vendredi 31 janvier 2014

Un chef d’œuvre américain

The Band "Music from the Big Pink" (1968)
ou "Naissance d'une Légende"


Avant Music from the Big Pink, The Band était connu, sous le sobriquet de The Hawks, comme le groupe de talentueux accompagnateurs d'un Bob Dylan en état de grâce. Avec cet album, The Band sera révélé comme une immense formation de musique typiquement américaine, c'est aussi simple que ça.

Et donc Music from the Big Pink, est le tour de force inaugural de The Band, un album indispensable à tout amateur de musique américaine de qualité, une galette absolument immortelle et aucunement datée malgré ses 45 ans d'âge.
Mais d'abord, qu'est-ce que ce Big Pink d'où émailla pareille tuerie ? Tout simplement la maison où vivent alors Rick Danko, Richard Manuel et Garth Hudson et où The Band composa et enregistra, en cave, les démos ce qui allait devenir leur première grande œuvre. Une grosse masure peinte en rose (d'où son nom) où seront également concoctées les fameuses Basement Tapes du Band et de leur ancien patron et toujours partenaire, Bob Dylan qui verront finalement publiquement le jour en 1975. Un lieu magique par ses occupants et leur intarissable inspiration du moment.
Et la musique me direz-vous, et vous aurez bien donné étant donné que c'est quand même de musique dont il s'agit ici et quelle musique. Une musique américaine donc, où on retrouve du rock, du blues, de la soul, de la folk et souvent tout ça en même temps dans la fusion unique créée par le quintet (sextet si on compte le producteur, cuivre et pianiste, très impliqué donc, John Simon). Une musique joueuse, jammy aussi où chaque intervenant joue de plusieurs instruments et chante dans avec un plaisir si audible, si communicatif qu'il est absolument impossible de résister. Parce qu'il y a, en plus, un sacré paquet de bonnes chansons et pas seulement les trois composées ou co-composées par Mister Dylan (dont un I Shall Be Released, futur classique du Zim' qui fait bel et bien ici sa première apparition). De fait, Music from the Big Pink est aussi l'avènement d'une sacrée paire de songwriters nommés Robbie Robertson (de To Kingdom Come, de la soul bouseuse d'immense classe, à Caledonia Mission, du folk blues plein de sentiment) et Richard Manuel (de In a Station, du baroque soul'n'roots, à Lonesome Suzie, ballade bluesy tire-larmes de première bourre). Avec le son pur, vrai, organique qui va comme un gant à ce déroulé fantastique, et des performances instrumentales (ha ! l'orgue de Garth Hudson !) ne visant qu'à bonifier le matériau et y parvenant avec majesté.
Un bonheur ne venant jamais seul, le présent remaster rallonge magnifiquement la sauce de chutes de studio qui auraient aisément fait le bonheur de bien des albums officiels, c'est dire le niveau de qualité et d'inspiration des sessions !

Music from the Big Pink ? Essentiel, vous dis-je !


1. Tears of Rage 5:23
2. To Kingdom Come 3:22
3. In a Station 3:34
4. Caledonia Mission 2:59
5. The Weight 4:34
6. We Can Talk 3:06
7. Long Black Veil 3:06
8. Chest Fever 5:18
9. Lonesome Suzie 4:04
10. This Wheel's on Fire 3:14
11. I Shall Be Released 3:19
Bonus
12. Yazoo Street Scandal 4:01
13. Tears of Rage (alternate take) 5:32
14. Katie's Been Gone 2:46
15. If I Lose 2:29
16. Long Distance Operator 3:58
17. Lonesome Suzie (alternate take) 3:00
18. Orange Juice Blues (Blues for Breakfast) 3:40
19. Key to the Highway 2:28
20. Ferdinand the Imposter (demo) 3:59


Rick Danko — bass guitar, fiddle, vocals
Levon Helm — drums, tambourine, vocals
Garth Hudson — electronic organ, piano, clavinet, soprano and tenor saxophone
Richard Manuel — piano, organ, drums, vocals
Robbie Robertson — electric and acoustic guitars, vocals
&
John Simon — producer, baritone horn, tenor saxophone, piano

jeudi 30 janvier 2014

Kiss me again?

Kiss "Dynasty" (1979)
ou "Baiser vendu ?"


La fin des haricots ou Kiss à la relance ? Les deux mon général !

A la relance parce que Kiss, qui n'était plus passé par la case studio depuis Love Gun en 1977 et n'avait occupé le terrain que par un presque live (Alive II, 3 faces de live très largement retravaillées en studio, et une studio de piètre intérêt) et quatre albums solo de très inégale qualité (bonne pour Paul et Ace, nettement moins pour Gene et surtout Peter) revient enfin aux affaires. La fin des haricots parce que la formule d'un hard rock franc et direct commence sérieusement à se déliter sur un album ne possédant plus la cohérence stylistique d'hier.
Parce que, s'il y a toujours une bonne part de party rock'n'roll, il y a aussi une nouvelle légèreté avec, en particulier, deux disco rocks qui surprendront beaucoup les fans... Et réaffirmeront le succès commercial de la formation, notamment chez nous où elle brillait par son absence dans les hit-parades. Force est de constater l'efficacité mélodique des deux ditties en question : Sure Know Something et, évidemment, I Was Made for Lovin' You, tube planétaire s'il en fut. Côté rock, une bonne reprise des Rolling Stones (2,000 Man) et quelques tourneries typiques des maquillés (Dirty Livin', Magic Touch, Hard Times, Save Your Love) viennent contenter une fan-base qu'on imagine inquiète des nouveaux développements soniques du quatuor même si on remarque que le tranchant passé s'est largement émoussé. Et l'inspiration quelque peu perdue comme semble le prouver les nombreux compositeurs externes venus renforcer les musiciens de la formation, en particulier Vini Poncia, co-auteur avec Paul Stanley des deux tubes de l'album mais également claviériste et choriste.
On notera aussi qu'il s'agit du premier album où les quatre musiciens originaux n'apparaissent plus tous, les parties de Peter Criss, sauf sur son morceau, Dirty Livin', ayant été gommées car jugé d'un niveau insuffisant par le groupe et leur producteur. Il sera remplacé par Anton Fig déjà présent sur l'album solitaire d'Ace Frehley. A la décharge du pauvre batteur, qui ne rejouera plus avec ses anciens comparses avant la reformation maquillée de 1995, il faut préciser qu'il se relève à peine d'un grave accident de voiture... Et que ses abus de substances en tous genres n'aident pas.

Dynasty (prononcez "die nasty") est tout de même un bon album, le dernier d'une belle série qui ne reprendra qu'avec Lick It Up en 1983 (même si son prédécesseur, Creatures of the Night est plus que correct). A l'époque dénoncé par les fans de rock qui charcle comme une concession à la mode du jour, alors que seuls les deux tubes précités sont symptomatiques du prétendu glissement, il a étonnamment bien vieilli et demeure, pour les amateurs du groupe et de ce genre de rock "bon vivant", une expérience agréable... A défaut de plus.


1. I Was Made for Lovin' You 4:30
2. 2,000 Man 4:54
3. Sure Know Something 4:00
4. Dirty Livin' 4:19
5. Charisma 4:25
6. Magic Touch 4:41
7. Hard Times 3:30
8. X-Ray Eyes 3:46
9. Save Your Love 4:41


Paul Stanley - vocals, rhythm guitar (bass guitar on "I Was Made for Lovin' You" and "Magic Touch", lead guitar on "Sure Know Something")
Gene Simmons - vocals, bass guitar
Ace Frehley - vocals, lead guitar (all guitars on "2,000 Man", bass guitar on "2,000 Man", "Hard Times" and "Save Your Love")
Peter Criss - drums, percussion and lead vocals only on "Dirty Livin'"
&
Anton Fig
- drums on all tracks except "Dirty Livin'"
Vini Poncia - backing vocals, keyboards

mercredi 29 janvier 2014

R.I.P. Pete Seeger

PETE SEEGER
(1919-2014)
 
C'est avec une réelle émotion que j'ai appris la disparition de Pete Seeger. Pas qu'elle n'ait pas été attendue, à 94 ans, le "vieux" avait bien vécu, mais qu'il représentait une certaine idée de l'Amérique : généreuse, dévouée aux plus fragiles, prompte à une juste indignation et à la résistance citoyenne qui va avec.
Je reviendrai bientôt sur le parcours de ce Grand Monsieur, en attendant, je vous livre le bel hommage que lui rendait Bruce Springsteen en 2006. Un fantastique outil du souvenir qui démontre que Mr. Seeger était aussi, surtout !, un songwriter exceptionnel ayant durablement marqué l'histoire culturelle de sa nation et de tous ceux qui résistent, encore et toujours, aux bas instincts si courants de la race humaine.

Bruce Springsteen "We Shall Overcome: The Pete Seeger Sessions (American Land Edition)" (2006)
ou "Le Boss hommage"


L'exercice est inhabituel, unique même !, pour le Boss et en dit, du coup, long sur l'importance historique et musicale du Monsieur ici hommagé,  Pete Seeger.

