samedi 25 février 2017

C comme...

C de la musique. C un recyclage aussi. C le 3ème de 26 chapitres de la saga alphabétique d'un blog en pilotage automatique... et C pour vous, surtout. Enjoie !


C comme...
CALE, JOHN "The Island Years" (1996)
Une Island avant le Désert...

Outre des enregistrements et des publications rapprochées, signe de temps où tout allait plus vite dans le monde de la rock music, il y a un vrai sentiment d'urgence sur la triplette enregistrée par John Cale pour le label Island et réunie (avec quelques inédits pas inutiles) sur un double cd bien fichu mais, surtout !, gorgé d'excellentes performances par d'excellents musiciens pour un résultat, ô surprise !... Excellent !
Or donc, au lendemain d'un triomphant et précieux Paris 1919, œuvre à laquelle nul ne niera une "panthéonienne" destinée, le gallois change notablement de ton en plus de label revenant à des amours plus brutales et donc à un rock'n'roll brut de décoffrage (mais pas idiot pour autant (intello un jour, intello toujours !) preuve qu'on peut bander ses muscles, tendre sa voix sans tomber dans l'agression machiste d'un Ted Nugent pour ne citer qu'un bon gros bœuf étatsunien) tout en continuant d'assurer l'héritage de ses expérimentations plus pop. Précisons aussi que la crème collectée par Cale dans les différents line-up qui l'accompagnent (en vrac : Manzanera, Eno, Richard Thompson, Chris Spedding, Phil Collins (ne riez/fuyez pas !), etc.) n'est pas exactement un facteur handicapant de l'entreprise... Mais bon, c'est Cale à la barre, c'est lui le chef et ces années Island sont définitivement marquées du sceau de sa divine colère, juste colère, sa glaçante colère... sa Belle colère ! Mais pas que de la colère, Cale est trop malin pour ça.
Si on rentre dans le "gras de la bête" et en isole chacune des ses composants, on dira que Fear, premier paru en octobre 1974, est aussi le plus varié du lot, le moins lugubre aussi, et qu'on y croise moult créatures chatoyantes qui ont sans aucun doute beaucoup influencé ce qu'est Nick Cave aujourd'hui devenu (tous projets confondus). Et c'est un magnifique album avec, en tête de gondole, un Ship of Fools tout simplement bouleversant.
Cinq mois seulement plus tard (ha les cadences infernales des joyeuses seventies !), en mars 1975, parait Slow Dazzle suite logique mais plus "rockocentrée" de Fear qui gagne largement en efficacité ce qu'il cède en diversité. C'est encore un album intense avec un Cale "à vif". On en ressortira l'hommage à Brian Wilson, Mr. Wilson, la reprise hantée d'Elvis Presley, Heartbreak Hotel, et un bien senti Dirty Ass Rock 'N' Roll qui en remontre facilement à son copain Lou.
Last but not least, en novembre 1975, Helen of Troy, l'album d'avant la rupture, est aussi le plus cohérent, celui qui donne le plus l'impression d'écouter un groupe des trois, pas un hasard puisque c'est celui au line-up le plus constant. Et pas le moins réussi donc parce qu'on y trouve des pépites comme la chanson titre ou le croquignolet (I Keep a) Close Watch où Cale croone comme un vieux pro. C'est aussi tout en étant le moins agité, le plus théâtral de ces années Island comme en témoigne le quasi-progressif Engine... Et une réussite de plus !
On ajoutera que les trois fonctionnent très bien les uns à côtés des autres et constituent un tout intéressant sur une période où Cale, visiblement, a quelques visées commerciales qui ne seront, hélas, pas payées en retour malgré la qualité générale des prestations et des compositions. Peut-être cette pop rock certes abordable mais encore un peu trop cérébrale et parfois un peu trop acide laissa froid un public amateur récurrent de prêt-à-mâcher... Peut-être aussi qu'un Cale, qui n'est pas un grand chanteur ni n'a jamais prétendu l'être, à la voix si particulière, n'était pas taillé pour le costard...
Peut-être... Mais le petit drame de la période c'est qu'il faudra quelque années avant que Cale ne repasse par la case studio privant donc le monde, et les fulgurances de son début de catalogue solo, d'une suite immédiate. Il faudra ainsi attendre 1981, et le pas glop (mais pas honteux non plus) Honi Soit, pour retrouver du matériau original de Cale en solitaire... Le niveau s'améliorera heureusement dès l'année et la galette suivante avec le très bon, essentiel même !, et pourtant cruellement indisponible aujourd'hui Music For A New Society, mais c'est une autre histoire...
De l'objet proprement dit, outre quelques bonus tracks bienvenues, on appréciera de le voir doté d'une pochette classe et pas tapageuse, à l'image du ténébreux artiste qu'elle affiche. Il n'y a pas à dire, c'est du bon boulot où on regrettera simplement l'absence de paroles qui auraient joliment complémenté les notes de pochettes de Ben Edmonds (du magazine Rolling Stones US, qui s'y connait visiblement) et les quelques photos d'époque. Mais bon, c'est pour pinailler parce que, vraiment !, The Island Years offre une trop belle opportunité de découvrir John Cale dans une phase moins "commercialement faste" de sa carrière (c'est tout relatif, Cale n'ayant jamais été un gros vendeur) mais pas moins faste artistiquement comme ceux qui tenteront l'expérience s'en rendront joyeusement compte.

CD 1
Fear (1974) & outtake
1. Fear Is a Man's Best Friend 3:52
2. Buffalo Ballet 3:28
3. Barracuda 3:46
4. Emily 4:21
5. Ship of Fools 4:36
6. Gun 8:04
7. The Man Who Couldn't Afford to Orgy 4:33
8. You Know More Than I Know 3:34
9. Momamma Scuba 4:23
10. Sylvia Said 4:07 (single B-side, remixed)
Slow Dazzle (1975) & outtakes
11. All I Want Is You 2:55 (outtake)
12. Bamboo Floor 3:24 (outtake)
13. Mr. Wilson 3:15
14. Taking It All Away 2:56
15. Dirty-Ass Rock 'N' Roll 4:41
16. Darling I Need You 3:35
17. Rollaroll 3:57
CD2
1. Heartbreak Hotel 3:10
2. Ski Patrol 2:05
3. I'm Not the Loving Kind 3:07
4. Guts 3:26
5. The Jeweller 4:11
Helen of Troy (1975) & outtakes
6. My Maria 3:48
7. Helen of Troy 4:18
8. China Sea 2:30
9. Engine 2:45
10. Save Us 2:20
11. Cable Hogue 3:30
12. (I Keep A) Close Watch 3:27
13. Pablo Picasso 3:20
14. Leaving It Up To You 4:33
15. Baby, What You Want Me to Do? 4:48
16. Sudden Death 4:36
17. You & Me 2:50 (outtake)
18. Coral Moon 2:14
19. Mary Lou 2:46 (outtake)

- Line-up sur "Fear" (1974)
John Cale - bass guitar, guitar, keyboards, viola, lead vocals, production, writing, cover
Phil Manzanera - guitar, slide guitar on "Momamma Scuba", executive producer
Fred Smith - drums
Brian Eno - synthesizer, effects, executive producer
Archie Leggatt - bass
Michael Desmarais - drums on "Momamma Scuba"and "Fear"
Richard Thompson - slide guitar on "Momamma Scuba"
Bryn Haworth - slide guitar on "Momamma Scuba"
Brian Turrington - bass on "Momamma Scuba"
Irene Chanter - background vocals
Doreen Chanter - background vocals
Liza Strike - background vocals, girl's choir
Judy Nylon - lead vocals on "The Man Who Couldn't Afford to Orgy"

- Line-up sur "Slow Dazzle" (1975)
John Cale: piano, organ, clavinet, vocals, production, cover, writing
Gerry Conway: drums
Pat Donaldson: bass
Timi Donald: drums
Brian Eno: synthesizer
Phil Manzanera: guitar
Geoff Muldaur: harmony vocals on "Guts" and "Darling I Need You"
Chris Spedding: guitar
Chris Thomas: violin, electric piano

- Line-up sur "Helen of Troy" (1975)
John Cale - keyboards, guitar, vocals
Phil Collins - drums
Pat Donaldson - bass
Timi Donald - drums
Brian Eno - synthesizer
Chris Spedding - guitar
Robert Kirby - string & choir arrangement


C comme...
CAMEL "Mirage" (1974)
Divin Dromadaire (sans filtre !)

