samedi 25 février 2017

C comme...

C de la musique. C un recyclage aussi. C le 3ème de 26 chapitres de la saga alphabétique d'un blog en pilotage automatique... et C pour vous, surtout. Enjoie !


C comme...
CALE, JOHN "The Island Years" (1996)
Une Island avant le Désert...

Outre des enregistrements et des publications rapprochées, signe de temps où tout allait plus vite dans le monde de la rock music, il y a un vrai sentiment d'urgence sur la triplette enregistrée par John Cale pour le label Island et réunie (avec quelques inédits pas inutiles) sur un double cd bien fichu mais, surtout !, gorgé d'excellentes performances par d'excellents musiciens pour un résultat, ô surprise !... Excellent !
Or donc, au lendemain d'un triomphant et précieux Paris 1919, œuvre à laquelle nul ne niera une "panthéonienne" destinée, le gallois change notablement de ton en plus de label revenant à des amours plus brutales et donc à un rock'n'roll brut de décoffrage (mais pas idiot pour autant (intello un jour, intello toujours !) preuve qu'on peut bander ses muscles, tendre sa voix sans tomber dans l'agression machiste d'un Ted Nugent pour ne citer qu'un bon gros bœuf étatsunien) tout en continuant d'assurer l'héritage de ses expérimentations plus pop. Précisons aussi que la crème collectée par Cale dans les différents line-up qui l'accompagnent (en vrac : Manzanera, Eno, Richard Thompson, Chris Spedding, Phil Collins (ne riez/fuyez pas !), etc.) n'est pas exactement un facteur handicapant de l'entreprise... Mais bon, c'est Cale à la barre, c'est lui le chef et ces années Island sont définitivement marquées du sceau de sa divine colère, juste colère, sa glaçante colère... sa Belle colère ! Mais pas que de la colère, Cale est trop malin pour ça.
Si on rentre dans le "gras de la bête" et en isole chacune des ses composants, on dira que Fear, premier paru en octobre 1974, est aussi le plus varié du lot, le moins lugubre aussi, et qu'on y croise moult créatures chatoyantes qui ont sans aucun doute beaucoup influencé ce qu'est Nick Cave aujourd'hui devenu (tous projets confondus). Et c'est un magnifique album avec, en tête de gondole, un Ship of Fools tout simplement bouleversant.
Cinq mois seulement plus tard (ha les cadences infernales des joyeuses seventies !), en mars 1975, parait Slow Dazzle suite logique mais plus "rockocentrée" de Fear qui gagne largement en efficacité ce qu'il cède en diversité. C'est encore un album intense avec un Cale "à vif". On en ressortira l'hommage à Brian Wilson, Mr. Wilson, la reprise hantée d'Elvis Presley, Heartbreak Hotel, et un bien senti Dirty Ass Rock 'N' Roll qui en remontre facilement à son copain Lou.
Last but not least, en novembre 1975, Helen of Troy, l'album d'avant la rupture, est aussi le plus cohérent, celui qui donne le plus l'impression d'écouter un groupe des trois, pas un hasard puisque c'est celui au line-up le plus constant. Et pas le moins réussi donc parce qu'on y trouve des pépites comme la chanson titre ou le croquignolet (I Keep a) Close Watch où Cale croone comme un vieux pro. C'est aussi tout en étant le moins agité, le plus théâtral de ces années Island comme en témoigne le quasi-progressif Engine... Et une réussite de plus !
On ajoutera que les trois fonctionnent très bien les uns à côtés des autres et constituent un tout intéressant sur une période où Cale, visiblement, a quelques visées commerciales qui ne seront, hélas, pas payées en retour malgré la qualité générale des prestations et des compositions. Peut-être cette pop rock certes abordable mais encore un peu trop cérébrale et parfois un peu trop acide laissa froid un public amateur récurrent de prêt-à-mâcher... Peut-être aussi qu'un Cale, qui n'est pas un grand chanteur ni n'a jamais prétendu l'être, à la voix si particulière, n'était pas taillé pour le costard...
Peut-être... Mais le petit drame de la période c'est qu'il faudra quelque années avant que Cale ne repasse par la case studio privant donc le monde, et les fulgurances de son début de catalogue solo, d'une suite immédiate. Il faudra ainsi attendre 1981, et le pas glop (mais pas honteux non plus) Honi Soit, pour retrouver du matériau original de Cale en solitaire... Le niveau s'améliorera heureusement dès l'année et la galette suivante avec le très bon, essentiel même !, et pourtant cruellement indisponible aujourd'hui Music For A New Society, mais c'est une autre histoire...
De l'objet proprement dit, outre quelques bonus tracks bienvenues, on appréciera de le voir doté d'une pochette classe et pas tapageuse, à l'image du ténébreux artiste qu'elle affiche. Il n'y a pas à dire, c'est du bon boulot où on regrettera simplement l'absence de paroles qui auraient joliment complémenté les notes de pochettes de Ben Edmonds (du magazine Rolling Stones US, qui s'y connait visiblement) et les quelques photos d'époque. Mais bon, c'est pour pinailler parce que, vraiment !, The Island Years offre une trop belle opportunité de découvrir John Cale dans une phase moins "commercialement faste" de sa carrière (c'est tout relatif, Cale n'ayant jamais été un gros vendeur) mais pas moins faste artistiquement comme ceux qui tenteront l'expérience s'en rendront joyeusement compte.

