dimanche 25 septembre 2016

L'Automne Mange-Disques - 7 Easy

C'est de saison, on se replie dans son intérieur pour éviter un vent devenu trop froid, lounge confortablement dans son salon enveloppé dans des musiques flattant l'oreille, pas tout à fait de l'easy listening mais quelque chose nous enveloppant dans un doux sentiment de sécurité, un gentil coussin pour nos tympans... C'est le point qu'essaye de faire passer la sélection hebdomadaire de la série saisonnière qu'elle ouvre, enjoie !

DiMaNCHe
Chet Baker "My Funny Valentine" (1994)
ou "Gueule d'Amour"

Rien qu'à voir la gueule d'amour de Chet et la nuque prometteuse de la dame qui l'accompagne sur la pochette, il n'y a pas mensonge sur la marchandise : intime et doux, ce jazz de salon est une arme de séduction massive.
Ici, sur une sélection de sessions enregistrées pour Pacific Jazz entre 1953 et 1956, une sélection maline composée de neuf chansons et de 5 instrumentaux pour (dé)couvrir tout l'art de Mr. Baker, on nage en plein cool jazz, une musique qui sied aussi bien au timbre caressant qu'à la trompette soyeuse de Chet.
Niveau marketing aussi, c'est impeccable parce qu'avec un titre pareil on imagine le très net redressement des ventes à l'approche de chaque 14 février. Il faut dire que cette musique douce et sensuelle, qui si bien chante l'amour, ou l'évoque quand elle est instrumentale, semble avoir été conçue pour parler aux amants/aspirants/requérants en mal de romantisme ou souhaitant célébrer leur emportement psychologico-hormonal saisonnier. Et ça commence donc par l'inusable, et magnifique, My Funny Valentine ou le souffle chaud de la voix de velours vous berce de sa tendre langueur.
Le reste de la tracklist est à l'avenant, alternant avec bonheur les chansons immortelles (Someone to Watch Over Me, Time After Time, Let's Get Lost) où Chet Baker étale la classe fragile de sa voix presque diaphane, et des instrumentaux où il "trompette" cool en concurrent idéal d'un jeune black du prénom de Miles. accompagné de musiciens roués, dont Bud Shank sur quelques morceaux, et expertement mis en son (et remasterisé, en la circonstance).
Excellente introduction à une période faste du chanteur/trompettiste pour les nouveaux venus, bon résumé pour les (plus) spécialistes, My Funny Valentine est une jolie petite compilation (pas chère ! et plutôt dans les mieux ficelées du marché) d'un artiste d'exception. Et, bis, une arme de séduction massive parce, la sensualité du machin, quoi!

1. My Funny Valentine 2:15
2. Someone To Watch Over Me 3:00
3. Moonlight Becomes You 3:24
4. This Is Always 3:06
5. I'm Glad There Is You 3:10
6. Time After Time 2:44
7. Sweet Lorraine 3:08
8. It's Always You 3:31
9. Let's Get Lost 3:41
10. Moon Love 3:15
11. Like Someone In Love 2:23
12. I've Never Been In Love Before 4:23
13. Isn't It Romantic? 3:41
14. I Fall In Love Too Easily 3:18

Chet Baker - vocals, trumpet
&
Russ Freeman, Pete Jolly - piano
Carson Smith, Red Mitchell, Joe Mondragon, Leroy Vinegar, Jimmy Bond, Bob Whitlock - bass
Bob Neel, Shelly Manne, Stan Levey, Peter Littman, Lawrence Marable, Bobby White - drums
Bud Shank - flute, baritone saxophone
Corky Hale - harp
Herb Geller - alto & tenor saxophone
Bob Brookmayer - valve trombone

CHET BAKER

LuNDi
Elvis Presley "Blue Hawaii" (1961)
ou "UkulElvis"

En 1961, avec il est vrai assez peu de concurrence, l'Elvis tout feu tout flamme des débuts a vécu. Transformé par son Colonel Parker de manager en pop idol hollywoodienne, œuvrant désormais dans de nombreux nanars taillés sur mesure pour ses capacités particulières, belle gueule et voix de velours, c'est un rocker dompté qui sort essentiellement les albums de ses films... Prenez ce Blue Hawaii au titre on ne peut plus explicite sur son contenu, dès la pochette Elvis y pose, collier de fleurs, chemises bariolée et ukulélé, comme le garçon sage qu'il est devenu, ce chat jadis sauvage aujourd'hui coupé et dégriffé par quelques executives particulièrement roués et, sans doute, une ambition sans cesse renouvelée de rester une star, coute que coute. Le pire c'est que ce n'est même pas mauvais, juste trop gentil pour ce gars qui, pas si longtemps avant, représentait la jeunesse américaine en rébellion générationnelle. Concrètement, la musique de cette romcom vaut surtout pour la belle ballade acoustique Can't Help Falling in Love entouré de remplissages parfois sympathiques (Blue Hawaii, Rock-A-Hula Baby, Beach Boy Blues) souvent anecdotiques toutes épicées d'un exotisme îlien pacifique un peu kitsch tout de même. Le film sera un succès, la bande-son itou, poussant encore un peu plus le rocker dans une douce routine dorée dont il ne sortira vraiment, comme on sait, que grâce au comeback scénique de 1970 mais ça c'est une autre histoire qui ne fait pas de Blue Hawaii autre chose qu'un petit album sans grande importance qu'on écoute cependant sans le moindre déplaisir d'autant que, bien remasterisé et généreusement bonussé, il sait prolonger l'expérience "Easy Elvis" de quelques jolies douceurs supplémentaires.

1. Blue Hawaii 2:36
2. Almost Always True 2:25
3. Aloha 'Oe 1:53
4. No More 2:22
5. Can't Help Falling in Love 3:01
6. Rock-A-Hula Baby 1:59
7. Moonlight Swim 2:20
8. Ku-U-I-Po 2:23
9. Ito Eats 1:23
10. Slicin' Sand 1:36
11. Hawaiian Sunset 2:32
12. Beach Boy Blues 2:03
13. Island of Love 2:41
14. Hawaiian Wedding Song 2:48
Bonus
15. Steppin' Out of Line (originally issued on the Pot Luck With Elvis LP) 1:53
16. Can't Help Falling in Love (movie version) 1:54
17. Slicin' Sand (alternate take 4) 1:45
18. No More (alternate take 7) 2:35
19. Rock-A-Hula Baby (alternate take 1) 2:15
20. Beach Boy Blues (movie version) 1:58
21. Steppin' Out of Line (movie version) 1:54
22. Blue Hawaii (alternate take 3) 2:40

Elvis Presley – lead vocals
The Surfers – backing vocals
The Jordanaires – backing vocals
Boots Randolph – saxophone
George Field – harmonica
Freddie Tavares, Bernie Lewis – ukulele
Hank Garland, Tiny Timbrell – acoustic guitar
Scotty Moore – electric guitar
Alvino Rey – pedal steel guitar
Floyd Cramer – piano
Dudley Brooks – piano, celeste
Bob Moore – double bass
D.J. Fontana, Bernie Mattinson, Hal Blaine – drums

ELVIS PRESLEY

MaRDi
Gregory Isaacs "Cool Ruler" (1978)
ou "Love Reggae"

Un des créateurs du Lovers Rock, le reggae de l'amour pour résumer, Gregory Isaacs avait la voix de velours qui correspondait au riddims soyeux et aux paroles sexy qu'il chantait.
Cool Ruler, son 6ème album, est une démonstration du plus smooth et du plus sexy reggae des 70s, un machin à se trémousser sous les cocotiers avec sa chacune avec de vilaines idées en tête.
Ceci dit, le reggae de Gregory va au-delà de l'obsession sexuelle (on est pas chez Franky Vincent, que diable), avec quelques textes résistants et revendicateurs (John Public, Party in the Slum, Word of the Farmer) mais toujours avec la cool attitude d'une voix chaude et habitée. Quand on constate, en plus, qu'il est servi par la crème des sessionmen reggae de l'époque et a été enregistré au légendaire Channel One Studio, tout doute sur l'excellence de la chose s'envole.
Gregory Isaacs rules, mais cool parce que le soleil brille, que les filles sont belles, que jah a fourni ses petites herbes... Plus jouisseur que rastafari combattant sans être détaché du monde pour autant, Isaacs a du cœur à revendre et l'offre généreusement sur ce très réussi, son meilleur en fait, long-jeu. Recommandé !

1. Native Woman 3:02
2. John Public 3:06
3. Party In The Slum 3:26
4. Uncle Joe 3:50
5. World Of The Farmer 4:08
6. One More Time 3:14
7. Let's Dance 2:56
8. Don't Pity Me 2:22
9. Created By The Father 2:31
10. Raving Tonight 3:57

Gregory Isaacs - Vocals
The Heptones - Backing Vocals
The Revolutionaries - Backing Band
Sly Dunbar - drums
Robbie Shakespeare, Ernest Wilson - bass
Eric "Bingy Bunny" Lamont, Earl "Chinna" Smith, Ranchie McLean - guitar
Ansel Collins - Keyboards
Bobby Ellis, Tommy McCook, Herman Marquis - Horns

GREGORY ISAACS

MeRCReDi
Stevie Wonder "Hotter Than July" (1980)
ou "Still a Wonder"

Ce n'est peut-être plus la période de gloire, cette parenthèse enchantée qui, du début au milieu des septantes, fit de Stevie une des toutes premières attractions du monde de la musique, tous genres confondus, mais ce n'est pas non plus l'absolu abysse créatif que certains s'imaginent, non, Hotter Than July, premier cru des 80s de l'ex-petite merveille de la Motown, tient formidablement la route. Alors, certes, la musique s'est simplifiée, des synthétiseurs de leur temps viennent aussi empeser les arrangements de quelques choix discutables mais, dans l'ensemble, qu'il donne dans la ballade tire-larmes (le jazzy Lately), dans l'hymne "positive attitude" (Happy Birthday, wikipédiez !), qu'il fasse le meilleur reggae américain d'alors (Master Blaster), se la joue disco sans se perdre totalement (I Ain't Gonna Stand for It), etc., c'est encore et toujours le compositeur expert auteur d'album aussi essentiels qu'Inner Visions ou Songs in the Key of Life. La suite, on le sait, sera nettement moins glorieuse mais, avec tous ses défauts, l'air du temps n'étant pas le moindre, Hotter Than July demeure une galette qu'on recommande au amateur de soul/funk d'exception, qui n'y trouveront certes pas une totale satisfaction mais suffisamment de bons moments pour ne pas regretter, loin s'en faut !, ce petit tout du côté de chez wonderful Stevie.