Et en dit long sur le respect et l'amour que Springsteen a pour le Monsieur, évidemment. D'autant que c'est un Bruce particulièrement respectueux de l'œuvre et du style de Seeger et donc assez éloigné de ses préoccupations musicales habituelles. C'est bien de country/folk dont il s'agit, pas de surprise pour ceux qui connaissent le répertoire et la façon du vieux Pete sauf qu'on y retrouve des orchestrations nettement plus développées que celles, plus ascétiques et dépouillées, généralement entendues sur les productions de Seeger, la licence artistique est là et là seulement. La surprise, en fait, est plus dans la sélection concoctée par le natif du New Jersey qui, si elle passe forcément par quelques obligatoires bienvenus (Joe Henry, Shenandoah et We Shall Overcome par exemple) sait aussi puiser des merveilles plus improbables dans un riche catalogue du modèle de l'occasion.
Et c'est une splendeur ! Pas un album compliqué, pas un album dépressif non plus mais un déroulé joyeux prouvant, s'il était besoin, que la politique, arme fondamentale du répertoire de Seeger (qu'il en soit le compositeur ou le plus fameux interprète), peut aussi s'exprimer avec joie et allant par des musiciens, le Boss en tête, se faisant visiblement bien plaisir.

Et comme, forcément, le plaisir est communicatif, il n'y a plus qu'à se laisser aller, à écouter les paroles aussi !, pour prendre un vrai pied pas idiot avec deux messieurs américains comme on aimerait en croiser plus souvent. En un mot comme en mille : un bel hommage et une idéale porte d'entrée dans le monde d'un compositeur/interprète, hélas disparu le 27 janvier 2014, pas aussi connu chez nous qu'on le souhaiterait. Recommandé.


1. Old Dan Tucker 2:31
2. Jesse James 3:47
3. Mrs. McGrath 4:19
4. O Mary Don't You Weep 6:05
5. John Henry 5:07
6. Erie Canal 4:03
7. Jacob's Ladder 4:28
8. My Oklahoma Home 6:03
9. Eyes on the Prize 5:16
10. Shenandoah 4:52
11. Pay Me My Money Down 4:32
12. We Shall Overcome 4:53
13. Froggie Went A-Courtin' 4:33
Bonus
14. Buffalo Gals 3:12
15. How Can I Keep from Singing? 2:19
16. How Can a Poor Man Stand Such Times and Live? 3:22
17. Bring 'Em Home 3:35
18. American Land 4:44


Bruce Springsteen – lead vocals, guitar, harmonica, B-3 organ, and percussion
Sam Bardfeld – violin
Art Baron – tuba
Frank Bruno – guitar
Jeremy Chatzky – upright bass
Mark Clifford – banjo
Larry Eagle – drums and percussion
Charles Giordano – B-3 organ, piano, and accordion
Ed Manion – saxophone
Mark Pender – trumpet, backing vocals
Richie "La Bamba" Rosenberg – trombone, backing vocals
Patti Scialfa – backing vocals
Soozie Tyrell – violin, backing vocals

mardi 28 janvier 2014

Organic Zorn

John Zorn "The Hermectic Organ vol. 2 - St. Paul's Chapel" (2014)
ou "Saint Zorn en la Chapelle"


Pour sa première apparition discographique de 2014, John Zorn nous refait le coup de l'orgue d'église, et donc d'un volume 2 de son Hermetic Organ. Bonne nouvelle, le premier avait séduit.

Une première constatation, sur la forme celle-ci, si le premier volume était une succession d'ambiances et de mélodies, la performance n'était pas découpée en plusieurs pistes contrairement à ce volume second qui en présente sept. Ainsi pourra-t-on l'écouter par "tranches", dans l’ordre ou pas selon l’envie et l’instinct, ce qui en facilitera sans doute la digestion, la compréhension aussi.
Parce qu'il est évident que le trip présentement proposé n'est pas exactement immédiatement accessible, sauf à se laisser émotionnellement submerger par le torrent. Il est évident aussi que Zorn "trippe" énormément sur l'orgue de la Chapelle Saint Paul de New York City devant un public qu'on imagine volontiers, tour à tour, enjôlé, médusé, cajolé, violenté par de tant passion et si peu de compromission quant à l'usage de l'instrument cérémoniel.
A l’évidence, et pas seulement parce que les titres alloués à chaque segment  pointent dans cette direction, il y a une dimension profondément mystique dans la performance, tout sauf une surprise pour ceux qui suivent un tant soit peu l’œuvre du trublion. Mais si le mysticisme zornien, présentement, déborde encore souvent vers un bruitisme orageux, les apaisements, pas si peu nombreux qu'on pourrait l'imaginer et tous bienvenus comme sur un Prayer en état de grâce (ça tombe bien !), respirations nécessaires à ce maelstrom, tempèrent ce déluge de notes péri-improvisées et sont autant d'entrées évidentes dans cet univers d'une noirceur souvent violente.
Alors, évidemment, on peut trouver des références, des ressemblances dans le classique contemporain le plus ardu, de Xenakis à Messiaen, de Stockhausen à Nono (le blabla promotionnel de Tzadik ne s’en prive d’ailleurs pas) mais aussi chez des minimalistes tels que Reich, Terry Riley ou, surtout !, le Philip Glass des débuts qui en disait tant en peu de notes qu'il nous laissait, du coup, ébahis. A l'image de ses glorieux devanciers, Zorn le roué, Zorn le malin sait ne pas trop en faire justement, et sait, ce faisant, hypnotiser son auditoire de belles ambiances calmes… Pour mieux le trépaner de furieuses cavalcades ensuite !
Toute l'œuvre fonctionne sur cette dichotomie, cet équilibre entre le chaud et le froid, le beau et le laid, le grandiose et le ridicule, le facile et le demandant. Typiquement zornien en somme et en même temps un autre monde parce que Zorn y oublie pas mal de ses tics en choisissant d'honorer, avant tout, l'instrument et ses possibles dramatiques, liturgiques même.
Au final, passées les 47 minutes que durent la performance, on ressort un peu rincé, tout à fait épaté par la capacité de l’homme Zorn posséde de sans cesse se réinventer, de toujours trouver de nouveaux champs d’action sans jamais avoir l’air de s’y forcer, de chercher absolument à élargir son spectre. Et de se dire que ce que  l’inaugural volume de la série avait touché du doigt en une emphase mélodico-foutraque, son successeur l’accomplit : faire du neuf avec du vieux, réussir l’incroyable exploit d’être à la fois familier et révolutionnaire.

A mon humble avis, que vous avez tout à fait le droit de ne pas partager me démettant comme un vil zélote du compositeur/performer New Yorkais, Bach, qui s’y connaissait un peu en musique pour orgue, serait fier de cet improbable et furieux rejeton. Oui, rien que ça !


Office Nr 9 - The Passion
1. Crucifixion 6:55
2. Prayer 9:12
3. Ascent into the Maelstrom 4:33
4. In Gloria Dei 11:28
5. Holy Spirit 7:17
6. Battle of the Angels 3:16
7. Communion 4:21
(pas d'extrait pour ce trip total !)


John Zorn: Organ

lundi 27 janvier 2014

Devoir de mémoire (4)

Motorpsycho "Let Them Eat Cake" (2000)
ou "Nouveau départ"


S'il y a un groupe dont on ne parle pas assez, c'est des Norvégiens de Motorpsycho qui traînent pourtant leurs guêtres depuis une vingtaine d'années sortant régulièrement des pépites aussi riches que variées et ne récoltant qu'une indifférence quasi-générale... Cette chronique a donc le double but de réparer une grande injustice et de mettre en lumière l'album le plus concis et abordable (peut-être leur meilleur aussi) de ces furieux vikings.

En 2000, la bande n'en est plus à ses premiers faits d'armes et sort son 8ème album au titre finalement évocateur de Let Them Eat Cake (Laissons-les manger du gâteau). Album de rupture, on y retrouve un Motorpsycho tentant de faire drastiquement évoluer son son vers quelque chose de moins brutal que ce qu'ils avaient proposés précédemment. Ainsi des influences jazz et psychédéliques viennent-elles enrichir un son déjà bien touffu. Pour ce faire, de nombreux invités sont convoqués. Ce qui aurait pu n'être qu'une indigeste accumulation s'avère un précieux montage amoureusement millimétré par des musiciens, compositeurs et arrangeurs au sommet de leur art.
Le choix de ne pas trop rallonger la sauce (écueil dont le groupe était devenu un habitué avec de nombreux albums dépassant allègrement l'heure) est judicieux et a sans doute permis à cette fine équipe de ne point trop se disperser. Ainsi, avec 45 minutes au compteur, Let Them Eat Cake est un LP sans temps morts ni baisse de régime.
Louable initiative, Motorpsycho se permet même une presque-reprise du Hot Lanta des Allman Brothers avec un Whip That Ghost (sous-titré Song for a Bro pour les durs d'oreille) tout bonnement exceptionnel de dévotion et de talent. Comme les autres compositions - de l'imparable single baroque (The Other Fool) à la douce folk-poperie (Upstairs-Downstairs) en passant par l'irrésistible grooverie qu'est Walking with J. - ne sont pas en reste, on est obligé de constater que c'est bel et bien à une aeuvre d'exceptionnelle qualité à laquelle nous avons affaire. Une de ces rares galettes qu'on peut écouter en boucle avec un plaisir toujours égal.
Cet album, à vrai dire, je le conseille à toutes et à tous... c'est dire ! Hélas, ceux qui voudront mettre la main sur le petit rond de plastique devront s'armer de patience Let Them Eat Cake étant (depuis trop longtemps !) indisponible. Une honte quand on constate le nombre de back-catalogues de bas étage qu'on nous vend régulièrement comme LE machin à avoir. Ici, je vous le dis, vous serez récompensés !