A l'ombre des géants de la période (Genesis, Yes, Pink Floyd, ELP, King Crimson, etc.) vit le jour un fougueux animal qui, blatérant à qui mieux-mieux, finit par se faire entendre de ses pairs et des amateurs du genre quand, après un premier album prometteur mais pas encore tout à fait au point, ils produisirent ce qui reste, à ce jour, 4 décennies après les faits, leur magnum opus, je pense évidemment à Camel et à son Mirage d'album, une tuerie !
Parce que, cette fois, assuré de leur art, de leurs techniques individuelles et de leur capacité à tout faire péter en groupe, c'est une formation qui lâche la bête à bosse qui se présente à nous, un Camel qui ose ne plus être le timide gentil petit groupe de son premier album pour venir chatouiller les crampons de Yes, de Genesis et même de King Crimson. Pas de doute, c'est de progressif symphonique dont il s'agit, les claviers monumentaux de Peter Bardens sont là pour nous le rappeler, les guitares stratosphériques et trépidantes d'Andrew Latimer itou, l'inventive section rythmique pas mieux, et les constructions alambiquées, mais retombant toujours sur leurs sabots, aussi.
Dans les faits, en 5 chansons, culminant avec les suites Nimrodel/The Procession/The White Rider (un emprunt textuel à l'univers de JRR Tolkien) et un Lady Fantasy parfait de son riff tranchant à son développement symphonique en passant par ses glissements subtilement jazzés, c'est un Camel triomphant qui fait le métier, une union de 4 musiciens menée de main de maître par ses deux leaders instrumentaux qui, d'ailleurs, trustent largement les crédits d'écriture. Ajoutez à ça la magistrale mise en son d'un Dave Hitchcock déjà connu pour de similaires exploits pour Genesis (Foxtrot) ou Caravan (presque tout de 1968 à 1976), un spécialiste du genre qui sut mettre en valeurs les nombreuses nuances instrumentales, les lumineuses trouvailles mélodiques d'une formation qu'on retrouvera rarement à pareille fête (quoique The Snow Goose, même dans sa version réenregistrée de 2013, et Moonmadness soient également fort recommandables).
Camel, outsider type de ces groupes qui sont arrivés trop tard pour être dans le premier wagon, est un combo dont la longue et riche carrière mérite amplement d'être explorer, et plus encore dans ces années de règne progressif et, en particulier, sur ce Mirage à la pochette aussi immédiatement reconnaissable que sa musique est trop méconnue au-delà du petit cercle des afficionados du rock progressif des années 70, un oubli à réparer.

1. Freefall 5:53
2. Supertwister 3:22
3. Nimrodel/The Procession/The White Rider 9:17
4. Earthrise 6:40
5. Lady Fantasy 12:45
- Encounter
- Smiles for You
- Lady Fantasy
Bonus
6. Supertwister (Live at The Marquee Club 1974) 3:14
7. Mystic Queen (Live at The Marquee Club 1974) 6:09
8. Arubaluba (Live at The Marquee Club 1974) 7:44
9. Lady Fantasy: Encounter/Smiles for You/Lady Fantasy (Original Basing Street Studios Mix - November 1973) 12:59

Andrew Latimer - guitars, flute, vocals on "Nimrodel/The Procession/The White Rider" and "Lady Fantasy"
Peter Bardens - organ, piano, Minimoog, Mellotron, vocals on "Freefall", Fender piano, clavinet
Doug Ferguson - bass
Andy Ward - drums, percussion


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CANNED HEAT AND JOHN LEE HOOKER "Hooker 'n' Heat" (1971)
Noir et Blancs Blues

Des petits blancs avec le vent en poupe qui donne un coup de main à un vieux maître un peu oublié ou l'adoubement d'une formation prometteuse par un pape du genre ? Quoiqu'il en soit, la rencontre mythique de Canned Heat et John Lee Hooker vaut le détour !
Dans les faits, Hooker 'n Heat est une drôle de créature tricéphale où voisinent performances solo du vieil Hooker, quelques duos entre le vieux maître et Alan "Blind Owl" Wilson, et des performances incluant les deux précités ainsi que tout le line-up, le nouveau line-up avec les arrivées du guitariste Henry Vestine (un retour en fait) et du bassiste Antonio de la Barreda suite à une double défection au profit des Bluesbreakers de John Mayall, de Canned Heat.
Souvent intensément laidback, la sélection coule comme un Mississipi paresseux vers son delta, roots en diable, authentique et dépourvue de tout artifice de modernité comme, évidemment, la première partie, 9 titres tout de même, entièrement dévolue à Hooker et à son blues si typique avec des hauts (l'intense The Fellin' Is Gone en pinacle suivi de près par un Burning Hell tout près des étoiles) et d'autres de qualité aussi si un peu routiniers (Send Me a Pillow ou Drifter) qui viennent un marginalement tempérer l'enthousiasme pour la partie solo du vieux maître. Suivent les duos entre Hooker et Blind Owl, trois au total, où la jeune pousse supporte aptement le bluesman de son piano (sur l'entraînant Bottle Up and Go, le talking blues The World Today, un des musts de l'album) ou à la guitare (I Got My Eyes on You, une version ainsi nouvellement titrée, pour des raisons de droit sans doute, du classique de John Lee, Dimples). Last, but certainly not least, viennent les pleines collaborations entre Hooker et le Heat, enfin ! Et c'est un festival de 5 titres où la joie du jeu est non seulement audible mais communicative avec, en sommet himalayen de blues suant et dansant, un Boogie Chillen de plus de 11 minutes... Légendaire !
Alors, certes, la rencontre ne se fait que brièvement, on le regrettera, mais comme le reste est beau, blues et beau, que le tout fait une collection de blues de qualité si supérieure qu'on ne devrait même pas avoir à le recommander. Oui, carrément.

CD 1
1. Messin' with the Hook 3:23
2. The Feelin' Is Gone 4:32
3. Send Me Your Pillow 4:48
4. Sittin' Here Thinkin' 4:07
5. Meet Me in the Bottom 3:34
6. Alimonia Blues 4:31
7. Drifter 4:57
8. You Talk Too Much 3:16
9. Burning Hell 5:28
10. Bottle Up and Go 2:27

CD 2
1. The World Today 7:47
2. I Got My Eyes on You 4:26
3. Whiskey and Wimmen' 4:37
4. Just You and Me 7:42
5. Let's Make It 4:06
6. Peavine 5:07
7. Boogie Chillen No. 2 11:33

John Lee Hooker - vocals, guitar (all)
Alan Wilson - guitar, harmonica, vocals (CD 1 10, CD 2)
Adolfo de la Parra - drums (CD 2 3-7)
Henry Vestine - guitar (CD 2 3-5, 7)
Antonio de la Barreda - bass (CD 2 3-7)


C comme...
CERAMIC DOG "Your Turn" (2013)
Du Rock oui, mais du Rock unique !

C'est Marc Ribot qui le dit, Ceramic Dog est son premier groupe de rock depuis le lycée. Diantre ! Forcément, avec Marc Ribot, qu'on situera comme excellent musicien de studio chez Bashung ou Tom Waits, pour ne citer qu'eux, ou comme crépitant guitariste surf & rock chez John Zorn ou encore comme artiste solo multiple capable de la plus grande ascèse comme du plus monumental bordel punk jazz, un groupe de rock ne peut pas être qu'une simplette entreprise à enchainer du couplet sur du refrain avec quelques bons riffs et un petit solo de temps en temps... Trop facile !
De fait, dans la lignée d'un premier album déjà très réussi (Party Intellectuals), Your Turn est, une fois de plus, une relecture inspirée et libre de l'idiome rock (au sens large) par un musicien qui s'amuse visiblement beaucoup avec ses deux excellents compagnons, le bassiste Shahzad Ismaily (Laurie Anderson, Will Oldham, Jolie Holland, Secret Chiefs 3) et le batteur Ches Smith (Xiu Xiu, Secret Chiefs 3, Trevor Dunn's Trio Convulsant). Relecture libre mais relativement plus traditionnelle, pour ne pas dire traditionaliste, qu'elle ne l'avait été dans l'opus originel qui, plus expérimental que ne l'est Your Turn n'en était, en toute logique, que plus difficile à appréhender. Illustrant cette nouvelle abordabilité, on y trouve ce qu'on pourrait assimiler à du Satriani "garage" sur l'instrumental Your Turn, simple tournerie où Ribot laisse libre court à sa transe guitaristique, un swinging blues fun et désarmant (The Kid Is Back), ou à une fusion rap'n'rock'n'fun à classer entre Fishbone et les Beastie Boys (We Are the Professionals), mais aussi à de jolies folies comme l'arabisant et rigolard Masters of the Internet, les uns aussi irrésistibles que les autres, ceci dit en passant parce que, fondamentalement, tout ceci n'est pas sérieux même si c'est fait sérieusement... du Rock, quoi ! Une musique où Gene Vincent voisine Devo, où les Ramones ont autant voie au chapitre que Faust, où Link Wray (qui n'est jamais bien loin) en remontre à Led Zeppelin !
Dire, cependant, que toutes traces de l'appartenance jazzistique et expérimentale de Ribot ont disparues serait une exagération. Quand sur Ritual Slaughter, il trippe dans des soli free évoquant autant John Cipollina qu'Ornette Coleman ou quand, sur The Prayer, d'intimiste à explosif, il met à l'amende toute une génération de shredders ET de droners qui s'en trouvent, pour le coup, sur le cul, ou quand, encore, il reprend, dissonances et virtuosité combinées, le Take 5 de Paul Desmond, il rappelle clairement d'où il vient, le bagage qu'il transporte, ses credentials... Mais sans intellectualiste aucun, jamais !, parce qu'il y a chez Ceramic Dog et son patron, chevillée au corps, une volonté de se faire plaisir en "lâchant les chevaux" (dans l'inspiration parce que l'album réserve quelques belles plages de repos pas très éloignées de son poteau Waits, bizarrerie incluse) qui fait un bien fou à entendre et prouve qu'on n'est pas blasé à presque 60 ans après plus de 25 ans de carrière... et quelle carrière !
Party Intellectuals avait été, en son temps, une excellente surprise qui, sans totalement nous chavirer, donnait des envies d'encore, laissait un gout de trop peu tant il semblait que la formation avait encore moult pistes à explorer. On n'était alors pas sûr que lendemain il y aurait ni qu'il serait du niveau d'un Your Turn où tout le potentiel entrevu se voit démultiplié, comme le plaisir de l'auditeur ! Ca n'en fait que plus espérer que Ceramic Dog fassent encore des petits parce que, mine de rien, on tient peut-être déjà l'album rock de l'année... tout simplement !