1. Did I Hear You Say You Love Me 4:07
2. All I Do 5:06
3. Rocket Love 4:39
4. I Ain't Gonna Stand for It 4:39
5. As If You Read My Mind 3:37
6. Master Blaster (Jammin') 5:07
7. Do Like You 4:25
8. Cash in Your Face 3:59
9. Lately 4:05
10. Happy Birthday 5:57

Stevie Wonder - Vocals, Synthesizer, Drums, Fender Rhodes, Bass Synthesizer, Clavinet, Background Vocals, Arp, Vocoder, Piano, Harpsichord, Celeste, Keyboards, Bass Melodeon, Harmonica, Cabasa, Percussion, Bells, Handclaps, Flute Synthesizer
Nathan Watts - Bass, Background Vocals
Benjamin Bridges - Guitar, Background Vocals
Dennis Davis - Drums on "Did I Hear You Say You Love Me," "As If You Read My Mind", and "Master Blaster (Jammin')"
Earl DeRouen - Percussion, Background Vocals
Isaiah Sanders - Fender Rhodes, Background Vocals, Pianet
Hank Redd - Saxophone, Handclaps
Robert Malach - Saxophone
Larry Gittens - Trumpet
Nolan A. Smith Jr. - Trumpet
Paul Riser - String Arrangement
Hank Devito - Steel Guitar
Rick Zunigar - Guitar
Background Vocals - Angela Winbush, Mary Lee Whitney Evans, Susaye Greene Brown, Alexandra Brown Evans, Shirley Brewer, Ed Brown, Charlie Collins, Eddie Levert, Walter Williams, Michael Jackson, Jamil Raheem, Betty Wright, Ronnie J. Wilson, Charles K. Wilson, Syreeta Wright, Marva Holcolm, Melody McCulley, Delores Barnes
Handclaps - Stephanie Andrews, Bill Wolfer, Trevor Lawrence, Dennis Morrison, Kimberly Jackson

STEVIE WONDER

JeuDi
The Style Council "Café Bleu" (1984)
ou "Je voudrais être noir"

Il y a toujours eu, chez Paul Weller, cette tentation soul et jazz, ce désir d'être noir qui, quand on est un petit blanc du Surrey, n'est pas forcément le but le plus aisé à atteindre. Vous connaissez Café Bleu, au fait ?
Parce que le voilà le bon coup ! Le voici l'album où Paul Weller réalise son potentiel "Nino-Ferrerien" (je voudrais être noir !) assisté en l'occurrence d'un compagnon de jeu ayant précédemment œuvré chez les Dexys Midnight Runners, le claviériste Mike Talbot (qui voulait être noir aussi, ça tombe bien !). Bon, ce n'est pas le premier bon coup du duo et de sa troupe en perpétuel renouvellement, les deux hommes ayant testé leur nouvelle formule sur l'embryonnaire Introducing, c'est celui où The Style Council se révèle tel qu'en lui même, orchestre multiple embrassant hier comme aujourd'hui (celui de 1984, bien sûr), dans un cocktail black music totalement réussi.
Qui dit orchestre multiple dit, forcément, styles multiples. Qu'il emprunte à la Motown (les délicats The Whole Point of No Return et My Ever Changing Moods, le dynamique Here's One That Got Away et son surprenant petit coup de violon, le cuivré Headstart for Happiness), qu'il semble hommager Verve ou Blue Note (l'instrumental piano Mick's Blessings, le big-bandant Me Ship Came In!, le velours lascif de The Paris Match, le "bopesque" Dropping Bombs on the Whitehouse) ou tente de coller au goût du jour dans ce qui peut être perçu comme les seules fautes de goût d'un album sinon sans faille (le rap The Gospel qui sonne daté aujourd'hui, l'urban funk Strength of Your Nature et la ballade mélo You're the Best Thing itou), The Style Council le fait bien avec une équipe parfaitement assemblée où les voix féminines (Tracey Horn d'Everything but the Girl, Dee C. Lee, la Mme Weller d'alors) et des cuivres rutilants viennent joliment complémenter un songwriting solide et inspiré si, exercice nostalgique oblige, dérivatif de bien d'autres artistes jalons d'un glorieux passé.
Les promesses de cet impeccable premier long-jeu feront malheureusement long-feu et The Style Council ira trop vite se perdre dans de peu convaincantes aventures (à partir de 1986 et Home Abroad, en fait) avant de définitivement plier les gaules avant même la décennie épuisée. Reste ce Café Bleu et son gracieux successeur (Our Favourite Shop), petites pépites toujours aussi recommandées.

1. Mick's Blessings 1:15
2. The Whole Point of No Return 2:40
3. Me Ship Came In! 3:06
4. Blue Café 2:15
5. The Paris Match 4:25
6. My Ever Changing Moods 3:37
7. Dropping Bombs on the Whitehouse 3:15
8. A Gospel 4:44
9. Strength of Your Nature 4:20
10. You're the Best Thing 5:40
11. Here's One That Got Away 2:35
12. Headstart for Happiness 3:20
13. Council Meetin' 2:29

Paul Weller - Vocals/Guitar
Mick Talbot - Keyboards/Piano/Hammond organ
Ben Watt - Guitar
Chris Bostock - Double Bass
Steve White - Drums
Billy Chapman - Saxophone
Barbara Snow - Trumpet
Hilary Seabrook - Saxophone
Tracey Thorn - Vocals
Dee C. Lee - Vocals
Dizzy Hites - Rap
Bobby Valentino - Violin

THE STYLE COUNCIL

VeNDReDi
The Cardigans "Emmerdale" (1994)
ou "Swing & Dream & Pop!"

De petits suédois à peine sortis de l'adolescence pour une dream pop délicieusement lounge et rétro ? Vous avez sans doute entendu parler des excellents Cardigans mais connaissez-vous leur opus débutant, Emmerdale ?
Oubliez le cocker, oubliez le titre emprunté à un soap britannique, Emmerdale c'est avant tout de la musique, légère comme une bulle de champomy ou de canada dry, du sixties swinging London dans la suède des années 90, un anachronisme charmant.
Et surtout une voix mutine et câline, celle d'une toute jeune Nina Persson (20 ans !) qui a le physique qui va avec, en plus. Et ensuite des compositions et des arrangements (signés Peter Svensson, 20 ans itou) qui ne laissent nullement entrevoir la jeunesse de leur auteur qui maîtrise comme un vieux briscard cette fusion de pop et de swing jusque dans une relecture inspirée du Sabbath Bloody Sabbath de Black Sabbath qu'on reconnaît mais qui a tout de même subi un ripolinage en règle. Il y a évidemment d'autres très belles chansons, l'emballage joyeux d'un Sick & Tired ou d'un Rise & Shine, la douceur feutrée de Black Letter Day, After All et Celia Inside.
Tout ceci, dont une production (signée Tore Johansson) sachant mettre en valeur les qualités du quintet, de précieux arrangements encore enrichis par d'utiles guests, et un album qui donnera le la de ses deux successeurs qui, cependant, n'en posséderont pas la touchante naïveté si typique des premiers essais. Emmerdale recommandé ? Mais carrément !

1. Sick & Tired 3:24
2. Black Letter Day 4:31
3. In the Afternoon 4:10
4. Over the Water 2:13
5. After All... 2:56
6. Cloudy Sky 4:07
7. Our Space 3:30
8. Rise & Shine 3:28
9. Celia Inside 3:34
10. Sabbath Bloody Sabbath 4:32
11. Seems Hard 3:56
12. Last Song 3:21

Lars-Olof Johansson - acoustic guitar, piano
Bengt Lagerberg - percussion, bassoon, drums, recorder
Nina Persson - vocals
Magnus Sveningsson - bass
Peter Svensson - bass, guitar, percussion, piano, arranger, conductor, vocals, bells, vibraphone
&
David Åhlén - violin
Ivan Bakran - grand piano
Lasse Johansson - guitar, piano
Tore Johansson - trumpet, producer, beats
Jens Lingård - trombone
Anders Nordgren - flute

THE CARDIGANS

SaMeDi
Helena Noguerra "Née dans la Nature" (2004)
ou "Belle de Nature"

Ha ! Être un lion câliné par la belle Helena !, s'entendre susurrer "je t'aime salaud"... un petit goût de paradis. Mais venons-en à la musique et laissons l'aspect fantasmatique de côté, pas le choix.
Et vantons les mérites de cette collaboration de 2004 avec ce doux dingue de Philippe Katerine, une collaboration qui n'est pas alors une nouveauté puisque, déjà, Projet:Bikini et Azul (et plus tard Fraise Vanille, hommage à Serge Rezvani) avaient bénéficié de ses grâces compositionnelles et son savoir-faire d'arrangeur particulièrement compatibles avec les visées pop de mademoiselle Noguerra qui y apparaît comme une anti-Carla Bruni puisque maniant aussi bien la sensualité, la fraicheur que l'humour en plus d'avoir une voix, une vraie voix pour la french pop puisque c'est, fondamentalement, ce que Née dans la Nature nous offre. Et qu'on ne voudrait pas autre chose d'ailleurs parce que, groovy ou folk, ces chansons sont autant de douceurs sucrées qui vous fondent dans l'oreille et vous enrobent le cervelet dans un nuage rose barbapapa. Et oui, même quand on attaque la reprise très réussi du pourtant agaçant, dans sa version originale, I Just Can't Get You Out of My Head, de l'australienne de poche Kylie Minogue, ici dégraissé, "dé-clubisé" pour un résultat extrêmement probant et satisfaisant prouvant que, sous la bouse, se cachait bel et bien la grâce. Bien vu Philippe et Helena ! Et bravo, en fait, pour l'ensemble d'un album varié, réussi de bout en bout qu'on se passe, encore et encore, avec l'assurance de la satisfaction répétée.
Ha ! Être un lion câliné par la belle Helena !, s'entendre susurrer "je t'aime salaud"... un petit goût de paradis... Facilement accessible à l'écoute de ce Née dans la Nature ô combien réussi et recommandé, qu'on se le dise !