Laissons-les manger du gâteau qu'ils disaient... J'en reprendrai bien une part, tiens !


1. The Other Fool 5:40
2. Upstairs-Downstairs 5:12
3. Big Surprise 3:36
4. Walkin With J. 3:59
5. Never Let You Out 2:46
6. Whip That Ghost (Song for a Bro') 6:30
7. Stained Glass 6:12
8. My Best Friend 4:21
9. 30/30 7:21


Bent Sæther: Vocals, bass, guitars, drums, percussion, rhodes piano, wood blocks, mini moog, piano, harmonium
Hans Magnus Ryan: Guitars, vocals, clavinette, double bass, violins, mandolin
Håkon Gebhardt: Drums, vocals, percussion, zither, guitars, piano
&
Helge Sten
(Deathprod): drum machine
Baard Slagsvold: Piano, rhodes piano, back. vocals
Ole Henrik Moe (Ohm): Violins, gong
Kristin Karlsson: violin
Kristin Skjølaas: violin
Einy Langmoen: viola
Kjersti Rydsaa: cello
Arne Frang: tenor saxophone
Jørgen Gjerde: trombone
Erlend Gjerde: trumpet
Helge Sunde: trombone
Tone Reichelt: waldhorn
Arve Henriksen: trumpet, mellophone



Un album dont vous voudriez que les gens se souviennent ? N'hésitez pas à la partager (avec un petit texte d'accompagnement si possible), je me ferai un plaisir de le poster.
zornophage[at]gmail[dot]com

.Recyclé de la Caverne d'Ali Baba.

dimanche 26 janvier 2014

Progressisme et vanité

Ayreon "The Theory of Everything" (2013)
ou "New like Old"


Les amoureux du renouvellement continuel, de la révolution musicale permanente, de la progression en rock progressif savent déjà tous qu'Arjen Anthony Lucassen n'est pas franchement le musicien, compositeur, arrangeur et producteur apte à leur donner des émotions en adéquation avec leurs folles attentes. De fait, ce Theory of Everything est tout sauf une surprise... C'est de l'Ayreon pur jus !

Évidemment, la maison de disque, à qui il faut bien du grain à moudre, l'aura vendu tout autrement mettant en avant la pléthorique liste de guest-stars toutes plus prestigieuses les unes que les autres qui servent, en fait, de cache-misère à un album on ne peut plus routinier. Pas qu'on ne soit pas ravi d'entendre Steve Hackett glisser un solo dont il a le secret, de retrouver un Keith Emerson plutôt discret dernièrement dans des exactions "clavieristiques" typiques de son légendaire E.L.P., ou d'entendre ce vieux grigou de John Wetton jouer des cordes vocales dans un des rôles du concept album. Non, vraiment, aucune mauvaise nouvelle dans les performances de ces vieilles barbes toujours vertes. Là où le bas blesse, sur un album globalement correct, c'est dans l'usure d'une formule qui commence sacrément à dater.
Parce que depuis les débuts de son projet progressif, l'ex-Vengeance, groupe batave de hard'n'heavy assez peu exceptionnel, Arjen Anthony Lucassen a, plus ou moins, toujours creusé le même sillon d'un symphonic metal prog "rock-opératisé" efficace et racé mais, ultimement, bien trop dérivatif pour qu'on le prenne pour autre chose qu'un substitut d'un passé plus glorieux. Il y bien eu quelques vrais bons moments (Inside the Electric Castle en 1998, The Human Equation en 2004) mais rien, fondamentalement, qui permette aux amateurs du genre de s'enthousiasmer plus que de raison. D'autant que, présentement, le concept, basé dans le réel cette fois, n'a rien d’affolant et ne justifie en aucun cas le bavardage instrumental débordant d'un musicien qui doit, on n'en doute pas, beaucoup s'amuser en studio. Épisodiquement, on s'amuse avec lui mais pas suffisamment souvent pour être captivé.
Alors oui, c'est bien joué (bien exécuté diraient ceux qui voient dans ce genre d'exercice de vanité la mort de la Musique majuscule), bien produit. Est-ce assez ? Pour certains peut-être, pour moi non.

Finalement, à trop s'éparpiller dans trop de projets, à délayer son inspiration tous azimuts (Ambeon, Finch, Guilt Machine, Star One, en solo, etc.), à vouloir aussi trop en faire sur chacune de ses sorties discographiques, on se dit que Lucassen a fini par se perdre, par redonder plus que de raison et que le résultat est là, criant d'évidence, dans ce Theory of Everything si plein de tout qu'il n'aboutit à rien. C'est d'autant plus dommage que le garçon possède un vrai potentiel qu'il noie malheureusement dans sa "mer de groupes". En un mot comme en mille, Arjen, concentre-toi boudiou !


CD 1
Phase I: Singularity
1. Prologue: The Blackboard 1:55
2. The Theory of Everything Part 1 3:01
3. Patterns 1:03
4. The Prodigy's World 1:31
5. The Teacher's Discovery 2:58
6. Love and Envy 2:39
7. Progressive Waves 3:16
8. The Gift 2:38
9. The Eleventh Dimension 1:46
10. Inertia 0:45
11. The Theory of Everything Part 2 1:50
Phase II: Symmetry
12. The Consultation 3:49
13. Diagnosis 2:48
14. The Argument 1 0:24
15. The Rival's Dilemma 2:22
16. Surface Tension 0:57
17. A Reason to Live 0:45
18. Potential 3:14
19. Quantum Chaos 2:09
20. Dark Medicine 1:23
21. Alive! 2:29
22. The Prediction 1:05

CD 2
Phase III: Entanglement
1. Fluctuations 1:01
2. Transformations 3:13
3. Collision 3:26
4. Side Effects 2:59
5. Frequency Modulation 1:44
6. Magnetism 3:54
7. Quid Pro Quo 3:09
8. String Theory 1:29
9. Fortune? 1:36
Phase IV: Unification
10. Mirror of Dreams 2:30
11. The Lighthouse 3:16
12. The Argument 2 0:49
13. The Parting 3:27
14. The Visitation 3:27
15. The Breaktrough 2:00
16. The Note 1:11
17. The Uncertainty Principle 2:09
18. Dark Energy 0:44
19. The Theory of Everything Part 3 1:29
20. The Blackboard (Reprise) 1:13


Vocalistes
JB (Grand Magus) as The Teacher
Sara Squadrani (Ancient Bards) as The Girl
Michael Mills (Toehider) as The Father
Cristina Scabbia (Lacuna Coil) as The Mother
Tommy Karevik (Kamelot, Seventh Wonder) as The Prodigy
Marco Hietala (Nightwish, Tarot) as The Rival
John Wetton (Asia, UK, ex-King Crimson, ex-Family, ex-Roxy Music) as The Psychiatrist
Wilmer Waarbroek - backing vocals

Musiciens
Arjen Anthony Lucassen - electric and acoustic guitars, bass guitar, mandolin, analog synthesizers, Hammond, Solina Strings
Ed Warby - drums, percussion
Rick Wakeman (ex-Yes) - synthesizer solo on "Surface Tension", piano
Keith Emerson (ex-Emerson, Lake & Palmer) - synthesizer solo on "Progressive Waves"
Jordan Rudess (Dream Theater, ex-Liquid Tension Experiment) - synthesizer solo on "Progressive Waves"
Steve Hackett (ex-Genesis) - guitar solo on "The Parting"
Troy Donockley (Nightwish) - uilleann pipes, whistles
Ben Mathot - violin
Maaike Peterse (Kingfisher Sky) - cello
Jeroen Goossens - flutes, bass flute, piccolo, bamboo flute, contrabass flute
Siddharta Barnhoorn - orchestrations
Michael Mills (Toehider) - Irish bouzouki

samedi 25 janvier 2014

Elle et Lui

Ce post est une réponse. Une réponse à Jeepeedee qui avait pas mal ereinté le coffret (tout en disant qu'il aimait... fourbe, le mec !) sur son blog il y a 1 an de ça (lien inside). Un coffret que j'ai donc fini par écouter et qui, franchement, ne méritait pas ça. Donc retour, réévaluation et rédemption... Na !

Ian & Sylvia "The Complete Vanguard Studio Recordings" (2001)
ou "Folk de Couple"


Ici nous parlons d'une époque révolue, balayée par le passage de Bob Dylan à l'électricité, celle où la folk musique nord-américaine n'avait pas encore perdue son innocence, par encore plié l'échine aux désidératas d'une industrie discographique en pleine révolution, pas encore fusionné avec des valeurs rock toujours plus envahissantes. Ici nous parlons de Ian & Sylvia, couple à la scène comme à la ville faisant perdurer une certaine conception d'une folk music aujourd'hui disparue... Sauf à se replonger dans d'archéologiques enregistrements comme ceux du coffret en question.

