Un méga-post au thème qu'on pourrait aisément qualifier de capilotracté. En l'occurrence, c'est l'occasion de revenir sur une obsession du tenancier de la présente maison mais aussi de proposer quelques albums (ou EP) aussi distants les uns des autres que réussis. Enjoie !
n°17 : Rose (la sexualité)
Banquet of the Spirits "Caym: Book of Angels Volume 17" (2011)
ou "Voyage en Terres Inconnues"
Si on n'est pas vraiment surpris de retrouver le Banquet of the Spirits de Cyro Baptista (30 ans de collaborations avec John Zorn !) pour une participation au Masada Book Two (The Book of Angels), on ne s'attendait pas à ce que la fusion brasiliana-worldo-foutraque de sa formation colle aussi bien à l'avant-gardisme klezmero-jazzo-contemporain de Zorn...
On aurait cependant du se souvenir que Cyro avait participé à deux des plus beaux volumes du Livre des Anges (le Lucifer de Bar Kokhba et le Ipos des Dreamers) et prendre ces "credentials" pour argent comptant. Encore plus en tenant compte que, dans le groupe, figure un autre vétéran de la galaxie Zornienne (et producteur de moult albums de la Radical Jewish Culture du Label Tzadik) en la personne de Shanir Ezra Blumenkranz responsable ici des arrangements et qui fit un si bon boulot que Zorn l'a reconvoqué (sous son nom cette fois) pour un prochain volume: Abraxas, 19ème du second livre de Masada.
Pour totalement prendre possession du répertoire, Cyro, Shanir et leurs deux compagnons (Tim Keiper et Brian Marsella) l'ont rôdé sur scène avant d'entrer en studio pour son enregistrement, et ça se sent. Le catalogue mélodique n'est pas plus exceptionnel que sur un (très) bon Book of Angels, c'est donc forcément l'interprétation qui fait la différence. Le tour de force, en l'occurrence, réside dans la capacité de la formation de ne pas renier ses racines tout en embrassant totalement celles de son auguste compositeur. Sur Matafiel par exemple, l'interpénétration des sources séfarades et de la coloration carioca qu'y accole le quatuor contribuent à créer un « autre-chose » aussi passionnant que déroutant, qui était la visée originelle de Zorn quand il décida de confier ses compositions à une large palette d'interprètes. Tout n'est pas aussi radical cependant. Souvent, le groove tropical de Cyro est l'épice dépaysante d'une musique clairement orientée klezmer. Même en cette instance Banquet of the Spirits trouve toujours le truc - en ajoutant des chants latino-tribaux ou des instruments nord-africains tel le guembri ou l'oud, tous deux tenus par le multi-talentueux Shanir - pour se démarquer de ce qui nous avait jusqu'alors été proposé dans la série.
Voyage en terres inconnues, Caym nous ballade de Rio à Java en passant par Jerusalem, Alexandrie ou Cracovie (et j'en passe !) sans jamais se départir de son esprit frondeur, de son modernisme fusionnant ou de sa salutaire liberté de ton. Ca en fait, vous l'aurez compris, une pleine et entière réussite et (encore !) une nouvelle richissime page d'un Livre des Anges décidément incontournable.
PS 12/2015 : Cyro, je l'aime ! Tout ce qu'il touche se transforme en or incrusté de rutilants joyaux dessinant de potaches et virtuoses scénettes, grand, même quand il ne compose ni n'arrange comme c'est le cas ici.
PS 12/2015 : Cyro, je l'aime ! Tout ce qu'il touche se transforme en or incrusté de rutilants joyaux dessinant de potaches et virtuoses scénettes, grand, même quand il ne compose ni n'arrange comme c'est le cas ici.
1. Chamiel 4:27
2. Matafiel 5:22
3. Briel 4:19
4. Zaphaniah 3:53
5. Tzar Tak 3:45
6. Flaef 2:05
7. Hutriel 4:27
8. Yeqon 4:55
9. Yahel 2:26
10. Tahariel 4:47
11. Natiel 4:00
12. Phaleg 4:07
Cyro Baptista: percussions, voix
Shanir Ezra Blumenkranz: oud, basse, guembri, voix
Tim Keiper: batterie, percussions, xalam, voix
Brian Marsella: piano, clavecin, orgue, accordéon, voix
John Zorn: composition
CYRO BAPTISTA |
n°20 : Rouge (la vie et la guérison)
Pat Metheny "Tap: Book of Angels Volume 20" (2013)
ou "Two Masters"
Ca faisait des mois qu'on l'attendait, depuis que la rumeur que Pat Metheny interviendrait dans la série des Book of Angels (pour l'ultime volume disait-elle, vilaine !). Voila, c'est fait, elle est là la rencontre au sommet d'un guitariste ô combien révéré et d'un compositeur toujours avide de nouvelles expériences, d'entendre sa musique triturée, réinterprétée par d'autres mains, d'autres cerveaux.
En l'occurrence, il n'y a pas pléthore, que ce soit pour la tracklist ou le line-up (6 et 2) mais les émotions sont bien au rendez-vous et la rencontre de deux univers à priori pas exactement compatibles porte magnifiquement ses fruits. Pas qu'on n'en attendait quoique ce soit d'autre, notez, quand deux géants se croisent, ça fait forcément quelques étincelles... Et si peu de musiciens interviennent ici, c'est tout bonnement parce que Metheny bouffe toute la place faisant montre, comme il l'a souvent fait sur ses récentes livraisons, de ses qualités de producteur/arrangeur/multi-instrumentiste. De fait, il n'a recours qu'au seul Antonio Sanchez, frappeur de peau de service, pour s'inviter sur les plates bandes d'un Zorn ô combien consentant.
Musicalement, la surprise est, finalement, de ne jamais en rencontrer vraiment. Je m'explique... Si, en effet, le traitement que se voient infligées les compositions de John Zorn est unique (tout en étant multiple, j'y viens), il est totalement dans les valeurs et inclinaisons stylistiques de Metheny qui s'est, en la circonstance, totalement réapproprié les notes de son compositeur. En introduction, ça donne un Mastema au "klezmerisme" discret occulté qu'il est par la folie fusion à bruitages électroniques que commet Metheny... Et ça fonctionne du feu de Dieu (ou des Anges, c'est bienvenu pour la série !). Suit Albim qui, plus respectueux des cannons du compositeur Zorn, est une charmante ballade nous emmenant presque jusqu'à Buenos Aires avec sa guitare acoustique, son discret bandonéon, son doux chaloupement et sa fin dramatique, parfait, et parfaitement maîtrisé, ça va sans dire ! Tharsis, piste 3, plus électrique et rapide n'est pas bien différent, comme si les deux thèmes qui le précédent se retrouvaient... Si l'empreinte Zorn y est impossible à rater, ça ne signifie pas que Metheny se soit laisser aller à la facilité, pièce à la fois rythmée et ambiante, elle bénéficie de son exceptionnelle qualité de guitariste en plus de ses capacités d'arrangeur/metteur en son, devenant "autre chose" au contact d'un imaginaire riche, "autre chose" de particulièrement prenant en son magnifique crescendo.