1. Née dans la nature
2. L'âge de ma mère
3. Je t'aime salaud
4. Mary poppins
5. Can't Get You Out of My Head
6. Le jardin près de la falaise
7. Aux quatre vents
8. Les fantômes
9. Quand tu dors
10. Je nageais nue
11. Qui es-tu ?
12. C'est parapluie (en duo avec Fifi Chachnil)

Helena Noguerra - chant
Philippe Katerine - guitares, chœurs
Philippe Eveno - guitares, chœurs
Christophe "Disco" Mink - guitare basse, keys, contrebasse, harpe, chœurs
Christophe Lavergne - batterie
&
Olivier Libaux - guitare (12)
Fifi Chachnill - chant (12)


HELENA NOGUERRA

dimanche 18 septembre 2016

L’Été Mange-Disques - 7 des Punks !


Pour la dernière de L’Été Mange-Disques, il est grand temps de se rappeler que l'automne n'est pas loin avec son cortège de putréfaction végétale, de liquéfaction céleste et de raréfaction du jour... Hé ouais ! Et quoi de mieux qu'une musique typiquement urbaine pour tout ce gris béton ? Alors c'est parti pour un théma Punk qui prend des libertés avec le genre mais colle toujours à l'esprit (j'espère)... Enjoie !

DiMaNCHe
The Velvet Underground "White Light/White Heat" (1968)
ou "Punk avant le Punk"

Au cas où on ne l'aurait pas compris avec leur premier album, White Light/White Heat nous rappelle que le Velvet Underground n'est pas un groupe de rigolos. Mais là où l'album à la banane nous berçait encore doucement de quelques délicates mélopées, le présent brûlot, nous lamine de son radicalisme sans compromis.
Out Nico et Andy Warhol, les ventes désastreuses de The Velvet Underground & Nico ont détérioré les rapports entre le groupe et leur mentor. Et puis après tout, White Light/White Heat, conçu à partir d'improvisations de tournée est leur album à eux, un animal dangereux, urgent comme les courtes sessions qui l'enfanteront : 2 jours !
Présentement, captés par Tom Wilson (qui a travaillé avec Sun Ra, les Animals d'Eric Burdon, Zappa et ses Mothers of Invention ou Bob Dylan), ils laissent libre cours à leurs pulsions électriques les plus ravageuses pour un résultat qui ne l'est pas moins. Parce qu'il faut d'abord dompter la bête pour ensuite vraiment l'apprécier. Parce que cette déconstruction de rock'n'roll post-moderne ne se livre pas facilement, plus beauté cachée que cover girl.
Pourtant, le morceau d'ouverture, qui donne son titre à l'album, ne paye pas de mine, petit rock'n'roll juste un peu "garageux" sur les bords mais finalement digne héritier d'un Jerry Lee Lewis ou d'un Chuck Berry. The Gift, errance improvisée et psychédélique, propose un Cale récitant un texte de Lou Reed sur une histoire d'amant destroy décidant de s'envoyer par la poste à sa bien aimée (Lou y es-tu ?), c'est aussi le début du grand largage d'amarres avec le commun de la pop musique et une exemplaire réussite d'avant-gardisme distrayant, bravo ! Au moins aussi étrange, Lady Godiva's Operation est une sorte de droning psyche pop post-apocalyptique avec Cale au chant et le groupe tournant sur le même thème ne s'autorisant que de rares variations, et c'est étrange et étrangement attirant même quand les voix se mélangent, la musique décline et la bizarrerie augment. Une drôle de chanson. Here She Comes Now c'est un peu la version garage, lo-fi du gentil Velvet Underground du premier album, sauf que le chant de Lou Reed, la souplesse instrumentale et l'ambiance beatnik électrique l'entraîne vers d'autres terres, et nous avec.
On sait que le groupe fut mécontent de I Heard Her Call My Name où il essayèrent, sans succès selon eux, de capturer l'énergie live du morceau. C'est pourtant un beau déluge électrique avec les badaboums primaires et énervés de Maureen Tucker et la voix et la guitare de Lou Reed en mode pas content, et ce ne sont pas les quelques chœurs qui viennent alléger l'ensemble... Une vraie furie ce titre ! Et puis vient le Gros Morceau, Sister Ray. 17 minutes captées live en studio en une seule et unique prise, qu'importent les maladresses et les fausses notes, un peu l'équivalent musical de l'écriture automatique chère à Kerouac, une folie ! Qui fonctionne parce qu'elle a la beauté de ces arts primitifs, parce qu'elle sait s'envoler en d'improbables crescendos, qui fonctionne aussi parce que le son du groupe y est si crument organique, y repousse, confond si radicalement les limites de la jam et du n'importe-quoi qu'on ne peut que fondre devant tant d'ingénuité et de cran. Marquant.
Et c'est fini. Et on en sort un peu rincé, parce que White Light/White Heat, ce n'est pas de l'easy listenning, mais définitivement content, certain d'avoir assisté à quelque chose d'unique, à une nouvelle définition, une nouvelle conception de la musique populaire pour jeunes gens de bon gout. Un quelque chose qui connaîtra des répliques, et des répliques (demandez voir au punks et à leurs descendants !), bref, important.
Deluxe Edition oblige, il y a du bonus à foison dans la présente édition, à commencer par deux outtakes des fameuses sessions, une version alternative de I Heard Her Call My Name et un inédit instrumental déjà croisé sur la compilation Another View (Guess I'm Falling in Love), toutes deux accessoires mais pas désagréable. On y retrouve aussi les extraits de deux sessions de février et mai 1968, les dernières de John Cale avec le VU, d'où ressortent Stéphanie Says et Temptation dans leurs mixes originaux et une early version vraiment inédite, la seule ici, de Beginning to See the Light de fort belle facture qui nous laisse songeur quand à ce que la suite de la carrière des new yorkais aurait pu donner avec leur ténébreux gallois.
Mais la fête n'est pas finie, loin de là, un live, enregistré le 30 avril 1967 au Gymnasium de New York, vient compléter la fête. Et quel live ! Déjà parce qu'il sonne diablement bien, mieux que tous les bootlegs et enregistrements plus ou moins officiels du Velvet Underground avec John Cale croisés de-ci de-là, ensuite parce que le groupe y délivre une prestation faite d'intensité et de talent à couper le souffle. C'est bien simple, à lui-seul, ce live justifie l'acquisition du coffret pourtant fort riche sinon avec, notamment, un texte fort intéressant narrant la genèse de l’œuvre.
White/Light White Heat était déjà un album dont, fondamentalement, aucun amateur de rock intelligent ne pouvait se passer, c'est encore plus vrai avec cette édition anniversaire totalement renversante.

CD 1
Stereo Version
1. White Light/White Heat 2:48
2. The Gift 8:20
3. Lady Godiva's Operation 4:57
4. Here She Comes Now 2:05
5. I Heard Her Call My Name 4:38
6. Sister Ray 17:32
Bonus
7. I Heard Her Call My Name (Alternate Take) 4:39
8. Guess I'm Falling In Love (Instrumental Version) 3:34
9. Temptation Inside Your Heart (Original Mix) 2:33
10. Stephanie Says (Original Mix) 2:50
11. Hey Mr. Rain (Version One) 4:40
12. Hey Mr. Rain (Version Two) 5:24
13. Beginning To See The Light (Previously Unreleased Early Version) 3:39

CD 2
Live At The Gymnasium, New York City, April 30, 1967
1.Booker T. 6:46
2. I'm Not A Young Man Anymore 6:17
3. Guess I'm Falling In Love 4:10
4. I'm Waiting For My Man 5:28
5. Run Run Run 6:58
6. Sister Ray 19:03
7. The Gift 10:25

John Cale - vocals, electric viola, organ, bass guitar, medical sound effects on "Lady Godiva's Operation"
Sterling Morrison - vocals, guitar, bass guitar, medical sound effects on "Lady Godiva's Operation"
Lou Reed - vocals, guitar, piano
Maureen Tucker - drums, percussion

THE VELVET UNDERGROUND

LuNDi
Eddie and the Hot Rods "Teenage Depression" (1976)
ou "Eddie sois chaud !"

C'est très simple, en fait. Eddie and the Hot Rods est le chaînon manquant entre le pub rock racé de Dr. Feelgood et les diatribes punks énervées des early Damned ou Clash,. Un sacré groupe avec un sacré premier album, aussi.
Vous aimez le rock'n'roll qui file à la vitesse d'un dragster ? Vous adorerez Teenage Depression. Parce qu'en 1976, alors que Londres ne fait que bruisser d'exactions primitives encore confinées au monde des clubs, Eddie and the Hot Rods, avec leur pêche d'enfer, leur pré-No Future déluge de rock, finalement très classique dans la facture, pub rock dirait-on, frappe fort. Parce qu'il n'y a ce supplément d'agressivité, cette urgence rythmique qui, évidemment !, rapproche la formation du futur phénomène punk anglais. D'ailleurs, en tournée nord-américaine avec les Ramones et les Talking Heads ou en tête d'affiche dans quelque improbable location (le groupe tourne alors intensément) , E&tHR sont souvent étiquetés "punk rock", et ne font pas pâle figure en ayant définitivement l'énergie à défaut du "fond de commerce". Au binaire sale, direct, agressif des Clash, Damned, Buzzcocks et autres Sex Pistols, ils anticipent par un rock'n'roll originel dopé à la frustration prolétarienne britannique de ces 70s déjà de crise.
Doté de huit originaux bien taillés et de trois reprises exemplaires (Show Me de Joe Tex, The Kids Are Alright des Who et le Shake de Sam Cooke), le Teenage Depression édition originale n'avait qu'un seul défaut, avec ses 31 minutes il obligeait à d'incessants déplacements vers la platine vinyle pour prolonger l'expérience de ce divin assaut d'électricité furieuse, cette glorieuse attaque de rock & roll brutalement jouissif. Un petit défaut donc, largement gommé sur ce remaster ô combien généreusement et qualitativement bonussé, particulièrement par une belle demie heure de live bien cru, bien suant, idéale occasion d'entendre, des Them à Bob Seger en passant par les Rolling Stones ou ? and the Mysterians et leur inusable 96 Tears, E&tHR replonger dans l'art délicat de la reprise où ils excellent.
Hélas... Trop énervés pour la génération d'avant, trop traditionalistes pour les crêtés à venir, Eddie and the Hot Rods, n'ayant gouté que fugitivement aux spotlights, seront vite emportés par la vague "no future" et sombreront dans un injuste anonymat. Injuste parce que, fines lames d'un rock & roll nerveux et finalement intemporel, ils méritaient tellement mieux que leur statut tout juste culte d'aujourd'hui qui ne suffit dignement pas. Sur la foi de cet impeccable Teenage Depression, c'est l'évidence.