Ian & Sylvia Tyson sont canadiens et débutèrent leur carrière en leur Colombie Britannique natale avant de migrer, aux naissantes 60s, dans la Mecque de la folk music d'alors, New York City, où il allait bientôt attirer l'attention du manager de Peter, Paul & Mary (et bientôt de Dylan lui-même), Albert Grossman.
On peut aisément qualifier leur musique de traditionaliste, elle ne cherche en effet nullement à innover où à s'éloigner des canons établis par les Grand Anciens de la chose, de Woody Guthrie à Pete Seeger en passant par Burt Ives ou Leadbelly (etc.). Tout juste y additionnent-ils un soupçon celtique bienvenu qui définit leur identité, les sort du lot des très nombreux gratteurs/chanteurs acoustiques alors en activité. Il y a aussi, c'est essentiel !, l'alchimie de deux voix s'accordant à merveille, deux voix mélodiques et franches, à l'ancienne !, se soutenant l'une l'autre dans un bel ensemble. Il y a, enfin, quelques décrochages vers un répertoire francophone, dans un français phonétique pas toujours très facile à comprendre (un peu à la manière des Cajuns, pour situer) mais absolument charmant. Et donc, à part ces quelques petits points distinctifs, c'est de classique de chez classique dont il s'agit, mais de classique de vraie belle qualité, bien enregistré, bien joué et, surtout, possédant un répertoire d'une impressionnante constance dans l'excellence et ce autant dans les adaptations de morceaux traditionnels, les reprises de contemporains ou d'aînés que dans les nombreux originaux à mettre au crédit du duo.
Le présent coffret propose donc les enregistrements de 1962 à 1967 pour le légendaire, et toujours en activité, label Vanguard fondé par les frères Solomon au début des années 50 et qui deviendra la "maison" de beaucoup d'activistes du revival folk d'alors, tout ceci pour dire que Ian & Sylvia avaient une belle réputation et y étaient en bonne compagnie mais aussi pour souligner le professionnalisme de sessions, n'ayant pris que la patine du temps, encore très écoutables pour un auditoire contemporain.
Pour l'anecdote, on retrouve sur un album, Play One More de 1966, un jeune Felix Pappalardi pas encore bassiste de Mountain, pas encore producteur de Cream, fort loin des exactions blues électriques dont il sera bientôt auteur mais déjà arrangeur. Pas qu'il ne tire le duo vers autre chose que sa folk de référence.

Plus à réserver aux nostalgiques du revival folk américain de l'après seconde guerre mondiale, et plus particulièrement de la première moitié des années 60, qu'à ceux goutant à son équivalent moderne, les Complete Vanguard Recordings de Ian & Sylvia sont  une excellente opportunité de (re)découvrir un duo/couple aujourd'hui tombé en désuétude. Un duo qui cessera toute activité suite à son divorce mais dont la musique, typique d'un autre temps mais toujours fort écoutable, est toujours bien vivante.


CD 1  
Ian & Sylvia (1962)
1. Rocks And Gravel 3:31
2. Old Blue 3:26
3. C.C. Rider 2:55
4. Un Canadien Errant 2:59
5. Handsome Molly 2:09
6. Mary Anne 3:15
7. Pride Of Petrovar 2:46
8. Makes A Long Time Man Feel Bad 2:43
9. Rambler Gambler 3:01
10. Down By The Willow Garden 2:59
11. Got No More Home Than A Dog 3:23
12. When First Unto This Country 2:37
13. Live A-Humble 2:43
Four Strong Winds (1964)
14. Jesus Met The Woman At The Well 2:12
15. Tomorrow Is A Long Time 3:18
16. Katy Dear 3:01
17. Poor Lazarus 4:03
18. Four Strong Winds 3:28
19. Ella Speed 2:25
20. Long Lonesome Road 2:27
21. V'La L'Bon Vent 1:43
22. Royal Canal 3:35
23. Lady Of Carlisle 3:37
24. Spanish Is A Loving Tongue 3:27
25. The Greenwood Side (The Cruel Mother) 2:30
26. Every Night When The Sun Goes Down 4:13

CD 2
Northern Journey (1964)
1. You Were On My Mind 2:47
2. Moonshine Can 2:16
3. The Jealous Lover 2:55
4. Four Rode By 2:42
5. Brave Wolfe 5:26
6. Nova Scotia Farewell 2:51
7. Someday Soon 2:20
8. Little Beggarman 2:23
9. Texas Rangers 3:27
10. The Ghost Lover 2:46
11. Captain Woodstock's Courtship 2:56
12. Green Valley 4:02
13. Swing Down, Chariot 2:09
Early Morning Rain (1965)
14. Come In Stranger 1:58
15. Early Morning Rain 3:57
16. Nancy Whiskey 2:37
17. Awake Ye Drowsy Sleepers 3:28
18. Marlborough Street Blues 2:18
19. Darcy Farrow 3:30
20. Travelling Drummer 2:28
21. Maude's Blues 4:01
22. Red Velvet 2:18
23. I'll Bid My Heart Be Still 2:51
24. For Lovin' Me 2:18
25. Song For Canada 4:07

CD 3
Play One More (1966)
1. Short Grass 2:19
2. The French Girl 2:43
3. When I Was A Cowboy 3:49
4. Changes 3:32
5. Gifts Are For Giving 3:16
6. Molly And Tenbrooks 3:29
7. Hey, What About Me 3:25
8. Lonely Girls 2:41
9. Satisfied Mind 3:35
10. Twenty Four Hours From Tulsa 3:06
11. Friends Of Mine 3:39
12. Play One More 3:03
So Much for Dreaming (1967)
13. The Circle Game 3:01
14. So Much For Dreaming 3:03
15. Wild Geese 3:59
16. Child Apart 3:30
17. Summer Wages 4:04
18. Hold Tight 2:39
19. Cutty Wren 2:56
20. Si Les Bateaux 3:42
21. Catfish Blues 3:36
22. Come All Ye Fair And Tender Ladies 3:25
23. January Morning 3:07
24. Grey Morning 2:47

CD 4
BONUS
Nashville
1. The Mighty Quinn 2:52
2. Wheels On Fire 3:47
3. Farewell To The North 3:45
4. Taking Care Of Business 3:14
5. Southern Comfort 5:04
6. Ballad Of The Ugly Man 2:34
7. Ninety Degrees X Ninety Degrees 2:41
8. She'll Be Gone 2:42
9. London Life 2:44
10. The Renegade 3:40
11. House Of Cards 4:04
Others
12. Every Time I Feel The Spirit 1:48
13. Rocks and Gravel (Alternate Take) 2:40
14. Keep On The Sunny Side 3:26
15. Je T'Aime Marielle 3:32


Sylvia Tyson - vocals, autoharp
Ian Tyson - vocals, guitar, autoharp
&
Monte Dunn
- guitar, mandolin
John Herald - guitar
David Rea - guitar
Rick Turner - guitar
Paul Griffin - organ
Art Davis - string bass
Robert Bushnell - bass
Felix Pappalardi - bass
Russ Savakus - bass
Eric Weissberg - Bass
Al Rogers - drums

Un grand merci à Jeepeedee dont il s'agit bel et bien du rip !

vendredi 24 janvier 2014

Premier Tom

Tom Waits "Closing Time" (1973)
ou "Le début de l'Histoire"


Pour ceux qui ne connaissent de Tom Waits que la seconde période, post-Asylum records, de sa carrière, Closing Time paraitra bien sage, presque commune dans sa faconde jazzy bluesy folky mais...

Parce qu'il y a un mais, et de taille ! En l'occurrence la grâce de compositions à l'époque plus connues par d'autres que par Mr. Waits : Ol' 55 par les Eagles, Martha par Tim Buckley, etc.
Qu'on se le dise, dès 73, dès ce premier album sorti alors qu'il n'a pas encore 25 ans, Tom Waits s'impose comme un songwriter d'exception même si, musicalement, on est encore bien loin des bizarreries à venir.
Présentement, loin des canons stylistiques alors en vogue, Waits étale son amour pour une musique un peu surannée, plutôt nostalgique. Lui même le dit d'ailleurs, il ne se sent pas très en phase avec ce qui l'entoure, plus Nat King Cole que Grateful Dead, pour simplifier, il aime à pianoter de belles chansons souvent tristes où sa belle voix, possédant déjà cette fêlure si distinctive alors qu'il n'a que 25 ans !, fait merveille.
Mais l'album n'est pas si jazz que Tom l'aurait souhaité, la faute à un Jerry Yester essayant de le rapprocher des folkeux contemporains quand le piano jazz souhaité par le jeune homme est assez out. Ça s'entend sur l'album qui est, de fait, un compromis entre les désirs de l'artiste et ceux de son producteur. Ce qui n'enlève évidemment rien à des compositions de qualité telles que Ol' 55, I Hope That I Don't Fall in Love with You, Martha, Ice Cream Man, etc., parce que tout est bon ici ! Allez, si on veut vraiment pinailler on regrettera que seul Ice Cream Man accélère le tempo d'un album sinon constitué de belles ballades douces-amères. Que Tom confectionne si bien que, vraiment, c'est pour trouver quelque chose à redire à ce festin mélodique et compositionnel de tous les instants où, petite précision pas inutile, Waits est bien secondé, en particulier par le trompettiste Delbert Bennett.

Closing Time, c'est un autre Tom, encore un poil hésitant mais à la plume déjà très sûre. Un fort bel album aussi, toujours aussi frais et émouvant plus de 40 ans après sa sortie. En un mot comme en mille : un classique !


