dimanche 31 juillet 2016

L’Été Mange-Disques - 7 Erreurs

En vacances, parfois, il est bon de se perdre, parfois, ça procure de belles émotions et crée de jolis souvenirs, parfois c'est le Radeau de la Méduse... Hé bien, en musique, c'est exactement pareil !, ce que cette série de 7 va se faire fort de démontrer. Et... oui, tout de même, Enjoie !

DiMaNCHe
Judas Priest "Turbo" (1986)
ou "Chic ou Toc ?"

De la difficulté de changer de braquet quand on est un groupe déjà largement établi... Parce que Turbo valut son lot d'opprobre à un Judas Priest ayant décidé d'adoucir son heavy metal à l'aulne d'une scène flirtant de plus en plus avec la pop et les aspirations commerciales. Un mauvais album pour autant ? Pas si sûr... Parce qu'il y a un paquet de bonne chansons dans ce Judas Priest si atypique du fait de l'usage de guitares synthés en plus d'une écriture étonnement accrocheuse et accessible. Une surprise ? Au-delà de l'aspect sonique de la galette, pas vraiment, Judas Priest ayant toujours aimé les refrains aisément mémorisables au potentiel tubesque indéniable (il n'y a qu'à écouter Living After Midnight, United ou You've Got Another Thing Comin' pour s'en convaincre). Mais, donc, il y a ce polissage de l'approche, cet inclinaison pop metal qui, euphémisme, ne plaira pas à tous à l'époque et continue de faire débat aujourd'hui. Et pourtant, nous avons probablement échappé au pire Halford, Tipton, Downing & Cie ayant, préalablement, envisagé de collaborer avec les affreux Stock, Aitken & Waterman (vous savez, ces faiseurs de hits britanniques à qui l'on doit les premiers soubresauts de Kylie Minogue, ou les carrières météoriques de Jason Donovan ou Rick Astley), il se dit même que des démos existent de ce mariage contre nature, rien n'est prouvé cependant. Et donc, de bonne chansons, un beau lot d'icelles pour qui peut supporter le parti-pris d'un groupe ayant, reconnaissons-leur, eu le courage d'essayer autre chose. Des exemples ? Presque toute la galette en fait mais un peu plus encore le performant Turbo Lover, l'hymne ado-rebelle un peu idiot mais terriblement accrocheur qu'est Parental Guidance ou la power-ballad Out in the Cold. D'ailleurs l'album sera couronné d'un juste succès réussissant même à mieux se classer dans les charts étasuniens que ceux de leur mère patrie, ce pour quoi il avait d'ailleurs été conçu, assurément. Reprenons, Turbo est une sacrée galette de pop metal dont le plus gros défaut, celui qui lui vaut sa funeste réputation, est d'être attribué à une formation représentant le plus orthodoxe des heavy metal. A partir de là, l'écouter ou pas, dépend de votre goût pour de telles exactions.

1. Turbo Lover 5:33
2. Locked In 4:19
3. Private Property 4:29
4. Parental Guidance 3:25
5. Rock You All Around the World 3:37
6. Out in the Cold 6:27
7. Wild Nights, Hot & Crazy Days 4:39
8. Hot for Love 4:12
9. Reckless 4:17
Bonus
10. All Fired Up (Recorded during the 1985 Turbo sessions) 4:45
11. Locked In (Live at Kiel Auditorium, St. Louis, Missouri; 23 May 1986) 4:24

Rob Halford – vocals
K. K. Downing – guitar
Glenn Tipton – guitar
Ian Hill – bass guitar
Dave Holland – drums
&
Jeff Martin – backing vocals on "Wild Nights, Hot & Crazy Days"

JUDAS PRIEST

LuNDi
Metallica "Load" (1996)
ou "New Mets ?"

Alors qu'ils avaient parfaitement réussi la transition vers un metal plus mainstream mais tout de même suffisamment fidèle à leurs origines soniques pour que les fidèles ne prennent pas ombrage avec le multi-platiné Black Album, les petits gars de Metallica décident de pousser le bouchon carrément beaucoup plus loin, parce qu'ils en ont envie et qu'être le plus gros groupe de metal de tous les temps et ne pas oser assouvir ses pulsions, ce serait idiot. Et donc Hetfield, Ulrich et leurs deux fidèles lieutenants, pas de doute sur qui commande chez les Mets !, osent et laissent galoper libres les chevaux de leur inspiration (appréciez l'image !). Et ça donne... Un album varié où le country rock, le rock sudiste, un metal alternatif teinté de pop et le stoner metal qui monte viennent ouvrir de nouveaux panoramas à ces Four Horsemen qui avaient déjà mis pas mal d'eau dans leur vin le coup d'avant. Du coup, il y a une vraie logique à les entendre ainsi évoluer, à constater qu'avec une quinzaine d'années et une demi-douzaine d'albums à leur compteur ces quatre trentenaires désormais riches comme Crésus ont, fatalement, de nouvelles envies. C'est tout à leur honneur d'ailleurs parce que, en l'espèce, Metallica prend le vrai risque de s'aliéner la partie la plus ancienne de son public, celle qui les suit depuis les débauches thrash de Kill 'Em All. Et c'est ce qui arrivera, fatalement, parce que, pour certaines personnes, de bonnes chansons ne suffisent pas, il leur faut, en plus, l'emballage auquel ils sont habitués... Fuck that! Parce que si tout n'est pas parfait sur Load, si, indéniablement, quelques chansons ressemblent fort à du remplissage (on pensera surtout au "ventre-mou" de l'album, Cure, Poor Twisted Me, Wasting My Hate, rien d'indigne mais rien d’affolant non plus), il reste, sur un album dépassant les 70 minutes !, largement de quoi contenter l'amateur de metal moderne et inspiré. Alors, évidemment, ça envoie moins que ça n'eût envoyé, et, de fait, la mesure et la nuance (toutes proportions gardées) semblent bien être, ici, les nouvelles mammelles de Metallica. Mais que les fidèles les plus aventureux se rassurent, de Metallica, il s'agit bel et bien, encore et toujours. C'est bien-sûr le cas sur les morceaux qui dépotent le plus, un Ain't My Bitch qui pour avoir de vraies influences stoner n'en a pas moins les flaveurs thrashy des quatre de la Bay Area, un King Nothing aux allures de petit frère évolué du mégatube Enter Sandman, un House That Jack Built qui même mené à un train de sénateur à tous les atours du Metallica péri-progressif, ou un Outlaw Torn qui pour sudiste que sont indéniablement ses tentations jammy porte la marque instrumentale de ses créateurs, mais, plus généralement, c'est ce qu'on détecte dans chaque montée de sève de chaque morceau en possédant, soit l'immense majorité d'iceux. Parce qu'outre Mama Said, ballade sudiste ô combien réussie, même quand James, Lars et Cie surprennent (Until It Sleeps et ses airs de grunge poppy, un King Nothing entre roots rock et mélodies pop, un Bleeding Me et un Outlaw TornMetallica s'adonne à l'exercice southern rock avec personnalité et talent, et, évidemment, le petit bout de ballade tire-larmes précité) on n'a jamais le moindre doute sur l'identité de la formation qu'on est en train d'écouter, et qui réussit son pari de l'élargissement au-delà de ce qu'on pouvait espérer, et sans se trahir, donc. Fort. A vrai dire, si vous prenez le gratin du présent, y ajoutez les quelques (très) bon moments de sa "séquelle", Re-Load, vous obtiendrez un Metallica quasiment du niveau des trois classiques originaux, certes un Metallica qui a beaucoup changé mais n'a nullement perdu l'inspiration qui fit de lui le plus gros groupe metal de tous les temps. Load ? Une réussite qu'on n'attendait pas par un groupe qu'on n'attendait pas là, une divine surprise.

1. Ain't My Bitch 5:04
2. 2 X 4 5:28
3. The House Jack Built 6:38
4. Until It Sleeps 4:28
5. King Nothing 5:29
6. Hero of the Day 4:21
7. Bleeding Me 8:18
8. Cure 4:54
9. Poor Twisted Me 4:00
10. Wasting My Hate 3:57
11. Mama Said 5:20
12. Thorn Within 5:51
13. Ronnie 5:17
14. The Outlaw Torn 9:48

James Hetfield – vocals, lead, rhythm guitar
Kirk Hammett – lead, rhythm and slide guitar
Lars Ulrich – drums
Jason Newsted – bass guitar, backing vocals

METALLICA

MaRDi
Kiss "Dynasty" (1979)
ou "Baiser vendu ?"