1. Get Across to You 2:48
2. Why Can't It Be? 2:33
3. Show Me 2:03
4. All I Need Is Money 2:21
5. Double Checkin' Woman 2:29
6. The Kids Are Alright 2:40
7. Teenage Depression 2:59
8. Horseplay (Wearier of the Schmaltz) 2:22
9. Been So Long 3:22
10. Shake 1:30
11. On the Run 6:26
Bonus
12. Writing on the Wall 2:42
13. Cruisin (In the Lincoln) 3:33
14. Wooly Bully (Domingo Samudio) 2:37
15. Horseplay (Single Version) 2:24
16. 96 Tears (Live) 2:58
17. Get Out of Denver (Live) 3:51
18. Medley: Gloria / Satisfaction (Live) 5:24
19. On the Run (Live) 9:02
20. Hard Drivin Man (Live) 2:11
21. Horseplay (Live) 2:30
22. Double Checkin' Woman (Live) 2:37
23. All I Need Is Money (Live) 2:56

Barrie Masters - vocals
Paul Gray - bass, backing vocals
Steve Nicol - drums, backing vocals
Dave Higgs - guitar, backing vocals, piano on "Horseplay (Wearier Of The Schmaltz)"

EDDIE AND THE HOT RODS

MaRDi
Killing Joke "Killing Joke" (1980)
ou "Punk Industry"

Inquiétant, lourd, agressif, le premier album des Anglais de Killing Joke est un cri primal et une œuvre essentielle dans l'invention du post-punk.
Bien qu'on puisse assimiler Jaz Coleman & Cie à la queue de la comète punk d'Albion, leur musique va bien au-delà de celle de leurs devanciers. Là où des schémas empruntés au reggae, à la soul, au funk ou à l'electro formaient l'essentiel des groupes punks cherchant à se diversifier (Gang of Four, Ruts, Clash, Damned, etc.) Killing Joke ajoutait une saleté, une lourdeur, une urbanité qui les différenciait définitivement. Et une totale maîtrise de leur sujet pour couronner la réussite.
Cette musique n'est pas technique, les musiciens impliqués connaissaient probablement leurs limites et comment les retourner en forces. Pour le coup, cette relative rudesse donne à la musique des accents tribaux qu'on ne soupçonnerait pas dans ce genre de musique. Les rythmes sont souvent lents mais ne manquent jamais de dynamique grâce à des lignes de basse simples mais efficaces qui complètent à merveille la performance toute en lourdeur de Paul Ferguson à la batterie. La guitare, étrangement, semble comme reléguée au second plan, à un effet sonore certes de très bon gout mais auquel on pourrait aisément substituer un autre instrument.
Évidemment, parler de Killing Joke sans mentionner la voix écorchée vive de Jaz Coleman serait impensable. Tel qu'on le connait toujours aujourd'hui, Jaz livre une performance possédée. Juste ce qu'il fallait à cette musique pour réellement exister. Pour s'en convaincre, il suffit d'examiner l'instrumental de l'album. Pas désagréable au demeurant avec son côté dub-punk-discoïde, il n'est du niveau d'aucune autre composition présentée ici simplement parce que Jaz n'y est pas (enfin, il y est mais uniquement aux claviers) et que sa verve inimitable y manque cruellement.
Cerise sur le gâteau, le remaster est de grande qualité. Les basses et l'amplification n'y ont pas été trop boostées, défauts généralement constatées sur les remasters bâclés disponible sur le marché (et sur un trop grand nombre de sorties récentes mais c'est un autre débat..).
En résumé, en plus de n'avoir pas pris une ride plus de 30 ans après sa sortie, l'éponyme n°1 de Killing Joke (le groupe en sortira un second en 2003) est un album important dont les influences se retrouvent partout chez à peu près tout ce qui se rapporte au rock industriel, au rock gothique, au post-punk et à pas mal de formations de metal aussi.
Essentiel donc, tout simplement.

1. Requiem 3:45
2. Wardance 3:49
3. Tomorrow's World 5:31
4. Bloodsport 4:46
5. The Wait 3:45
6. Complications 3:08
7. $,O,36 6.52
8. Primitive 3:37
Bonus
9. Change 4:01
10. Requiem (Single Version) 3:47
11. Change (Dub) 4:00
12. Primitive (Rough Mix) 3:35
13. Bloodsport (Rough Mix) 4:50

Jaz Coleman – lead vocals, synthesizer, production
Kevin "Geordie" Walker – guitar, production
Martin "Youth" Glover – bass guitar, production
Paul Ferguson – drums, backing vocals, production

KILLING JOKE

MeRCReDi
Black Flag "Slip It In" (1984)
ou "Red Rage"

Indéniablement une des formations ayant le plus œuvré dans l'évolution du hardcore étatsunien vers une forme d'art, Black Flag sort alors son 4ème album, le troisième de 1984 aussi, c'est dire l'inspiration de Rollins, Ginn et Cie.
Mais aussi le peu de temps que prend un quatuor au moyens financiers limités pour enregistrer chacune de ses compulsives livraisons. Alors forcément, c'est cru, affreux, sale et méchant, sans le moindre compromis au amateurs de haute-fidélité et ça tombe bien, c'est comme ça que c'est bon.
D'autant que Black Flag a des choses à dire. C'est évident dans les paroles rageuses d'Henry Rollins, ça l'est autant dans le punk déstructuré, libéré fomenté par la formation, son leader/guitariste et principal compositeur, Greg Ginn, en tête. Mais avec tant d'empressement dans le façonnage de leur ex-novo hardcorum, et donc une prise de risque maximale, le risque est la sortie de route que n'évite pas toujours les californiens, et s'il y a une majorité de très bon sur ce Slip It In urgent où l'agression punkoïde se pare d'atours (free) jazzés et hard'n'bluesy via des parties de guitare de plus en plus osées sans y perdre une once de sa bileuse et originelle colère, il y a aussi des longueurs et des stridences dont l'utilité échappe, et une ou deux compositions en-deçà du niveau d'ensemble (Rat's Eyes, My Ghetto).
Rien de dramatique dans ce qui demeure une des plus belles livraisons de cette séminale formation et, par conséquent, un album important, presque essentiel, ce que sera In My Head, une petite année plus tard.

1. Slip It In 6:17
2. Black Coffee 4:53
3. Wound Up 4:17
4. Rat's Eyes 3:57
5. Obliteration 5:51
6. The Bars 4:20
7. My Ghetto 2:02
8. You're Not Evil 7:00

Henry Rollins - vocals
Greg Ginn - guitar, producer
Kira Roessler - bass, backing vocals
Bill Stevenson - drums, producer
&
Davo Claassen - backing vocals
Suzi Gardner - backing vocals
Chuck Dukowski - backing vocals

BLACK FLAG

JeuDi
One Last Wish "1986" (1986/99)
ou "Séminal DC Punk"

Comme son nom mais pas sa date de publication (1999) l'indique, cet unique opus des punk rockers de Washington DC a été enregistré en 1986.
Formé sur les cendres des légendaires Rites of Spring (3 des membres de OWL en furent), One Last Wish fut une brève aventure. Entre un premier show en août 86, ces sessions en novembre de la même année et un split qui les suivra de peu; le groupe n'aura vécu qu'à peine une demie année.
Chanceux que nous sommes, l'excellent label Dischord a publié ces bandes en 1999, tout le monde peut donc profiter pleinement de ce hardcore punk séminal.
Parce que One Last Wish, c'est quand même quelque chose ! Dégraissé à l'extrême, leur punk est vibrant, rapide, précis et toujours mélodique. Attention, pas comme du Bad Religion ou du (early) Green Day. Non, ce n'est pas du melodic punk mais bien du hardcore punk qui a su ne pas oublier la nécessaire harmonie dont il s'agit.
Je n'en dirais pas plus. Je vous laisse dénicher la bête pour l'écouter, juste récompense, potards à fond ! Enjoie !

1. Hide 2:12
2. Burning in the Undertow 2:08
3. Break to Broken 2:01
4. Friendship is Far 2:36
5. My Better Half 1:56
6. Loss Like A Seed 2:01
7. Three Unkind Silences 1:39
8. Shadow 1:50
9. Sleep of the Stage 1:35
10. One Last Wish 2:18
11. This Time 1:58
12. Home Is the Place 1:39

Brendan Canty: drums
Michael Hampton: guitar,vocals
Edward Janney: bass, vocals
Guy Picciotto: guitar, vocals

BRENDAN & GUY (dans Rites of Spring)

VeNDReDi
Les Shériff "La Saga des Sheriff" (2007)
ou "Pogo à Gogo !"

On les surnomme les Ramones de Montpellier, la réalité est évidemment un peu plus complexe que ça mais la description reste tout sauf erronée. Bienvenue dans le petit monde des Shériff !
...Et dans la double compilation récapitulative La Saga des Shériff, 39 morceaux où énergie punkoïde, bonne humeur communicative et innocence presque enfantine se marient pour le meilleur et pour le rire... Rien que ça !
Notez, la formule est d'une simplicité absolue : des riffs punks de base, un emballage rythmique le plus souvent pied au plancher, des paroles à la touchante naïveté, une voix itou, et des chœurs de soutien juste comme il faut. Il est évident que c'est de l'art avec un tout petit a mais quelle tenue, quelle fougue ! Parce que, dans leurs meilleurs moments, les Shériff étaient capables de tout emporter, comme tout ceux qui ont eu l'honneur et le privilège d'assister à leurs électriques prestations scéniques peuvent en témoigner. Et comme, même dans leurs pires, pas souvent donc, quand l'inspiration n'est pas au top, ils restent une des plus sympathiques formations de punk rock de chez nous on rejoint sans rechigner la pogo party.
Alors, les Ramones d'ici ? En vérité, pour influents et importants que furent les faux frères de la Grosse Pomme, je leur préfère le joyeux chahut de nos Shériff à nous qui, certes, ne figureront jamais dans les livres d'histoire de la musique mais savaient (savent, puisqu'ils ressortent de temps en temps de leur cave) faire bien, faire simple. Une totale absence de prétention qu'il fait bon entendre.
La Saga des Shériff ? Un "good deal", peut-être un peu long pour qu'on se le fade d'une traite, où figure bel et bien le meilleur de nos étoilés, formation essentielle de l'agitation binaire tricolore. Punk's not dead, comme dirait l'autre.