1. Lies My Body Told Me 5:30
2. Your Turn 3:59
3. Masters of the Internet 4:04
4. Ritual Slaughter 4:04
5. Avanti Popolo 0:57
6. Ain't Gonna Let Them Turn Us Round 3:54
7. Bread and Roses 5:17
8. Prayer 5:39
9. Mr. Pants Goes to Hollywood 4:31
10. The Kid is Back! 3:06
11. Take 5 5:25
12. We are the Professionals 3:53
13. Special Snowflake 1:39

Marc Ribot: guitars, vocals, eb horn (3, 5, 11, 12), banjo (3), trumpet (3, 12), melodica (5), bass (5)
Ches Smith: drums, percussion, electronic, vocals, keys (13)
Shahzad Ismally: bass, vocals, moog (5), keys (3, 13), additional guitar (1), samples (3)
&
Eszter Balint: vocals (1, 6, 10), melodica (9), organ (10), violin (13)
Keetus Ciancia: samples (3, 7, 8, 12)
Dan Willis: Oboe, zurna (3)
Arto Lindsay: additional guitar (10)


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COLTRANE, JOHN "Giant Steps" (1959)
Sax de Sept Lieues

Il y a quelques très utiles portes d'entrée pour découvrir John Coltrane. Il y a Ballads, facile et harmonieux, A Love Supreme, épique et transcendantal, Blue Train, où le bop devient déjà hard et, bien sûr, Giant Steps, première galette de Trane pour Atlantic, révolution jazzistique à lui seul, et une merveille d'album !
Dans les faits, à peine sortie des sessions du légendaire Kind of Blue de Miles Davis, Coltrane se lance, avec un trio fort différent de celui qui l'accompagnera bientôt et entrera de plein droit dans la légende, sa légende, dans l'élaboration d'un opus qui fera non seulement date par les compositions l'articulant que par le jeu d'un Trane révolutionnant présentement l'approche de son instrument.
Pour s'en convaincre, en n'oubliant évidemment pas de le contextualiser dans son époque, il suffit d'écouter le morceau titre d'ouverture de l'album où ce diable de John, un peu à la manière de ces instrumentistes folk celtiques qui "tournent" autour de la mélodie en de riches et développés soli, fait couler un impressionnant torrent de notes de son cuivre. On pourrait se dire, bien sûr, que l'exploit est avant tout technique, ce qu'il est, indéniablement, sauf que Trane habite sa création entrainant aisément l'auditeur, qui après quelques écoutes se surprendra peut-être à chanter ses exploits à l'unisson, dans un monde à priori un peu alien mais définitivement attirant. De fait, il n'y aurait que ce Giant Steps historique suivi d'un "récital" de Kenny G (le André Rieu du sax soprano) qu'on ne se sentirait qu'à peine floué, mais il y a plus, bien plus, dans le 5ème opus de John Coltrane, le premier dont il soit l'unique compositeur.
Parce qu'en plus d'être le furieux instrumentiste que l'on sait, le sax ténor est aussi un vrai bon compositeur sachant ménager quelques salvatrices respirations au sein de sa galette, des titres qui ne reposent plus sur sa vitesse d'exécution mais bien sur son talent de mélodiste. Naima, devenu un standard du jazz depuis, sensible ballade en hommage à son épouse d'alors, en est l'admirable démonstration mais pas le seul exemple talonné qu'il est par un Syeeda's Song Flute certes plus emporté mais pas moins inspiré et mélodique. Vous l'aurez compris, le reste de l'album, pas abscond pour autant, Trane hard-boppe encore, le free viendra plus tard, dédié à de swinguantes constructions où son saxophone supersonique est l'attraction principale comme, exemple extrême et unique de l'opus sur un bref et intense Countdown qu'on finit essoufflé alors que c'est John qui enchaine les notes en un galop frénétique.
Bref, pierre fondatrice d'une seconde partie de carrière, post héroïnomanie, hélas raccourcie par la maladie, Giant Steps est non seulement une aeuvre indispensable, c'est aussi, de l'avis de votre humble serviteur, la plus apte introduction à cette authentique légende de la musique du XXème siècle qu'est John Coltrane.

1. Giant Steps 4:43
2. Cousin Mary 5:45
3. Countdown 2:21
4. Spiral 5:56
5. Syeeda's Song Flute 7:00
6. Naima 4:21
7. Mr. P.C. 6:57
Bonus
8. Giant Steps (alternate version 1) 3:41
9. Naima (alternate version 1) 4:27
10. Cousin Mary (alternate take) 5:54
11. Countdown (alternate take) 4:33
12. Syeeda's Song Flute (alternate take) 7:02
13. Giant Steps (alternate version 2) 3:32
14. Naima (alternate version 2) 3:37
15. Giant Steps (alternate take) 5:00

John Coltrane -- tenor saxophone
Tommy Flanagan -- piano
Paul Chambers -- bass
Art Taylor -- drums
&
Wynton Kelly -- piano on "Naima"
Jimmy Cobb -- drums on "Naima"
Cedar Walton -- piano on "Giant Steps" and " Naima" alternate versions
Lex Humphries -- drums on "Giant Steps"' and "Naima" alternate versions


C comme...
CORNU "Cornu" (1998)
Un étrange animal

Y en a qui on le dont de ne pas faire comme les autres, qui ne réunissent pas les instruments habituels, les textes convenus, les mélodies attendues et même les pochettes qui vont bien. C'est le cas de Cornu mené par l'ex-Forguette Mi Note Julie Bonnie (groupe qui révéla aussi l'extraordinaire Claire Diterzi)... Et tout ça en power trio, en plus !
Ayant dit ça, il faut décrire l'objet, pas simple. On pourrait dire que le violon y prend la place habituellement allouée à la guitare et il y a de ça mais pas seulement. On pourrait citer les textes souvent très intimes de Miss Bonnie (depuis devenue infirmière en puériculture et romancière à petit succès), c'est une composante essentielle de l'ensemble. On pourrait aussi évoquer une section rythmique (Alex, le frère de Julie, à la basse, un certain Ben Bernardi à la batterie) qui, un peu comme celle de l'Experience de Jimi Hendrix, a le rôle de suivre les délires de l'évidente tête de proue de la formation, on apprécie leur performance. Et la voix de Julie évidemment, un organe de "fausse chanteuse" allant du mutin au viscéral sans qui rien n'aurait vraiment été pareil. En chansons, puisque si la forme est libre le format choisi est celui habituel de la pop ou de la variété, ça donne une sélection allant du fun et groovy (J'ai besoin de tes mains, J'aime ma vie) à des explorations plus expérimentales mais non moins satisfaisantes (Pour vous retrouver un de ces jours, Je suis fière (mes fesses), Piercing) assimilables à ce grand fourre-tout qu'on appelle indie rock mais, ultimement, unique en son genre.
Pour comprendre exactement de quoi il s'agit, parce que la comparaison avec Louise Attaque est d'une rare fainéantise intellectuelle, le mieux sera de se frotter à cet animal unique, à cette formation qui ne fera hélas pas florès (trop bizarre, trop alien... trop différent !) et se séparera après un second album d'une qualité comparable mais moins surprenant (parce qu'on a alors déjà entendu Cornu). Que ceux qui plongeront soit assuré d'une chose, il n'ont jamais entendu ça avant !

1. Accompagné 3:21
2. Pour Vous Retrouver Un De Ces Jours 3:26
3. Lisa 2:27
4. J'Ai Besoin De Tes Mains 3:00
5. Le Bar 5:08
6. Je Suis Fière (Mes Fesses) 4:00
7. La Magie 2:29
8. Je Lève La Tête 2:56
9. Youpi 2:25
10. J'Aime Ma Vie 3:03
11. Piercing 4:12
12. Les Lutins (Je N'Ai Pas Voulu) 5:12

Julie Bonnie - violon et chant
Alex Bonnie - basse
Ben Bernardi - batterie


C comme...
COTTON MATHER "Kontiki" (1997)
Revivalissimo

Avec le nom d'un pasteur et politicien puritain du XIXème siècle pour le groupe et celui d'une expédition scientifique nautique norvégienne pour l'album, on sait d'emblée que le Kontiki (ou Kon-Tiki) de Cotton Mather ne sera pas un album tout à fait comme les autres.
Pas de doute, pour ceux que le revivalisme 60s intelligent intéresse, cette galette sera (s'ils ne la connaissent pas encore) une trouvaille inespérée. Passé l'étonnant mimétisme vocal entre Robert Harrison et John Lennon demeure une écriture qui n'est pas sans rappeler celle des Fab Four circa Revolver. On aurait pu craindre qu'une ressemblance aussi flagrante s'avère gênante mais l'écriture de ce quatuor d'Austin (Texas) permet d'éviter cet écueil.
Pas qu'elle diffère tant que ça de celle des Beatles, notez bien. En bons ouvriers de la pop, Cotton Mather n'appliquent que des recettes connues et reconnues afin d'arriver à leurs fins. Cependant, il faut que tous les éléments soient réunis afin d'accomplir la périlleuse mission. Pour ce faire, la mise en son est essentielle et comme elle est ici délicieusement vintage - pas en mono (faut pas pousser quand même !) mais avec juste ce qu'il faut de garage pour conserver un grain authentique - une première étape est brillamment accomplie. Notons simplement qu'en bon groupe indie, la tâche de production est assumée collectivement par trois des membres du line-up.
Evidemment, sans les chansons, tout ceci ne serait que de l'enrobage, clinquant, bien foutu mais vide de sens... Or, les compositions d'Harrison étant du tonneau de celles d'un Elliott Smith ou d'un Andy Partridge et voguant, pleines de malice, entre un rock psychédélique estampillé 60's et pop/folk enluminée de chaeurs appropriés comme savait si bien la faire les Beach Boys, CSNY... Et les Beatles, évidemment.
Avec tant d'atouts artistiques dans ses manches (imaginez un album avec des manches, pour voir... ), il est surprenant que Kontiki n'ai pas eu un plus grand retentissement. En France, de vénérables magazines tel que Magic RPM ou les Inrockuptibles (qui sont peut-être pédants mais n'ont pas mauvais goût), ont loué les qualités de ce groupe et de cet album, à raison. Hélas, à défaut d'un clip passant en boucle pour les chaines visant à lobotomiser les futures générations, d'une promotion suffisante (petit label indé oblige), c'est à une excellent réputation underground que se voit confiné ce putain de bon disque. C'est dommage, d'autant plus que le groupe semble avoir plié les gaules (plus de trace discographique depuis 2001). Reste la musique et quand elle est de cette qualité, on ne peut que se réjouir de la découverte et s'attrister que si peu de gens en aient entendu parler.
Alors, que vous soyez nostalgiques des années soixante ou amateur de musique revivaliste ou, tout simplement, amateurs de bonnes chansons, vous trouverez en Cotton Mather et leur Kontiki, une petite perle comme on n'en rencontre pas si souvent... Il serait regrettable de s'en priver.