CD 1
Fear (1974) & outtake
1. Fear Is a Man's Best Friend 3:52
2. Buffalo Ballet 3:28
3. Barracuda 3:46
4. Emily 4:21
5. Ship of Fools 4:36
6. Gun 8:04
7. The Man Who Couldn't Afford to Orgy 4:33
8. You Know More Than I Know 3:34
9. Momamma Scuba 4:23
10. Sylvia Said 4:07 (single B-side, remixed)
Slow Dazzle (1975) & outtakes
11. All I Want Is You 2:55 (outtake)
12. Bamboo Floor 3:24 (outtake)
13. Mr. Wilson 3:15
14. Taking It All Away 2:56
15. Dirty-Ass Rock 'N' Roll 4:41
16. Darling I Need You 3:35
17. Rollaroll 3:57
CD2
1. Heartbreak Hotel 3:10
2. Ski Patrol 2:05
3. I'm Not the Loving Kind 3:07
4. Guts 3:26
5. The Jeweller 4:11
Helen of Troy (1975) & outtakes
6. My Maria 3:48
7. Helen of Troy 4:18
8. China Sea 2:30
9. Engine 2:45
10. Save Us 2:20
11. Cable Hogue 3:30
12. (I Keep A) Close Watch 3:27
13. Pablo Picasso 3:20
14. Leaving It Up To You 4:33
15. Baby, What You Want Me to Do? 4:48
16. Sudden Death 4:36
17. You & Me 2:50 (outtake)
18. Coral Moon 2:14
19. Mary Lou 2:46 (outtake)

- Line-up sur "Fear" (1974)
John Cale - bass guitar, guitar, keyboards, viola, lead vocals, production, writing, cover
Phil Manzanera - guitar, slide guitar on "Momamma Scuba", executive producer
Fred Smith - drums
Brian Eno - synthesizer, effects, executive producer
Archie Leggatt - bass
Michael Desmarais - drums on "Momamma Scuba"and "Fear"
Richard Thompson - slide guitar on "Momamma Scuba"
Bryn Haworth - slide guitar on "Momamma Scuba"
Brian Turrington - bass on "Momamma Scuba"
Irene Chanter - background vocals
Doreen Chanter - background vocals
Liza Strike - background vocals, girl's choir
Judy Nylon - lead vocals on "The Man Who Couldn't Afford to Orgy"

- Line-up sur "Slow Dazzle" (1975)
John Cale: piano, organ, clavinet, vocals, production, cover, writing
Gerry Conway: drums
Pat Donaldson: bass
Timi Donald: drums
Brian Eno: synthesizer
Phil Manzanera: guitar
Geoff Muldaur: harmony vocals on "Guts" and "Darling I Need You"
Chris Spedding: guitar
Chris Thomas: violin, electric piano

- Line-up sur "Helen of Troy" (1975)
John Cale - keyboards, guitar, vocals
Phil Collins - drums
Pat Donaldson - bass
Timi Donald - drums
Brian Eno - synthesizer
Chris Spedding - guitar
Robert Kirby - string & choir arrangement


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CAMEL "Mirage" (1974)
Divin Dromadaire (sans filtre !)