J'arrête là menu non sans préciser que la seconde moitié des titres propose d'au moins aussi fortes émotions, d'au moins aussi belles révélations musicales pour une satisfaction finale évidemment acquise.
Formellement, les petits plats ont été mis dans les grands et, grande première dans la série sans doute motivée par quelques obligations contractuelles, ce Tap bénéficie d'une double sortie, chez Nonesuch (label attitré de Metheny) et chez Tzadik (la maison de qui vous savez). C'est finalement, sauf pour Tzadik peut-être, une bonne nouvelle qui, espérons-le, permettra à un compositeur toujours trop méconnu de récolter quelques suiveurs fanatiques supplémentaires dans l'opération, Zorn le mérite, Metheny le lui offre... Elle est pas belle la vie ?
Reste que cette rencontre (un sommet au sommet !) donne extrêmement envie d'en entendre plus, que John Zorn fasse plus de nouvelles rencontrent qui élargiront encore le spectre d'une série et d'un monde pourtant déjà si riche parce que, si vous ne l'aviez pas compris, ce Tap, 20ème Book of Angels, c'est de l'or en barre... Tout simplement !
PS 12/2015 : Je minorerais un chouïa mon enthousiasme d'époque mais ça reste un authentique évènement et une galette réussie.
PS 12/2015 : Je minorerais un chouïa mon enthousiasme d'époque mais ça reste un authentique évènement et une galette réussie.
1. Mastema 7:20
2. Albim 9:07
3. Tharsis 5:54
4. Sariel 11:09
5. Phanuel 10:55
6. Hurmiz 6:12
John Zorn: composition
Pat Metheny: production, arrangements, electric & acoustic guitars, baritone guitar, sitar guitar,
tiples, bass, piano, keyboards, marimba, bells, bandoneon, percussion, electronics, flugelhorn
Antonio Sanchez: drums
PAT METHENY |
n°6 : Orange (la santé et la fierté)
Uri Caine "Moloch: Book of Angels Volume 6" (2006)
ou "Solo Piano"
Dans ce genre d'exercice - l'album en solitaire - il n'est pas rare qu'une certaine aridité se fasse jour. Fatalement, ce Moloch - 6ème levée du deuxième livre de Masada où John Zorn explore ses racines juives - n'échappe pas à l'exception. Il faut cependant compter sur les qualités de mélodiste de Zorn et l'excellence des arrangements et interprétations d'Uri Caine pour faire de cet album, sur le papier un peu rebutant, une vraie, belle et complète réussite.
Un peu rebutant parce que, si l'excellence n'avait pas été au rendez-vous, ces 77 minutes de piano auraient paru extrêmement fastidieuses voire carrément endormissantes. Or, il y a les compositions de John Zorn mariant klezmer, jazz, classique et avant-garde comme nul autre ne sait le faire. Un Zorn inspiré, qui plus est dont les dissonances si couramment aperçues dans le catalogue sont ici gardées dans les limites de l'acceptable même pour les oreilles les plus sensibles. Et puis il y a les interprétations (et arrangements) d'Uri. On sait le garçon virtuose de son instrument et arrangeur malin et versatile (son Primal Light, version personnelle de certaines pièces de Mahler paru chez Winter & Winter, fait encore référence) et le moins que l'on puisse dire c'est qu'il ne nous déçoit pas ici. Que ce soit dans les pièces à la douce-amère saveur nostalgique, celles plus emportées ou celles plus complexes, il brille de tous ses feux.
Moloch n'est pas une œuvre aisée, ce n'est pas non plus un album où il est difficile de rentrer. Comme souvent chez Zorn c'est - à l'image de son créateur - un assemblage précieux et délicat qui, s'il peut s'écouter distraitement, ne livrera sa substantifique moelle qu'à ceux prêts à y donner toute leur attention. On y découvre alors moult détails et nuances qui en font tout l'attrait.
PS 12/2015 : Le plus raide des Livre des Anges mais pas le moins intéressant. Uri est un virtuose sensible en plus d'aimer l'exploration, et ça s'entend.
PS 12/2015 : Le plus raide des Livre des Anges mais pas le moins intéressant. Uri est un virtuose sensible en plus d'aimer l'exploration, et ça s'entend.
1. Rimmon 4:46
2. Domiel 3:55
3. Mehriel 4:30
4. Savliel 2:24
5. Tufrial 4:03
6. Jerazol 3:39
7. Harshiel 3:34
8. Dumah 3:12
9. Harviel 5:00
10. Segef 1:57
11. Sahriel 4:59
12. Shokad 2:56
13. Zophiel 5:01
14. Hayyoth 2:29
15. Nuriel 5:51
16. Ubaviel 5:17
17. Hadrial 4:41
18. Cassiel 2:37
19. Rimmon 6:14
Uri Caine: piano
John Zorn: composition, production
URI CAINE |
n°10 : Jaune (la lumière du soleil)
Bar Kokhba "Lucifer: Book of Angels Volume 10" (2008)
ou "Diablement bon !"
Dans la série des Book of Angels de John Zorn, beaucoup s'accordent à dire que le Lucifer de Bar Kokhba est un des sommets... Voire LE sommet.
Il est vrai que Bar Kokhba, composé du Masada String Trio (Cohen, Feldman et Friedlander) additionné de quelques brillants pensionnaires de la maison Zorn, offre un équilibre et une grâce rarement atteints ailleurs dans le catalogue de l'hyperactif compositeur de Downtown. Cet exquis nectar jamais ne vrille oreille mais jamais, non plus, cède-il à trop de facilité. A vrai dire, cette musique, à la fois moderne et traditionnelle semble avoir été touchée par les Dieux. Des pizzicati et glissandi divins des cordes, des chaloupes rythmiques renversantes, de l'experte surf-guitar... Tout ici appelle à l'harmonie, à l'amour !
Il faut dire que John Zorn a, pour la circonstance, offert quelques unes de ses plus belles pièces et le fait est que jamais la déception ne pointe le bout de son vilain nez. C'est d'ailleurs aussi l'occasion de se rappeler le compositeur inspiré et mélodieux que Zorn peut (et sait !) être, lui à qui on accole plus facilement les qualificatifs de difficile, élitiste, abscons... Ce qui est preuve d'une méconnaissance crasse de sa discographie riche de mille facettes et dont le côté profondément mélodique n'est pas le moindre. Mais rien de tout ça ici. Le Bar Kokhba (enregistré en live en studio) est admirable de mélodie jusque dans ses emportements, qui sont nombreux et toujours bienvenus.
A ceux qui n'auraient pas encore goûté cet album exemplaire je dis « Veinards que vous êtes ! Comme j'aimerais moi aussi connaître de nouveaux les frissons qui me prirent à sa découverte ! ». Bien sûr, je l'aime encore énormément, comme on aime un charmant petit coin de campagne qu'on connait comme le dos de sa main et qu'on aime visiter régulièrement mais, la première fois... Ha ! La première fois !