CD 1
1. La saga des sheriff 1:39
2. Ne fais pas cette tête là 3:03
3. Hissez le drapeau noir 2:50
4. Panik (à Daytona Beach) 2:04
5. Les deux doigts dans la prise 2:01
6. A coup de batte de base ball 2:17
7. Jouer avec le feu 2:52
8. Plus haut 2:19
9. Dollars 3:21
10. Mayonnaise à gogo 2:43
11. 3,2,1... zéro 2:17
12. Pourvu que ça dure 2:20
13. Bongo kid 1:58
14. Pendons les haut et court 2:37
15. Je veux savoir pourquoi 2:50
16. Ça sert à rien 2:50
17. De toutes les couleurs 3:19
18. Ne comptez pas sur moi 1:52
19. Pile ou face 2:45
20. Arrête d'aboyer 2:31

CD 2
1. Ça fait mal 2:53
2. A la poubelle 2:52
3. Pas le temps d'attendre 2:21
4. Non ! Non ! Non ! 1:12
5. Je ne suis pas menteur 2:49
6. Pas besoin d'un dessin 2:44
7. Y'a comme un problème 2:57
8. État végétal 2:24
9. Question de fun 1:42
10. Donne moi plus2:02
11. A la porte 2:58
12. Tant de temps 2:18
13. Marteaux piqueurs 3:08
14. Génération atomique 3:21
15. Pagaille générale 2:32
16. Que pasa ? 2:44
17. Le goût du sang 2:46
18. Pour le meilleur et pour le pire 3:27
19. Le mur du son 2:35

Michel Conegero - basse
Olivier Téna - chant
Frédéric Bessière - guitare
Fabrice Albert-Birot - guitare
Emmanuel Larnaud - batterie
(line-up sujet à caution)

LES SHERIFF (...ont vieilli)

SaMeDi
KEN Mode "Venerable" (2011)
ou "Kill Everyone Now!"

Avec un nom comme KEN mode (Kill Everyone Now), les canadiens ne mentent pas sur leurs intentions, Venerable, leur 3ème album propose bien ce hardcore barbare et métallisé, mais nettement plus original que la moyenne, qui en fera fuir plus d'un et en assourdira quelques autres de bonheur.
Plus original que la moyenne ? Il faut dire que le metalcore, ce petit cousin bâtard du thrash'n'death metal et du hardcore, est devenu le domaine d'un formatage si répandu, d'une banalité si presque totalement générale qu'il n'en faut pas tant pour s'extraire du lot des nez-de-bœufs peuplant son microcosme. Parce qu'en plus de suivre quelques codes du genre, KEN Mode y ajoute une rage plus explosive que la majorité, de penchants noise bienvenus, d'un groove sale et suant directement hérité du stoner le plus brutalement punkoïde, et d'une qualité compositionnelle permettant à la formation de livrer, malgré les supposées limitations du genre, un album varié, et imparfait mais ça fait partie de son chaotique charme.
Comme, en plus, Venerable est doté d'une production de Kurt Ballou (également à la slide sur un titre), toujours un bon signe, ça, et sonne donc du feu du diable, et a l'ultime élégance de ne pas s'éterniser (43 petites minutes sans temps mort et puis s'en va), il n'en faut pas plus pour le recommander encore un peu plus que les autres de leur "joli" catalogue. KEN Mode ? Une vraie bonne adresse pour la destruction tout en finesse de vos tympans !

1. Book of Muscle 3:28
2. Obeying the Iron Will... 4:26
3. Batholith 3:33
4. The Irate Jumbuck 7:26
5. A Wicked Pike 2:51
6. Flight of the Echo Hawk 3:39
7. Never Was 8:16
8. The Ugliest Happy You've Ever Seen 3:03
9. Terrify the Animals 2:58
10. Mako Shark 2:58

Jesse Matthewson - guitar, vocals
Shane Matthewson - drums
Chad Tremblay - bass, vocals
&
Kurt Ballou - slide guitar on "Terrify the Animals", production
Jahmeel Russell - composing on "Flight of the Echo Hawk"

KEN MODE

dimanche 11 septembre 2016

L’Été Mange-Disques - 7 en Prog

En vacances, il est parfois bon de se perdre mais on peut aussi revenir aux fondamentaux, tracer sa route de Monument Valley à Lady Liberty, d'une tour métallique à une autre penchée... En musique c'est exactement pareil, on peut fureter dans les raretés les plus étonnantes ou s'atteler à de grands classiques comme cette sélection de 7 étendue (parce que 7 ne suffisait définitivement pas) quelques joyaux progressifs s'articulent en une sorte sélection "Prog for Dummies"... Enjoie !

DiMaNCHe
King Crimson "In the Court of the Crimson King" (1969)
ou "Le Roi Bien Habillé"

Il serait aisé de s'étendre sur les multiples qualités, le caractère avant-gardiste, influent et le statut dorénavant culte (voire légendaire) de cet In the Court of the Crimson King, première levée d'un King Crimson destiné à l'excellence. En toute honnêteté, l'exercice d'analyser une fois de plus cette impeccable galette, entrepris a de trop nombreuses reprises, confinerait à l'extrême vanité. Convenons-en, l'album frise la perfection, tout le monde s'y entend dorénavant même si, en son temps, l'accueil fut nettement plus nuancé avec un certain nombre de rock critics déconcertés par l'approche ô combien libre d'un groupe se souciant si peu des structures qu'elles disparaissent souvent complètement ici remplacées par ce qui devait être connu comme l'archétype, le mètre étalon du rock progressif.
Un point, par contre, a trop longtemps gâché le plaisir des auditeurs. Il concerne la mise en son qui, suite à des problèmes techniques dans la phase d'enregistrement et de mixage d'origine (la perte du master stéréo, une paille !) mais aussi à de nombreuses rééditions n'offrant qu'une version « au rabais » (masterisées à la va-vite et donc peu recommandables), n'étaient pas à la hauteur de ce chef d’œuvre intemporel. Ainsi aura-t-il fallu attendre 2004 pour enfin bénéficier d'une édition digne de ce nom élaborée sous le patronage scrupuleux et attentif de Monsieur Robert Fripp. A croire que ce n'était pas assez pour un perfectionniste maniaque de la trempe de Fripp, le quarantième anniversaire de la formation du groupe a de nouveau été l'occasion d'une nouvelle édition, définitive cette fois, si l'on en croit la communication du KC Estate. Et le moins que l'on puisse dire c'est que les petits plats ont été mis dans les grands avec une édition double CD, une édition CD et DVD et une gargantuesque box set de 5 CDs et 1 DVD !
Pour mener à bien cette ambitieuse et utile entreprise, Robert Fripp - comme pour les autres rééditions de la série du 40ème anniversaire - a fait appel aux talents d'ingénieur du son de Steven Wilson (leader absolu Porcupine Tree mais également producteur, entre autres, de Fish, de Marillion ou d'Opeth) qui, en la circonstance, a si bien nettoyé et dynamisé le matériau brut (bien aidé, il faut le dire par la découverte quasi-miraculeuse des master-tapes stéréo) qu'on aurait presque l'impression de se retrouver avec une version overdubbée, trafiquée, du premier King Crimson. Évidemment, il n'en est rien. Ayant personnellement opté pour l'édition 2 CDs, je ne puis commenter que sur le matériel s'y trouvant. En l'occurrence, à choisir entre le 2009 (de Wilson, donc) et le 2004, mon cœur ne balance absolument pas. Si l'Original Master Edition de 2004 était une nette et salutaire amélioration par rapport aux éditions précédentes, le Stereo Mix de 2009 l'enterre aisément. Clair, précis, d'une dynamique à couper le souffle, c'est un travail d'orfèvre donnant une nouvelle vie à un album qu'on prend de nouveau grand plaisir à écouter pointilleusement tant il révèle de petites merveilles auparavant trop noyée dans un spectre sonore trop resserré et imprécis. Les bonus quand à eux sont une addition satisfaisante à cette rutilante réédition et permettent, via des prises alternatives, deux lives sortis des placards de la BBC, une "Wind Session" permettant de vivre quelques instants dans le studio avec le groupe et la chanson titre en version single mono (divisée en deux parties pour la circonstance) de rallonger le bonheur de quelques précieuses minutes et de s’apercevoir, au passage I Talk to the Wind en version duo instrumentale ou la backing track (instrumentale aussi, donc) d'Epitath valent presque les versions de l'album... Presque !
Indispensable (euphémisme !), In the Court of the Crimson King l'est encore plus dans cette version enfin soniquement à la hauteur des ambitions et de la grâce de la musique contenue. C'est dire le bonheur absolu qu'on y prend !

CD 1
1. 21st Century Schizoid Man
2. I Talk to the Wind
3. Epitaph
4. Moonchild
5. The Court of the Crimson King
6. Moonchild (full version)
7. I Talk to the Wind (Duo version)
8. I Talk to the Wind (Alternate mix)
9. Epitaph (Backing track)
10. Wind session

CD 2
1. 21st Century Schizoid Man
2. I Talk to the Wind
3. Epitaph
4. Moonchild
5. The Court of the Crimson King
6. 21st Century Schizoid (instrumental)
7. I Talk to the Wind (BBC session)
8. 21st Century Schizoid Man (BBC session)
9. The Court of the Crimson King (Part 1) (Mono Single)
10. The Court of the Crimson King (Part 2) (Mono Single)

Robert Fripp: guitare
Ian McDonald: flûte, clarinette, vibraphone, claviers, mellotron, voix
Greg Lake: guitare basse, chant
Michael Giles: batterie, percussions, voix
Peter Sinfield: textes et illumination (sic)

KING CRIMSON

LuNDi
Jethro Tull "Thick as a Brick" (1972)
ou "Oh! La Belle Brique !"