1. Ol' '55 3:58
2. I Hope That I Don't Fall in Love with You 3:54
3. Virginia Avenue 3:10
4. Old Shoes (& Picture Postcards) 3:40
5. Midnight Lullaby 3:26
6. Martha 4:30
7. Rosie 4:03
8. Lonely 3:12
9. Ice Cream Man 3:05
10. Little Trip to Heaven (On the Wings of Your Love) 3:38
11. Grapefruit Moon 4:50
12. Closing Time 4:20


Tom Waits – vocals, piano, celeste, guitar
Delbert Bennett – trumpet
Shep Cooke – guitar; backing vocals on "I Hope That I Don't Fall in Love with You" and "Old Shoes (& Picture Postcards)"
Peter Klimes – guitar
Bill Plummer – bass guitar
John Seiter – drums, backing vocals
&
Arni Egilsson – bass guitar on "Closing Time"
Jesse Ehrlich – cello
Tony Terran – trumpet on "Closing Time"

jeudi 23 janvier 2014

N'goni m'botte !

Bassekou Kouyaté & N'goni Ba "I Speak Fula" (2009)
ou "African (happy) blues"


Là où beaucoup se contentent de faire perdurer la tradition, le malien Bassekou Kouyaté innove en la fusionnant avec des racines blues nord-américaines pour un résultat au-dessus de tout soupçon.

Compagnon de route, entre autre, d'Ali Farka Touré, Bassekou Kouyaté partage avec le défunt sage un amour pour l'ouverture vers l'occident et plus précisément le blues états-unien. Pas vraiment surprenant quand on prend en compte que le blues, fondamentalement, est l'héritier des chants d'esclaves amené sur le nouveau continent lors d'une page noire de l'histoire de la civilisation humaine. Plus quand on prend en compte l'instrument star de l'album, le n'goni, sorte de luth d'Afrique de l'Ouest rarement aperçu en dehors de la musique traditionnelle pure et dure.
Gracieuse et joyeuse, majoritairement uptempo, la musique d'I Speak Fula reste cependant fondamentalement africaine. Elle est l'occasion d'un trip assez unique en compagnie de musiciens doués sur des compositions immédiatement accessibles. Des instrumentistes, tous de haut niveau, on remarquera particulièrement le leader et son agilité de soliste à faire pâlir d'envie tous les six-cordistes de la planète sur un instrument pourtant plus "primitif". C'est aussi l'occasion de recroiser quelques grands maliens déjà aperçus ailleurs (Vieux Farka Touré, le fils d'Ali; Toumani Diabté, déjà brillant sur l'Ali & Toumani sorti poshtumément en 2010) et qu'il fait bon réentendre en pareil et savoureux contexte.

Typiquement africain dans sa gravité joyeuse, sa festivité pas pouet-pouet pour deux sous, I Speak Fula est un parangon de blues africain à recommander à tous.Un exemple d'une Afrique n'ayant pas peur de se frotter à l'occident sans y perdre son âme. Un bel album.


1. I Speak Fula 3:41
2. Jamana Be Diya 4:59
3. Musow (For Our Women) 5:26
4. Torin Torin 4:47
5. Bambugu Blues 5:05
6. Amy 4:31
7. Saro 3:48
8. Ladon 5:31
9. Tineni 4:55
10. Falani 5:45
11. Moustapha 7:46


Bassekou Kouyaté: solo n'goni, n'goniba
Amy Sacko: lead vocals (1-4, 6-9, 11), chorus
Omar Barou Kouyaté: medium n'goni
Fousseyni Kouyaté: n'goniba
Moussa Bah: bass n'goni
Alou Coulibaly: calabash, chorus
Moussa Sissoko: yabara, tamani
Kasse Mady Diabaté: vocals (2)
Vieux Farka Touré: electric guitar (5, 7)
Toumani Diabaté: kora (2, 9)
Harouna Samaké: kamalengoni (3, 4)
Zoumana Tereta: lead vocal, soku (6)
Andra Kouyaté: chorus, lead vocals (5)
Mah Soumano: chorus; Baba Sissoko: dunun (7)
Baba Diabaté: dunun (3)
Jelimusoba: mpolon (11)

mercredi 22 janvier 2014

Les fils d'Ariane

Ariane Moffatt "Trauma" (2010)
ou "Cover girl"


Une fois n'est pas coutume, je vous livre aujourd'hui un album qui n'existe pas. Enfin, pas tout à fait.

Trauma est, de fait, une collection de reprises jamais parues dans le commerce outre quelque plateforme de téléchargement dont l'appellation m'échappe.
On y retrouve 8 titres pour 29 trop courtes minutes où la singer/songwriter québecoise Ariane Moffatt, habituellement plutôt versée dans l'expression francophone, s'approprie quelques classiques anglo-saxons les retravaillant à sa sauce sans tenter de réinventer la roue. C'est charmant, doux comme une caresse, pas forcément transcendantal mais devrait plaire aux amateurs de reprises bien troussées dont je sais que certains passent régulièrement par ici. Personnellement, je n'en attendais pas plus et suis donc tout à fait satisfait du résultat, d'où le partage !
Enfin, comme il n'y avait pas de pochette pour illustrer la collection, je m'y suis modestement collé, j'espère que vous apprécierez.

Et à part ça ? Ha oui, le titre vient de la série télévisée pour laquelle lesdites reprises furent enregistrées. Et maintenant, enjoie !


1. Hallelujah (Leonard Cohen) 5:26
2. Be My Baby (The Ronettes) 2:34
3. Goodnight Moon (Shivaree) 3:29
4. Everybody Hurts (R.E.M.) 4:25
5. Where Is My Mind (Pixies) 3:04
6. It's a Man's Man's World (James Brown) 3:04
7. In My Secret Life (Leonard Cohen) 3:28
8. The Greatest (Cat Power) 3:27

ERRATUM
L'album existe bien (même s'il est cher, 60€ sur Amazon par exemple).
En voici la (vraie) pochette sanguinolente :

mardi 21 janvier 2014

I love cello! (Friedlander über alles)

Erik Friedlander, Mike Sarin, Trevor Dunn "Broken Arm Trio" (2008)
ou "Chamber Jazz"


Des fois, l'obsession a du bon ! Prenez le Broken Arm Trio d'Erik Friedlander, Mike Sarin et Trevor Dunn, je n'aurais été atteint de zornophagie aigüe, je serais probablement passé à côté de ce délicieux album de jazz de chambre mené par le pizzicato précis et précieux d'un partenaire régulier de l'ami John... Vraiment, des fois l'obsession a du bon !

Parce que le Broken Arm Trio , mené donc par Erik Friedlander membre de l'excellent Masada String Trio et interprète d'un des plus beaux Book of Angels (Volac), délivre une performance qui, tant mélodiquement que techniquement, épate.
Mélodiquement parce que ces treize pièces fusionnant allègrement jazz, klezmer et americana aux mélodies accrocheuses frappent direct au cœur et respirent la joie de jouer d'un trio qui s'est bien trouvé.
Techniquement, parce que, n'en déplaise aux amateurs de primitivisme musical, il est tout de même très agréable d'entendre de la musique expertement jouée par trois musiciens aux compétences plus à démontrer. On goute particulièrement à la frappe toute en finesse de Mike Sarin, l’abattage joyeux de Trevor Dunn et, évidemment !, le divin pizzicato (pas d'archet ici !) du maître de cérémonie.
Pour la petite histoire, le nom de la formation (le trio bras cassé) est un hommage direct à Oscar Pettiford qui, s'étant cassé le bras, se redéfinit en violoncelliste. On y retrouve d'ailleurs l'influence du défunt mais pas les stridences et emportements dont il fut coutumier.

Petit album sans prétention mais pas sans ambition, Broken Arm Trio, tournera longtemps sur la platine de ceux qui goutent à ce jazz à la fois ludique et enlevé, ouvert d'esprit, intelligent et abordable. Un vrai tour de force !


1. Spinning Plates 3:23
2. Pearls 4:36
3. Knife Points 2:36
4. Jim Zipper 1:08
5. Pretty Penny 4:15
6. Easy 6:10
7. Cake 3:38
8. Buffalo 1:30
9. Hop Skip 6:47
10. Ink 2:01
11. Big Shoes 4:13
12. In The Spirit 4:00
13. Tiny's 4:44
(plus d'extraits sur la page CD BABY de l'album)


Erik Friedlander - cello
Trevor Dunn - bass
Mike Sarin - drums

lundi 20 janvier 2014

Devoir de mémoire (3)

David Baerwald "Triage" (1993)
ou "This is America"


Dans la série : "Je vous parie que vous n'avez jamais entendu parler de cet oiseau-là", je vous présente David Baerwald, auteur/compositeur/interprète ayant connu quelques succès au sein de David & David dans la seconde moitié des années 80 ou pour sa participation à la bande-originale du Moulin Rouge de Baz Luhrman. David Baerwald a souvent œuvré loin des préoccupations du grand public qui ne sait pas ce qu'il perd.