1. Camp Hill Rail Operator
2. Homefront Cameo
3. Spin My Wheels
4. My Before and After
5. Private Ruth
6. Vegetable Row
7. Aurora Bori Alice
8. Church of Wilson
9. Lily Dreams On
10. Password
11. Animal Show Drinking Song
12. Prophecy for the Golden Age
13. She's Only Cool
14. Autumn's Birds


samedi 18 février 2017

B comme...

Deuxième épisode du florilège alphabétique, une petite sélection maison que, j'espère, vous apprécierez et qui, comme d'hab', part dans tous les sens !
Un petit mot tout de même à toutes celles et tous ceux qui commentent et à qui je ne réponds pas... Ça viendra, sans doute par vagues mais, pour l'instant, le blog, même si désormais actualisé avec plus de régularité, est en "pilotage automatique". Donc, voilà, quoi... 
Et maintenant tous au B !, et ENJOIE !

B comme...
BADFINGER "No Dice" (1970)
Le Power de la Pop

Deux ou troisième album de Badfinger, selon que l'on considère ou pas leur opus sous le noms des Iveys, No Dice est une excellente occasion de se replonger dans les capacités de songwriter hors du commun d'un Pete Ham mort beaucoup trop jeune, 27 ans ! Et de dégonfler un mythe parce que, non, malgré ce qu'on aurait voulu nous faire croire à l'époque, peut-être parce qu'ils étaient le premier groupe sans aucun Beatle dedans à sortir sur le label des Fab Four, Badfinger ne sont pas la descendance des vénérables garçons dans le vent. Il faut dire que quand No Dice sort, le monde se remet tout juste de la nouvelle de la séparation des précités et se jette donc avidement sur la galette y voyant comme un présage de lendemains qui chantent, enfin, surtout en Grande-Bretagne où, franchement, c'est le drame. Résultat ? Un excellent album de pop qui compte, parce que c'est un peu là que la power pop commence, avec des chansons absolument formidables (d'un I Can Take It en pop rock à l'américaine mieux que les ricains, d'une belle ballade menée au piano telle que Midnight Caller, d'une tournerie pop aussi irrésistible que No Matter What, à un fort hippie mais aussi un peu country mais surtout réjouissant Blodwyn... pour ne citez qu'eux), une production absolument parfaite pour le genre (un des ingés son de Sgt. Pepper à la barre, un choix sûr) mais, donc, pas la relève des Beatles. parce que si les mélodies sont belles et le talent indéniable, la fantaisie caractéristiques des arrangements de 4+1 (George Martin !) est ici absente ou, plutôt, recentrée sur un groupe qui veut pouvoir jouer tout ça en scène. Et tant mieux, parce qu'ainsi Badfinger est son propre animal, avec sa propre sensibilité et ses propres maniérismes, et comme la formule est nettement plus accomplie que sur le Magic Christian Music sorti quelques mois plus tôt, et dont on se souvient souvent plus pour sa pochette "à l'index" que ses chansons, c'est forcément une galette fort recommandable. Encore plus dans cette belle réédition où le transfert du vinyle au numérique est parfait et où quelques jolis bonus viennent rallonger le plaisir. Bref, le No Dice de Badfinger, ce n'est peut-être pas les Beatles mais c'est rudement bien !

1. I Can't Take It 2:57
2. I Don't Mind 3:15
3. Love Me Do 3:00
4. Midnight Caller 2:50
5. No Matter What 3:01
6. Without You 4:43
7. Blodwyn 3:26
8. Better Days 4:01
9. It Had to Be 2:29
10. Watford John 3:Midn23
11. Believe Me 3:01
12. We're for the Dark 3:55
Bonus
13. I Can't Take It (Extended Version) 4:14
14. Without You (Mono Studio Demo Version) 3:57
15. Photograph (Friends are Hard to Find) 3:24
16. Believe Me (Alternate Version) 3:04
17. No Matter What (Mono Studio Demo Version) 2:57

Pete Ham – guitar, piano, vocals
Tom Evans – bass, vocals
Joey Molland – guitar, vocals
Mike Gibbins – drums


B comme...
BEARDFISH "Mammoth" (2011)
La Classe "Tradi"

Dire le contraire serait nier l'évidence, le rock progressif est un genre largement ancré dans son propre passé où les contributions de jeunes formations valent surtout par la qualité de leurs compositions et la modernité éventuelle de leurs approches sonores. Sinon ? Le rock progressif est un genre largement ancré dans son passé (bis).
Prenez Beardfish, formation suédoise auteure de sept long-jeux, et plus particulièrement, Mammoth, leur sixième, monument au revivalisme triomphant assumé et, précision utile puisque c'est loin de toujours être le cas, de bon goût. Hé bien ces petits gars ne se compliquent pas l'existence en tentant de tracer leur propre chemin, de réinventer la roue, ils recyclent à tout-va ce qui a fait ses preuves et conquis des hordes de chevelus "septantisants" amateurs de cigarettes qui font rire et d'anticipation artistique (parce que ça fait mieux que science-fiction) en rêvant de la fille trop belle qu'il ne serreront jamais dans leurs bras pales et malingres. Bref, si l'audience n'est pas physiquement réjouissante (d'autant qu'elle est largement mâle, boutonneuse ou dégarnie, le choc des générations !), elle est fidèle et généreuse quand elle rencontre une formation de qualité, comme c'est le cas ici. Et Beardfish auraient d'autant plus tort de se priver qu'ils accomplissent leur tâche avec un allant et un enthousiasme qui fait plaisir à entendre, parce qu'ils aiment ce qu'ils font, ces gars-là, c'est évident, en plus de posséder un savoir-faire présentement jamais démenti.
Pour les pattes de velours, vous repasserez mais pour ceux qui aiment leur prog' référencé, ludique comme un jeu de piste, haletant comme un bon thriller "blade-runnerisé" revu et corrigé à l'éclairage naturel, authentique d'un Barry Lyndon. On y croise donc, pêlemêle de vieilles connaissances : un petit coup de saxo qui rappelle Pink Floyd, une certaine idée de la lourdeur clairement héritée de King Crimson mais aussi de Black Sabbath, des orgues que Jon Lord n'aurait pas renié, des petits détours jazzés à la moustache de Frank Z, une emphase pas étrangère d'Emerson Lake & Palmer, une sympho-capacité qui rappelle fugitivement Procol Harum... Dans des chansons bien troussées et, évidemment, épiques qui on le bon goût de ne jamais se trop se vautrer les excès, l'indulgence instrumentale quasi-masturbatoire de certains de leur contemporains et aînés (Yes et ses Tales from Topographic Oceans, non mais, j'vous jure !). Pour tout dire, dès The Platform, pièce d'ouverture de l'opus et démonstration de heavy prog implacable de classe, jusqu'au délicat, accrocheur et complexe à la fois (la maison aime donner dans la composition à tiroirs) Without Saying Anything qui referme le bal, on est saisi par la capacité de Beardfish à rester totalement passéiste tout en appartenant indéniablement à ce millénaire.
Sans doute pas révolutionnaire mais si parfaitement construit et exécuté que nul amateur de rock progressif de qualité ne peut passer à côté de Beardfish et de son poids lourd d'album, le bien nommé Mammoth.

1. The Platform 8:06
2. And The Stone Said: If I Could Speak 15:07
3. Tightrope 4:33
4. Green Waves 8:53
5. Outside / Inside 1:43
6. Akakabotu 5:41
7. Without Saying Anything 8:10

Rikard Sjöblom - vocals, keyboards
David Zackrisson - guitars
Robert Hansen - bass
Magnus Östgren - drums
&
Johan Holm - soprano & alto saxophones


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BLUE BUDDHA "Blue Buddha" (2015)
Jazz Trip !

D'abord, on est interpellé par la formation, le trompettiste du Masada de Zorn, disciple élégant et inspiré de l'immortel Miles et de Don Cherry, Dave Douglas, le vétérant bassiste new yorkais amoureux de dub par dessus tout mais fondamentalement multicarte, Bill Laswell, le puissant et créatif Tyshawn Sorey à la batterie et, qu'on a croisé chez God Is My Copilot ou Rashied Ali, Louie Belogenis au sax ténor, on se demande bien à quelle sauce on va être mangé... Et puis on glisse la galette et là, c'est un chaos brillamment orchestré qui nous accueille à commencer par un Purification, gros morceau d'introduction avec ses douze minutes, en lent et long crescendo jusqu'à une explosion où, double soli croisés, Douglas et Belogenis se croisent, s'opposent, se complètent. Et puis on barre en free avec un duo Sorey/Belogenis qui n'aurait pas déplu au regretté Ornette et doit ravir le patron de leur label (John Zorn) lui-même client de telles exactions. Et voilà les deux pôles de la galettes installés, des exploration quasi-mystiques où la basse aquatique de Laswell fait merveilles aux saillies bruitives et jouissives (Ha! Wrathful Compassion, ça pète !) et parfois aux deux à la fois (Diamond Vehicle). Album de jazz à la marge fomenté par quatre excellents instrumentistes, Blue Buddha ne sera pas à mettre entre toutes les oreilles mais, pour les amateurs de jazz aventureux, quel trip !