PS 12/2015 : Mon Livre des Anges préféré ? C'est comme de me demander de choisir entre mon fils et ma fille, je pourrais m'y résoudre (wink wink) mais c'est douloureux. Un sommet, assurément.
PS 12/2015 : Mon Livre des Anges préféré ? C'est comme de me demander de choisir entre mon fils et ma fille, je pourrais m'y résoudre (wink wink) mais c'est douloureux. Un sommet, assurément.
1. Sother 5:58
2. Dalquiel 6:07
3. Zazel 3:22
4. Gediel 6:12
5. Rahal 3:49
6. Zechriel 7:53
7. Azbugah 3:02
8. Mehalalel 9:54
9. Quelamia 4:57
10. Abdiel 3:24
Cyro Baptista: percussions
Joey Baron: batterie
Greg Cohen: basse
Mark Feldman: violon
Erik Friedlander: violoncelle
Marc Ribot: guitare
John Zorn: composition, arrangements, production
MARC RIBOT |
n°19 : Vert (la nature)
Shanir Ezra Blumenkranz "Abraxas: Book of Angels Volume 19" (2012)
ou "The Devil's Wonders"
Il n'est pas vraiment surprenant de voir Shanir Ezra Blumenkranz apparaître dans la série des Book of Angels. Vieux compagnon de route de John Zorn (alors qu'il n'a que 37 ans !) et collaborateur régulier du label Tzadik, il était écrit qu'il poserait un jour ses mains et son inspiration sur les compositions du maître sous son seul nom quand, avec le Banquet of the Spirits de Cyro Baptista ou le Rashanim de Jon Madof, il l'a déjà fait collectivement.
Musicalement, c'est une furieuse session dont nous sommes les témoins. Accompagné de deux guitaristes (Eyal Maoz et Aram Bajakian, tous deux publiant leurs travaux de leaders chez Tzadik) et d'un batteur (Kenny Grohowski, furieux et versatile), il nous propose une musique où se télescopent violemment jazz, klezmer et metal. Stylistiquement, il serait aisé de rapprocher cet Abraxas de l'Asmodeus de Marc Ribot dont il partage la centralité guitaristique et les emportements bruitifs et puissants, Abraxas n'en a pourtant ni l'approche minimaliste ni la froideur agressive. Si les guitares dépotent, que la batterie ne plaisante jamais et que Shanir himself envoie sérieusement le bois (qu'il soit à la basse ou au guembri), les chaloupements ne sont jamais bien éloigné d'une musique qui garde toujours un petit rayon de soleil dans son cœur. Ponctuellement, sur Yaasriel par exemple, le tempo se ralentit, le mood se fait plus pensif, plus rêveur... C'est une parfaite pause avant de réattaquer « dans le dur » avec un Muriel aux furieuses dissonances. Ces respirations, peu nombreuses mais ô combien salutaires !, permettent de jouir de leurs voisins excès avec un enthousiasme encore plus béat devant tant de maîtrise et de fougue. En bref, on en reste baba.
Abraxas, musiques de John Zorn et arrangements de Shanir Ezra Blumenkranz, est donc une réussite de plus dans la longue et glorieuse série du Livre des Anges dont on ne saurait trop recommander les précédents volumes. Un album sans compromis qui fera fuir les plus sensibles des tympans (tant pis pour eux !) et enchantera les autres devant les galipettes osées et rétablissements de chats noirs de ces quatre talentueux trublions.
PS 12/2015 : Un cas d'école de Zorn furieux et maîtrisé par des musiciens connaissant parfaitement leur sujet... Rock me again, Johnny Johnny Johnny !
PS 12/2015 : Un cas d'école de Zorn furieux et maîtrisé par des musiciens connaissant parfaitement leur sujet... Rock me again, Johnny Johnny Johnny !
1. Domos 4:00
2. Tse'An 4:09
3. Nachmiel 3:35
4. Yaasriel 5:22
5. Muriel 3:27
6. Maspiel 5:51
7. Aupiel 3:44
8. Nahuriel 4:57
9. Biztha 3:37
10. Zaphiel 5:21
Shanir Ezra Blumenkranz: guembri, arrangements
Aram Bajakian: guitare
Kenny Grohowski: batterie
Eyal Maoz: guitare
John Zorn: composition
EYAL MAOZ |
n°16 : Turquoise (la magie/l'art)
Masada String Trio "Haborym: Book of Angels Volume 16" (2010)
ou "Volume 2"
Une première dans la série des Book of Angels ! Une formation, le Masada String Trio, remet le couvert et nous propose une nouvelle exploration klezmero-contemporaine de quelques pièces sélectionnées dans le second livre de Masada.
Tout de suite, on se demande quelle mouche à piqué ce bon John Zorn ? Lui si habitué au changement convoque de nouveau le violoniste Mark Feldman, le contrebassiste Greg Cohen et le violoncelliste Erik Friedlander (tous des réguliers de la maison Zorn en plus d'appartenir à la présente formation) à tenter d'égaler la magie d'Azazel, second album de la série et une de ses plus belles plages, accessoirement.
Forcément, avec pareil devancier, le challenge est de taille. Et si le Masada String Trio tutoie parfois les ses sommets passés, force est de constater qu'Haborym ne supporte que difficilement la comparaison. On y retrouve évidemment des musiciens hors-pair dans un univers qu'ils possèdent totalement. Oui mais, des mélodies un tout petit peu moins inspirées que pour le premier tour, un effet de surprise forcément écorné sont des facteurs objectifs qui handicapent une galette empiriquement tout à fait recommandable. De fait, deux choix s'imposent à nous : rejeter la création purement et simplement en ne la voyant que comme un exercice de facilité pour le mastodonte projet de l'album par mois que s'imposa Zorn en 2010 (ce qui serait se priver de quelques exquises pièces), ou le considérer comme un volume complémentaire d'une formation qui avait si bien réussi son premier que reprendre ainsi l'ouvrage tombait sous le sens.
Clairement, j'ai choisi le second camp, trop de grâce, d'intelligence et de virtuosité pour que je boude mon bonheur.
PS 12/2015 : Comment j'ai changé d'avis sur cet album, sans doute étais-je déçu de ne pas avoir un nouveau groupe dans le Livre des Anges... Avec le recul, il vaut le premier volume du trio, ce qui n'est pas peu dire !
PS 12/2015 : Comment j'ai changé d'avis sur cet album, sans doute étais-je déçu de ne pas avoir un nouveau groupe dans le Livre des Anges... Avec le recul, il vaut le premier volume du trio, ce qui n'est pas peu dire !
1. Turel 6:20
2. Tychagara 3:39
3. Carniel 4:42
4. Bat Qol 2:56
5. Gamrial 6:40
6. Elimiel 3:04
7. Techial 2:05
8. Umikol 2:31
9. Malkiel 4:24
10. Raamiel 6:24
11. Gergot 3:48
Greg Cohen: basse
Mark Feldman: violon
Erik Friedlander: violoncelle
John Zorn: composition, arrangements, direction
ERIK FRIEDLANDER |
n°8 : Bleu (la sérénité/l'harmonie)
Erik Friedlander "Volac: Book of Angels Volume 8" (2007)
ou "My Cello is rich!"