Le concept album rock progressif à la mode Jethro Tull ? Vous pensez que c'est différent des Yes, Genesis, Pink Floyd et autres Camel parce qu'avec Gentleman Farmer Ian Anderson à la barre, un monsieur qui a ses convictions et son sens de l'humour bien à lui, les affectations progo-symphoniques prennent de tout autres atours.
Qu'on se rassure tout de même, malgré l'orchestre, malgré la longueur de chaque suite, malgré la teneur conceptuelle de la bête, on reconnaît bel et bien Jethro Tull ne serait-ce que par les voix et flûtes d'un omniprésent Ian Anderson ou les guitares souvent incandescentes, toujours décisives d'un irremplaçable Martin Barre au sommet de sa forme. Il reste, évidemment, de la folk, de la gouaille et de la bonne humeur dans ce Thick as a Brick d'anthologie. Oui, d'anthologie !, parce quelle fête, mes aïeux, quelle tour de force que de passer d'un chef d’œuvre mêlant folk, hard rock et progressisme mesuré, Aqualung dont on ne conseillera jamais assez l'édition du 40ème anniversaire, à cet ambitieux projet et de le réussir si bien.
Bref, sur fond de dénonciation satyrique de l'hypocrisie de la société britannique du début des années 70, parce qu'on peut être ambitieux tout en gardant de l'humour et un regard lucide, Anderson & Cie ont confectionné un ensemble où douceur acoustique, hard rock et folk rock dans une forme progressive (et donc pas stricto sensu du rock progressif) se marient à merveille. En plus de la performance des deux leaders naturels (Barre et Anderson, donc) on notera la fantastique performance d'un John Evan constituant le trait d'union idéal entre les inspirations "rootsy" du Tull et ses présentes prétentions symphoniques, clairement, sans lui, sans son Hammond particulièrement, rien n'aurait été tout à fait pareil. Tous les éléments en place, parce qu'on n'oublie évidemment pas une section rythmique au diapason de ses collègues, il ne reste plus qu'à apprécier l'exploit d'une formation qu'on n'attendait certainement pas là et qui s'en sort, c'est le moins que l'on puisse dire, avec plus que les honneurs, avec un complet triomphe.
Mais puisqu'il est impossible de rendre tout à fait justice à une œuvre qui se "comprend" plus en l'écoutant que par quelque description, pour précise et maniaque qu'elle soit, il ne reste qu'à conseiller cet historique Thick of a Brick, forcément un des haut-faits de Jethro Tull (d'autant plus qu'il est présentement bien bonussé par un version live raccourcie et une intéressante interview d'Anderson, Barre et Hammond), indéniablement un des tous meilleurs concept-albums jamais réalisé.

1. Thick as a Brick, Part I 22:40
2. Thick as a Brick, Part II 21:06
Bonus
3. Thick as a Brick (1978 live version at Madison Square Garden) 10:50
4. Interview with Jethro Tull (Ian Anderson, Martin Barre and Jeffrey Hammond) 16:30

Ian Anderson - lead vocals, acoustic guitar, flute, violin, trumpet, saxophone
Martin Barre - electric guitar, lute
John Evan - organ, piano, harpsichord
Jeffrey Hammond - bass guitar, spoken words
Barriemore Barlow - drums, percussion, timpani
&
David Palmer - Orchestral arrangements

JETHRO TULL

MaRDi
Soft Machine "Third" (1970)
ou "Premium Molle"

Jazz ou prog ? Prog et jazz ! Third, troisième album de Soft Machine est une révolution en soi, un album où, sans guitare, un quatuor d'instrumentistes experts trace une nouvelle voie et s'impose, mine de rien, comme une valeur sûre d'une avant-garde progressive de plus en plus décisive.
De fait il n'y a plus que le Moon in June de Robert Wyatt qui contienne encore du chant, et même celui-là s''est largement éloigné des préoccupations débutantes de la formation, quand Kevin Ayers en était encore et que le psychédélisme dada dominait. Soft Machine est désormais un groupe de jazz progressif, un impossible trait d'union à l'avant-garde d'un genre comme de l'autre. Double album de quatre titres dans son édition originale, un titre par face, aucun sous les 18 minutes !, où seul Elton Dean ne compose pas (Facelift pour Hopper, Slightly All the Time et Out-Bloody-Rageous pour Ratledge), Third rapproche le jazz de John Coltrane du rock progressif de King Crimson (particulièrement sur Facelift), résumerait-on. Parce qu'au trip instrumental complet de la période free de Trane s'ajoute les manipulations de studio, la modernité des synthétiseurs, et, plus généralement, l'esprit mélodique et innovateur forcément différent de quatre anglais de la middle-class comparé à un black de Caroline du Nord.
Cette fusion, pas au sens électrique et funky qu'un certain Miles Davis est alors en train d'imposer, outre le fait qu'elle transcende les genres, propose une nouvelle conception musicale jusqu'alors jamais entendue, une conception qui fera florès même si personne, que ce soit en rock progressif ou en jazz, même parmi les divers et excellents travaux des divers membres en dehors de la machine, et même par le groupe lui-même qui ne reproduira plus jamais tout à fait l'exploit (et encore moins après le malheureux accident, et donc le départ forcé, de Robert Wyatt). Touché par la grâce de son batteur/compositeur/multi-instrumentiste, Moon in June en demeure l'himalayen sommet mais, vraiment, tout vaut qu'on y plonge, qu'on y replonge jusqu'à avoir décodé, compris, enregistré chaque note, voulue ou improvisée (le Facelift d'Hopper sent fort la dernière tendance).
Comme en plus la présente version propose un excellent live, sorti des coffres forts de la bonne maison BBC, pour un évènement où Soft Machine, ouvrant présentement pour le BBC Symphony Orchestra, fut la première formation non classique à jamais se produire (c'est dire l'impact de Third sur les mélomanes), il va s'en dire qu'on recommande chaudement cet album, c'est le mot, historique... Et indispensable !

CD 1 - Album
1. Facelift 18:45
2. Slightly All the Time 18:12
3. Moon in June 19:08
4. Out-Bloody-Rageous 19:10

CD 2 - Bonus
Live at the Proms (Royal Albert Hall, 13/08/70)
1. Out-Bloody-Rageous 11:54
2. Facelift 11:22
3. Esther's Nose Job 15:39

Mike Ratledge - Hohner Pianet, Lowrey organ, piano (all but 3)
Hugh Hopper - bass guitar (all but 3)
Robert Wyatt - drums, vocals (3), Hammond Organ (3), Hohner Pianet (3), piano (3), bass (3)
Elton Dean - alto saxophone, saxello (all but 3)
&
Lyn Dobson - soprano saxophone, flute (1)
Jimmy Hastings - flute, bass clarinet (2,4)
Rab Spall - violin (3)
Nick Evans - trombone (2,4)

SOFT MACHINE

MeRCReDi
Caravan "In the Land of Grey and Pink" (1971)
ou "Canterbury Gold"

Pilier de cette passionnante Canterbury Scene, aux côtés de Soft Machine, National Health, Hatfield and the North, Gong, et, à moindre titre, d'Egg, Comus, Quiet Sun, etc., excusez du peu !, Caravan en est aussi l'un des fondateurs, l'un des détenteurs d'un son, mariant jazz libre (ici tenu à un strict minima), indéniable anglicité et progressisme naturel qui fait tellement d'effet aux amateurs d'évasion sonique de qualité.
Dans les faits, In the Land of Grey and Pink est l'avant-dernier album de la formation originelle de Caravan, le troisième d'icelle, celui où le futur Hatfield and the North Richard Sinclair, qui quittera ses partenaires l'année suivante, après un Waterloo Lily un poil décevant, s'implique le plus dans le songwriting et le chant jusqu'à en devenir le quasi-leader. Découpé en deux parties, une face dédiée à de courtes chansons, l'autre au massif Nine Feet Underground et ses presque 23 minutes, il exemplifie à la perfection les deux facettes compositionnelles d'une formation autant capable de chansons pop progressives toutes en nuances et joliesses mélodiques que de magistrales explorations progressives symphoniques où moult soli virtuoses, moult textures réussies viennent émailler une création qui tient beaucoup de la jam sans pour autant perdre un seul instant un focus compositionnel bien tenu. Forcément, Caravan n'ayant pas de vrai guitariste en son sein, les claviers en génrale et l'orgue bourré de fuzz en particulier de l'autre Sinclair, cousin du premier, David qui s'en donne à cœur-joie et nous offre, ce faisant, un paquet de belles émotions musicales.
Alors, certes, Caravan n'est pas exactement le plus edgy des groupes de la scène de Canterbury, contrairement à Soft Machine ils ne poussent pas leur art vers le free jazz, contrairement à Gong ils ne partent pas de dans de spatiaux délires psychédéliques mais ce qu'ils font, une musique finalement simple, accessible mais jamais simpliste, ils le font avec un classe et un naturel qui laisse bouche bée. C'est vrai sur tous les albums de leur période de gloire (1968-1973) et encore un peu plus cet In the Land of Grey and Pink qu'il est, à partir de là, facile de considérer comme leur magnum opus, ce qu'il est, indéniablement.
Présentement, en un remaster de qualité doté de nombreux titres bonus permettant de rallonger la bonne sauce, c'est l’œuvre qu'on conseillera à toutes celles et tous ceux qui souhaitent découvrir cette formation trop souvent confinée à un quasi-anonymat hors de la sphère progressive alors qu'elle mérite tellement mieux. Testez-le donc, vous ne serez pas déçus.

1. Golf Girl 5:05
2. Winter Wine 7:46
3. Love to Love You (And Tonight Pigs Will Fly) 3:06
4. In the Land of Grey and Pink 4:51
5. Nine Feet Underground 22:43
Bonus
6. I Don't Know Its Name (Alias The Word) 6:12
7. Aristocracy 3:42
8. It's Likely to have a Name Next Week (Instrumental version of "Winter Wine") 7:48
9. Group Girl (First version of "Golf Girl") 5:04
10. Dissassociation/100% Proof (New Mix) (Closing section of "Nine Feet Underground") 8:35

Richard Sinclair - bass guitar, acoustic guitar, vocals
Pye Hastings - electric guitars, acoustic guitar, vocals
David Sinclair - organ, piano, Mellotron, harmony vocals
Richard Coughlan - drums and percussion
&
Jimmy Hastings - flute, tenor sax, piccolo
Dave Grinstead - cannon, bell and Wind

CARAVAN

JeuDi
Pink Floyd "Animals" (1977)
ou "La Ferme !"