1. Purification 12:14
2. Double Dorje 5:29
3. Renunciation 8:11
4. Truth of Cessation 9:40
5. Wrathful Compassion 3:54
6. Diamond Vehicle 6:54
7. Lineage 6:53

Dave Douglas: Trumpet
Bill Laswell: Bass
Louie Belogenis: Tenor Saxophone
Tyshawn Sorey: Drums


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BLUR "The Great Escape" (1995)
L'échappée belle

Vainqueur de la guerre des singles qui l'opposa à Oasis, leader incontesté d'une explosion britpop qui n'a pas fini de faire des remous, le Blur de The Great Escape, le quatrième album des londoniens, est une continuation absolument logique de celui qui, sur Parklife paru un an et demi plus tôt, les imposa comme une valeur sûre d'un art pas si simple à produire que ça, soit un opus glorieusement pop, d'une indéniable anglicité et lardé de chansons réussies.
Une fois encore produit par le fidèle Stephen Street, qui produira tous les albums de Blur à l'exception de 13 et Think Tank, deux album où la proverbiale légèreté instrumentale du quartet avait une très nette tendance à disparaître, The Great Escape ne réinvente donc pas le groupe, ce qui fut avec Moddern Life is Rubbish et l'éponyme successeur du présent, se contentant de remettre sur l'ouvrage la formule qui a si bien fonctionné le coup d'avant, d'en explorer les possibles aussi puisqu'il n'est aucunement question d'immobilisme, pour un résultat bluffant de classe.
Outre quatre singles particulièrement réussi (Country House, The Universal, Stereotypes et Charmless Man), c'est à une collection aussi diversifiée que réussie à laquelle nous avons affaire. Vous voulez du qui rocke comme il faut ? Parce que Blur sait aussi défourailler quelques guitares bien tranchantes comme vous aurez Charmless Man, Mr. Robinson's Quango et It Could Be You et Globe Alone, tous dans l'esprit pop du groupe mais, donc, dotés de six-cordes et d'un allant inhabituellement costauds pour le groupe à ce stade de sa carrière. Vous voulez de la pop plus que parfaite ? Vous aurez l'embarras du choix avec le sautillant Stereotypes, le n°1 qui a humilié Oasis (l'irrésistible Country House), un Charmless Man mutin et énergique, ou l'électro pop japonisante de Yuko and Hiro. Vous voulez de la belle ballade à faire mouiller les yeux ? Ne cherchez pas plus loin qu'un gracieux Best Days ou que la power ballad Burt-Bacharachisée The Universal. Un peu de bizarrerie en cerise sur le gâteau ? Elle est souvent à tous les étages, la contribution de Graham Coxon et de ses guitares différentes, mais encore plus sur un Fade Away en parade de l'impossible, un Ernold Sane tout en cordes baroques "spoken-wordisé" par le député du labour et futur maire de Londres Ken Livingstone, un Entertain Me à l'impeccable partie de basses volubile d'Alex James. Et tout ça danse (si tu ne bouges pas ton popotin sur Entertain Me ou Mr. Robinson's Quango, c'est que tu es mort !), rit, rêve, et nous avec ! En vérité, on reste baba devant la polyvalence de quatre petits gars (les deux multi-instrumentistes du groupe plus précisément, Damon Albarn et Graham Coxon) qui ne payent pas de mine mais on des trésors d'idées à dévoiler au monde, et ils ne s'en privent pas pour l'évident bénéfice de l'auditeur comblé qui a en plus pu jouer au jeu de piste en repérant les différentes excellentes influences du groupe (de XTC aux tutélaires Kinks en passant Scott Walker et même Ennio Morricone, pour ne citer qu'eux).
Parklife était déjà un triomphe, commercial aussi mais pas seulement, de l'humble avis de votre serviteur, un avis que tous ne partagent pas, The Great Escape est encore meilleur, une galette de pop multiple et maline dont, 20 ans après sa sortie, on ne se lasse toujours pas. Pour tout dire, l'opus n'est pas recommandé, il est ordonné, oui, rien que ça !

1. Stereotypes 3:10
2. Country House 3:57
3. Best Days 4:49
4. Charmless Man 3:34
5. Fade Away 4:19
6. Top Man 4:00
7. The Universal 3:58
8. Mr. Robinson's Quango 4:02
9. He Thought of Cars 4:15
10. It Could Be You 3:14
11. Ernold Same 2:07
12. Globe Alone 2:23
13. Dan Abnormal 3:24
14. Entertain Me 4:19
15. Yuko and Hiro 5:24
16. To the End (La Comédie) 6:40

Damon Albarn – vocals, piano, keyboards, organ, synthesizer, handclaps
Graham Coxon – electric and acoustic guitar, banjo, saxophone, backing vocals, handclaps
Alex James – bass guitar
Dave Rowntree – drums, percussion
&
Simon Clarke – saxophone
Tim Sanders – saxophone
J. Neil Sidwell – trombone
Roddy Lorimer – trumpet
Louise Fuller – violin
Richard Koster – violin
John Metcalfe – viola
Ivan McCermoy – cello
Ken Livingstone – narration on "Ernold Same"
Theresa Davis – backing vocals on "The Universal"
Angela Murrell – backing vocals on "The Universal"
Cathy Gillat – backing vocals on "Yuko and Hiro"
Françoise Hardy - vocals on "To the End (La Comédie)"


B comme...
BON JOVI "New Jersey" (1988)
quand Jon se rêve en Bruce (ou presque)

Deux ans après un triomphe commercial mérité, parce que Slippery When Wet est une sacrée galette de hard rock commercial et efficace, Jon Bon Jovi et les siens remettent le couvert pour une œuvre, cette fois, plus ambitieuse, New Jersey.
Impossible d'ignorer, du titre de l'album à des paroles souvent pseudo-sociales, comme sur Living on a Prayer le coup d'avant, que cette progression tient beaucoup de l'obsession du vocaliste/leader pour Bruce Springsteen. Ce n'est pas à dire que New Jersey est une copie-carbone de Born to Run, certainement pas. Premièrement parce que la faconde mélodique de Jon Bon Jovi et de son compagnon de composition, le guitariste Ritchie Sambora, est fondamentalement différente, là où l'un tire son inspiration d'une tradition étatsunienne forte (de Bob Dylan à Peter Seeger et Woody Guthrie en passant par Roy Orbison), l'autre, ou plutôt les autres puisque c'est d'un duo de songwriters dont il s'agit, puisent dans la veine la plus mélodique du hard rock et du stadium-rock des années 70 (et de Bruce, évidemment, mais plus en épice qu'en fondement). Deuxièmement parce que là où l'aîné se moque de savoir si sa musique aura un succès grand-public, les cadets semblent particulièrement obsédés par une starisation populaire. Troisièmement, et enfin, parce que les paroles de Jon, pour attachées au réel qu'elles semblent vouloir être n'auront jamais la portée col-bleu d'un gars authentiquement working-class à la plume trempée dans les aléas de monsieur et madame tout-le-monde en plus d'avoir ce supplément de verve poétique si décisif. On ne sent pas moins, dans ce New Jersey au titre choisi tout sauf au hasard plus que dans toute autre extrait de leur catalogue, une vraie volonté de se rapprocher de ce gars avec qui ils partagent un peu plus que leur état d'origine.
En chansons, ça donne un paquet de titres rock-hard gonflés de refrains pop et de riffs efficaces qui fonctionnent comme jamais. On pense évidemment aux singles de la galette (Lay Your Hands on Me, Bad Medecine, Born to Be My Baby, Living in Sin et I'll Be There for You, tous des tubes classés au top 10 des charts de leur mère patrie) mais aussi, surtout même, à quelques titres plus roots au retentissement commercial moindre mais à l'endurance d'appréciation plus pérenne (Blood on Blood ou Wild Is the Wind, du Springsteen qui refuse de dire son nom, Homebound Train qui doit beaucoup à Aerosmith, 99 in the Shade, un rocker typiquement américain, et Love for Sale, un petit blues acoustique, tous deux directement hérités des exactions de frangins Van Halen et de leur Diamond Dave de chanteur).
Evidemment, il est de bon ton de moquer ces permanentés, spandexés, MTVisés-là, c'est un peu facile puisque nous avons droit, 56 minutes durant, à une impeccable collection de chansons divertissantes et, souvent, pas si idiotes qu'il y paraît. Certes, pour la vraie profondeur il faudra repasser mais là n'est pas le propos d'une feelgood music réussie, idéalement produite par l'excellent et regretté Bruce Fairbairn et, donc, d'un album qu'on recommande d'autant qu'il a plutôt très bien vieilli ce qui est loin d'être le cas de toute l'œuvre des natifs de Sayreville.