A l'ombre des géants de la période (Genesis, Yes, Pink Floyd, ELP, King Crimson, etc.) vit le jour un fougueux animal qui, blatérant à qui mieux-mieux, finit par se faire entendre de ses pairs et des amateurs du genre quand, après un premier album prometteur mais pas encore tout à fait au point, ils produisirent ce qui reste, à ce jour, 4 décennies après les faits, leur magnum opus, je pense évidemment à Camel et à son Mirage d'album, une tuerie !
Parce que, cette fois, assuré de leur art, de leurs techniques individuelles et de leur capacité à tout faire péter en groupe, c'est une formation qui lâche la bête à bosse qui se présente à nous, un Camel qui ose ne plus être le timide gentil petit groupe de son premier album pour venir chatouiller les crampons de Yes, de Genesis et même de King Crimson. Pas de doute, c'est de progressif symphonique dont il s'agit, les claviers monumentaux de Peter Bardens sont là pour nous le rappeler, les guitares stratosphériques et trépidantes d'Andrew Latimer itou, l'inventive section rythmique pas mieux, et les constructions alambiquées, mais retombant toujours sur leurs sabots, aussi.
Dans les faits, en 5 chansons, culminant avec les suites Nimrodel/The Procession/The White Rider (un emprunt textuel à l'univers de JRR Tolkien) et un Lady Fantasy parfait de son riff tranchant à son développement symphonique en passant par ses glissements subtilement jazzés, c'est un Camel triomphant qui fait le métier, une union de 4 musiciens menée de main de maître par ses deux leaders instrumentaux qui, d'ailleurs, trustent largement les crédits d'écriture. Ajoutez à ça la magistrale mise en son d'un Dave Hitchcock déjà connu pour de similaires exploits pour Genesis (Foxtrot) ou Caravan (presque tout de 1968 à 1976), un spécialiste du genre qui sut mettre en valeurs les nombreuses nuances instrumentales, les lumineuses trouvailles mélodiques d'une formation qu'on retrouvera rarement à pareille fête (quoique The Snow Goose, même dans sa version réenregistrée de 2013, et Moonmadness soient également fort recommandables).
Camel, outsider type de ces groupes qui sont arrivés trop tard pour être dans le premier wagon, est un combo dont la longue et riche carrière mérite amplement d'être explorer, et plus encore dans ces années de règne progressif et, en particulier, sur ce Mirage à la pochette aussi immédiatement reconnaissable que sa musique est trop méconnue au-delà du petit cercle des afficionados du rock progressif des années 70, un oubli à réparer.

1. Freefall 5:53
2. Supertwister 3:22
3. Nimrodel/The Procession/The White Rider 9:17
4. Earthrise 6:40
5. Lady Fantasy 12:45
- Encounter
- Smiles for You
- Lady Fantasy
Bonus
6. Supertwister (Live at The Marquee Club 1974) 3:14
7. Mystic Queen (Live at The Marquee Club 1974) 6:09
8. Arubaluba (Live at The Marquee Club 1974) 7:44
9. Lady Fantasy: Encounter/Smiles for You/Lady Fantasy (Original Basing Street Studios Mix - November 1973) 12:59

Andrew Latimer - guitars, flute, vocals on "Nimrodel/The Procession/The White Rider" and "Lady Fantasy"
Peter Bardens - organ, piano, Minimoog, Mellotron, vocals on "Freefall", Fender piano, clavinet
Doug Ferguson - bass
Andy Ward - drums, percussion


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CANNED HEAT AND JOHN LEE HOOKER "Hooker 'n' Heat" (1971)
Noir et Blancs Blues