La fin des haricots ou Kiss à la relance ? Les deux mon général ! A la relance parce que Kiss, qui n'était plus passé par la case studio depuis Love Gun en 1977 et n'avait occupé le terrain que par un presque live (Alive II, 3 faces de live très largement retravaillées en studio, et une studio de piètre intérêt) et quatre albums solo de très inégale qualité (bonne pour Paul et Ace, nettement moins pour Gene et surtout Peter) revient enfin aux affaires. La fin des haricots parce que la formule d'un hard rock franc et direct commence sérieusement à se déliter sur un album ne possédant plus la cohérence stylistique d'hier. Parce que, s'il y a toujours une bonne part de party rock'n'roll, il y a aussi une nouvelle légèreté avec, en particulier, deux disco rocks qui surprendront beaucoup les fans... Et réaffirmeront le succès commercial de la formation, notamment chez nous où elle brillait par son absence dans les hit-parades. Force est de constater l'efficacité mélodique des deux ditties en question : Sure Know Something et, évidemment, I Was Made for Lovin' You, tube planétaire s'il en fut. Côté rock, une bonne reprise des Rolling Stones (2,000 Man) et quelques tourneries typiques des maquillés (Dirty Livin', Magic Touch, Hard Times, Save Your Love) viennent contenter une fan-base qu'on imagine inquiète des nouveaux développements soniques du quatuor même si on remarque que le tranchant passé s'est largement émoussé. Et l'inspiration quelque peu perdue comme semble le prouver les nombreux compositeurs externes venus renforcer les musiciens de la formation, en particulier Vini Poncia, co-auteur avec Paul Stanley des deux tubes de l'album mais également claviériste et choriste. On notera aussi qu'il s'agit du premier album où les quatre musiciens originaux n'apparaissent plus tous, les parties de Peter Criss, sauf sur son morceau, Dirty Livin', ayant été gommées car jugé d'un niveau insuffisant par le groupe et leur producteur. Il sera remplacé par Anton Fig déjà présent sur l'album solitaire d'Ace Frehley. A la décharge du pauvre batteur, qui ne rejouera plus avec ses anciens comparses avant la reformation maquillée de 1995, il faut préciser qu'il se relève à peine d'un grave accident de voiture... Et que ses abus de substances en tous genres n'aident pas. Dynasty (prononcez "die nasty") est tout de même un bon album, le dernier d'une belle série qui ne reprendra qu'avec Lick It Up en 1983 (même si son prédécesseur, Creature Of The Night est plus que correct). A l'époque dénoncé par les fans de rock qui charcle comme une concession à la mode du jour, alors que seuls les deux tubes précités sont symptomatiques du prétendu glissement, il a étonnamment bien vieilli et demeure, pour les amateurs du groupe et de ce genre de rock "bon vivant", une expérience agréable... A défaut de plus.

1. I Was Made for Lovin' You 4:30
2. 2,000 Man 4:54
3. Sure Know Something 4:00
4. Dirty Livin' 4:19
5. Charisma 4:25
6. Magic Touch 4:41
7. Hard Times 3:30
8. X-Ray Eyes 3:46
9. Save Your Love 4:41

Paul Stanley - vocals, rhythm guitar (bass guitar on "I Was Made for Lovin' You" and "Magic Touch", lead guitar on "Sure Know Something")
Gene Simmons - vocals, bass guitar
Ace Frehley - vocals, lead guitar (all guitars on "2,000 Man", bass guitar on "2,000 Man", "Hard Times" and "Save Your Love")
Peter Criss - drums, percussion and lead vocals only on "Dirty Livin'"
&
Anton Fig - drums on all tracks except "Dirty Livin'"
Vini Poncia - backing vocals, keyboards

KISS

MeRCReDi
Neil Young "Trans" (1982)
ou "Nine Inch Neil"

Pour bien parler de Trans et, conséquemment, bien le défendre, il n'est pas inutile, en guise de préambule, de le contextualiser dans la carrière du Loner comme dans sa vie privée, le sens, la profondeur qu'il y gagne en fait une toute autre œuvre, plus grande. Nous sommes donc au début des années 80, période particulièrement délicate pour les géants des années 60 et 70 comme vous le savez sans doute tous déjà. Pour Neil, tout devrait bien aller, il vient de signer un juteux contrat avec un label qui monte (Geffen) et effectue un retour discographique fébrilement attendu par une cohorte de fans d'avance enthousiastes qui voit dans cette nouvelle ère un possible renouveau après deux derniers albums pas forcément très inspirés (Hawks And Doves, Re-ac-tor) qui en seront pour leur frais quand tombera l'opus nouveau, Trans. Parce que, si professionnellement Neil a tout pour être heureux, ce bonheur est irrémédiablement entaché par le lourd handicap mental de son dernier né, Ben, et son incapacité de communiquer avec lui par des méthodes traditionnelles. Forcément, musicien qu'il est, c'est par le truchement de son art qu'il s'essaye à l'impossible. Ce détail, non explicité à l'époque de la sortie, forcément influe largement sur l'orientation musicale de l'album, qui fait figure de mouton noir dans un catalogue jusque alors largement dédié au rock et à la folk. Ici, voix robotisées et synthétiseurs mènent la danse pour ce qu'il est convenu de considérer comme l'album électronique du canadien. On s'en doute, pas plus les fans que la critique ne marcha dans la combine et Trans de se retrouver voué aux gémonies tel l'affreux barbarisme que beaucoup entendaient. Pourtant la plupart des compositions se tient bien et le parti-pris expérimentaliste fonctionne plutôt mieux que ce qu'on aurait pu craindre à la description sonique du contenu. Ainsi, malgré leur vocaux vocodérisés, des chansons comme Transformer Man ou Sample and Hold valent leur pesant de chemises à carreaux et vestes en jeans... Et le reste est à l'avenant d'une création unique de (Nine Inch) Neil (avec, qui plus est, un beau casting au menu). Album bancal, imparfait mais étonnamment attachant, Trans n'est sans doute pas l’œuvre Younguienne la plus essentielle de sa longue et excellente discographie, on l'admettra sans peine. Passer outre serait cependant une erreur, il a gagné, avec le temps, une patine, un charme qui le rend, de l'avis de votre serviteur, nettement plus aisément "ingérable" aujourd'hui qu'à l'époque de sa parution. Et puis, un album fait avec le cœur et d'aussi nobles motifs ne peut pas être totalement mauvais, n'est-ce pas ?

1. Little Thing Called Love 3:13
2. Computer Age 5:24
3. We R in Control 3:31
4. Transformer Man 3:23
5. Computer Cowboy 4:13
6. Hold On to Your Love 3:28
7. Sample and Hold 8:03
8. Mr. Soul 3:19
9. Like an Inca 9:46

Neil Young: guitar, bass, synclavier, vocoder, electric piano, vocal
Nils Lofgren: guitar, piano, organ, electric piano, synclavier, vocal
Ben Keith: pedal steel guitar, slide guitar, vocal
Bruce Palmer, Billy Talbot: bass
Ralph Molina: drums, vocal
Joe Lala: percussion, vocal
Frank Sampedro: guitar, stringman

NEIL YOUNG

JeuDi
Yes "90125" (1983)
ou "Pop ? Oui !"

Que se passe-t'il quand de vieilles barbes progressives en mal de renouvellement recrutent un jeune et bouillonnant guitariste/chanteur sud-africain pour leur nouveau projet, Cinema ? Il se passe, déjà, que le passé n'en finit pas de ressurgir et que le jeune homme, Trevor Rabin, se voit forcé de jouer les troisièmes-voix pour le chanteur revenant, que, du coup, le projet reprend l'identité patronymique des septantes, mais que, tout de même, outre quelques harmonies vocales et de beaux restes de virtuosité, ça n'a vraiment plus grand chose à voir avec le groupe qui donna au monde un Fragile, un Relayer ou un Tales from Topographic Oceans. Et après tout, tant mieux parce que, franchement, entendre en 1983 exactement ce que Yes produisait 10 ans plus tôt, ça aurait un petit quelque chose de pathétique ici absolument évité. Or donc c'est un nouveau Yes, un Yes qui combine l'extrême efficacité d'un rock fm ultra-léché, tous les atouts et tous les tics de "l'instrument studio" tel qu'on l'entendait en ces 80s et, rassurons-nous, quelques signes distinctifs qui font que, tout de même, quoiqu'il s'agisse indéniablement d'une nouvelle voie (et nouvelle voix), on reconnait les chevelus babacoolisants des 70s. Enfin, sur les morceaux les plus aventureux parce que, force est de constater que les plus pop des chansons proposées ici (le mégatube Owner of the Lonely Heart mais aussi sa plus convaincante séquelle, Hold On) on en est à se raccrocher à de petits riens, les chœurs essentiellement, la voix si particulière de Jon Anderson, aussi. Parce que pour du progressisme pur et dur, de celui qui fit de Yes un des leaders naturels du courant symphonique, il n'y a guère que quelques éclats sur Changes (son intro mais pas sur son refrain stadium rock pas exemple), le court instrumental Cinema (le plus "vrai Yes" du lot) et un Hearts de clôture en forme de rappel d'à qui nous avons présentement affaire même avec une mise en son si typiquement moderne (pour l'époque) signée de Trevor Horn qui fut du line-up précédent, et donc du sous-estimé Drama, où il chipa même la place de l'emblématique chanteur. Bref, relance commerciale comme on en vit rarement, album d'une absolue efficacité totalement de son temps et, finalement, plus de 30 ans après sa sortie, un opus qui tient bien la route et a plutôt mieux vieilli que ce qu'on aurait pu penser, 90125 n'est sans doute pas le Yes le plus typique du répertoire, euphémisme inside, mais pas pour autant une œuvre qu'on peut démettre... Un coup de bol monumental de musiciens supérieurement talentueux et, donc, immensément adaptables. Bien joué.