1. Lay Your Hands on Me 6:01
2. Bad Medicine 5:16
3. Born to Be My Baby 4:40
4. Living in Sin 4:39
5. Blood on Blood 6:16
6. Homebound Train 5:10
7. Wild Is the Wind 5:08
8. Ride Cowboy Ride 1:25
9. Stick to Your Guns 4:45
10. I'll Be There for You 5:46
11. 99 in the Shade 4:29
12. Love for Sale 3:58

Jon Bon Jovi - lead vocals, rhythm guitar, acoustic guitar
Richie Sambora - lead guitar, background vocals
Tico Torres - drums, percussion, background vocals (tracks 3, 12)
David Bryan - keyboards, background vocals
Alec John Such - bass, background vocals
&
Bruce Fairbairn - production, additional percussion, horn
Peter Berring - arrangement, additional vocals, vocal arrangement
Scott Fairbairn - cello
Audrey Nordwell - cello


B comme...
BOURVIL "Bourvil" (1997)
...Si vous aimez Bourvil

Il en manque !, diront les mécontents. Et c'est vrai, à Byciclette, Salade de Fruits, le Clair de Lune à Maubeuge, tous les grands succès n'y sont pas.
Mais, justement, il est aussi là l'intérêt de cette collection, d'offrir des chansons souvent oubliées d'un interprète talentueux. Et puis il y a La Tendresse, la chanson la plus optimistement poignante du répertoire d'André Raimbourg, plus conteur que comique troupier en l'occurrence. Et quelques "tubes" tout de même : les crayons, la tactique du gendarme, les rois fainéants, le bal perdu, la ballade irlandaise, Joinville le pont... entourés, donc, des moins connu mais également savoureux la mandoline, le pêcheur, mon bon vieux phono, nous vieillirons ensemble... Bref, quand même de quoi ne pas tout à fait perdre ses marques mais un joli lot de découvertes. Pour information, les enregistrements couvrent toute la carrière de Bourvil (de 1949 aux années soixante), il n'est donc pas question de droits mais bien de choix...
Qu'on peut contester parce que, c'est indéniable, il en manque. Mais comme il y en a aussi qu'on ne trouve pas ailleurs et qu'à creuser, on trouvera bien une compilation complémentaire, on ne se plaindra pas et, au contraire, conseillera cette belle double galette qui permet de redécouvrir un chanteur tendre et drôle, exactement ce qu'était Bourvil dans la vraie vie, tiens !

CD 1
1. Adèle 3:06
2. C'est la Vie de Bohème 2:50
3. C'est une Gamine Charmante 2:25
4. En Revenant d'la Revue 3:01
5. Allumett' Polka 2:51
6. D'Où Viens-Tu ? 3:08
7. La Berceuse à Frédéric 3:06
8. Frédo le Porteur 3:16
9. Du Côté de l'Alsace 2:59
10. La Tendresse 3:08
11. Le Hoquet 3:14
12. Le Pêcheur 2:59
13. La Dondon Dodue 2:23
14. La Mandoline 3:24
15. Je Suis Content, Ca Marche 2:23
16. C'est pas le Pérou 3:12
17. Elle Faisait du Strip-Tease 3:51
18. Le Voleur de Pervenches 3:06

CD 2
1. Les Crayons 3:36
2. Les Papous 3:25
3. La Tactique du Gendarme 2:59
4. Les Rois Fainéants 3:07
5. C'Etait Bien (Le Petit Bal Perdu) 3:18
6. Mon Bon Vieux Phono 2:47
7. Mon Frère d'Angleterre 3:43
8. Ballade Irlandaise (Un Oranger) 2:56
9. Prends Mon Bouquet 3:18
10. A Joinville le Pont 2:42
11. Les Abeilles 3:23
12. Mon Village au Clair de Lune 3:08
13. Nous Vieillirons Ensemble 2:55
14. Nénesse d'Epinal 2:53
15. T'Epier 2:36
16. Tatane 3:09
17. Vive la Mariée 3:21
18. Les Haricots 3:04


B comme...
BUGGLES "The Age of Plastic" (1980)
They've got the Horn!

Prenez une dose de Kraftwerk pour l'influence électronique, une dose de Beatles pour la qualité de mélodie d'origine pop, un peu de l'énergie du post-punk et de la new wave naissante, un solide sens de l'humour et une obsession totalement nerdy/geeky pour la science-fiction et vous obtenez... The Age of Plastic, le premier album des Buggles de Trevor Horn et Geoff Downes.
Mais, fondamentalement, The Age of Plastic c'est surtout une collection d'excellentes chansons à l'esthétique et à la mise en son absolument cohérentes, un collection menée tambours battants par un énorme tube que vous connaissez forcément tous (Radio Killed the Video Star) qui fut, d'ailleurs, le tout premier clip diffusé sur une MTV naissante. A l'écoute de l'ensemble de l'album une évidence se fait jour : le tube n'est, cette fois, pas l'arbre d'inspiration qui cache la forêt du tout-venant puisque dès le sautillant et fun tour de force proto-synthpop Living in the Plastic Age, on entend que le groupe a des mélodies et des idées pour les mettre en forme à foison, impression confirmée les inflexions rétro-futuristes de Kid Dynamo, la relecture du Kraftwerk sur I Love You (Miss Robot), le dynamisme d'un Clean Clean qu'on situera quelque part entre la power-pop des Cars de Ric Ocasek et les œuvres de Giorgio Moroder, etc. puisque, sur cet opus extrêmement bien produit (par Horn et Downes) il n'y a rien à jeter et certainement pas les deux inédits de la version remasterisée (Island et Technopop) venant joliment prolonger l'expérience.
On sait maintenant qu'après un second album presque aussi réussi, Adventures in Modern Technology, le duo pliera les gaules, que, dans l'intervalle, ils surprendront leur monde en jouant les remplaçants de luxe pour Jon Anderson et Rick Wakeman dans un Yes à la relance (pour un excellent Drama, précision utile puisque l'album ne rencontrera pas le succès qu'il méritait), avant d'aller chacun de leur côté, Horn en producteur star (de Yes à Paul McCartney en passant par Frankie Goes to Hollywood ou t.A.T.u), Downes en claviériste "progopoppiste" chez Asia, reste cet opus originel, une réussite de tous les instants, donc, qu'on ne peut que chaudement recommander, même à ceux qui se croient allergique à pareille entreprise parce qu'il en connaissent l'emblématique single.

1. Living in the Plastic Age 5:13
2. Video Killed the Radio Star 4:13
3. Kid Dynamo 3:29
4. I Love You (Miss Robot) 4:58
5. Clean, Clean 3:53
6. Elstree 4:29
7. Astroboy (And the Proles on Parade) 4:41
8. Johnny on the Monorail 5:28
Bonus
9. Island 3:33
10. Technopop 3:50
11. Johnny on the Monorail (A very different version) 3:49

Geoff Downes – keyboards, drums, percussion
Trevor Horn – vocals, bass guitar, guitar
&
Bruce Woolley – guitar
Paul Robinson – drums
Richard James Burgess – drums
Debi Doss – background vocals, on "Video Killed the Radio Star"
Linda Jardim – background vocals on "Video Killed the Radio Star"
Tina Charles – background vocals
Dave Birch – guitars on "The Plastic Age" and "Video Killed the Radio Star"


samedi 11 février 2017

A comme...

A comme ? Amour ? Mais on aurait deux jours d'avance... Alors A comme Artistes, une belle brochette tous avec un sobriquet débutant comme l'alphabet. Bête comme chou, n'est-il pas ? Et ce n'est que le début d'une série de recyclages alphabétiques que je vous proposerai avant un (encore incertain) retour en bonne et due forme avec une nouvelle formule. Mais, avant ça, ce sera A comme... Et enjoie !

A comme...
AC/DC "Dirty Deeds Done Dirt Cheap" (1976)
Assez d'essais !

Premier album quasi-identique (la tracklist est légèrement différente tout comme la pochette, conceptualisée par Storm Thorgerson dans la version pour tous) à l'international et dans leur Australie d'origine, Dirty Deeds Done Dirt Cheap est une étape de plus dans la conquête du monde par le plus improbable des combos d'affreux sales et méchants rockers, AC/DC avec son lead-guitariste en habit d'écolier, ridicule ! Mais la musique, man, la musique, ce machin qui vous pète à la tronche, vous fait irrésistiblement remuer du chef et battre de la semelle, ce son gras de blues bien pêchu, cette voix aussi, rauque, qui roule dans vos cages à miel pour le décrassage de rigueur... Fantastique ! Or, donc, après High Voltage et TNT en 1975, quelques mois seulement après la sortie de leur premier album international compilant leur deux galettes australiennes initiales, voici l'album qui enfonce le clou, prouve que ce quintet a des arguments à faire valoir et que sa formule, à priori limitée, peut produire moult trésors. Cela en fait-il le meilleur album du groupe ? Sans doute pas (voire l'inénarrable Highway to Hell pour ça) mais avec des classiques tels que le menaçant Dirty Deeds Done Dirt Cheap, le rigolard mais toutefois sévèrement burné Big Balls, le boogie nerveux mené tambours battants de Rocker, le déjà typique et définitivement efficace Problem Child, ou, pour ne plus citer que celui-ci et éviter l'énumération systématique, le gros blues de la mort qui tue Ride On sur lequel Bon étale tout l'immense feeling de sa voix rauque and roll... Bref, neuf titres pour un évident triomphe démontrant alors qu'AC/DC n'était pas qu'un épiphénomène mais bien une valeur avec qui il allait falloir compter, et tout ça fait un album classique mais vous le saviez sûrement déjà.