Triage est le second album solo de Baerwald après l'aimable mais pas transcendant Bedtime Stories, un album trop poli pour que les chansons qu'on y trouve accomplissent leur plein potentiel. C'est, évidemment, une tout autre histoire avec ce Triage ou Baerwald "explose" son adult-folk-rock pour lui faire rejoindre des sommets rarement atteints.
Dès la première composition, "A Secret Silken World", il est évident qu'une énorme somme de travail a été engagée pour obtenir un tel résultat. Pourtant le morceau est fluide mais regorge, ce que démontre une "inspection" détaillée, de moult détails enrichissant subtilement une composition déjà d'une grande force où les esprits des Beach Boys et de Miles Davis sont discrètement convoqués pour un résultat du plus bel effet.
Tout l'album est à l'avenant, avec son lot de guitares tranchantes (juste ce qu'il faut), d'influences folk ou jazz, de textures sonores visiblement très pensées et de textes finement politisés, glorieusement protestataires n'épargnant pas, l'artwork est "spot on" pour le coup, son Amérique natale. Autant de preuves de l'excellence de Baerwald en tant que songwriter (pas surprenant quand on voit la longue liste d'artistes avec lesquels il a collaboré sous son nom ou un pseudonyme, de l'iconique Pavarotti à la chanteuse country LeAnn Rimes, l'ex Bangles Susana Hoffs, Sheryl Crow dont il aida grandement à lancer la carrière ou encore l'outlaw ultime de la country, Waylon Jennings).
A vrai dire, on a beau chercher, il n'est pas simple de trouver quelque faille que ce soit en ce Triage. Eventuellement, ceux qui sont particulièrement allergique à toute musique (dans l'ensemble) adulte ne trouveront pas ici leur bonheur. Il est vrai qu'à chercher à comparer cet album à ceux d'autres artistes contemporains, on évoquera volontiers Sting et Peter Gabriel - bien qu'une évidente américanité démarque Triage des œuvres de ces deux icones britanniques- ou encore de Paul Simon ou Randy Newman pour ses compatriotes. Aucune de ces comparaisons ne rendant tout à fait justice à la large palette de Baerwald, une écoute attentive sera la meilleure façon de juger de la qualité de l'ensemble.

Personnellement, ayant découvert cet album dès sa sortie, je suis surpris de la relative absence d'usure que de nombreuses écoutes auraient, en toute logique, dû entraîner. Il n'en est rien ici et si Triage demeure une œuvre d'une telle force quasiment vingt ans après son apparition c'est tout simplement à la force des ses compositions et à la relative intemporalité de son écriture qu'il le doit.


1. A Secret Silken World 7:41
2. The Got No Shotgun Hydra Head Octopus Blues 4:26
3. Nobody 4:33
4. The Waiter 5:03
5. AIDS and Armageddon 5:32
6. The Postman 5:35
7. A Bitter Tree 3:32
8. China Lake 4:37
9. A Brand New Morning 4:38
10. Born for Love 6:22
(un seul extrait disponible sur youtube mais, croyez-moi, cet album mérite votre attention)


David Baerwald: Bass, Guitar, Keyboards, Organ, Vocals
Bill Bottrell: Guitar, Keyboards, Loops, Vocals
Dan Schwartz: Bass, Guitar
Kevin Gilbert: Drums, Piano
Herb Alpert: Trumpet
Gregg Arreguin: Guitar
David Kemper: Drums
Brian Macleod: Drums


Un album dont vous voudriez que les gens se souviennent ? N'hésitez pas à la partager (avec un petit texte d'accompagnement si possible), je me ferai un plaisir de le poster.
zornophage[at]gmail[dot]com

.Recyclé de la Caverne d'Ali Baba.

dimanche 19 janvier 2014

Mystic Hiatt

John Hiatt "Mystic Pinball" (2012)
ou "Racines"


Contrairement à ce que la pochette pourrait laisser entendre, c'est avec un album plutôt focus que le singer/songwriter vétéran John Hiatt nous revient en 2012. Un album fermement ancré dans les racines de la musique nord-américaine, aussi, et c'est une élégante et bienvenue manière de dignement fêter son déjà 60ème anniversaire.

Ceci dit, qui dit Roots ne dit pas forcément musique pépère, acoustique et idéale pour un coin de feu comme ce fut grosso modo le cas de son précédent album, le très produit (et donc un peu clinique) Dirty Jeans and Mudslide Hymns (sorti il y a tout juste un an). Non, cette fois c'est d'humeur jammy et groovy qu'Hiatt revient avec un répertoire, évidemment, taillé pour la circonstance où blues, country rock, accents jazzy et même funky roulent de bonheur sous nos yeux ébahis. Musicalement, il serait trop simple de rapprocher Hiatt d'un Springsteen, d'un Petty ou d'un Mellencamp (même s'il y a de ça), le malin John est bien trop distancié et rigolard pour incarner le working class hero, le blue collar boy. Si rapprochement il doit y avoir, présentement, on évoquera plus volontiers un Randy Newman survitaminé, un Dr. John devoodooisé voire (en cherchant vraiment bien) Tom Waits quand il se prend pour un rocker (My Business).

Bien produit (Kevin Shirley aux manettes), bien joué aussi (par des musiciens dont le nom vous échappera probablement autant qu'à moi mais qu'on imagine facilement comme une belle brochette de requins roués à tous les exercices) et servi par de bonnes chansons (desquelles les plus rythmées, pas forcément les plus rapides !, voir le délicieux slow shuffling blues Wood Chipper, sont globalement les plus convaincantes), c'est une réussite pour un artiste quasiment inconnu chez nous (malgré quelques très beaux albums tels que Slow Turning, Bring The Family ou Same Old Man) et dont la belle voix burinée par les ans, les vents et divers spiritueux mérite amplement un plus brillant éclairage que celui qu'il a reçu chez nous depuis ses débuts... Il y a presque 40 ans de ça !

L’œuvre révolutionnera-t-elle le catalogue d'Hiatt ? Certainement pas mas, avouons, ça fait un bien fou, en 2012, de voir quelques vieilles barbes, dont Hiatt bien entendu, rappeler aux jeunots qu'ils savent encore faire et n'on pas rendu les armes.

Recommandé.


1. We're Alright Now 4:23
2. Bite Marks 3:37
3. It All Comes Back Someday 3:38
4. Wood Chipper 4:36
5. My Business 3:07
6. I Just Don't Know What To Say 4:38
7. I Know How To Lose You 3:49
8. You're All The Reason I Need 3:47
9. One Of Them Damn Days 2:46
10. No Wicked Grin 3:56
11. Give It Up 4:09
12. Blues Can't Even Find Me 3:35


John Hiatt: guitare, orgue, piano, chant
Doug Lancio: dobro, guitare, mandoline
Russ Pahl: pedal steel guitare
Arlan Schierbaum: orgue, piano
Patrick O'Hearn: basse
Kenneth Blevins: batterie, percussions
Ron Dziubla: saxophone
Doug Henthorn: choeurs
Brandon Young: choeurs

.Recyclé de la Caverne d'Ali Baba.

samedi 18 janvier 2014

Cure de désintégration

The Cure "Disintegration (Deluxe Edition)" (1989/2010)
ou "Le dernier classique"


Je ne sais pas si vous avez remarqué mais le format "deluxe" se généralisant, l'intérêt des sorties dépérit à force de lives sans intérêts ajoutés à des albums surestimés. Le concept, de fait, est devenu un simple outil marketing de plus pour faire cracher au bassinet des fans qui, fort heureusement, ne marchent pas toujours dans la grosse combine cousue de fil blanc.

Ce n'est pas le cas de cette édition du Disintegration e The Cure, soigneusement remastérisé et bonussé de vrais beaux suppléments sous la supervision pointilleuse d'un Robert Smith, gardien de son propre temple s'il en fut. On a d'ailleurs plus envie d'appeler ce deluxe The Story of Disintegration que par son  sobriquet originel. Et de l'écouter dans l'ordre historique pour gouter pleinement l'expérience.
Et donc, on commence directement par le second cd, les Rarities 1988-1989, proposant la genèse, depuis l'home studio du sieur Smith en passant par la rencontre du matériau créé par le patron avec ses musiciens du moment en répétition pour finalement se retrouver en studio pour son développement final. L'écoute de ce disque 2 n'est pas forcément toujours très captivante et la musique proposée parfois mal dégrossie mais l'intérêt n'est pas, présentement, dans une perfection mélodique ou audiophile mais bien dans le "comment" The Cure en est arrivé, en 1989, à pondre ce qui reste encore aujourd'hui, et restera vraisemblablement, son dernier grand classique.
Passé le "work in progress", il est temps d'attaquer le vif du sujet : l'album ! Et c'est un Cure sur le retour, balayant d'un revers de main l'ère la plus commerciale de sa carrière, qui s'avance. Il en reste bien quelques éléments (les singles Lullaby et Love Song) mais la tonalité est tout autre, plus sombre, plus hypnotique, avec des tempi largement décélérés et des ambiances globalement beaucoup plus réussies. Le résultat, moins accrocheur que les pop songs presques sucrées de The Head on the Door et Kiss Me Kiss Me Kiss Me, n'en est pas moins séduisant même s'il s'adresse audiblement à un public fidèle plus qu'aux masses qui ont fait le succès des deux précédents précités. Du vrai Cure, en somme où pas une chanson ne fait tâche, où pas une mélodie ne parait téléphonée. Un vrai tour de force.
Et du studio à la scène, il n'y a qu'un pas que ce foisonnant deluxe nous fais franchir allègrement sur le troisième CD. En toute honnêteté, c'est l'étape la moins intéressante de ce deluxe sinon irréprochable. Pas que le live en question, enregistré à Wembley, soit de mauvaise qualité, il ne l'est pas, simplement que l'évolution entre le studio et la scène n'est pas suffisamment marquante pour justifier l'addition. Mais bon, on ne boude pas son plaisir d'entendre de bonnes compositions interprétées par un groupe inspiré. Pas obligatoire donc mais sympathique, un ajout qui sera surtout apprécié de ceux qui en veulent toujours plus et, pour le coup, en auront pour leur argent.