1. Owner of a Lonely Heart 4:27
2. Hold On 5:15
3. It Can Happen 5:39
4. Changes 6:16
5. Cinema 2:09
6. Leave It 4:10
7. Our Song 4:16
8. City of Love 4:48
9. Hearts 7:34
Bonus
10. Leave It (Single Remix) 3:56
11. Make It Easy 6:12
12. It Can Happen (Cinema Version) 6:05
13. It's Over 5:41
14. Owner of a Lonely Heart (Extended Remix) 7:05
15. Leave It ("A Capella" Version) 3:18

Jon Anderson – lead vocals
Chris Squire – bass guitars, vocals
Trevor Rabin – guitars, keyboards, vocals
Alan White – drums, percussion, vocals, Fairlight CMI
Tony Kaye – keyboards, vocals
&
Dipak Khazanchi – sitar and tambura on "It Can Happen"
Graham Preskett – violin on "Leave It"
Trevor Horn – backing vocals

YES

VeNDReDi
Bob Dylan "Christmas in the Heart" (2009)
ou "Zimgle Bells... all the way!"

Un album de Noël par Bob Dylan ? Tiens, donc, quelle drôle d'idée... Le truc absolument incroyable, et je le dis d'autant plus tranquillement que je ne suis pas un zélote du Zim qui, à mon humble avis, a beaucoup plus raté que réussi passé Desire, c'est que ce brigand de Dylan ne fait pas dans le folklorique avec clochettes omniprésentes et tout le tintouin mais dans l'authentique avec des versions si habitées qu'on sent bien qu'on dépasse ici la simple opportunité commerciale. Du coup Christmas in the Heart, qui porte bien son titre, ressemble vraiment beaucoup à un album de Dylan, pas dans la note mais dans l'âme,  et tout de même un peu beaucoup à un album de Noël, puisque c'en est indéniablement un. Alors, certes, ce n'est pas du grand Dylan mais ce n'est pas non plus du mauvais Dylan non plus, c'est pépère se souvenant de ses tendres années, d'un Noël que la famille Zimmerman, juive mais avant tout américaine, célébrait en grandes pompes, au grand bonheur du petit Robert dont les oreilles résonnaient de ces mélodies graciles et dont les yeux pétillaient devant l'arbre dûment décoré. Ces sentiments revisités, avec les musiciens qui constituent alors son groupe de scène, dont certains travaillent depuis un bout de temps avec Bob (le fidèle bassite Tony Garnier, qui joue avec lui depuis 1989, tout de même !) et d'autres sont de belles additions à la famille (le blues'n'soulman Phil Upchurch, le Lobo David Hidalgo), bénéficient aussi d'une sélection aux petits oignons n'oubliant ni les essentiels pop (Here Comes Santa Claus du cowboy Gene Autry, un Winter Wonderland présentement gentiment swing, I'll Be Home for ChristmasBob se la joue Bing Crosby à la voix détruite, le quasi-obligatoire Little Drummer Boy où il ne se la joue heureusement pas Nana Mouskouri!, etc.) ni ceux qu'on a plus l'habitude d'entendre à la messe (Hark the Heral Angels Sing de Mendelssohn, les traditionnel O Come All Ye Faithful, The First Noel ou O Little Town of BethlehemDylan chante émotionnellement très juste), et ne se privant petit décrochage presque hors-sujet, presque seulement parce que Noël est une fête de paix, avec Do You Hear What I Hear?, chant d'appel paix datant de l'époque de la crise de missiles à Cuba, qui se glisse confortablement dans l'ensemble. Alors, Christmas in the Heart, un grand Dylan ? Non. Un grand album de Noël ? Non plus. Mais certainement pas l'abomination qu'on aurait pu imaginer, un album digne et émouvant d'une vieille légende qui n'a peut-être plus grand chose à dire mais prouve, présentement, qu'il a encore quelques petites cartes planquées dans son jeu.

1. Here Comes Santa Claus 2:35
2. Do You Hear What I Hear? 3:02
3. Winter Wonderland 1:52
4. Hark the Herald Angels Sing 2:30
5. I'll Be Home for Christmas 2:54
6. The Little Drummer Boy 2:52
7. The Christmas Blues 2:54
8. O' Come All Ye Faithful (Adeste Fideles) 2:48
9. Have Yourself a Merry Little Christmas 4:06
10. Must Be Santa 2:48
11. Silver Bells 2:35
12. The First Noel 2:30
13. Christmas Island 2:27
14. The Christmas Song 3:56
15. O Little Town of Bethlehem 2:17

Bob Dylan - vocals, guitar, electric piano, harmonica
Tony Garnier - bass guitar
George Recile - drums, percussion
Donnie Herron - steel guitar, mandolin, trumpet, violin
David Hidalgo - accordion, guitar, mandolin, violin
Phil Upchurch - guitar
Patrick Warren - piano, organ, celeste

BOB DYLAN

SaMeDi
Attila "Attila" (1970)
ou "Billy avant Joel"

Comme quoi une réputation tient parfois à pas grand-chose. Prenez l'Attila de Billy Joel, une pochette ridicule, une musique anecdotique et, surtout !, un leader connu pour tout autre chose ensuite et vous obtenez ce que certains considèrent comme le pire album de l'histoire du Rock'n'Roll. Pire album de l'histoire du Rock'n'Roll, vraiment ? Ca va loin là ! Parce que, honnêtement, ce hard rock typique de la toute fin des années 60 et du tout début des années 70 ne mérite pas ça ! On y retrouve un Billy Joel s'égosillant franchement, jouant de son orgue souvent filtré par de multiples effets et branché sur un bon gros Marshall deux-corps qui, du coup, sonne souvent comme une guitare électrique. On y retrouve aussi un batteur badaboumant à tout va, Jon Small et oubliant ce faisant tout art de la nuance. Vous me direz, le hard rock et l'art de la nuance, ça fait souvent deux, et vous n'aurez pas tort, mais, franchement, depuis plus de 3 décennies que je me plonge dans les méandres de l'improbable et de l'inattendu, j'ai entendu bien pire, bien bien pire ! Alors oui, c'est vieillot, les paroles ne sont pas bien finaudes et ça prête, conséquemment souvent à sourire. D'autant que la production flirte plus souvent avec l'amateurisme qu'avec la haute-fidélité mais, parce qu'il y a un "mais", ça s'écoute bien. Et si Billy Joel a depuis renié la chose, enfin, pas tout à fait puisqu'un titre figure sur son coffret de 2005, My Lives, c'est sans doute en le considérant comme un faux-pas de jeunesse et, sans doute, une étape pas inutile pour celui qui deviendra, pour simplifier, l'Elton John américain. Alors non, mille fois non, Attila, unique album d'Attila n'est pas le plus mauvais album de l'histoire du Rock'n'Roll, probablement même pas le plus mauvais album de l'année 1970, juste une galette anecdotique d'un hard rock d'un autre temps par des musiciens manquant encore de maturité et de vision artistique. En résumé, Attila est fun et ce n'est déjà pas si mal. Avis aux amateurs !