Pour ceux qui ne le connaitraient pas encore, Erik Friedlander est un violoncelliste fréquemment employé par John Zorn que ce soit dans ses filmworks, en musique contemporaine ou dans diverses formations de la galaxie Masada (Bar Kokhba, Masada String Trio). Cette fois, seul maître à bord, il a eu l'honneur de se voir confier un volume du livre des Anges (Masada Book Two), soit des compositions de Zorn ici arrangées et interprétées par Erik, seul.
Sur le papier, l'exercice pourrait faire peur - Pensez ! Un violoncelle et rien d'autre ! - le fait est que comme pour l'album d'Uri Caine dans la même série (Moloch, Book of Angels Volume 6), et ce malgré un instrument mélodiquement plus limité que le piano, le résultat, pour ascétique qu'il soit, est bourré d'un charme contagieux. Les arrangements de Friedlander y sont pour beaucoup, toujours respectueux des mélodies de Zorn, mais sans flagornerie, ils sont le parfait pendant de sa gigantesque maîtrise instrumentale (qu'il joue à l'archet ou aux doigts), et ce n'est pas peu dire. De fait, pas une fois on ne regrette l'absence d'autres instruments, le violoncelle de Friedlander se suffit ici amplement à lui seul, prend tout l'espace (sans l'envahir, un silence est une note, rappelons-le) et sert, avec une immense profondeur d'âme, une musique riche où se côtoient classique contemporain (parfois chaotique et cartoonesque, un aspect décisif de la grammaire zornienne) et « mélodisme » klezmer.
Pour avoir vu Friedlander jouer ces compositions sur scène (de la Salle Pleyel au Teatro Manzoni de Milan), je peux vous assurer que pas la moindre tricherie de studio ne se glisse dans cette extraordinaire performance, Erik est un cador, voilà tout, et Volac un indispensable que vous aimiez John Zorn, le violoncelle ou tout simplement la musique quand elle s'approche d'aussi près du divin.
PS 12/2015 : Chaque écoute est un ravissement, Friedlander est grand, vraiment !
1. Harhazial 4:36
2. Rachsiel 2:39
3. Zumiel 1:39
4. Yeruel 3:24
5. Sannul 1:18
6. Haseha 4:35
7. Kadal 3:51
8. Ahaniel 5:45
9. Ylrng 1:36
10. Anahel 4:18
11. Sidriel 3:01
12. Zawar 4:38
Erik Friedlander : violoncelle, arrangements
John Zorn: composition, production
n°15 : Violet (la sérénité/l'harmonie)
Ben Goldberg "Baal: Book of Angels Volume 15" (2010)
ou "Comfort Zone"
En réunissant des habitués de la série du Livre des Anges - le batteur Joey Baron, le pianiste Jamie Saft et le batteur Kenny Wollesen - autour du clarinettiste jazz/avant-garde Ben Goldberg (issu comme Zorn de la scène dite de Downtown et leader de l'excellent New Klezmer Trio en plus d'une prolifique carrière solitaire), Zorn ne prend pas franchement de risque collant au plus près à la grammaire originelle du projet Masada.
Il est vrai qu'au regard du récent et explosif Pruflas de David Krakauer, Baal a des allures d'enfant (trop ?) sage. Et de fait, là où Krakauer éparpille façon puzzle, Golberg charme... tout en douceur. Evidemment, sans diminuer la performance de chaque instrumentiste, le mérite revient majoritairement à un John Zorn qui, en plus de composer, dirige la formation et est l'auteur des arrangements. Cela va sans dire, cette musique, évocatrice du klezmer originel aussi bien que du free jazz, a ses dissonances et bizarreries, du type de celles dont les fervents de Zorn ont l'habitude. Ainsi a-t-on droit tant à de courtes et chaotiques saillies (Lahash) qu'à des pièces nettement plus contemplatives (Asimor ou Uzza, ce dernier joué par la seule clarinette de Goldberg) ou à de passionnants explorations aux confins du free jazz et du klezmer (l'introductif et explosif Chachmiel ou le dispersé Irin).
Rien que de très classique, en somme, et c'est sans doute ce qui empêche de considérer un album, autrement d'une fort belle tenue, comme une des œuvres les plus essentielles de ce second livre de Masada. Baal est cependant recommandé, plus qu'aux complétistes de la chose Zornienne, et plaira à tous ceux qui aiment leur jazz exploratoire mais néanmoins mélodique et accessible.
PS 12/2015 : Sur celui-ci mon avis n'a pas changé, ce n'est pas le plus excitant des Livres des Anges mais définitivement un bon album qui s'il ne surprend pas sait contenter.
PS 12/2015 : Sur celui-ci mon avis n'a pas changé, ce n'est pas le plus excitant des Livres des Anges mais définitivement un bon album qui s'il ne surprend pas sait contenter.
1. Chachmiel 7:21
2. Asimor 4:27
3. Irin 4:32
4. Pharzuph 7:18
5. Lahash 2:52
6. Reqel 7:17
7. 'ifafi 5:09
8. Uzza 3:10
9. Poteh 5:55
Ben Goldberg: clarinette
Jamie Saft: piano
Greg Cohen: contrebasse
Kenny Wollesen: batterie
John Zorn: composition, arrangements, direction
BEN GOLDBERG |
LiSTe CoMPLéMeNTaiRe
Rose (la sexualité)
Milemarker "Anaesthetic" (2001)
ou "Remontées de Synth"
Des caroliniens du nord qui poussent le post-hardcore dans ses ultimes retranchements synth-poppistes et new-waveux ? C'est Milemarker et leur 3ème album, le second pour le lable indépentant étatsunien de référence, Jade Tree.
En l'occurrence, Anaesthetic est court, en titres et en durée, 7 des premiers, 41 minutes des autres, avec un élément féminin nouvellement acquis (Monika Bukowska) apportant un vrai plus au style d'un groupe s'éloignant encore et toujours des fondamentaux agressifs de ses racines pour développer une musique qui, sans tout à fait se départir de ses derniers oripeaux punkoïdes, a de notables ressemblances avec l'explosion de l'usage des synthétiseurs dans la musique anglaise de la fin des années 70 et des années 80.
En l'occurrence, Anaesthetic est court, en titres et en durée, 7 des premiers, 41 minutes des autres, avec un élément féminin nouvellement acquis (Monika Bukowska) apportant un vrai plus au style d'un groupe s'éloignant encore et toujours des fondamentaux agressifs de ses racines pour développer une musique qui, sans tout à fait se départir de ses derniers oripeaux punkoïdes, a de notables ressemblances avec l'explosion de l'usage des synthétiseurs dans la musique anglaise de la fin des années 70 et des années 80.