Au final, le Disintegration deluxe n'est pas seulement un objet destiné au zélotes de Robert Smith & Co. Exploration d'un album de sa naissance à sa performance publique, c'est un tour d'horizon passionnant qui, à la condition que vous soyez un tant soit peu intéressé par le genre de new wave gothique et ambiante de qualité (très) supérieure qui y figure, vous tiendra aisément en haleine. Avec plus de 3h30 de musique au programme, la performance se doit d'être notée.


CD 1: Album
1. Plainsong 5:17
2. Pictures of You 7:28
3. Closedown 4:19
4. Lovesong 3:29
5. Last Dance 4:45
6. Lullaby 4:09
7. Fascination Street 5:16
8. Prayers for Rain 6:08
9. The Same Deep Water as You 9:22
10. Disintegration 8:21
11. Homesick 7:08
12. Untitled 6:30

CD 2: Rarities 1988–1989
1. Prayers for Rain [Robert Smith home demo (Instrumental) – 4/88] 3:01
2. Pictures of You [Robert Smith home demo (Instrumental) – 4/88] 3:31
3. Fascination Street [Robert Smith home demo (Instrumental) – 4/88] 2:41
4. Homesick [Band rehearsal (Instrumental) – 6/88] 3:14
5. Fear of Ghosts [Band rehearsal (Instrumental) – 6/88] 2:59
6. Noheart [Band rehearsal (Instrumental) – 6/88] 2:41
7. Esten [Band demo (Instrumental) – 9/88] 3:15
8. Closedown [Band demo (Instrumental) – 9/88] 2:50
9. Lovesong [Band demo (Instrumental) – 9/88] 3:41
10. 2Late (alternate version) [Band demo (Instrumental) – 9/88] 2:52
11. The Same Deep Water as You [Band demo (Instrumental) – 9/88] 6:06
12. Disintegration [Band demo (Instrumental) – 9/88] 6:37
13. Untitled (alternate version) [Studio rough (Instrumental) – 11/88] 3:39
14. Babble (alternate version) [Studio rough (Instrumental) – 11/88] 3:00
15. Plainsong [Studio rough (Guide vocal) – 11/88] 4:45
16. Last Dance [Studio rough (Guide vocal) – 11/88] 4:43
17. Lullaby [Studio rough (Guide vocal) – 11/88] 3:48
18. Out of Mind [Studio rough (Guide vocal) – 11/88] 3:00
19. Delirious Night [Rough mix (vocal) – 12/88] 4:31
20. Pirate Ships (Robert Smith solo) [Rough mix (vocal) – 12/89] 3:31

CD 3: Entreat Plus: Live at Wembley 1989
1. Plainsong 5:19
2. Pictures of You 7:04
3. Closedown 4:21
4. Lovesong 3:04
5. Last Dance 4:37
6. Lullaby 4:14
7. Fascination Street 5:10
8. Prayers for Rain 4:49
9. The Same Deep Water as You 10:03
10. Disintegration 7:54
11. Homesick 6:47
12. Untitled 6:44


Robert Smith – vocals, guitars, keyboards, 6-string bass
Simon Gallup – bass guitar, keyboards
Porl Thompson – guitars
Boris Williams – drums
Roger O'Donnell – keyboards
&
Lol Tolhurst
– credited for "other instruments", but later revealed to have involvement only in creating basis for song Homesick.

vendredi 17 janvier 2014

Que d'os, que d'os !

Tom Waits "Bone Machine" (1992)
ou "Le cauchemar de Mr. Waits"


5 ans ! Il aura fallu attendre 5 ans pour découvrir le tant attendu successeur du déjà très réussi Frank's Wild Years... Une éternité, mais le jeu en valait la chandelle. Pour patienter, il y aura bien eu le live Big Time, la bande-son du Night on Earth de Jim Jarmush mais dieu que cette dixième oeuvre de l'improbable californien aura été attendue !

Pour le coup, c'est un Tom Waits bien noir, lugubre même, qui nous revient. Parce que dès sa pochette (signée Jesse Dylan, fils de Bob), pochette qui ne ment pas, Bone Machine s'affiche comme un étrange animal, une exploration quasi-gothique du versant waitsien de la musique américaine où, c'est heureux, les belles ballades tristes, qui sont devenues la trademark du possédé, ne sont pas totalement absentes et servent idéalement de respiration dans un ensemble plutôt beaucoup plus étrange et claustrophobe que ce que Tom avait eu l'habitude de livrer jusqu'alors. Et c'est en grande partie à cette intense bizarrerie assumée, à cette absolue noirceur que reviennent l'exceptionnelle réussite artistique de l'album.
Parce que si état de grâce compositionnelle et sonore il y a indéniablement, pour la rigolade, vous repasserez ! Obsédé par la mort textuellement, Bone Machine s'affiche en blues cassé et percussif orné des croassements si immédiatement du Maître de Cérémonie. De fait, pour parvenir à ses noirs desseins, Waits remanie en partie ses accompagnateurs, trouvant d'idéals nouveaux partenaires de jeu dans la (alors) jeune génération en la personne de Les Claypool et Brain des agités du bocal de Primus. Le résultat, outres les belles ballades tristes précitées, est souvent glaçant avec Tom en grand ordonnateur vaudou, en touche-à-tout instrumental aussi.
Les meilleurs moments ? Tous ! Même quand l'invité de luxe Keith Richards y va de sa guitare et de sa gorge (That Feel, qui clôt l'album), même quand un chicano rocker de Los Lobos, David Hidalgo sur Whistle Down the Wind, vient poser son habituellement clicheteux violon et accordéon (pas ici !), c'est dire !

Sur la lancée de cette épatante réussite, Tom Waits sortira son petit frère bâtard trop ambitieux, The Black Rider qui, s'il comporte quelques très beaux moments, n'a ni la classe ni l'esprit ni l'ambiance de son glorieux devancier. Un de chute pour Tom qui se remettra bien vite, mais ça vous le savez déjà. Reste donc Bone Machine, beau de toute sa laideur, laid de toute sa beauté, un opus noir toujours aussi indispensable. Le meilleur de Tom ? Peut-être même bien !


1. Earth Died Screaming 3:39
2. Dirt in the Ground 4:08
3. Such a Scream 2:07
4. All Stripped Down 3:04
5. Who Are You 3:58
6. The Ocean Doesn't Want Me 1:51
7. Jesus Gonna Be Here 3:21
8. A Little Rain (for Clyde) 2:58
9. In the Colosseum 4:50
10. Goin' Out West 3:19
11. Murder in the Red Barn 4:29
12. Black Wings 4:37
13. Whistle Down the Wind (for Tom Jans) 4:36
14. I Don't Wanna Grow Up 2:31
15. Let Me Get Up on It 0:55
16. That Feel 3:11


Tom Waits - Vocals (all songs), Chamberlin (1,6,9), Percussion (1,3,4,5,6,15), Guitar (1,3,5,12,14,16), Sticks (1), Piano (2,13), Upright Bass (7), Conundrum (9), Drums (10,11,12,16), Acoustic Guitar (14)
Brain - Drums (3,9)
Kathleen Brennan - Sticks (1)
Ralph Carney - Alto Sax (2,3), Tenor Sax (2,3), Bass Clarinet (2)
Les Claypool - Electric Bass (1)
Joe Gore - Guitar (4,10,12)
David Hidalgo - Violin (13), Accordion (13)
Joe Marquez - Sticks (1), Banjo (11)
David Phillips - Pedal Steel Guitar (8,13), Steel Guitar (16)
Keith Richards - Guitar (16), Vocal (16)
Larry Taylor - Upright Bass (1,2,4,5,8,9,10,11,12,14,16), Guitar (7)
Waddy Wachtel - Guitar (16)

jeudi 16 janvier 2014

Bashung biblique, western Alain (et Chloé ! et Rodolphe !)

Alain Bashung, Rodolphe Burger et Chloé Mons "Cantique des Cantiques" (2002)
ou "Alain soit loué"


Si le Cantique des Cantiques (Chir ha-chirim en hébreux) a inspiré de nombreuses œuvres classiques, rares sont ceux qui, dans l'idiome pop, rock ou jazz, avaient osé s'attaquer à cette suite de poèmes bibliques référentielle et sensuelle, sans doute par révérence pour un texte quasi-intouchable mais aussi par différent culturel. Aussi quand Alain Bashung et sa nouvelle épouse, Chloé Mons, en créent leur propre version en 2002, les oreilles se tendent prêtes à capter un évènement rare. Prêtes aussi à tomber sur le râble d'un projet trop ambitieux ?