1. Wonder Woman 3:38
2. California Flash 3:32
3. Revenge Is Sweet 4:00
4. Amplifier Fire (Part I: Godzilla/Part II: March of the Huns) 7:39
5. Rollin' Home 4:52
6. Tear This Castle Down 5:49
7. Holy Moses 4:30
8. Brain Invasion 5:41

Billy Joel - chant, orgue
Jon Small - batterie

ATTILA

dimanche 24 juillet 2016

L’Été Mange-Disques - 7 Cachés

Parce que, comme le touriste aime bien les petits coins planqués où ses semblables n'ont pas encore posé la tong, l'amateur de musique adore les petits trésors cachés, il me fallait offrir une sélection du genre, sous le signe du 7, évidemment, Été Mange-Disques oblige. Enjoie !

DiMaNCHe
Faraquet "The View from this Tower" (2000)
ou "La Haut, très haut"

En voici un auquel vous ne pouviez pas échapper tant il est cher à mon cœur. J'ai donc l'honneur et l'avantage de vous présenter l'unique album du groupe de Washington DC, Faraquet. A la base, et si on en croit leur appartenance à la scène (post) hardcore de leur ville, Faraquet pourraient n'apparaître que comme une référence de plus dans la longue, et parfois ennuyeuse, histoire du math-rock. C'est sans compter sur l'incroyable habileté à ciseler des chansons qui, pour ne pas être immédiatement accessibles, n'en demeurent pas moins des pépites pour qui sait prendre le temps de laisser cette musique l'amadouer. La base, comme je viens de le préciser, est math-rock. C'est donc à une formation techniquement impeccable à laquelle nous avons affaire. Sauf que, contrairement à la plupart de leurs petits camarades, Faraquet y ajoute du chant et c'est ce qui fait toute la différence. En effet, là où on est trop souvent confronté avec de simples exhibitions techniques, Faraquet nous propose des vraies chansons qu'on se surprendra à fredonner à l'occasion. A vrai dire, chaque fois que j'ai dû décrire cette musique, j'ai employé les mêmes comparaisons à savoir d'imaginer ce qu'une fusion de Police période Synchronicity et d'un King Crimson à l'époque de Red non sans y ajouter une bonne rasade d'esprit indie pourrait donner. Je sais, ce n'est pas simple et c'est pourtant, après réflexion, la meilleure description que je puisse faire de la musique contenue sur ce The View from This Tower. Évidemment, les musiciens sont exceptionnels, en particulier le batteur, mais il faut dire qu'ils sont magnifiquement mis en valeur par la production claire et précise de J Robbins (Jawbox, Burning Airlines, Channels) qui a su donner la dynamique nécessaire à telle musique qu'on pourrait facilement taxer de Rock Progressif. Et donc, sur 36 minutes et une grosse poignée de titres en état de grâce, voici un album qui ravira ceux qui pensent que la musique est un peu plus qu'un simple enchaînement couplet/refrain/couplet. Une galette unique en son genre et totalement indispensable !

1. Cut Self Not 2:54
2. Carefully Planned 3:40
3. The Fourth Introduction 3:17
4. Song For Friends To Me 1:37
5. Conceptual Separation Of Self 6:43
6. Study Complacency 5:05
7. Sea Song 4:10
8. The View From This Tower 5:55
9. The Missing Piece 3:29

Bass, Guitar [Feedback Guitar] – Jeff Boswell
Drums, Percussion, Bass [Piccolo Bass], Vocals, Keyboards – Chad Molter
Guitar, Vocals, Drums, Percussion, Keyboards, Trumpet, Banjo [Banja], Guitar [Baritone Guitar] – Devin Ocampo

FARAQUET

LuNDi
Colin Blunstone "One Year" (1971)
ou "Belle Pop"

Quand un ex-Zombies se lance en solo, ça donne "One Year" et c'est un petit miracle de pop raffinée comme on aimerait en entendre beaucoup plus souvent.
Nous sommes en 1971, quelques années après la séparation d'un groupe pop anglais presque oublié aujourd'hui, The Zombies. Paraît One Year, premier album solo de Colin Blunstone, pareil à un rosier sous la pluie, subtil et alangui. Le rêve de tout critique de rock serait de tomber, au fond d'un grenier, sur la discothèque oubliée par exemple dans une vielle malle, d'un fan de song-writing britannique qui aurait acheté, dans les années soixante, à peu près tout ce qui ce serait fait à l'époque. On peut présumer que les saints vinyles mériteraient presque tous qu'on les écoute avec une nostalgie admirative et One Year, de Colin Blunstone, ne ferait pas exception. Nous sommes en 1971, quelques années après la séparation d'un groupe pop anglais presque oublié aujourd'hui, The Zombies. Mélodiques et raffinés, ces zombies bien vivants dans les sixties ne survécurent pas au tournant de la décennie la plus rock de l'Histoire, contrairement à leur chanteur, Colin Blunstone. Discret, doté d'une voix de velours froissé, moins sombre et prophétique qu'un Nick Drake, il n'en publie pas moins cette année-là, chez Epic, une petite merveille de délicatesse : One Year. Très court, une trentaine de minutes, comme beaucoup des galettes de l'époque, One Year parcourt les quatre saisons sentimentales de son auteur. Un ou deux titres mis à part, c'est paré de guitare sèche et de cordes précieuses que l'album s'effeuille, pareil à un rosier sous la pluie, subtil et alangui. Presque tous les titres semblent faits de brume et si l'on devait trouver à la musique une harmonie de couleurs, c'est avec des pastels de rose, de vert et de gris bleuté qu'il faudrait ici l'esquisser. On sent parfois, surtout sur les morceaux plus rythmés, à quel point le temps a marqué son passage sur ce genre de compositions mais hormis cette note mineure, tout y est si harmonieux, si délicieusement susurré qu'on ne peut que s'abandonner, reconnaissant et oublieux, à cette joie empreinte de tristesse qui accompagne le souvenir de ce qui ne reviendra plus.

1. She Loves the Way They Love Her 2:49
2. Misty Roses 5:04
3. Smokey Day 3:13
4. Caroline Goodbye 2:54
5. Though You Are Far Away 3:24
6. Mary Won't You Warm My Bed 3:11
7. Her Song 3:31
8. I Can't Live Without You 3:27
9. Let Me Come Closer to You 2:24
10. Say You Don't Mind 3:20

Colin Blunstone – vocals, guitar
Rod Argent – keyboards
Russ Ballard – guitar
Jim Rodford – bass
Robert Henrit – drums
Alan Crosthwaite – guitar on "Misty Roses"

COLIN BLUNSTONE

MaRDi
Jonas Hellborg with Glen Velez "Ars Moriende" (1994)
ou "Méditatif"

Dire que ces trois pièces du fusionneux bassiste suédois et de son comparse percussionniste ethno-latino du jour relève de la grâce dans l'austérité tient du doux euphémisme. L'épure, de fait, sert à merveille un album qui, pour n'être que peu démonstratif, sait offrir les tréfonds de son âme. Mais clairement une question s'impose à moi. Est-ce l'influence de son mentor Mahavishnien, le zen Sir McLaughlin ou un goût tout personnel pour l'expérimentation (déjà perçu sur The Word) des formules et des sons qui amène une star montante du jazz-fusion à s'impliquer dans pareil projet ? Sans doute un peu des deux considérant que les hasards cosmiques qui ont jalonné son parcours sont autant de signes du destin et de rencontres d'âmes compatibles. Ne fuyez pas à déballage de charabia niaiso-newageux ! Cet album se déguste aussi quand on a la profondeur spirituelle d'une moule bretonne accrochée à son rocher mazouteux. Et si l'ensemble de l'ambiance penche ici vers le franchement méditatif, celui qui sait prêter l'oreille découvrira d'insoupçonnés méandres et d'audibles délicatesses. Bref ! Ars Moriende est un diable d'album ! Unique en son genre, puissant dans sa prétendue tranquillité, et, surtout, une pièce de plus au convaincant tableau d'un artiste qui n'a pas fini de nous surprendre tant par les choix artistiques auxquels il souscrit que par le choix, parfois improbable mais toujours judicieux, de ses petits partenaires de jeu.