Comme en plus, en colère post-punk, atours angulaires et synthétiseurs rappelant les heures de gloire de la synth-pop et de la new wave, les garçons et la fille savent produire des compositions tantôt directement accrocheuses (Shrink to Fit), tantôt sinueusement progressives (Ant Architect), il n'y a pas à hésiter plus longtemps pour recommander une formation et un album qui, si elle n'a pas réalisé tout le potentiel commercial qu'on percevait, n'a pas, malgré les ans et les modes passantes, pris une ride, bravo Milemarker !
1. Shrink To Fit 4:17
2. Food For Worms 5:34
3. A Quick Trip To The Clinic 4:46
4. Lost The Thoughts But Kept The Skin 7:33
5. Ant Architect 8:27
6. The Fear Is Back In Town 2:46
7. The Installment Plan 7:53
Dave Laney - Guitar, Bass, Vocals, Drums, Computer
Al Burian - Bass, Guitar, Vocals, Synthesizer
Roby Newton - Vocals, Synthesizer
Monika Bukowska - Vocals, Synthesizer
Sean Husick - Drums, Fizmo
MILEMARKER |
Rouge (la vie et la guérison)
Morcheeba "Big Calm" (1998)
ou "Trip-Pop"
Peut-être les plus abordables, les plus ear-friendly des groupes de la première vague dite Trip-Hop, Morcheeba sont à leur comment quand sort, en 1998, l'excellent Big Calm, plus belle pièce de leur discographie comme va nous l'expliquer JJ (XSilence.net) :
"Peut-être chaque groupe ou artiste n'a-t-il en réalité sorti qu'un seul disque, dont les autres en seraient l'écho plus ou moins lointain. Big Calm est de ceux-là. Bien sûr, Who Can You Trust est un très bon album, une réussite. Mais il faut sans doute le voir (ou l'entendre) comme une ébauche. Big calm est une oasis de pureté, de sérénité et de simplicité. En quelques morceaux, dont d'assez nombreuses véritables pépites, Morcheeba signe un album de référence trip pop [sic]. Si vous n'êtes pas de suite emballé, votre oreille le sera pour vous : les mélodies sont simples, belles et gaies, le travail de composition est remarquable. Sans parler de Skye Edwards, dont les vocalises (et surtout les inspirations!) sont absolument envoûtantes. Morcheeba a réussi à concevoir un album, il faut bien reconnaître, assez easy listening, mais qui en fait un atout majeur : chose plutôt rare, mais très significative.
L'art dans ses productions les plus magistrales s'est en général appuyé sur des sentiments mélancoliques, pessimistes, destructeurs ; quelques exceptions font entorse à la règle, et si en musique, ce sont les Beatles qui incarnent au mieux cet exemple, Morcheeba également arrive à nous envahir de gaieté et de sérénité, et d'une manière profonde ; chose rare donc, mais d'autant plus belle. Un album parmi les 5 plus importants du trip hop."
Voilà, c'est dit, vous savez ce qu'il vous reste à faire !
1. The Sea 5:47
2. Shoulder Holster 4:04
3. Part of the Process 4:24
4. Blindfold 4:37
5. Let Me See 4:20
6. Bullet Proof 4:11
7. Over and Over 2:20
8. Friction 4:13
9. Diggin' a Watery Grave 1:34
10. Fear and Love 5:04
11. Big Calm 6:00
Skye Edwards – vocals and reproduction
Paul Godfrey – navigation, programming, scratching, live drums and lyrics
Ross Godfrey – all guitars, sitar, pedal steel, lap steel, clavinet, Hammond, Fender Rhodes, Wurlitzer piano, drums, EMS synthesizer, MKS 80, and no factory presets
Pete Norris – sound surgery, synthesizer programming and dropping science
MORCHEEBA |
Orange (la santé et la fierté)
Pet Shop Boys "Very" (1993)
ou "Golden Orange"
A part Depeche Mode, vous en connaissez beaucoup des groupes de synth-pop ayant résisté, parce qu'ils surent s'adapter et imposer leur qualité d'écriture, à l'extinction de la mode qui les avaient vu éclore ? Ha oui, il y a ce duo anglais de garçons bien propres sur eux et définitivement gay-friendly, les Pet Shop Boys qu'ils s'appellent. Et sur leur Very, leur cinquième galette studio, vous pouvez me croire sur parole, Tennant et Lowe n'ont pas perdu le truc.
Aussi, qu'il s'attaquent à une reprise des Village People (Go West), ou fassent dans leur habituel mélange de joie et de tristesse, parce qu'il y a toujours un petit pincement au cœur au milieu de leur fête, comme sur le single Can You Forgive Her? ou la déchirante ballade To Speak Is a Sin, ces deux gars-là, en la circonstance glorieusement entourés d'un casting au petits oignons, réussissent encore une fois le tour de force de faire du léger demeurant substantiel, de la pop à danser qui fait aussi vibrer l'âme. C'est d'ailleurs sans doute pour ça, parce que Neil et Chris, entertainers hors-pair comme tous ceux qui ont vu leur grand-messes synthétiques "in vivo", parvinrent à imposer leur Pet Shop Boys comme une formation qui compte alors que, factuellement, elle arrivait un peu sur la queue de la comète.
Et donc Very, galette sans le moindre faux-pas, vous est chaudement recommandé, que vous vous pensiez client du style pratiqué par ces messieurs ou pas. Oui, elle est juteuse à ce point là, cette orange d'exception.
1. Can You Forgive Her? 3:53
2. I Wouldn't Normally Do This Kind of Thing 3:03
3. Liberation 4:05
4. A Different Point of View 3:26
5. Dreaming of the Queen 4:19
6. Yesterday, When I Was Mad 3:55
7. The Theatre 5:10
8. One and One Make Five 3:30
9. To Speak Is a Sin 4:45
10. Young Offender 4:50
11. One in a Million 3:52
12. Go West 8:22
Neil Tennant
Chris Lowe
&
Pete Gleadall – programming
J.J. Belle – guitar on tracks 3 and 12
Frank Ricotti – percussion on track 5
Phil Todd, Snake Davis, John Barclay, John Thirkell and Mark Nightingale – brass on track 12
Anne Dudley – orchestra arrangement and conduction on tracks 3, 5 and 7
Richard Niles – brass-, choir- and additional keyboard arrangement on track 12
Sylvia Mason-James – additional vocals on tracks 7, 11 and 12
Dainton Connell – additional vocals on track 8
Carol Kenyon – additional vocals on tracks 9 and 10
Katie Kissoon and Tessa Niles – additional vocals on track 10
Joanna Wyatt, Thomas Rogers, Laurie Smith, Hody Smith, Nigel Francis, Francis Hatson, Lee Harris, Lucy Clark, Marie-Claire Peterson and Victoria Ferher – choir on track 7
Scott Altman, James Bassi, Hugh Berberich, Rodne Brown, Maurizio Corbino, Martin Doner, Dan Egan, James Gandre, Paul Houghtaling, Michael Hume, Robert Kuehn, Drew Martin, Joseph Nelson Neal, Mark Rehnstrom, Steven Tachell and Frank Nemhauser. With thanks to Graeme Perkins and Jaqueline Pierce – choir on track 12
PET SHOP BOYS |
Jaune (la lumière du soleil)
Hank Roberts "Everything Is Alive" (2011)
ou "Jazz de Chambre"
Partenaire récurrent de Bill Frisell ou Tim Berne, le violoncelliste Hank Roberts sort sont 8ème album solitaire toujours pour le label Winter&Winter. Pour le peu que je connaisse de l'oeuvre de Roberts, Everything Is Alive ne chamboulera pas la perspective qu'on a de sa (bonne) musique.