Le meilleur Pink Floyd ? Certains qui préfèrent la période Barrett citeront le pécher originel, The Piper at the Gates of Dawn, d'autres plus proches de la trippante et décontractée période 70s pencheront pour The Dark Side of the Moon ou Wish You Were Here, d'autres, enfin, sans doute amateurs de concept albums choisiront The Wall. Rares sont ceux qui citent Animals, et pourtant, quel album !
Peut-être parce qu'il est moins facilement appréhendable que ses concurrents au trône, Animals, plus progressif qu'aucun devancier ou successeur, ce qui lui vaut d'ailleurs les généreux suffrages de la communauté prog, a toujours eu des allures de parent pauvre, de celui qu'on aime tout de même mais qu'on oublie trop souvent.
Pourtant, dès sa marquante pochette (la centrale de Battersea survolée par un cochon de baudruche), c'est une démonstration d'un groupe au pic de sa puissance créatrice. Compositionnellement dominé par Roger Waters (ça deviendra l'habitude jusqu'à son départ du groupe en 1985) qui ne cède qu'un co-crédit à son collègue Gilmour (Dogs), mais c'est une première ici, c'est un album sombre et étrange, adaptation libre de l'Animal Farm de George Orwell, précurseur aussi, sans les longueurs et les lourdeurs, d'un nihiliste The Wall, où chaque musiciens trouve sa place participant au tissage de l'inquiétante toile qui nous est proposée.
Certes, les amateurs de Richard Wright regretteront que ces claviers soient ici essentiellement des créateurs d'ambiances, des machines à texturer (en l'occurrence, c'est exactement ce qu'il fallait) le son Pink Floyd n'en est pas pour autant radicalement altéré ne serait-ce que par l'omniprésence de la scintillante guitare de David Gilmour. Certes, l'absence de quelque vraie chanson que ce soit déconcertera ceux qui avaient fait de Money, Time, Welcome to the Machine ou Wish You Were Here leurs moments préférés du catalogue des londoniens mais, des grandes épopées (Dogs, Pigs, Sheep) aux deux miniatures d'ouverture et de fermeture de l'opus (les deux Pigs on the Wing), il y a largement de quoi s'esbaudir devant tant de maîtrise, tant de talent, tant d'imagination, et une si totale cohérence d'ensemble qu'il est aisé de se laisser emporter dans le noir trip de Waters.
Pour toutes ces raisons, mais aussi pour l'impeccable mise en son fomentée par le groupe lui-même, ce 10ème opus de Pink Floyd mérite largement sa place au panthéon des œuvres progressives et conceptuelles qui comptent, un plus qu'un accessit dans le bilan des œuvres d'une formation, à raison, toujours révérée aujourd'hui.

1. Pigs on the Wing 1 1:25
2. Dogs 17:03
3. Pigs (Three Different Ones) 11:25
4. Sheep 10:25
5. Pigs on the Wing 2 1:23

David Gilmour - lead guitar, vocals on "Dogs", bass guitar on "Pigs (Three Different Ones)" and "Sheep", talkbox on "Pigs (Three Different Ones)", acoustic guitar on "Dogs", additional backing vocals 
Nick Mason - drums, percussion, tape effects
Roger Waters - lead vocals, acoustic guitar on "Pigs on the Wing", rhythm guitar on "Pigs (Three Different Ones)" and "Sheep", tape effects, vocoder, bass guitar on "Dogs"
Richard Wright - Hammond organ, electric piano, Minimoog, ARP string synthesizer, piano, clavinet, backing vocals

PINK FLOYD

VeNDReDi
Genesis "Selling England by the Pound" (1973)
ou "Malice in Wonderland"

Relever le gant d'un Foxtrot triomphant et de son Himalaya compositionnel, Supper's Ready, tenait de la gageure. Pas pour ces cinq lascars qui, décidément, boxent dans une toute autre catégorie que tous leurs petits copains progressifs d'alors.
Au début, on se dit que rien n'a vraiment changé. La voix de Gabriel nous accueille, familière, le groupe le rejoint, la mélodie est belle, le texte fait sens, c'est de classique et efficace dont il s'agit. Mais Genesis n'est pas de ceux qui restent figés, se reposent sur leurs lauriers. Et donc tout vole en éclat. C'est toujours Genesis mais un élément est venu s'ajouter à la mixture, désormais Genesis fusionne aussi, pousse encore un peu plus sa musique dans des retranchements inattendus. Parce que Genesis progresse, encore ! Dancing with the Moonlit Knight décolle et nous avec. La batterie de Collins, la guitare d'Hackett, la basse de Rutherford n'ont jamais aussi bien été mises en valeur par une composition toujours aussi mélodique, aussi épique que ses plus belles devancières et, pourtant, instrumentalement encore plus osée avec un ambianceur en chef, Banks évidemment, en trait d'union essentiel. Quel accueil !
Un "petit" single pour suivre, l'efficace I Know What I Like, premier tube du groupe dans son Angleterre natale. Une mélodie accrocheuse, un refrain entêtant, un esthétisme pop qui ne minore aucunement le progressisme du combo... Et c'est une des moins bonnes chansons de l'album, diantre ! Parce qu'il y a ensuite Firth of Fifth avec son intro de piano où on se dit que Bach n'est pas si loin, avec une mélodie de chant imparable avec, surtout !, une longue section solo centrale à couper le souffle où Steve nous offre ce qui reste, plus de quarante ans après, son plus beau solo : mélodique, technique, stratosphérique. Si énorme qu'on a bien besoin de reprendre ses esprits ce que, justement, propose la petite chanson acoustique chantée par Phil, More Fool Me, une réussite encore. Fin de la face A, on en reste pantois.
The Battle of Epping Forest en fait trop ? Probablement. Mais il le fait bien avec un Gabriel plus théâtral que jamais. Alors oui, c'est bavard, chargé jusqu'à la garde des mots du chanteur mais les mélodies sont là. Du bavardage comme ça, on en redemande ! Pas de suite..., il faut se reconcentrer, prendre une pause avec un instrumental tout en harmonie où Hackett, qui en est l'artisan principal, excelle aussi bien à l'acoustique qu'à l'électrique. Mineur After the Ordeal ? Pas si. Et puis The Cinema Show, quatrième baobab de l'opus, une symphonie de prog, un prog en symphonie, parfait tout simplement, n'en disons pas plus, la musique parle d'elle-même. Une petite reprise du Moonlit Knight en conclusion, pour dûment refermer la grande maison, c'est Aisle of Plenty qui le fait et le fait bien. Et c'est déjà fini, snif. Et dire qu'ils ont mis Twilight Alehouse, petit chef d’œuvre planqué en face B d'I Know What I Like, de côté, fallait oser !
La mise en son de John Burns, qui a déjà mixé le très réussi Genesis Live et produira The Lamb Lies Down On Broadway dans la foulée, était déjà très réussie, le remaster définitif enfonce encore le clou. Tout y est plus clair, tous les détails d'un album qui n'en manque pas explosent de tous leurs feux, y sont encore mieux révélés. Splendide.
Selling England by the Pound, un classique inusable. Essentiel, c'est le mot.

1. Dancing with the Moonlit Knight 8:02
2. I Know What I Like (In Your Wardrobe) 4:03
3. Firth of Fifth 9:36
4. More Fool Me 3:10
5. The Battle of Epping Forest 11:43
6. After the Ordeal 4:07
7. The Cinema Show 11:10
8. Aisle of Plenty 1:30

Tony Banks - acoustic & electric pianos, organ, mellotron, synthesizers, twelve-string guitar
Phil Collins - drums, percussion, backing vocals, lead vocals on "More Fool Me"
Peter Gabriel - lead vocals, flute, oboe, percussion, additional backing vocals on "More Fool Me"
Steve Hackett - electric guitar, nylon guitar
Mike Rutherford - twelve-string guitar, bass guitar, electric sitar

GENESIS

SaMeDi
Yes "Fragile" (1971)
ou "Yes they can!"

C'est le Yes du progressisme triomphant, celui d'avant les errances mégalomaniaques d'océans peut-être topographiques mais assurément ampoulés, alourdis de trop de frasques instrumentales pour ne pas un peu ennuyer, celui de Fragile, peut-être le tout meilleur album de Yes, dès 1971.
Concrètement, 4ème album des anglais, premier avec le claviériste Rick Wakeman, c'est tout sauf un détail, Fragile marque le moment où Yes trouve vraiment son style, où, avec le complément d'un nouvel instrumentiste capable de répondre aux ambitions symphoniques de ses petits camarades de jeu, les londoniens réussissent leur plus beau coup qui sera, ce qui n'était que mérité, leur explosion critique et commerciale. Parce qu'avec un virtuose de plus dans ses rangs, un maître du Moog (là où Tony Kaye, son prédécesseur, se refusait au synthétiseur "in"), Anderson, Howe, Squire et Bruford on trouvé la cinquième colonne capable de supporter leur grandiloquent édifice. Howe y trouve un partenaire avec qui il peut dialoguer lors de précieux soli, Anderson un support idéal pour ses vocalises androgynes et emphatiques, Squire et Bruford un véhicule vrombissant pour complémenter leurs excès rythmiques, bref, l'équipe idéale.
Et les chansons qui vont avec, en plus, parce que de Roundabout, un titre qui vient encore hanter les setlist du groupe aujourd'hui, au majestueux Heart of Sunrise, la collection épate. Parce qu'il y faut évidemment plus que ces deux mastodontes pour faire de Fragile la référence qu'il est devenu, on trouve d'autres vrais délices dans la galette dont quelque jolies miniatures (le précieux détournement instrumental du Johannes de Cans and Brahms, le choeur hippie We Have Heaven, l'intermède fusion Five Per Cent for Nothing, un orientalisant The Fish créé par Chris Squire, le Mood for a Day d'Howe à la guitare classique), une petite chanson presque pop qui fait son effet (Long Distance Runaround) et bien sûr un South Side of the Sky pour nous faire décoller vers les étoiles. Un sans faute ! Auquel, remaster oblige, se rajoute un vrai beau bonus avec la belle reprise de l'America de Simon & Garfunkel que le groupe avait en tête depuis longtemps (avant même de se renommer Yes, en fait) qui, imaginative et maîtrisée, rallonge agréablement le festin.
Parfait jusque dans sa production (signée du groupe et d'Eddy Offord, qui travailla aussi avec ELP, Rory Gallagher ou la Baker Gurvitz Army), Fragile est un indéniable pilier du rock progressif des années 70, un album où l'évident virtuosité n'est pas encore onanisme, un must tout simplement !