1. Ritual Love-Death 32:38
2. Stars Of The Morning Sky 8:24
3. Regicide 23:10

Bass Guitar – Jonas Hellborg
Drums, Percussion, Voice – Glen Velez

JONAS HELLBORG

MeRCReDi
The Dismemberment Plan "Emergency & I" (1999)
ou "My Precious"

Originaires de Washington DC et membres à part entière de la scène "Art-Punk" de cette ville, signés sur le label des ex-Jawbox Kim Coletta et Bill Bardot, produits par l'autre ex-Jawbox J Robbins... Tout porte à croire que The Dismemberment Plan fait dans l'agression sonique de type « qui crie et qui va vite ». Oui...et non. Déjà parce que la caractéristique de base de la scène de DC est d'avoir mis de la matière grise dans son hardcore-punk. Le temps des furieux batifolages binaires de Minor Threat, Government Issue ou Youth Brigade est depuis longtemps passé. Fugazi (avec l'ex-Minor Threat Ian McKaye en étendard), Jawbox ou Smart Went Crazy ont depuis longtemps revitalisé la formule lui offrant des circonvolutions et développements flirtant même avec l'esprit du rock progressif ! C'est bien dans cette tradition de qualité et d'aventurisme que The Dismemberment Plan s'inscrit tout en conservant une identité à part. C'est encore plus flagrant sur leur 3ème album, Emergency & I, déjà, dans la composition même du groupe, où on aperçoit que ses membres ont - pour la première fois - eu massivement recours aux claviers. Ça se confirme d'ailleurs dans le son où des parties malines de synthétiseur viennent enrichir les compositions anguleuses de Morrison & Cie. Le quatuor pousse même le bouchon jusqu'à enregistrer une chanson de synthpop (un poil paranoïde, faut pas déconner non plus) avec le savoureux You Are Invited. Ensuite, c'est dans l'approche même du format chanson que TDP se démarque de ses petits camarades : si ils ne crachent pas sur l'enchaînement classique couplets/refrains, ils savent aussi y ajouter leur touche à eux, une façon de déstructurer la pop qui n'est pas si éloignée de certains morceaux des jeunes XTC. C'est justement cette étonnante qualité qui fit de TDP un groupe qui, malgré les louanges d'une poignée de fervents adorateurs, ne trouva jamais vraiment sa place. Trop pop et prog pour les purs hardcoreux, trop bizarres et abstraits pour une audience plus mainstream, TDP n'aura hélas pas marqué grand monde mais ceux qui le furent le furent profondément et indélébilement. Des 12 morceaux qui composent Emergency & I, aucun n'est ne serait-ce que moyen. Cet album - comme son successeur (Change) d'ailleurs - est une impeccable et implacable collection de brulots à la fois psychotiques et amusants. Cette musique, cependant, ne s'apprivoise pas en l'écoutant distraitement, elle demande un minimum d'investissement et d'attention de l'auditeur qui, ce faisant, sera largement repayé de son effort et y découvrira du prog, du ska, du funk, du punk, de la new wave, de la synth pop passé à la moulinette d'un quatuor d'exception mené par un chanteur au falsetto attachant. Pour conclure sur une petite note personnelle, je préciserais que cet album - que j'ai évidemment beaucoup fait écouter autour de moi - a généralement été très favorablement accueilli et ce par des gens aux univers et goûts musicaux très éloignés les uns des autres. Aussi me plait-il de penser que c'est plus par un abasourdissant manque de chance que par une quelconque absence de talent que The Dismemberment Plan ne sont pas, aujourd'hui, des stars mondiales du calibre de Pearl Jam ou System of a Down comme ils mériteraient de l'être. Aussi est-ce avec un immense plaisir que je vous livre cet album qui, bien qu'écouté à de très très nombreuses reprises, n'arrive toujours pas à me lasser. Je vous le promets, ça n'arrive pas si souvent.

1. A Life of Possibilities 4:34
2. Memory Machine 2:43
3. What Do You Want Me to Say? 4:18
4. Spider in the Snow 3:50
5. The Jitters 4:19
6. I Love a Magician 2:38
7. You Are Invited 4:52
8. Gyroscope 2:29
9. The City 4:26
10. Girl O' Clock 2:54
11. 8½ Minutes 2:57
12. Back and Forth 5:07

Eric Axelson: bass, keyboards
Jason Caddell: guitar, keyboards
Joe Easley: drums
Travis Morrison: vocals, guitar, keyboards

THE DISMEMBERMENT PLAN

JeuDi
David Baerwald "Triage" (1992)
ou "Grown Up America"

Dans la série : "Je vous parie que vous n'avez jamais entendu parler de cet oiseau-là", je vous présente David Baerwald, auteur/compositeur/interprète ayant connu quelques succès au sein de David & David dans la seconde moitié des années 80 ou pour sa participation à la bande-originale du Moulin Rouge de Baz Luhrman. David Baerwald a souvent œuvré loin des préoccupations du grand public qui ne sait pas ce qu'il perd. Triage est le second album solo de Baerwald après l'aimable mais pas transcendant Bedtime Stories, un album trop poli pour que les chansons qu'on y trouve accomplissent leur plein potentiel. C'est, évidemment, une tout autre histoire avec ce Triage ou Baerwald "explose" son adult-folk-rock pour lui faire rejoindre des sommets rarement atteints. Dès la première composition, "A Secret Silken World", il est évident qu'une énorme somme de travail a été engagée pour obtenir un tel résultat. Pourtant le morceau est fluide mais regorge, ce que démontre une "inspection" détaillée, de moult détails enrichissant subtilement une composition déjà d'une grande force où les esprits des Beach Boys et de Miles Davis sont discrètement convoqués pour un résultat du plus bel effet. Tout l'album est à l'avenant, avec son lot de guitares tranchantes (juste ce qu'il faut), d'influences folk ou jazz, de textures sonores visiblement très pensées et de textes finement politisés. Autant de preuves de l'excellence de Baerwald en tant que songwriter (pas surprenant quand on voit la longue liste d'artistes avec lesquels il a collaboré sous son nom ou un pseudonyme de l'iconique Pavarotti, à la chanteuse country LeAnn Rimes, l'ex Bangles Susana Hoffs ou encore l'outlaw ultime de la country, Waylon Jennings). A vrai dire, on a beau chercher, il n'est pas simple de trouver quelque faille que ce soit en ce Triage. Éventuellement, ceux qui sont particulièrement allergique à toute musique (dans l'ensemble) adulte ne trouveront pas ici leur bonheur. Il est vrai qu'à chercher à comparer cet album à ceux d'autres artistes contemporains, on évoquera volontiers Sting et Peter Gabriel - bien qu'une évidente américanité démarque Triage des aeuvres de ces deux icones britanniques- ou encore de Paul Simon ou Randy Newman pour ses compatriotes. Aucune de ces comparaisons ne rendant tout à fait justice à la large palette de Baerwald, une écoute attentive sera la meilleure façon de juger de la qualité de l'ensemble. Personnellement, ayant découvert cet album dès sa sortie, je suis surpris de la relative absence d'usure que de nombreuses écoutes auraient, en toute logique, dû entraîner. Il n'en est rien ici et si Triage demeure une œuvre d'une telle force quasiment vingt ans après sa sortie c'est tout simplement à la force des ses compositions et à la relative intemporalité de son écriture qu'il le doit.

1. A Secret Silken World 7:41
2. The Got No Shotgun Hydra Head Octopus Blues 4:26
3. Nobody 4:33
4. The Waiter 5:03
5. AIDS and Armageddon 5:32
6. The Postman 5:35
7. A Bitter Tree 3:32
8. China Lake 4:37
9. A Brand New Morning 4:38
10. Born for Love 6:22

David Baerwald: Bass, Guitar, Keyboards, Organ, Vocals
Bill Bottrell: Guitar, Keyboards, Loops, Vocals
Dan Schwartz: Bass, Guitar
Kevin Gilbert: Drums, Piano
Herb Alpert: Trumpet
Gregg Arreguin: Guitar
David Kemper: Drums
Brian Macleod: Drums

DAVID BAERWALD

VeNDReDi
Cotton Mather "Kontiki" (1997)
ou "Revivalissimo"