Des petits blancs avec le vent en poupe qui donne un coup de main à un vieux maître un peu oublié ou l'adoubement d'une formation prometteuse par un pape du genre ? Quoiqu'il en soit, la rencontre mythique de Canned Heat et John Lee Hooker vaut le détour !
Dans les faits, Hooker 'n Heat est une drôle de créature tricéphale où voisinent performances solo du vieil Hooker, quelques duos entre le vieux maître et Alan "Blind Owl" Wilson, et des performances incluant les deux précités ainsi que tout le line-up, le nouveau line-up avec les arrivées du guitariste Henry Vestine (un retour en fait) et du bassiste Antonio de la Barreda suite à une double défection au profit des Bluesbreakers de John Mayall, de Canned Heat.
Souvent intensément laidback, la sélection coule comme un Mississipi paresseux vers son delta, roots en diable, authentique et dépourvue de tout artifice de modernité comme, évidemment, la première partie, 9 titres tout de même, entièrement dévolue à Hooker et à son blues si typique avec des hauts (l'intense The Fellin' Is Gone en pinacle suivi de près par un Burning Hell tout près des étoiles) et d'autres de qualité aussi si un peu routiniers (Send Me a Pillow ou Drifter) qui viennent un marginalement tempérer l'enthousiasme pour la partie solo du vieux maître. Suivent les duos entre Hooker et Blind Owl, trois au total, où la jeune pousse supporte aptement le bluesman de son piano (sur l'entraînant Bottle Up and Go, le talking blues The World Today, un des musts de l'album) ou à la guitare (I Got My Eyes on You, une version ainsi nouvellement titrée, pour des raisons de droit sans doute, du classique de John Lee, Dimples). Last, but certainly not least, viennent les pleines collaborations entre Hooker et le Heat, enfin ! Et c'est un festival de 5 titres où la joie du jeu est non seulement audible mais communicative avec, en sommet himalayen de blues suant et dansant, un Boogie Chillen de plus de 11 minutes... Légendaire !
Alors, certes, la rencontre ne se fait que brièvement, on le regrettera, mais comme le reste est beau, blues et beau, que le tout fait une collection de blues de qualité si supérieure qu'on ne devrait même pas avoir à le recommander. Oui, carrément.

CD 1
1. Messin' with the Hook 3:23
2. The Feelin' Is Gone 4:32
3. Send Me Your Pillow 4:48
4. Sittin' Here Thinkin' 4:07
5. Meet Me in the Bottom 3:34
6. Alimonia Blues 4:31
7. Drifter 4:57
8. You Talk Too Much 3:16
9. Burning Hell 5:28
10. Bottle Up and Go 2:27

CD 2
1. The World Today 7:47
2. I Got My Eyes on You 4:26
3. Whiskey and Wimmen' 4:37
4. Just You and Me 7:42
5. Let's Make It 4:06
6. Peavine 5:07
7. Boogie Chillen No. 2 11:33

John Lee Hooker - vocals, guitar (all)
Alan Wilson - guitar, harmonica, vocals (CD 1 10, CD 2)
Adolfo de la Parra - drums (CD 2 3-7)
Henry Vestine - guitar (CD 2 3-5, 7)
Antonio de la Barreda - bass (CD 2 3-7)


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CERAMIC DOG "Your Turn" (2013)
Du Rock oui, mais du Rock unique !

C'est Marc Ribot qui le dit, Ceramic Dog est son premier groupe de rock depuis le lycée. Diantre ! Forcément, avec Marc Ribot, qu'on situera comme excellent musicien de studio chez Bashung ou Tom Waits, pour ne citer qu'eux, ou comme crépitant guitariste surf & rock chez John Zorn ou encore comme artiste solo multiple capable de la plus grande ascèse comme du plus monumental bordel punk jazz, un groupe de rock ne peut pas être qu'une simplette entreprise à enchainer du couplet sur du refrain avec quelques bons riffs et un petit solo de temps en temps... Trop facile !
De fait, dans la lignée d'un premier album déjà très réussi (Party Intellectuals), Your Turn est, une fois de plus, une relecture inspirée et libre de l'idiome rock (au sens large) par un musicien qui s'amuse visiblement beaucoup avec ses deux excellents compagnons, le bassiste Shahzad Ismaily (Laurie Anderson, Will Oldham, Jolie Holland, Secret Chiefs 3) et le batteur Ches Smith (Xiu Xiu, Secret Chiefs 3, Trevor Dunn's Trio Convulsant). Relecture libre mais relativement plus traditionnelle, pour ne pas dire traditionaliste, qu'elle ne l'avait été dans l'opus originel qui, plus expérimental que ne l'est Your Turn n'en était, en toute logique, que plus difficile à appréhender. Illustrant cette nouvelle abordabilité, on y trouve ce qu'on pourrait assimiler à du Satriani "garage" sur l'instrumental Your Turn, simple tournerie où Ribot laisse libre court à sa transe guitaristique, un swinging blues fun et désarmant (The Kid Is Back), ou à une fusion rap'n'rock'n'fun à classer entre Fishbone et les Beastie Boys (We Are the Professionals), mais aussi à de jolies folies comme l'arabisant et rigolard Masters of the Internet, les uns aussi irrésistibles que les autres, ceci dit en passant parce que, fondamentalement, tout ceci n'est pas sérieux même si c'est fait sérieusement... du Rock, quoi ! Une musique où Gene Vincent voisine Devo, où les Ramones ont autant voie au chapitre que Faust, où Link Wray (qui n'est jamais bien loin) en remontre à Led Zeppelin !
Dire, cependant, que toutes traces de l'appartenance jazzistique et expérimentale de Ribot ont disparues serait une exagération. Quand sur Ritual Slaughter, il trippe dans des soli free évoquant autant John Cipollina qu'Ornette Coleman ou quand, sur The Prayer, d'intimiste à explosif, il met à l'amende toute une génération de shredders ET de droners qui s'en trouvent, pour le coup, sur le cul, ou quand, encore, il reprend, dissonances et virtuosité combinées, le Take 5 de Paul Desmond, il rappelle clairement d'où il vient, le bagage qu'il transporte, ses credentials... Mais sans intellectualiste aucun, jamais !, parce qu'il y a chez Ceramic Dog et son patron, chevillée au corps, une volonté de se faire plaisir en "lâchant les chevaux" (dans l'inspiration parce que l'album réserve quelques belles plages de repos pas très éloignées de son poteau Waits, bizarrerie incluse) qui fait un bien fou à entendre et prouve qu'on n'est pas blasé à presque 60 ans après plus de 25 ans de carrière... et quelle carrière !
Party Intellectuals avait été, en son temps, une excellente surprise qui, sans totalement nous chavirer, donnait des envies d'encore, laissait un gout de trop peu tant il semblait que la formation avait encore moult pistes à explorer. On n'était alors pas sûr que lendemain il y aurait ni qu'il serait du niveau d'un Your Turn où tout le potentiel entrevu se voit démultiplié, comme le plaisir de l'auditeur ! Ca n'en fait que plus espérer que Ceramic Dog fassent encore des petits parce que, mine de rien, on tient peut-être déjà l'album rock de l'année... tout simplement !