A l'image du premier morceau (le blues progresso-jazzé Crew Cut, qui n'aurait pas déparé sur un album de Caravan ou National Health), cette musique hybride, métissée de jazz, de folk, de blues et de tout ce qui lui passe par l'esprit et « colle à l'ambiance », est libre de toute étiquette. Il faut dire qu'avec un line-up impeccable (Bill Frisell à la guitare, Kenny Wollesen à la batterie et Jerome Harris à la basse) et l'alternance d'une douce langueur communicative et d'un attractif chaos spécifique de sa musique, Roberts joue sur du velours. Contemplatif et serein dans ses plages les plus calmes et harmonieuses (Necklace), Everything Is Alive n'en devient pas pour autant un vrille-neurones imbittable quand les bizarreries arrivent comme sur Treats with a Blind Dog, sorte de country jazz ivre et cahotant où la fine équipe démontre un solide sens de l'humour.
Œuvre sensible, intelligente et libre, Everything Is Alive est avant tout une machine à rêver d'une résolue puissance où des musiciens experts et s'amusant visiblement beaucoup nous invitent au partage du résultat de leurs brillantes cogitations, un trip rendu d'autant plus vibrant qu'il est aidé par la proximité de la prise de son Et ça, franchement, ça ne se refuse pas.
1. Crew Cut 4:58
2. Cayuga 6:31
3. Easy's Pocket 4:52
4. Treats With a Blind Dog 5:13
5. Joker's Ace 5:34
6. Open Gate 8:11
7. Necklace 5:10
8. Jb 3:16
9. Sapphire 7:41
10. Sapphire Blue 3:02
Hank Roberts: violoncelle, voix, violon "jazzaphone"
Bill Frisell: guitares électriques et acoustiques
Jerome Harris: guitare et basse acoustiques, voix
Kenny Wollesen: batterie, percussions
HANK ROBERTS |
Vert (la nature)
Robert Wyatt "A Short Break" (1992)
ou "Robert en solitaire"
Aussi court que minimaliste, A Short Break a tout d'une collection de chutes de studio, normal !, c'en est ! Mais comme c'est de Robert Wyatt dont il s'agit (l'Ange à roulettes, le martien progressif, le sage entre l'éther et la terre), on ne boude pas son plaisir à savourer des ébauches dont la richesse laisse déjà béat d'admiration. Parce que, comme à son habitude, Robert fait du Wyatt, trouve des mélodies dont lui seul a le secret et, ultimement, ravit celles et ceux qui ne se lasseront décidément jamais de son art gracile et libre. Sans doute pas essentiel, A Short Break sera surtout recommandé aux zélotes et autres admirateurs transis d'un Homme qui mérite toutes les louanges qui lui sont régulièrement tressées, de la presse la plus "in" au geeky nerds à lunettes et cheveux gras peuplant la masse progressive.
1. A Short Break 4:14
2. Tubab 3:29
3. Kutcha 3:54
4. Venti Latir 5:11
5. Unmasked 3:35
Robert Wyatt (chant, piano, claviers, batterie)
ROBERT WYATT |
Turquoise (la magie/l'art)
Thomas Fersen "Les Ronds de Carotte" (1995)
ou "Du neuf avec du vieux"
Après un premier album remarqué si encore un peu contrit, Thomas Fersen revient avec ce qui demeure une des plus belles pièces de sa pourtant très réussie discographie. Présentement, c'est Christian Larrède (Music Story) qui vous fait le détail:
"Dès la photo de pochette (signée Mondino), on comprend qu’il y a le réel et, juste à la marge, le monde de Thomas Fersen, un univers agencé avec une précision d’horloger mais qui, à l’instar de toute création artistique, ne répond qu’à ses propres règles. Des ronds de carotte, ce n’est pas grand-chose (et carotter, ce n’est pas bien), sauf pour un lapin.
Pour son deuxième album, celui qui n’est encore qu’un chanteur débutant, s’entoure en tout cas d’une équipe renouvelée (Joseph Racaille assure la production et on croise les silhouettes d’Arthur H, ou de Philippe Delettrez, saxophoniste et homme d’habillages musicaux). Mais ce qui ne change pas, c’est le goût du chanteur pour les ambiances acoustiques et les images décalées, comme une lecture approfondie des thèmes du premier album (Le Bal des Oiseaux, 1993).
En ouverture du disque, « Louise » reste comme l’une des plus belles chansons de Thomas Fersen et « Un parapluie pour deux » ou « Hugo, à la bougie » ne pédalent pas très loin derrière. Et puis, il y a, naturellement, cette « Bella ciao » empruntée à la mémoire des révolutionnaires italiens. Grand moment de frénésie en concert, l’hymne a au moins le mérite de faire voler en éclats des temps de frilosité et de recentrage. Et Thomas Fersen nous y rappelle que l’insurrection reste l’étape la plus captivante de la création artistique."
Définitivement, Thomas est l'une des plus sûres valeurs de la nouvelle chanson française, si vous n'avez pas encore été vous rafraichir à sa source pleine de fantaisie, il n'est que temps de réparer ce scandaleux oubli !
"Dès la photo de pochette (signée Mondino), on comprend qu’il y a le réel et, juste à la marge, le monde de Thomas Fersen, un univers agencé avec une précision d’horloger mais qui, à l’instar de toute création artistique, ne répond qu’à ses propres règles. Des ronds de carotte, ce n’est pas grand-chose (et carotter, ce n’est pas bien), sauf pour un lapin.
Pour son deuxième album, celui qui n’est encore qu’un chanteur débutant, s’entoure en tout cas d’une équipe renouvelée (Joseph Racaille assure la production et on croise les silhouettes d’Arthur H, ou de Philippe Delettrez, saxophoniste et homme d’habillages musicaux). Mais ce qui ne change pas, c’est le goût du chanteur pour les ambiances acoustiques et les images décalées, comme une lecture approfondie des thèmes du premier album (Le Bal des Oiseaux, 1993).
En ouverture du disque, « Louise » reste comme l’une des plus belles chansons de Thomas Fersen et « Un parapluie pour deux » ou « Hugo, à la bougie » ne pédalent pas très loin derrière. Et puis, il y a, naturellement, cette « Bella ciao » empruntée à la mémoire des révolutionnaires italiens. Grand moment de frénésie en concert, l’hymne a au moins le mérite de faire voler en éclats des temps de frilosité et de recentrage. Et Thomas Fersen nous y rappelle que l’insurrection reste l’étape la plus captivante de la création artistique."