1. Roundabout 8:30
2. Cans and Brahms 1:38
3. We Have Heaven 1:40
4. South Side of the Sky 8:02
5. Five Per Cent for Nothing 0:35
6. Long Distance Runaround 3:30
7. The Fish (Schindleria Praematurus) 2:39
8. Mood for a Day 3:00
9. Heart of the Sunrise 11:27
Bonus
10. America 10:33
11. Roundabout (Early Rough Mix) 8:35

Jon Anderson - lead and backing vocals
Steve Howe - electric and acoustic guitars, backing vocals
Chris Squire - bass guitars, backing vocals, electric guitar
Rick Wakeman - Hammond organ, grand piano, RMI 368 Electra-Piano and Harpsichord, Mellotron, Minimoog
Bill Bruford - drums, percussion

YES

BoNuS "MiSFiT"
Van der Graaf Generator "World Record" (1976)
ou "La Magie Hammill"

Dans la riche discographie des progueux de Van der Graaf Generator, il y a un album qui a une place tout à fait à part dans mon caeur d'amoureux de la musique. Peut-être parce qu'il fut mon premier, peut-être parce qu'il pousse les limites du son de VdGG encore un peu plus loin, aussi... Voici World Record !
Je sais que beaucoup considèrent ce chapitre final de la trilogie commencée avec Godbluff et Still Life comme un album presque mineur dans la prodigieuse carrière du groupe, avis que je me permets de ne pas partager et je m'en vais immédiatement vous expliquer pourquoi :
1 - 5 compositions, 5 bombes !
Du presque punkoïde When She Comes (écoutez donc la rage du chant d'Hammill !) au quasi-grégorien Wondering (une cathédrale de prog ou du prog de cathédrale) qui clos l'album en passant par le groovy/jazzy sorties de routes incluses et contrôlées A Place to Survive ou l'épique, fleuve et souvent surprenant Meurglys III et ses 21 minutes, c'est un festin de tous les instants. Allez, si vous me poussez, j'avouerais aimer un tout petit peu moins Masks qui reste cependant une excellent composition.
2 - Une démarche unique
Nous ne sommes ni dans les explorations quasi-symphoniques d'un Yes, ni dans la précision clinico-technique d'un King Crimson, et encore moins dans la galaxie proggopopiste Génésienne. Non ! VdGG s'impose comme un esprit libre ce qui valut au groupe - alors que détruire du dinosaure était à la mode - le respect des punks originels et de toutes les jeunes pousses « up and coming » qui suivent depuis et ont croisé la route de ces vaillants hallucinés. Vraiment, VdGG est un cas unique... Un peu au prog ce que Motörhead est au metal, un truc qui dépasse les clivages et les intérêts boutiquiers. Avec, en supplément de luxe, la plume si fine d'Hammill, un des plus grands paroliers de langue anglaise, osons !
3 - Un remaster de qualité
Ni trop loud (vous savez, trop de basse, trop de volume) ni trop nettoyé - on reste dans l'esprit de la production d'origine - World Record se présente dans une version optimisée. Le son est clair mais reste rugueux (c'est un peu la trademark du groupe avec l'orgue épais et le sax écorché), et ne souffre pas d'une digitalisation qui lui aurait fait perdre sa chaleur... Juste ce qui convient à pareille musique. Et deux bonus, du John Peel Show, où VdGG apparait comme la formation transitoire idéale (et même prospective) entre ce rock d'hier et ce son de demain que professe alors le fameux DJ, en pleine explosion punk.
Vous l'aurez compris, si vous ne connaissez pas encore cet album ou si vous l'aviez démis un peu hâtivement, je vous exhorte de lui redonner sa chance, le bonheur est au bout du chemin !

1. When She Comes 8:02
2. A Place to Survive 10:05
3. Masks 7:30
4. Meurglys III (The Songwriter's Guild) 20:50
5. Wondering 6:33
Bonus
6. When She Comes 8:13
7. Masks 7:23

Peter Hammill: chant, guitare, piano
Hugh Banton: orgue, bass pedals, basse, mellotron, piano
Guy Evans: batterie, percussions
David Jackson: saxophone, flute

VAN DER GRAAF GENERATOR

BoNuS "CaMeMBeRT"
Magma "Mekanïk Destruktïw Kommandöh" (1973)
ou "Kobaïa attacks !"

D'une autre planète ! Peut-on faire plus alien que le cabaret prog science-fictionneux de Christian Vander et sa troupe d'allumés cosmiques ?
Ecoutez donc l'intro d'Hortz Fur Dëhn Stekën West, ouverture du légendaire Mekanïk Destruktïw Kommandöh, on y a l'impression d'entrer dans le domaine d'un Evil Emperor d'une galaxie far far away... C'est magistral et décadent à la fois, imposant et bizarroïde aussi... C'est Magma !
Et Magma ce sont surtout les drôles d'obsessions d'un petit gars de Nogent sur Marne, fils adoptif du pianiste de Claude Nougaro (Maurice Vander), batteur/vocaliste/pianiste/compositeur/inventeur de sa chose dont la musique est tellement d'ailleurs qu'elle a sa propre langue (le kobaïen), et son propre univers où l'on croise aussi bien John Coltrane que Stravinski/Orff/Stockhausen (etc. pour le côté contemporain de l'affaire) ou King Crimson... Re-haché à la sauce Zeuhl, bien sûr !, puisque c'est ainsi que Christian Vander étiquette le style, l'improbable fusion de sa formation. Pour les newbies, on décrirait volontiers Magma comme une sorte de jazz progressif polyphonique mutant, un genre où la liberté coltranienne, l'expérimentation harmonique stravinskienne et la sombre majesté crimsonienne se rejoignent.
Et donc Mekanïk Destruktïw Kommandöh, le Sgt Pepper, le Red, le Pet Sounds, le A Love Supreme de la formation francilienne... Leur magnum opus de l'avis général. Parce que l'album est bouillant, trippant, transcendantal presque. Un album moins jazz que ne le furent ses prédécesseurs et où l'addition d'un vocaliste aussi frapadingue que Klaus Blasquiz apporte sa pierre à l'édifice. Et quel édifice ! Un majestueux, ténébreux et fantasque opéra spatial, opéra parce que les voix c'est important chez Magma, qui vous prend à la première seconde, vous entraîne au passage dans les méandres de la création Vanderienne, méandres où les possibles se dissolvent dans le bouillant magma (je devais bien la faire celle là) d'une "créativite" (virus intersidéral bien documenté) débordante, pour vous laisser, exsangue mais heureux, 38 intenses mais trop courtes minutes plus tard... Un immense (space) trip, quoi ! Alors, évidemment, cette musique se gagne, demande de multiples écoutes pour être pleinement et parfaitement appréhendée, elle n'en aura qu'une plus grande endurance, une supérieure résistance aux usures du temps.
Parce qu'une fois gagné, une fois exploré les autres splendeurs du catalogue de Kobaïa-Prime (de Magma donc, avec en priorité Kohntarkosz ou Wurdah Ïtah, parce que le zeul de Christian a fait des petits ailleurs, jusqu'au japon), on revient invariablement à M.D.K., un chef d'œuvre, un vrai !

1. Hortz Fur Dëhn Stekëhn West 9:34
2. Ïma Süri Dondaï 4:28
3. Kobaïa Iss de Hündïn 3:35
4. Da Zeuhl Wortz Mekanïk 7:48
5. Nebëhr Gudahtt 6:00
6. Mekanïk Kommandöh 4:08
7. Kreühn Köhrmahn Iss de Hündïn 3:14

Christian Vander : batterie, chant, orgue, percussions
Jannick Top : basse
Klaus Blasquiz : chant, percussions
Jean-Luc Manderlier : piano, orgue
René Garber : clarinette basse, chant
Claude Olmos : guitare
Stella Vander : chant
Muriel Streisfield : chant
Evelyne Razymovski : chant
Michèle Saulnier : chant
Doris Reinhardt : chant
Teddy Lasry : basse, flûte

MAGMA

BoNuS "CHouCRouTe"
Kraftwerk "Autobahn" (1974)
ou "ElectroKrautMagic"

Il s'en passe des choses sur l'autoroute. Et dans l'Allemagne des années 70 où une bande de zigotos nippés de costards rétrogrades ou de tenues futuristes inventent leur propre monde musical.
Kraftwerk , toujours solidement mené par Ralf Hütter et Florian Schneider, n'en est d'ailleurs pas à son coup d'éclat, trois albums embryonnaires de leur "signature sound" sont déjà parus, mais c'est là, en novembre 1974 que le monde découvre le groupe tel qu'en lui-même établi, une formation qui s'est totalement affranchie des tentations électriques et progressives qui peuplaient encore ses précédentes aeuvres, une formation qui assume son "industrialité" et la transforme en art.
On ne pérorera pas sur l'importance, l'influence capitale qu'auront Autobahn et ses créateurs sur le monde de la musique, le développement d'une musique électronique aujourd'hui omniprésente, l'évidence s'impose à l'écoute de ces 5 plages, de ces constructions sonores à la fois avant-gardistes et abordables, de ces climats synthétiques suffisants pour créer de dépaysants panoramas qui viennent durablement s'imprimer dans le cortex de l'auditeur, aucun doute, on tient là un album essentiel, une pierre fondamentale à l'édifice musical inventé depuis. A commencer, évidemment, par le morceau-titre qui connaitra même les charts dans une version violemment éditée ne rendant pas tout à fait justice aux 23 minutes de sa version intégrale.
Si vous vous intéressez de près ou de loin à la chose électronique, Autobahn est plus qu'une galette importante, un essentiel absolu.

1. Autobahn 22:47
2. Kometenmelodie 1 6:26
3. Kometenmelodie 2 5:48
4. Mitternacht 3:43
5. Morgenspaziergang 4:04

Ralf Hütter - voice, electronics, synthesizer, organ, piano, guitar, electronic drums, artwork reconstruction.
Florian Schneider - voice, vocoder, electronics, synthesizer, flute, electronic drums.
Wolfgang Flür - electronic drums "Kometenmelodie 1-2".
Klaus Röder - electric violin "Mitternacht".

KRAFTWERK