Avec le nom d'un pasteur et politicien puritain du XIXème siècle pour le groupe et celui d'une expédition scientifique nautique norvégienne pour l'album, on sait d'emblée que le Kontiki (ou Kon-Tiki) de Cotton Mather ne sera pas un album tout à fait comme les autres. Pas de doute, pour ceux que le revivalisme 60s intelligent intéresse, cette galette sera (s'ils ne la connaissent pas encore) une trouvaille inespérée. Passé l'étonnant mimétisme vocal entre Robert Harrison et John Lennon demeure une écriture qui n'est pas sans rappeler celle des Fab Four circa Revolver. On aurait pu craindre qu'une ressemblance aussi flagrante s'avère gênante mais l'écriture de ce quatuor d'Austin (Texas) permet d'éviter cet écueil. Pas qu'elle diffère tant que ça de celle des Beatles, notez bien. En bons ouvriers de la pop, Cotton Mather n'appliquent que des recettes connues et reconnues afin d'arriver à leurs fins. Cependant, il faut que tous les éléments soient réunis afin d'accomplir la périlleuse mission. Pour ce faire, la mise en son est essentielle et comme elle est ici délicieusement vintage - pas en mono (faut pas pousser quand même !) mais avec juste ce qu'il faut de garage pour conserver un grain authentique - une première étape est brillamment accomplie. Notons simplement qu'en bon groupe indie, la tâche de production est assumée collectivement par trois des membres du line-up. Évidemment, sans les chansons, tout ceci ne serait que de l'enrobage, clinquant, bien foutu mais vide de sens... Or, les compositions d'Harrison étant du tonneau de celles d'un Elliott Smith ou d'un Andy Partridge et voguant, pleines de malice, entre un rock psychédélique estampillé 60's et pop/folk enluminée de chœurs appropriés comme savait si bien la faire les Beach Boys, CSNY... Et les Beatles, évidemment. Avec tant d'atouts artistiques dans ses manches (imaginez un album avec des manches, pour voir... ), il est surprenant que Kontiki n'ai pas eu un plus grand retentissement. En France, de vénérables magazines tel que Magic RPM ou les Inrockuptibles (qui sont peut-être pédants mais n'ont pas mauvais goût), ont loué les qualités de ce groupe et de cet album, à raison. Hélas, à défaut d'un clip passant en boucle pour les chaines visant à lobotomiser les futures générations, d'une promotion suffisante (petit label indé oblige), c'est à une excellent réputation underground que se voit confiné ce putain de bon disque. C'est dommage, d'autant plus que le groupe semble avoir plié les gaules (plus de trace discographique depuis 2001). Reste la musique et quand elle est de cette qualité, on ne peut que se réjouir de la découverte et s'attrister que si peu de gens en aient entendu parler. Alors, que vous soyez nostalgiques des années soixante ou amateurs de musique revivaliste ou, tout simplement, amateurs de bonnes chansons, vous trouverez en Cotton Mather et leur Kontiki, une petite perle comme on n'en rencontre pas si souvent... Il serait regrettable de s'en priver.

1. Camp Hill Rail Operator
2. Homefront Cameo
3. Spin My Wheels
4. My Before and After
5. Private Ruth
6. Vegetable Row
7. Aurora Bori Alice
8. Church of Wilson
9. Lily Dreams On
10. Password
11. Animal Show Drinking Song
12. Prophecy for the Golden Age
13. She's Only Cool
14. Autumn's Birds

COTTON MATHER

SaMeDi
Gospel "The Moon Is a Dead World" (2005)
ou "Beau Chaos"

Formé par les trois ex-Helen of Troy avec le concours du guitariste/clavier Jon Pastir, Gospel est né de la volonté de ces post-hardcoreux émérites de pousser le bouchon encore un peu plus loin et, en l'occurrence, vers le space et le progressive rock. Et nous voici donc en 2005 et à cet unique album, "The Moon is a Dead World". Sorti sur l'excellent label indépendant US, Level Plane Records et produit par le guitariste de Converge, Kurt Ballou, cet album est la preuve absolue que le rock progressif moderne peut exister si il accepte de... progresser. En ce qui concerne Gospel, les éléments provenant du hardcore et du math rock plus une batterie d'influences contenant - entres autres - Hawkwind (en tête !), King Crimson, Refused, Converge (etc.) offrent l'opportunité de marier la complexité de structures directement héritées des grands anciens progressifs avec une agression et une précision quasi-clinique dont l'origine est, évidemment, à chercher du côté de leurs racines hardcore. Le plus étonnant sur cet album - outre son extrême qualité - est de constater ô combien naturellement tous ces éléments s'imbriquent sous la férule de musiciens possédant une vraie vision de leur art. Ainsi est-on ballotté, chahuté, violenté par ces 8 compositions. Ainsi en redemande-t'on et espère-t'on qu'une reformation en bonne et due forme vienne nous apporter une suite à pareille fête.

1. Congratulations...You've Hit Bottom 3:41
2. Yr Electric Surge Is Sweet 4:15
3. Golden Dawn 9:05
4. Paper Tigon 3:23
5. And Redemption Fills The Emptiest Of Hearts 2:46
6. Opium 3:57
7. What Means Of Witchery 6:18
8. As Far As You Can Throw Me 5:41

Bass – Sean Miller
Drums – Vinny Roseboom
Guitar, Keyboards – Jon Pastir
Guitar, Vocals – Adam Dooling

GOSPEL

dimanche 17 juillet 2016

L’Été Mange-Disques - 7 Honteux

Des albums qu'on écoute en se cachant ou des albums dont les auteurs feraient bien de se cacher, c'est le programme d'une semaine un peu honteuse chez le Zornophage, honteuse comme ces bourrelets disgracieux que la séance de parking à bronzer révèle chez le vacancier... Enjoie ? Allez, on va dire ça !

DiMaNCHe
Kylie Minogue "Impossible Princess" (1997)
ou "Impossible à détester"

Reconnaissons-le, petite princesse d'une pop fast food étant passée précédemment par un soap de son pays (l'Australie), puis version un peu cheap de la Ciccone, Kylie Minogue, c'est un tout petit peu la honte. Quand en plus on se targue d'avoir du goût, posséder un opus de la (fausse ?) blonde de poche tient carrément de la faute... de goût, justement ! Mais il y eut une parenthèse enchantée, une rare occurrence où l'ambition commerciale de l'artiste fut mise en berne, de nouveaux équipiers recrutés et une galette nettement plus substantielle proposée, Impossible Princess. Présentement, Kylie en est à son deuxième opus depuis qu'elle s'est séparée des encombrants mentors de sa jeune carrière (Stock, Aitken et Waterman, les tristement fameux "inventeurs" d'également Jason Donovan ou Rick Astley) avec donc chevillée au corps une envie d'indépendance, de renouvellement d'un art qui souhaite s'éloigner de la dance-pop niaise de jadis au profit de son équivalent plus évolué, noble but. Un but qu'elle atteint plus souvent qu'à son tout parce que, présentement, d'un Too Far paré d'une maline rythmique jungle et de cordes trip-hoppantes (on est pas loin de 4Hero), des purs exercices d'heroic-pop très réussis que sont Some Kind of Bliss et I Don't Need Anyone (très Manic Street Preachers, et pour cause, ce sont bel et bien les gallois qui sont aux commandes), d'un Say Hey très hype et club mais aussi doté d'un formidable décrochage planant et d'une grande performance de Miss Minogue, d'un Limbo en forme d'électro-techno au surprenant et satisfaisant abattage, aux deux petites perles finales, le totalement trip-hop Through the Years au malin et cordé Dreams, c'est à une inspirée sélection que nous avons indéniablement affaire. Qu'importe si le reste est un peu moins décisif, un peu plus de ce qu'on imagine entendre sur un album de Kylie, Impossible Princess, exemple unique dans la discographie de son auteure, est une galette à la fois ambitieuse et ludique qu'on recommandera au-delà des adorateurs de dance-pop qui, cependant, y trouveront largement leur compte. Et on dit ? Bravo Kylie !

1. Too Far 4:43
2. Cowboy Style 4:44
3. Some Kind of Bliss 4:13
4. Did It Again 4:21
5. Breathe 4:37
6. Say Hey 3:36
7. Drunk 3:58
8. I Don't Need Anyone 3:12
9. Jump 4:02
10. Limbo 4:05
11. Through the Years 4:19
12. Dreams 3:44

Kylie Minogue – lead vocals, backing vocals, synthesiser
Steve Anderson – drum programming, grand piano, guitar, Hammond B3, keyboards
Guy Barker – trumpet
Geoff Bird – guitar
Greg Bone – guitar
James Dean Bradfield – bass, guitar
Alan Bremmer – programming
Livingstone Brown – bass
Simon Clarke – flute, saxophone
Andy Duncan – percussion
Johnnie Hardy – fiddle
Sally Herbert – strings
Bogislaw Kostecki – fiddle
Peter Lale – viola
Roddie Lorimer – trumpet
Martin Loveday – cello
Sean Moore – drums
Nick Nasmyth – keyboards
Tim Sanders – saxophone
Steve Sidelnyk – drums, percussion
Neil Sidwell – trombone
Steve Walters – bass
Gavyn Wright – violin

KYLIE MINOGUE

LuNDi
Bad English "Bad English" (1989)
ou "FMiné"