Définitivement, Thomas est l'une des plus sûres valeurs de la nouvelle chanson française, si vous n'avez pas encore été vous rafraichir à sa source pleine de fantaisie, il n'est que temps de réparer ce scandaleux oubli !
1. Louise 2:22
2. Au café de la paix 4:05
3. Hugo, chanson du cyclone 2:40
4. Les Ronds de carotte 2:44
5. Dans les transports 3:19
6. Un temps de chien 3:42
7. Ne pleure plus 4:05
8. Hugo, à la bougie 2:34
9. Pommes, pommes, pommes 3:47
10. Un parapluie pour deux 2:59
11. Pont Mirabeau 4:04
12. Bella Ciao 1:52
13. L'Histoire d'une heure 2:39
14. L'Escalier 1:45
Thomas Fersen - chant
Cyrille Wambergue - piano
Frank Ridacker - batterie
Jeff Pevar - guitare, dobro, mandoline
Bernard Viguié - contrebasse, basse
Pierre Sangra - guitare, violon
Michel Marin - harmonica, saxophone, flûte, guitare
Victor Durox - chant (6)
Vincent Frèrebeau - accordéon, tambourin, chœurs
Francis Aubier - trompette
Eric Louis - trombone
Florent Maupetit - cor
Philippe Czeladka - tuba
Gérard Augé, Thierry Neurantier - flûte
Patrick Verveille - clarinette
Catherine Bost - hautbois
Hervé Duhamel - basson
Marc Chantereau - percussions
Rodica Bogdanas, Sophie Stéphanica, François Polanswky, Laurence Dupuis, Rose-Marie Négréa - violon
Nathalie Carlucci, Jérôme Duchemin - alto
Marie-Christine Colmonc, Mariette Laport - violoncelle
THOMAS FERSEN |
Bleu (la sérénité/l'harmonie)
Antony & the Johnsons "Antony & the Johnsons" (2000)
ou "Premiers sangs"
Retour sur les débuts d'Antony & the Johnsons, avant la gloire quoi, avec l'assistance de la plume de Stéphane Deschamps (Les Inrocks) qui en parle fort bien :
"Quand ils ont entendu I Am a Bird Now, le deuxième album d’Antony And The Johnsons, beaucoup ont pensé : tiens, un ange passe. Personne ne l’avait vu, mais Antony était déjà passé quelques années plus tôt, sur ce premier album enfin dignement distribué en France. A l’origine, Antony And The Johnsons est sorti en toute discrétion sur Durtro, le petit label de l’Anglais à tête chercheuse David Tibet. Réédité par Secretly Canadian, maison de qualité, Antony And The Johnsons n’est pas moins bon que I Am a Bird Now. Pas meilleur non plus. Mais aussi indispensable. L’enregistrement date de 1998, mais Antony chante déjà comme un lys humain, qui semble éclore et faner dans le même mouvement. Une créature fragile et majestueuse, un crooner lyrique au paradis, qu’on pourrait rapprocher de Klaus Nomi, Scott Walker, Jimmy Scott ou Elizabeth Fraser des Cocteau Twins. Ou qu’on pourrait aussi ne rapprocher de personne, tant Antony s’est affirmé comme un des rares talents singuliers du moment.
Inspirées par la musique classique, les orchestrations d’Antony And The Johnsons sont somptueuses, mais la production est un peu trop uniforme, conventionnelle. Antony nous expliquait un jour qu’il avait enregistré ce premier album en deux semaines ? contre deux ans et demi pour le second. Une sorte de premier jet, qui le propulsait d’entrée dans la stratosphère de la pop orchestrale. Grand fan de musique soul (Nina Simone, Otis Redding, Donny Hathaway sont dans son panthéon personnel), Antony a depuis eu la bonne idée, et le courage, d’intégrer des influences soul à sa musique blanche et un brin glaçante. Mais c’est surtout au niveau vestimentaire qu’il a fait de gros progrès : on le préfère vraiment période I Am a Bird Now, en brune lascive coiffée de la perruque de Keren Ann, plutôt qu’en version immaculée de La Denrée (Jacques Villeret) dans La Soupe aux choux."
Mais franchement, qu'importe le flacon pourvu qu'on l'ait l'ivresse parce que des premiers pas comme ça, ça n'arrive pas tous les jours. Aussi rare que précieux, donc, ce premier Antony & the Johnsons qu'on n'hésite pas à recommander, ardemment.
1. Twilight 3:49
2. Cripple and the Starfish 4:11
3. Hitler in My Heart 3:32
4. Atrocities 3:53
5. River of Sorrow 4:03
6. Rapture 3:57
7. Deeper than Love 4:40
8. Divine 3:13
9. Blue Angel 3:35
Bass - François Gehin
Cello - Vicky Leavitt
Clarinet - William Basinski
Clarinet, Saxophone - Barb Morrison
Drums - Todd Cohen
Engineer - Alan Douches, Erika Larsen, Rich Lamb, Roger Fife, Steve Regina
Flute - Mariana Davenport
Guitar [Effects] - Charles Neiland
Harp - Baby Dee
Mastered By - Denis Blackham
Violin - Cady Finlayson, Liz Maranville
Voice, Piano - Antony Hegarty
ANTONY & THE JOHNSONS |
Violet (la sérénité/l'harmonie)
Nico Gori, Fred Hersch "Da Vinci" (2012)
ou "Jazz intime"
Da Vinci ou quand le minimalisme factuel d'une formation (duo en l'occurrence) vole en éclat à l'usage d'un album définitivement réussi.
Concrètement, rencontre du clarinettiste italien Nico Gori (un sideman récurrent de Stefano Bollani) et du pianiste américain Fred Hersch (Bill Frisell, Stan Getz, Charlie Haden, en tant que leader aussi, etc), fruit d'une amitié et d'une attirance artistique développées au fil de rencontres dans différents festivals, Da Vinci offre bien, comme son titre l'indique, une palette à la fois émotionnelle et savante où la maîtrise et la technique ne visent qu'à servir les mélodies (on n'en attendait pas moins de deux instrumentistes de cette trampe). Millimétrée et harmonieuse (toujours !), c'est une musique cousine du jazz qui en emprunte souvent la grammaire (mais pas toujours ou plutôt pas seulement) qui nous est ici dévoilée.
De fait, si l'inaugural Old Devil Moon (un standard) propose un jazz d'un extrême classicisme, et le fait très bien ceci dit en passant, le sel de la rencontre, l'attrait et la particularité de l'opus se retrouve définitivement plus dans des thèmes aussi cousins de la classique que du terrain habituellement occupé par les deux compères, musique qu'on taxera volontiers de jazz de chambre (dénomination tout sauf péjorative). Pour transformer le projet, il fallait bien entendu des compositions et ce sont justement elles (majoritairement signées de la main du pianiste) qui justifient, unissent pleinement et entièrement cette rencontre binationale, cette osmose entre un pianiste expert et son contrepoint soufflant.
Intime, forcément, le résultat ne déçoit jamais et s'impose comme un excellent compagnon de moments calmes où l'harmonie, ô combien bien employée par le duo, est une nécessité impérieuse.