De son interprétation, lors des noces des deux tourtereaux, il ne resterait de traces que dans les souvenirs de quelques proches/privilégiés qui y assistèrent si quelques microphones n'avaient été judicieusement placés dans l'église Pas-de-Calaisienne hôtesse de l'évènement. Fort heureusement, parce que l'expérience du duo vocal, mise en musique par l'ex-Kat Onoma Rodolphe Burger qui les accompagne pour la circonstance sur une nouvelle traduction de l'écrivain Olivier Cadiot, mérite que l'on s'y penche avec une attention religieuse, et pas seulement parce que Bashung nous a depuis quitté.
Or, donc, ces deux (ou trois, ou quatre) ont osé. Grand bien leur en prit parce que ces 27 minutes coupent littéralement le souffle de l'auditeur pantois. Déjà parce que le texte en impose et qu'à défaut de comprendre le latin, l'hébreu ou l'araméen, on apprécie la version Cadiot à sa juste valeur. Ensuite parce que les voix d'Alain et de Chloé lui donne admirablement vie, ce qui permet, au passage, de se souvenir le conteur d'exception que fut M. Bashung. Enfin parce que la mise en musique de Rodolphe Burger offre l'écrin, minimaliste mais riche, intense et contrasté, qu'il lui fallait. Qui plus est, la captation est parfaite, organique et chaude comme il se doit, vibrante des murs de l'église d'Audighen.

Le profane et le sacré, une alliance particulièrement réussie ici. Qu'est-ce qu'on dit ? Bravo.


1. Cantique des Cantiques 26:58
(écoute en streaming)


Alain Bashung - voix, harmonica
Chloé Mons - voix
Rodolphe Burger - musique
Olivier Cadiot - traduction


Alain Bashung, Rodolphe Burger et Chloé Mons "La Ballade de Calamity Jane" (2006)
ou "to the West"


A partir des lettres que Calamity Jane écrivit à sa fille, c'est à un film sans image que nous invitent Chloé Mons, Rodolophe Burger et Alain Bashung, une triplette qui avait déjà réussi son Cantique des Cantiques et qui vise à nouveau en plein cœur sur cet album unique et trop méconnu.

Concrètement, l'album est double, d'un côté des chansons éthérées inspirées des écrits de Calamity Jane majoritairement chantées par Chloé (avec quelques interventions remarquées d'Alain), de l'autre des lectures d'extraits des fameuses lettres par Alain ambiancées de quelques notes d'harmonica, de quelques bruitages percussifs discrets et de quelques licks de guitare de Rodolphe Burger. A priori, on se dit que le cadencement 1/2 (une chanson souvent courte, une lecture généralement plus longue) risque d'être le talon d'Achille de l'exercice, il n'en est rien l’œuvre fonctionnant parfaitement telle quelle. On y a un grand plaisir de retrouver les dons de lecteur, de conteur même, d'Alain et pas de réserve sur la voix de Chloé sur des chansons cependant moins substantielles qu'on ne l'aurait souhaité. Le tout, puisque c'est un concept, une bande-son filmique sans image, s'imbrique sans paraitre artificiel et donne à l'auditeur de fort belles émotions lui permettant de découvrir des textes vrais d'un vieil ouest sauvage trop souvent fantasmé. Parce qu'il y a de la véracité ici, une authenticité bien loin de la vision hollywoodienne ou spaghetti de la chose.

Comme le dit le livret accompagnant l'album, "La Ballade de Calamity Jane est un film à regarder les yeux fermés", un voyage qu'on partage avec trois artistes à la créativité sans borne, un album chaudement recommandé.


1. Introduction 0:37
2. Saddle in the Wind 1:55
3. Lecture 2:20
4. I'll See Your Eyes Again 1:14
5. Lecture 7:38
6. Bill and Jane 1:48
7. Lecture 6:21
8. See You Later 1:21
9. Lecture 2:39
10. Sad and Free 1:54
11. Lecture 3:41
12. By the River 2:31
13. Lecture 2:26
14. Old and Queer 2:12
15. Lecture 1:01
16. To Bill 4:01


Alain Bashung - voix, harmonica
Chloé Mons - voix
Rodolphe Burger - guitare, voix
Marco De Oliveira - percussions

NB: les deux en un lien !

mercredi 15 janvier 2014

Highland Funk !


Average White Band "Show Your Hand/How Sweet Can You Get/Average White Band" (2009)
ou "Au dessus de la moyenne"


Voir un groupe de Soul'n'Funk d'exception débarquer d'Ecosse au début de années 70 ne devrait surprendre personne, le nord du Royaume Uni ayant, déjà à l'époque, une vraie propension à recycler avec talent la musique à gigoter du popotin noire américaine (un peu comme les irlandais s'y entendent en blues). C'est donc sans étonnement, quoiqu'avec une certaine perplexité,  que furent accueillis les débuts du combo d'enkiltés le plus funky de la planète.

Déjà, Average White Band, quel nom tout de même ! Groupe Blanc Moyen ? L'undestatement si cher à nos cousins d'outre-Manche est dans l'air, pas de doute ! Parce que la musique est extrêmement convaincante sur les deux premiers opus, et quelques uns par la suite, ici bonussés d'un album perdu, How Sweet Can You Get?, et de quelques titres supplémentaires pour bonne mesure... Riche, donc.
Tout commence en 1973 avec Show Your Hand mais pas le succès puisque la formation devra attendre l'année suivante, sa signature sur la Warner et un album éponyme du feu de Dieu pour véritablement exploser commercialement. Pourtant, tout est déjà là, une funk/soul resplendissante évoquant ce qui se fait alors de mieux en la matière, de Tower of Power à Blood Sweat and Tears, d'Earth Wind & Fire aux Ohio Players... Et les compositions à l'avenant ! Parce qu'il y a matière à se réjouir sur les 8 titres de cet initial tour de force : voix pleines de soul, cuivres rutilants, grooves implacables, soli triomphants... Une fête de tous les instants mais, donc, pas vraiment de succès et on imagine bien volontiers qu'il ne fut pas facile de "vendre" une bande d'écossais goguenards à des stations soul qui ne manquaient pas d'équivalents afro-américains à diffuser. Il fallut en fait les irrésistibles Pick Up the Pieces, Person to Person ou Work to Do (ce dernier repris des Isley Brothers) sur leur blanc second album, où on retrouve, excusez du peu, les Brecker Brothers en session men de luxe, pour que la garde corporatiste baisse et qu'enfin la mayonnaise prenne. Et que les highlanders du funk s'installent durablement dans les oreilles et dans les cœurs des amateurs du genre.

Un package attractif, une musique inattaquable, un riche livret, la réédition Edsel, quart d'une série de quatre double CDs documentant la période faste de l'Average White Band (1973-1982), est, vous l'aurez compris, un investissement obligatoire, et finalement fort peu onéreux, à qui aime la funk music de qualité. Une bonne façon, aussi, de se remémorer la classe absolue d'un groupe trop souvent oublié aujourd'hui.


CD 1
Show Your Hand (1973)
1. The Jugglers 4:51
2. This World Has Music 5:58
3. Twilight Zone 5:28
4. Put It Where You Want It 5:16
5. Show Your Hand 4:29
6. Back In '67 4:12
7. Reach Out 4:04
8. T.L.C. 8:06
Bonus
9. Reach Out (First Version) 3:43
10. The Jugglers (First Version) 4:05
11. It Didn't Take Me A Minute 2:24
12. In The Beginning 3:45
13. Look Out Now 2:14
14. Back in '67 (First Version) 4:04
15. White Water Dreams 4:00
16. How Can You Go Home? 3:05

CD 2
How Sweet Can You Get (1974)
1. Person To Person 3:23
2. Keepin' It To Myself 3:09
3. There's Always Someone Waiting 5:01
4. McEwan's Export 4:47
5. Got The Love 3:41
6. Work To Do 3:42
7. Just Want To Love You Tonight 4:42
8. Pick Up The Pieces 3:56
9. I Just Can't Give You Up 3:45
10. How Sweet Can You Get? (First Version) 3:41
Average White Band (1974) 
11. You Got It 3:30
12. Got The Love 3:47
13. Pick Up The Pieces 3:54
14. Person To Person 3:36
15. Work To Do 4:20
16. Nothing You Can Do 4:04
17. Just Want To Love You Tonight 3:53
18. Keepin' It To Myself 3:56
19. I Just Can't Give You Up 3:26
20. There's Alway Someone Waiting 5:27


Show Your Hand
Alan Gorrie – bass, guitar, vocals
Hamish Stuart – bass, guitar, vocals
Roger Ball – keyboards, alto saxophone, vocals
Malcolm Duncan – tenor saxophone, vocals
Onnie McIntyre – guitar, vocals
Robbie McIntosh – drums, percussion

Average White Band
Alan Gorrie – lead vocals (on "Keepin' It To Myself" and "There's Always Someone Waiting"), co-lead vocals (on "You Got It", "Work To Do", "Nothing You Can Do", and "Just Wanna Love You Tonight"), background vocals, bass, guitar (on "You Got It")
Hamish Stuart – lead vocals (on "Got The Love", "Person To Person", and "I Just Can't Give You Up"), co-lead vocals (on "You Got It", "Work To Do", "Nothing You Can Do", and "Just Wanna Love You Tonight"), background vocals, lead guitar, bass (on "You Got It")
Roger Ball – keyboards, alto & baritone saxophones
Malcolm (Molly) Duncan – tenor saxophone
Onnie McIntyre – background vocals, guitar, guitar solo on "Work To Do"
Robbie McIntosh – drums, percussion
&
Ralph MacDonald
– congas, percussion
Michael Brecker – tenor saxophone
Randy Brecker – trumpet
Marvin Stamm – trumpet
Mel Davis – trumpet
Glenn Ferris – trombone
Ken Bichel – mellotron (on "Just Wanna Love You Tonight")