1. Dirty Deeds Done Dirt Cheap 3:52
2. Love at First Feel 3:12
3. Big Balls 2:38
4. Rocker 2:50
5. Problem Child 5:46
6. There's Gonna Be Some Rockin' 3:18
7. Ain't No Fun (Waiting Round to Be a Millionaire) 6:54
8. Ride On 5:53
9. Squealer 5:27

Bon Scott - lead vocals
Angus Young - lead guitar
Malcolm Young - rhythm guitar, backing vocals
Mark Evans - bass guitar
Phil Rudd - drums


A comme...
ALICE COOPER "Welcome to My Nightmare" (1975)
Cooper de Têtes

Le cauchemar originel de Vincent Furnier quand, soldant pour de bon son groupe il en assume l'identité patronymique, est un concept album qui marqua tellement la carrière d'Alice Cooper qu'il connut rien moins que trois suites plus ou moins officielles, plus ou moins récentes... La raison de tout ce tintouin ? Un foutu bon concept de shock rock, évidemment !
Parce qu'il a sa petite idée, Alice, celle d'un show total, d'une rencontre entre l'hémoglobine, l'électricité et le sexe, un machin à faire s'étrangler ses plus vertueux compatriotes même si, musicalement, la messe est nettement plus tempérée qu'elle ne le fut avec son groupe. Parce qu'ici, sous, toujours, la bienveillante et inspirée supervision de Bob Ezrin, qui ayant travaillé sur les quatre premiers albums classiques du groupe Alice Cooper (ne manquant que Muscle of Love pour des raisons de divergences artistiques avec les musiciens de la formation, le guitariste Michael Bruce aux premiers d'iceux) fait figure de recours logique quand le vocaliste reprend seul le flambeau.
Musicalement, Welcome to My Nightmare n'est pas exactement une rupture avec le son classique d'Alice Cooper, ce hard/glam rock théâtral et braillard sachant mixer hooks pop irrésistibles à une énergie provocatrice salutaire, plus une évolution avec, concept oblige, un supplément de pompe qui, en vérité, va bien au teint du référentiel shock-rocker. Et donc, avec un producteur à l'importance centrale et un groupe largement emprunté à Lou Reed, Vincent "Alice Cooper" Furnier crée-t-il sa collection la plus variée et réussie prouvant également qu'il a une vie, un potentiel, sans les musiciens qui l'accompagnaient depuis toujours. Voyage dans les cauchemars du petit Steven (une réinvention de Vincent quand il était encore le fils d'un pasteur de Detroit, Michigan relocalisé dans le désert arizonien ? y a de ça), Welcome to My Nightmare est aussi, surtout !, une sacrément bien troussée collection de chansons où Alice va parfois très loin dans la théâtralisation de son art (l'enchaînement Devil's Flood/The Black Widow avec l'excellente participation du légendaire Vincent Price en récitant cinématique) mais, plus important encore, sait élargir la palette sonore vers quelques bienvenues fantaisies (le cabaret rock de Some Folks, la power-ballad épique et pas idiote Only Women Bleed, la comptine flippante Years Ago, un presque progressif Steven hommageant l'encore tout récent Tubular Bells de Mike Oldfield, et le transitionnel et habité The Awakening, tout en ambiance claustrophobe) tout en conservant sa crédibilité de scary-clown électrique (Welcome to My Nightmare, Department of Youth, Cold Ethyl et Escape).
Tout ça nous fait un album aujourd'hui justement entré dans la légende, la plus magistrale réussite de l'Alice Cooper solo aussi et une œuvre donc forcément recommandée à toutes celles et tous ceux qui ne s'y seraient pas encore penché, il n'est pas trop tard mais largement temps de se rattraper parce que Welcome to My Nightmare, c'est quelque chose !

1. Welcome to My Nightmare 5:19
2. Devil's Food 3:38
3. The Black Widow 3:37
4. Some Folks 4:19
5. Only Women Bleed 5:49
6. Department of Youth 3:18
7. Cold Ethyl 2:51
8. Years Ago 2:51
9. Steven 5:52
10. The Awakening 2:25
11. Escape 3:20

Alice Cooper - vocals
Bob Ezrin - synthesizer, arranger, keyboards, vocals, producer
Jozef Chirowski - keyboards, clavinet, vocals, Fender Rhodes
Dick Wagner - electric and acoustic guitar, vocals
Steve Hunter - electric and acoustic guitar
Prakash John - bass
Tony Levin - bass
Pentti "Whitey" Glan - drums
Johnny "Bee" Badanjek - drums
Gerry Lyons - vocals
Vincent Price - the curator


A comme...
ANDERSON, RON "Secret Curve" (2011)
Prog It!

Si on avait pas peur d'en faire fuir certains, qui auraient bien tort ceci dit en passant, on classifierait volontiers le Secret Curve de Ron Anderson dans la catégorie Rock Progressif, versant RiO (Rock in Opposition) soit de ces formations qui aimaient se jouer des formats et de l'harmonie, briser les conventions pour réinventer le rock.
A la croisée d'un jazz devant beaucoup à la libération des années 60 et de la version déconstruite/reconstruite du rock progressif des années 70 (Henry Cow, Zappa, King Crimson), mené de main de maître par une paire rythmique d'une technique, d'une précision et d'une inspiration digne du meilleur Ruins (avec qui Ron a d'ailleurs collaboré sur l'album Big Shoes), c'est une référence. Une paire qui est absolument la base de l'édifice PAK (le nom du groupe) sur lequel s'ajoutent trompette, piano, cor, saxophone, clarinette, violon (etc.)... et pas de guitare ! Il faut dire que l'ensemble est riche et que l'overdose de biens, la foutraque propension du groupe d'enchaîner les séquences abruptement mais expertement, nécessitera plusieurs écoutes pour être parfaitement compris, capté, et apprécié.
Parce que tout ceci, chaque intervention de chaque excellent musicien, n'a semble t-il laissé que peu de place à l'improvisation. Les écoutes successives révèlent d'ailleurs ce que la première ne faisait qu'effleurer, c'est de vrais morceaux de musique, avec chacun sa logique harmonique, sa progression dramatique, ses vignettes mélodiques récurrentes, dont il s'agit, pas juste de cette folie tressautante qui saisit et captive l'innocente, mais rapidement consentante, victime qui ne s'attendait pas à ça.
Et pourquoi elle consent, la victime, me demanderez-vous ? Parce que Secret Curve en plus d'être ébouriffant de bout en bout, est une galette diablement fun, un album qui donne envie d'entamer une improbable mais jouissive danse de Saint-Guy. Une vraie petite perle de folie hautement, magistralement contrôlée, si richement truffée d'idées qu'on sait, on le sent, qu'on n'est pas prêt de s'en lasser.

1. Overture 1:08
2. Let Me Tell You Something 6:29
3. Caffeine Static Rendezvous 3:24
4. No Future 2:30
5. Caro-Kann 9:40
6. Secret Curve 6:12
7. Mama´s Little Anarchist 1:05
8. E4 Or D4? 3:00
9. Trebuchet 4:58
10. Blinding Light 2:33
11. Kempelen´s Automaton 5:17
Bonus Vidéo - Live at The Stone 2015

Ron Anderson - Bass Guitar
Keith Abrams - Drums, Percussion
Tim Byrnes - Trumpet, French Horn, Keyboards
Anthony Coleman - Piano
Jérôme Noetinger - Electronics, Tape Manipulation
Eve Risser - Piano, Prepared Piano
Tom Swafford - Violin
Stefan Zeniuk - Clarinet, Bass Clarinet, Tenor Saxophone, Bass Saxophone, English Horn


A comme...
ANTIBALAS "Who Is This America?" (2004)
AfroUSbeat

Le grand Fela aurait été fier, et sans doute un peu surpris, de voir sa fusion africano-jazzo-funkienne (le bien nommé afrobeat) se répandre ainsi sur 5 continents tant elle paraissait n'appartenir qu'aux bidonvilles de Lagos...
Les cocos du jour, en l'occurrence, sont américains d'adoption mais multi-nationaux d'origine. Antibalas, puisque c'est d'eux dont il s'agit, se sont fait une (bonne) habitude de s'inspirer des plus funko-jazzeux moments de l'aeuvre du sieur Kuti. "Who Is This America?" - leur troisième album - est gorgé de cuivres, de tressautantes rythmiques, de tribalismes vocaux et de la nécéssaire dose d'humour.
Le résultat est un son massif, vibrant et diablement addictif. C'est également, à mon humble avis, la galette dans laquelle ils excellent... 75 minutes (!) durant. Impressionnant.

1. Who Is This America Dem Speak Of Today? 11:59
2. Pay Back Africa 8:23
3. Indictment 5:38
4. Big Man 7:55
5. Obanla'e 1:39
6. Elephant 14:03
7. Sister 19:14

Ernesto Abreu: congas, chant
Duke Amayo: percussions, chant
Mayra Vega, Babatunde Adebimpe, Veronica Cuevas, U Poppa Dobi, Ogugua Iwelu, Olia Toporovsky: choeurs
Victor Axelrod: clavinet, orgue, piano
Stuart Bogie: saxophone ténor
Martin Perna : saxophone bariton
Jordan McLean: trompette
Aaron Johnson : trombone
Tom Brenneck, Luke O'Malley, Gabriel Roth: guitare
Nick Movshon, Del Stribling: basse
Alex Kadvan : violoncelle
Entcho Todorov: violon
Geoff Mann: shekere
Fernando Velez: congas
Dylan Fusillo: percussions
Philip Ballman: batterie


A comme...
APHRODITE'S CHILD "666" (1972)
Gloire à Satan !