Une beauté simple (mais pas simpliste) pour un album chaudement recommandé.
1. 2-5 7:37
2. Old Devil Moon 7:12
3. Mandevilla 6:10
4. Da Vinci 5:29
5. Doce De Coco 8:11
6. At The Close Of The Day 6:00
7. Down Home 6:25
8. Lee's Dream 6:30
9. Tea For Two 7:03
10. Hot House Flower 4:24
Nico Gori: clarinette
Fred Hersch: piano
NICO GORI, FRED HERSCH |
Pride of Angels (Le Livre LGBT des Anges et des Humains)
RépondreSupprimerBanquet of the Spirits "Caym: Book of Angels Volume 17" (2011)
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Pat Metheny "Tap: Book of Angels Volume 20" (2013)
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Uri Caine "Moloch: Book of Angels Volume 6" (2006)
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Bar Kokhba "Lucifer: Book of Angels Volume 10" (2008)
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Shanir Ezra Blumenkranz "Abraxas: Book of Angels Volume 19" (2012)
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Masada String Trio "Haborym: Book of Angels Volume 16" (2010)
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Erik Friedlander "Volac: Book of Angels Volume 8" (2007)
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Ben Goldberg "Baal: Book of Angels Volume 15" (2010)
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Milemarker "Anaesthetic" (2001)
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Morcheeba "Big Calm" (1998)
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Pet Shop Boys "Very" (1993)
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Hank Roberts "Everything Is Alive" (2011)
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Robert Wyatt "A Short Break" (1992)
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Thomas Fersen "Les Ronds de Carotte" (1995)
- http://www91.zippyshare.com/v/ogXmXKXS/file.html
Antony & the Johnsons "Antony & the Johnsons" (2000)
- http://www91.zippyshare.com/v/qyzFbRxT/file.html
Nico Gori, Fred Hersch "Da Vinci" (2012)
- http://www91.zippyshare.com/v/f72OMssD/file.html
Mais oui.. obsédé que tu es.. ;D
RépondreSupprimerFou aussi, un billet à lire et approfondir pour plusieurs jours. Aussi, je serais bien trop courageux de m'aventurer sur le JZ .. mais Fersen et Antony first réunis (ehh Keren Villeret..pas mal..) , c'est assez beau sur l'arc en ciel.
Le Wyattje le connais, mais je découvre la pochette.. top.
Et pourquoi ne pas s'aventurer chez Zorn ? Tester un Lucifer par exemple... Allez, un peu de courage, que diable !
SupprimerJ'ai déjà fait, y'a qq temps, mais juste pour suivre ton billet et sa carrière, il me faut des nuits entières :D
SupprimerEn ce dimanche pluvieux, je pensais prendre une nouvelle douche mélancolique avec Antony. Et voilà que je retrouve le bonhomme (?) baignant dans une ambiance à la limite de la pop, pas tout à fait quand même (!), mais apaisée, avec des arrangements précieux. Et cette voix, cette putain de voix qui te prend dans ses fils comme une veuve noire prête à te dévorer l'âme.
RépondreSupprimerCe disque est moins impressionnant que "The Crying Light" mais hautement recommandable.
Antony, c'est top moumoute gothic pop avec une louche de soul dedans, si on n'aime pas, c'est qu'on n'a pas d'âme... Ravi de voir que tu en as une.
SupprimerEt un petit coup de colère par Milemarker, ça ne te tente pas ?
Ouaih, quelques titres vraiment sympas… mais c'est une petite colère rose !!!
SupprimerJ'aime bien, personnellement, quand la colère n'est pas constante, et j'aime bien la new wave et la synthpop alors tu te doutes que Milemarker me ravit.
SupprimerJ'ai pris le Fersen. Je crois que je le connais; J'ai toujours été un peu snob avec la musique française, donc j'en ai assez peu. Fersen, j'aimais bien mais je ne gravais pas ces CD pour m'y plonger vraiment, mais le personnage m'intéresse et j'aimais bien ces textes façon "l'air de ne pas y toucher". Je connaissais surtout ses débuts. Depuis, il semble avoir trouvé sa place. Et je préfère quand un artiste ne l'a pas encore trouvée et qu'il la cherche encore.
RépondreSupprimerPour ce qui est de Morcheeba, je serai assez sévère avec eux. Ce sont plus des faiseurs de musique que des compositeurs de chanson. Je trouve qu'ils savent créer des ambiances, pondre de jolies textures, les voix sont belles, mais tout ça sonne assez creu au final. Mais, du lot, c'est certainement celui-ci qui est le plus intéressant. Je crois même qu'il y a un morceau que j'avais gardé dans un coin qui reste suffisamment fort pour provoquer un p'tit truc... Mais le reste est assez décoratif quand on connait Portishead, Massive Attack, Goldfrapp, le premier Archive ou même Alpha.
Les Pet Shop Boys: voilà un groupe qu'il est jubilatoire de passer en écoute à des snobs. CA ne manque pas: "Quoi? Tu écoutes ça!?!". Ben, oui, et je n'ai pas honte. J'ai plutôt honte que l'on fasse la dure d'oreille à des mélodies si évidentes, à des textes très subtiles et une image très calculée qu'il est assez vain de raillée. Je préfère les deux précédents. Actually pour les sublimes singles (à mon avis les meilleurs) et surtout Behaviour (qui contient deux de mes chansons favorites du groupe qui ne sont pas des singles (Only the Wind et My October Simphony).
Very a un côté volontairement kitsch et excessif que je trouve parfois un peu indigeste. Mais il reste excellent. Je me suis arrêtée à Bilingual et ne connais pas leurs derniers.
Et du coup, j'ai pris le Livres 8 et 10. Parce que ton petit rajout 2015 m'a bien guidée. J'ai jeté une oreille rapide. Le 10 est assez facile d'écoute sur sa première moitié (je n'ai pas écouté le reste mais ça viendra) mais le 08 a mes faveurs, un monde à mon goût plus personnel et j'aime le brassage contemporain, jazz mâtiné d'ethnique. Et puis, les musiciens m'ont l'air tellement techniques et musicals...
Et Charlu a raison, il y a beaucoup de choses à lire.
Fersen a trouvé sa place dès ce second album qui n'est pas mon préféré (c'est Qu4tre qui détient la palme) mais pas loin.
SupprimerMorcheeba, je ne suis pas du tout d'accord avec toi. Ok, c'est le versant light et pop du trip-hop plus cérébral et trippant de Massive Attack, Portishead et consorts mais pas, à mon avis, le produit que tu décris.
Pet Shop Boys ou le kitsch réussi, tu as raison et il n'y a rien d'autre à ajouter sur le sujet sauf à préciser que les paroles sont souvent plus substantielles que la musique ne le laisse penser.
Curieux de connaître ton avis plus avancé sur les deux Zorn que tu as choisi, une belle pioche, ceci dit en passant.
Et comme d'hab', merci pour ce commentaire qui m'a ravi. ^_^