Du rock pour la radio ? Par cinq emplumés plus tout à fait de la première fraicheur ? L'horreur absolue ! Sauf qu'il y a les chansons, et le savoir-faire d'une bande de professionnels ô combien expérimentée, et, là, tu ne peux plus lutter... Enfin, si, évidemment, tu peux rejeter en bloc ces mélodies dégoulinantes de sucre, cette production ô combien typique de son genre, et je ne te parle même pas de ce que peut inspirer un petit coup d’œil au look forcé des mecs sur la pochette. Oui, tout ça est vrai et, de fait, ce Bad English originel (un album suivra, qui ne reproduira pas l'exploit) est un album du genre archétypique, pur opus de (hard) Rock FM qui ne semble ne pouvoir plaire qu'à ceux qui ont une petite place dans leur cœur pour Foreigner, Toto, Bon Jovi, Journey évidemment (puisqu'on en retrouve certains cadres), bref, ce stadium rock ultra-formaté qui fit fureur auprès des masses étasuniennes de la fin des années 70 à la fin des années 80. Pour ceux-là, du rocker taillé pour les highways de Best of What I Got, du pop-metal hit à l’entêtant refrain qu'est Heaven Is a 4 Letter Word, du costaud rock fm de Forget Me NotNeal Schon nous rappelle qu'il est quand même un sacré guitariste, à la grosse power-ballad tire-larmes ultime (When I See You Smile, délicieux ou insupportable selon vos inclinaisons), pour ne citer que ces quelques exemples typiques, Bad English, c'est le bonheur incarné, un machin tellement millimétré, tellement expertement conçu et accoucher qu'on n'y résiste pas. Les autres ? Soit ils auront de s'infliger la torture d'un douloureux retour vers les 80s, soit ils fuiront à toutes jambes devant la nausée qui s'annonce. Mais pour ceux qui aiment... Ha ! Ce Bad English de Bad English, je te le dis, c'est de l'or en barre et peut-être bien l'ultime classique d'un genre qui ne va plus tarder, grunge oblige, à sombrer dans l'anonymat, o tempora o mores !

1. Best of What I Got 4:40
2. Heaven Is a 4 Letter Word 4:45
3. Possession 5:08
4. Forget Me Not 4:58
5. When I See You Smile 4:20
6. Tough Times Don't Last 4:42
7. Ghost in Your Heart 4:46
8. Price of Love 4:47
9. Ready When You Are 4:20
10. Lay Down 4:38
11. The Restless Ones 5:23
12. Rockin' Horse 5:31
13. Don't Walk Away 4:30

John Waite - lead vocals
Neal Schon - lead, rhythm & acoustic guitars, backing vocals
Jonathan Cain - keyboards, backing vocals
Ricky Phillips - bass, backing vocals
Deen Castronovo - drums, percussion, backing vocals

BAD ENGLISH

MaRDi
Metallica "St. Anger" (2003)
ou "Anger Management"

A quoi bon tirer sur l'ambulance ? A quoi bon encore dire tout le mal qu'on pense d'un album universellement (ou presque) conspué ? Pourquoi, plutôt, ne pas célébrer l'exercice cathartique d'une galette infecte sur un groupe en voie de se perdre, un groupe qui sort de deux albums d'alternative metal, d'un album de reprises et d'une relecture symphonique (partiellement ratée) de son œuvre, d'un groupe qui a su, par la seule force d'une prise de position de sa tête à claques de batteur contre Napster, se faire détester comme rarement un groupe jadis adoré y parvint. Alors, oui, il fallait passer par St. Anger, passer par cet album où Lars Ulrich a le pire son de batterie de sa carrière (enterré les casseroles de And Justice for All !), où James empile les riffs là où il a d'habitude le bon goût de les sélectionner, ou le même s'adonne à une étonnante, atterrante, risible même !, caricature de son propre personnage de chanteur (des paroles à l'interprétation, tout y est), un album où Kirk Hammett est totalement privé de soli (et du coup assez absent, tant mieux pour lui), un album, enfin, sans bassiste où le producteur/grand frère/nounou, Bob Rock, fait l'intérim d'un Jason Newsted démissionnaire (parce qu'il a d'autres envies et parce qu'il n'en peut plus du psychodrame qu'est devenu Metallica)... Ca fait beaucoup ! Trop pour que ce Titanic d'opus ne rencontre pas l'iceberg artistique qui lui semble promis. De fait, que sauvera-t'on de St. Anger ? Frantic (tic toc tic toc) qui porte bien son nom, et St. Anger, la chanson, parce qu'il s'y passe tout de même quelque chose... Et encore !, parce qu'on aime Metallica et qu'on veut trouver le rayon de soleil dans le ciel de plomb d'une œuvre magistrale parce que magistralement ratée, un album si intégralement inécoutable qu'on ne résiste pas de le ranger aux côtés du Metal Machine Music de Lou Reed avec lequel, d'ailleurs... Mais ça c'est une autre histoire (et pas la pire d'ailleurs !).

1. Frantic 5:50
2. St. Anger 7:21
3. Some Kind of Monster 8:26
4. Dirty Window 5:25
5. Invisible Kid 8:30
6. My World 5:46
7. Shoot Me Again 7:10
8. Sweet Amber 5:27
9. The Unnamed Feeling 7:10
10. Purify 5:14
11. All Within My Hands 8:48

James Hetfield – vocals, rhythm guitar
Kirk Hammett – lead guitar, backing vocals
Lars Ulrich – drums
&
Bob Rock – bass

METALLICA

MeRCReDi
Lou Reed "Metal Machine Music" (1975)
ou "De qui se moque-t-on?"

Ok, vive l'expérimentation, vive le bruit blanc, vive le "je n'en ai rien à carrer de ce que pense le reste de l'humanité", mais, tout de même, sur Metal Machine Music, Lou Reed se moque un tout petit peu, non ? Une démarche artistique vous dites ? Certainement pas de celles qui fédèrent les foules alors parce que cet opus de bruit et de bruit (et non de fureur parce que ce n'est pas particulièrement furieux) se pose un peu là dans le genre indigeste. Plutôt, si vous voulez mon avis et si vous ne voulez pas tant pis, vous l'aurez quand même, un pur exercice de provocation avec, certes, un authentique cheminement intellectuel derrière (l'influence des minimalistes qui "dronent" tel que LaMonte Young et son Theatre of Eternal Music dont était d'ailleurs le vieil ami/ennemi de Lou, John Cale) mais aucunement l'ambition d'accoucher d'une œuvre écoutable. Parce que, pour influent qu'est aujourd'hui considéré Metal Machine Music, via son influence sur le développement de la musique industrielle ou du Noise Rock, c'est d'une vraie purge auditive dont il s'agit de celles qu'on ne possède que pour se souvenir que celui qui avait si bien décollé avec l'immanquable Transformer (avec l'aide de qui vous savez) est un potentiel accident industriel pour qui oserait lui accorder toute latitude artistique, comme c'est le cas ici. A partir de là, savoir si vous avez l'estomac pour un pareil machin n'appartient qu'à vous, à votre capacité à encaisser cette grosse heure de chaos électroacoustique d'un vrai sale gosse du rock and roll qui, d'ailleurs, déclarera, à propos du présent : "Quiconque arrive jusqu'à la quatrième face est plus stupide que moi", c'est dire l'état d'esprit frondeur et le peu de cas que fait Lou Reed de son auditoire...

1. Metal Machine Music, Part 1 16:10
2. Metal Machine Music, Part 2 15:53
3. Metal Machine Music, Part 3 16:13
4. Metal Machine Music, Part 4 15:55

Lou Reed - Guitar, Keyboards, Vocals

LOU REED

JeuDi
Sigue Sigue Sputnik "Flaunt It" (1986)
ou "Les Escrocs"

Le look pseudo superheros de manga et la pochette qui va avec, la musique en forme de glam rock retravaillé à la sauce synthpop, décidément, ces anglais-là avait le cran d'un mauvais goût affirmé avec fierté, arrogance même. Évidemment, c'est le genre de supercherie, le type d'effet de mode qui, talent mis à part, ne fait que passer, atteint rapidement son pic avant d'entamer une vertigineuse descente, ne tient jamais très longtemps et, de fait, Sigue Sigue Sputnik disparaitra vite, et reviendra trois fois sans jamais regagner ses "15 minutes de gloire" originelles, faut pas rêver non plus. Tout ça nous ferait rapidement démettre cette absolue kitscherie, ce criard artifice sauf que, reconnaissons-le, il est plutôt bien fichu et plutôt très efficace ce vilain petit canard qui a voulu se faire aussi grosse que le bœuf, ce Flaunt It où, certes, les effets synthétiques sont souvent le cache-misère d'un songwriting approximatif, tout comme le look des cinq zozos, et le "spectacle" qui va avec, était sensé fourvoyer les oreilles de leurs auditoires live, à la Kiss, quoi, mais il fonctionne (particulièrement sur ses deux supra-efficaces singles, Love Missile et 21st Century Boy, la vraie crème de l'opus). Parce que, bon, pour tous ses défauts, l'album à son charme, et probablement le charme de ses défauts d'ailleurs, il est pétillant, distrayant comme l'est un poteau qui fait l'idiot, et tient plutôt bien la route avec ses déjà 30 ans d'âge. Essentiel ? Sans doute pas mais on peut décemment le recommander aux nostalgiques des excès des années plastiques ou à ceux qui n'y étaient pas mais ont des envies de "Machines à Remonter le Temps".