C'est l'ultime opus du plus connu des groupes de psyché/progressive rock grec (le seul ?), celui avant que Demis ne parte faire sa star de la variété en France et que Vangelis n'aille "new-agiser" en solo ou avec Jon de Yes, et que les deux autres ne disparaissent dans les limbes, c'est 666, imposant et ambitieux double album, aussi énorme que Roussos deviendra. Présentement, d'un début (The System/Babylon) semblant inspiré des "évènements" de mai 1968 en France (où le groupe résidait alors, exilé qu'il était du régime dictatorial des généraux de leur Mère Patrie), on sent que l'Aphrodite's Child pop et psychédélique, connu surtout pour sa ballade lacrymale Rain and Tears, est entré dans de toutes nouvelles dispositions où un progressisme échevelé et iconoclaste est la nouvelle norme. A vrai dire, outre quelques virgules plus abordables vocalisées par Demis, on peine à reconnaître le groupe des deux premiers albums, et c'est une bonne nouvelle ! Une bonne nouvelle parce que cette nouvelle liberté va bien au teint de nos barbus, que les performances instrumentales de Roussos et Koulouris aux guitares sont bien trippantes comme il faut, que les compositions, les arrangements et la production de Vangelis (le big boss de l'exercice), loin de rappeler les épopées synthétiques dont il se fera la spécialité, sont un parfait panorama, un divin écrin pour une formation qui ose et réussit à chaque fois. Ose et réussit un album avec peu de vraies chansons mais beaucoup de trouvailles, de l'adjonction d'éléments folkloriques grecs à une certaine atonalité aussi surprenante et discrète que bienvenue. Ose et réussit une évocation de l'orgasme féminin sur le polémique, à l'époque, Infinity enregistré avec le précieux concours de la comédienne, grecque également, Irene Papas (quelle performance !). Ose et réussit un long trip psyché-prog en remontrant au meilleur de Quicksilver Messenger Service et de King Crimson (All the Seats Were Occupied)... Bref, c'est un grand chelem d'album qui, varié, mélodique, complexe et abouti demeure une des plus belles double-pièces studio toutes époques et tous genres confondus. Et donc ? Bravo Aphrodite's Child et... Gloire à Satan !

CD 1
1. The System 0:23
2. Babylon 2:47
3. Loud, Loud, Loud 2:42
4. The Four Horsemen 5:53
5. The Lamb 4:34
6. The Seventh Seal 1:30
7. Aegean Sea 5:22
8. Seven Bowls 1:28
9. The Wakening Beast 1:11
10. Lament 2:45
11. The Marching Beast 2:00
12. The Battle of the Locusts 0:56
13. Do It 1:44
14. Tribulation 0:32
15. The Beast 2:26
16. Ofis 0:14

CD 2
1. Seven Trumpets 0:35
2. Altamont 4:33
3. The Wedding of the Lamb 3:38
4. The Capture of the Beast 2:17
5. Infinity 5:15
6. Hic and Nunc 2:55
7. All the Seats Were Occupied 19:21
8. Break 2:59

Vangelis Papathanassiou - keyboards, organ, piano, vibraphone, bass, flute, percussions, backing vocals ("Lament", "The Beast", "Break")
Demis Roussos - lead vocals ("Babylon", "The Four Horsemen", "Lament", "Hic et Nunc"), bass, guitar, backing vocals
Lucas Sideras - drums, lead vocals ("The Beast", "Break"), backing vocals
Silver Koulouris - guitar, percussion
&
Harris Halkitis - bass, tenor saxophone, congas, percussion, backing vocals
Michel Ripoche - trombone, tenor saxophone ("Babylon", "Hic et Nunc")
Irene Papas - vocals ("Infinity")
John Forst - English narration
Yannis Tsarouchis - Greek narration ("Ofis")
Daniel Koplowitz - voice ("Loud Loud Loud")
Costas Ferris - lyricist


A comme...
ARTAUD "Music from Early Times" (2010)
Passe de trois

Tel le bon ouvrier labourant obstinément son précieux lopin de terre, tel l'horloger affairé à concocter un fragile mécanisme à l'impeccable précision, Artaud continue de tracer sa route sur ce 3ème long-jeu en tant que leader. Et sa troisième réussite, il faut le préciser.
Ceux qui ont eu la chance d'écouter les deux précédentes galettes du compositeur/arrangeur/multi-instrumentiste le savent bien, Vincent Artaud est un garçon bourré de talent et détenteur d'un savoir-faire, d'un trademark sound désormais bien installé. L'addition de Daniel Yvinec (précédemment directeur de l'Orchestre National de Jazz et présentement directeur artistique et réalisateur), pour précieuse qu'elle soit, ne vient pas tout chambouler, et c'est tant mieux. Car enfin, il eut été dommage que ce jazz convoquant des influences aussi diverses que Mingus, Coltrane, Schifrin, Glass, Morricone ou François de Roubaix (un résumé, parce que c'est bien sûr infiniment plus compliqué que ça) ne soit pas reconduit, si ce n'est à l'identique au moins essentiellement. Les différences ? Pas d'orchestre de cordes, et donc une musique plus aérée et jammeuse cette fois mais une contribution également cinématique grâce aux textures sonores amenés par les programmations d'Artaud (et de Vincent Lafont au passage seul co-compositeur, sur Rule of Beeline) et l'expertise du reste du line-up trié sur le volet, on s'en doute.
Comme à l'habitude, on a beau se dire que l'affaire a été millimétrée, profondément pensée et "tenue" par deux "co-chefs" qu'on sait aussi pointilleux l'un que l'autre, on est emporté par la fluidité, le naturel de l'entreprise qui recèle, in fine, rien de plus que des sons pour "bouger" l'âme. Si l'on détaille "l'assemblage", c'est évident, c'est à un travail d'orfèvre auquel on a affaire, chaque place a sa note et chaque note à sa place en quelque sorte. Ce rigorisme créatif, cet extrême souci du détail, une constante dans les oeuvres d'Artaud, est un nécessaire carburant au moteur qu'est la délicieuse partition par laquelle Vincent nous entraîne, 55 minutes durant, dans un film sans image (plus nouvelle vague, la où La Tour Invisible se parait d'atours hollywoodiens), un trip "jazzosphérique" comme il en a le secret.
Et ça, ça ne se refuse pas !

1. People Of The Black 3:18
2. Kingdom & History 5:05
3. Rule Of Circle 7:43
4. The Crowning 5:57
5. Wisdom & Wonderment 1:49
6. Victoire 4:50
7. Rule Of Beeline 3:33
8. Rule Of Diameter 0:51
9. People Of The White 6:45
10. Die Folgerung 5:27
11. Seed 4:44
12. Kunst 1:57
13. People Of The Red 4:37
En live au Duc des Lombards !

Vincent Artaud: basse, guitare, claviers, programmation
Frédéric Couderc: clarinette, saxophone, coudophone, cor anglais
Vincent Lafont: piano, synthétiseur, électronique
Fabrice Moreau: batterie
Daniel Yvinec: direction artistique, réalisation


A comme...
AVETT BROTHERS, THE "I and Love and You" (2009)
Simplement beau

Il est de ces albums qui s'imposent d'emblée comme des évidences, de ces oeuvres qui nous paraissent mille fois entendues et qui, pourtant, conservent une totale fraicheur. I and Love and You, déjà le 9ème album des frangins Avett, est de ceux-ci.
Il faut dire que l'intemporalité, les Avett semblent avoir ça dans le sang à commencer par leur choix de la Folk Music et d'une certaine épure, gage de ne pas tomber trop facilement dans les tics et gimmicks que chaque époque à le don d'imposer aux artistes. Pas de ça ici. Sous la férule de Rick Rubin (cumulant les fonctions de patron du label American et de producteur) les Avett déroulent leurs chansons où les arpèges lumineux, les choeurs harmonieux enluminent des compositions qui coulent de source.
Pour ce qui est des influences et ressemblances, on ne pourra nier que la paire fraternelle a quelque chose de CSNY (Crosby, Stills, Nash & Young pour les ignares) ou, dans les formations plus récentes, de Wilco et des Jayhawks (voire des immenses Fleet Foxes). Pas franchement ce qui se fait de pire, avouez-le. On sent aussi que la scène country alternative de la fin des années 60 et du début des années 70 (Townes Van Zandt, Kris Kristofferson, Willie Nelson, etc.) a laissé son empreinte dans cette musique à la fois terrienne et ethérée. Le plus fort c'est qu'on se dit souvent - tout au long des 13 titres qui composent l'album - que les Avett Brothers, malgré le lourd bagage de leurs influences, réussissent à se créer - si ce n'est une identité vraiment originale - un tour de main, un son distintifs de leurs petits camarades... Ce n'était pas gagné d'avance.
En résumé, si vous souhaitez découvrir un album simple et beau, sans artifice et sans volonté de coller à quelque mode que ce soit, I and Love and You vous ravira... Longtemps.

1. I and Love and You 5:00
2. January Wedding 3:47
3. Head Full of Doubt/Road Full of Promise 4:47
4. And It Spread 4:06
5. The Perfect Space 4:31
6. Ten Thousand Words 5:35
7. Kick Drum Heart 2:54
8. Laundry Room 4:51
9. Ill with Want 4:04
10. Tin Man 3:07
11. Slight Figure of Speech 2:22
12. It Goes on and On 2:57
13. Incomplete and Insecure 2:35

Scott Avett: Banjo, Drums, Guitar, Percussion, Piano, Vocals
Seth Avett: Drums, Glockenspiel, Guitar, Mandolin, Organ, Percussion, Piano, Vocals
Bob Crawford: Bass, Percussion, Background Vocals
Joe Kwon: Cello
&
Monica Samalot, Stuart Johnson, Justin Glanville, Lenny Castro, Dolph Ramseur, Bill Reynolds, Dane Honeycutt: Percussion
Simone Felice, Mike Marsh: Drums
Elizaveta Khripounova: Harmonium
Mark Daumen: Tuba
Donny Herron: Fiddle
Benmont Tench Hammond: Harmonium, Organ, Piano
Paleface: Percussion, Background Vocals
Mary Ellen Bush, Sarah Swan McDonald: Background Vocals