1. Love Missile F1-11 (Re-Recording Part II) 3:49
2. Atari Baby 4:57
3. Sex-Bomb-Boogie 4:48
4. Rockit Miss U·S·A 6:08
5. 21st Century Boy 5:10
6. Massive Retaliation 5:02
7. Teenage Thunder 5:17
8. She's My Man 5:37

Martin Degville - vocals
Tony James - synth guitar
Neal X - electric guitar
Ray Mayhew - drums
Chris Kavanagh - drums
&
Miss Yana Ya Ya - special effects

SIGUE SIGUE SPUTNIK

VeNDReDi
François Hadji-Lazaro "Les Mamies" (1992)
ou "Nanar"

Je ne sais pas si vous connaissez ça mais, personnellement, il y a des artistes "de ma famille", que je suis "religieusement" dans leurs œuvres principales comme dans leurs exactions parallèles où, parfois, on a de mauvaises surprises. C'est le cas de cette B.O. d'un gros nanar français du début des années 90 qui n'eut que le succès qu'il méritait, aucun, mais dont je m'étais procuré la soundtrack parce que, dans le mille Émile !, François Hadji-Lazaro (Pigalle, Les Garçons Bouchers, Los Carayos... excusez du peu) était à la barre. J'ai vu le film, Les Mamies, avec Danielle Darrieux, Sophie Desmarets, Odette Laure, Paulette Dubost et Marthe Villalonga dans les principaux rôles titres, c'te casting de folie !, qui m'a laissé fort peu de souvenirs outre son absolue nullité dans le registre de la comédie familiale qui n'en manque pas, notez, et fort peu écouté le CD avant de le ressortir, juste pour voir, enfin, entendre... Et c'est franchement moins pire que ce dont je me souvenais avec, même, quelques très jolis thèmes tel que l'acoustique Lise Boit, à la Moustaki,  les country & western Bonne Est Lise et Les Mousquetaires des Appalaches ou à Nashville, le folk rock de Qu'Est-ce Qu'On se Marre dans le Grenier, le "folkobilly" de A la Chasse à la Mob, ou le jazz bien mené de Le Jazz Club aux Mousquetaires, et même quelques chansons (le très Garçons Bouchers dernière période Adolescent, la chansons réaliste revisitée de Mon Gavroche à Moi, la divine apparition des fous-furieux des Tétines Noires (My Night Club Head)) qui contribuent certainement aux meilleurs moments. Épars, les bons moments, pas suffisamment présents, des idées parfois sous-développées comme c'est si souvent le cas avec les courtes pistes des bandes-sons de film, qui sont avant tout faites pour être entendues en support de la pellicule éclairée, pour qu'on recommande une galette de toute manière difficilement localisable (parce que plus éditée) mais, sait-on jamais, si un jour l'occasion se présente (ici par exemple ! ;-)) et que "le Gros" vous a toujours "parlé", ce n'est peut-être pas une si mauvaise idée...

1. La Comptine Des Mousquetaires 0:30
2. Fanfare Des Mousquetaires 1:03
3. Lise Boit 1:09
4. Les Mamies 3:09
5. Le Menuet Des Mousquetaires 0:39
6. Kill Destroille 0:40
7. Bonne Est Lise 1:54
8. Adolescent 2:47
9. Les Mousquetaires Des Appalaches 1:18
10. Vive Le Mariage 0:35
11. Qu'Est-Ce Qu'On Se Marre Dans Le Grenier 1:53
12. Mon Gavroche À Moi 2:43
13. Les Mousquetaires Au Portugal 1:07
14. J'Ai Une Gueule D'Atmosphère? 1:19
15. Je Thème 1 2:44
16. Je Thème 2 2:07
17. Les Mousquetaires Sont Fatigués 1:32
18. À La Chasse À La Mob 1:00
19. Les Hard Mousqueters 1:12
20. Les Raviolis Sont Jolis 1:14
21. Dans La Rome Antique 3:20
22. Les Mousquetaires À Nashville 1:18
23. Charroux S.A. 0:59
24. Cherche Cherche 0:55
25. Les Mousquetaires À La Ferme 1:18
26. My Night Club Head (Les Tétines Noires) 3:16
27. Porto Rinolaryngologiste 1:31
28. Nom D'Un Bréviaire 1:39
29. Les Mousquetaires Valse 1:35
30. Le Bar Était Louche 2:16
31. Au Zoo C'Est Beau 1:29
32. Le Jazz Club Aux Mousquetaires 1:30
33. Pot-Pourri Des Mousquetaires 2:02

Various Instruments – François Hadji-Lazaro
Bass – Boubouche
Double Bass – Alain Wampas
Drums – Xavier Mesa
Guitar – Moby Dick (11), Robert Bazarte
Keyboards – Alex Reitzman
Saxophone – Pierre Rigaud
Trombone – Bernard Maitre
Trumpet – François Martin
Vocals – Sapu

FRANÇOIS HADJI-LAZARO

SaMeDi
Lene "Play with Me" (2003)
ou "Post-Barbie Girl"

Comment ça vous ne connaissez pas Lene ? Outre un physique qu'on remarque et une charmante frimousse, elle fut la reine (et l'est redevenue, le groupe s'étant reformé) des dance-poppers norvégiens d'Aqua, mais si, vous savez, Barbie Girl, ce one hit one-hit-wonder aussi agaçant qu'addictif, aussi fun que nauséeux avec son hymne, certes décalé, à la femme objet. Femme objet qu'était donc Lene, dans le clip, mais certainement pas derrière les spotlights où, plus qu'une simple potiche, elle participe activement à l'écriture, pour ce que ça vaut glisseront les tenants du bien-écoutant... Bref, en 2003, Aqua n'est plus qu'un souvenir et Lene, Nystrøm de son nom de famille, se lance dans une carrière solo avec, ô! surprise, un album de dance pop dans la droite lignée de qui vous savez. Play with Me qu'il s'appelle, un titre qu'on mettrait bien à exécution et une galette rondement menée qui, n'en doutons pas, saura séduire les amateurs du genre. Parce qu'elles sont bien troussées ces chansons, absolument classiques dans le genre, les figures du genre de l'époque (Madonna encore et toujours, Kylie Minogue, Britney Spears ou, déjà, Beyoncé) ne sont jamais bien loin, mais, à l'image d'un It's Your Duty (to Shake That Booty), single introductif et tube au Danemark et ne Norvège, passé sous silence chez nous d'ailleurs, absolument réussi et diablement efficace où la voix mutine de Lene fait merveille, c'est une affaire qui roule, une belle mécanique de précision parce qu'autour, il n'y a rien qui ne déçoive si on n'attend pas de Play with Me autre chose que ce qu'un album de dance-pop est capable d'offrir, une belle quarantaine de minutes de "mindless fun" pour se secouer le popotin avec même de jolies ballades (le trip-hop au refrain qui pète façon power ballad 80s, Bad Coffee Day, le classieux et cotonneux Scream qui clôt l'album en beauté) ou de belles trouvailles d'arrangements (les flaveurs orientales discrètes de Virgin Superstar et Up in Smoke, la guitare compressée d'It's Your Duty, Play with Me ou Surprise). Rien de révolutionnaire mais, indéniablement du travail bien fait et une galette finalement assez fraiche (la voix de Lene y est pour beaucoup) et donc largement recommandable si, prioritairement, aux amateurs du genre. Et aux curieux qui tomberaient par chance dessus, on ne sait jamais et qui auront sans doute un peu honte de l'aimer, ce petit album...

1. Virgin Superstar 3:24
2. Pretty Young Thing 4:24
3. It's Your Duty 3:06
4. Play with Me 3:05
5. Bad Coffee Day 4:44
6. Here We Go 3:43
7. Bite You 3:29
8. Up in Smoke 3:38
9. We Wanna Party 3:18
10. Pants Up 3:31
11. Surprise 3:01
12. Scream 3:44

LENE