1. Lies My Body Told Me 5:30
2. Your Turn 3:59
3. Masters of the Internet 4:04
4. Ritual Slaughter 4:04
5. Avanti Popolo 0:57
6. Ain't Gonna Let Them Turn Us Round 3:54
7. Bread and Roses 5:17
8. Prayer 5:39
9. Mr. Pants Goes to Hollywood 4:31
10. The Kid is Back! 3:06
11. Take 5 5:25
12. We are the Professionals 3:53
13. Special Snowflake 1:39

Marc Ribot: guitars, vocals, eb horn (3, 5, 11, 12), banjo (3), trumpet (3, 12), melodica (5), bass (5)
Ches Smith: drums, percussion, electronic, vocals, keys (13)
Shahzad Ismally: bass, vocals, moog (5), keys (3, 13), additional guitar (1), samples (3)
&
Eszter Balint: vocals (1, 6, 10), melodica (9), organ (10), violin (13)
Keetus Ciancia: samples (3, 7, 8, 12)
Dan Willis: Oboe, zurna (3)
Arto Lindsay: additional guitar (10)


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COLTRANE, JOHN "Giant Steps" (1959)
Sax de Sept Lieues

Il y a quelques très utiles portes d'entrée pour découvrir John Coltrane. Il y a Ballads, facile et harmonieux, A Love Supreme, épique et transcendantal, Blue Train, où le bop devient déjà hard et, bien sûr, Giant Steps, première galette de Trane pour Atlantic, révolution jazzistique à lui seul, et une merveille d'album !
Dans les faits, à peine sortie des sessions du légendaire Kind of Blue de Miles Davis, Coltrane se lance, avec un trio fort différent de celui qui l'accompagnera bientôt et entrera de plein droit dans la légende, sa légende, dans l'élaboration d'un opus qui fera non seulement date par les compositions l'articulant que par le jeu d'un Trane révolutionnant présentement l'approche de son instrument.
Pour s'en convaincre, en n'oubliant évidemment pas de le contextualiser dans son époque, il suffit d'écouter le morceau titre d'ouverture de l'album où ce diable de John, un peu à la manière de ces instrumentistes folk celtiques qui "tournent" autour de la mélodie en de riches et développés soli, fait couler un impressionnant torrent de notes de son cuivre. On pourrait se dire, bien sûr, que l'exploit est avant tout technique, ce qu'il est, indéniablement, sauf que Trane habite sa création entrainant aisément l'auditeur, qui après quelques écoutes se surprendra peut-être à chanter ses exploits à l'unisson, dans un monde à priori un peu alien mais définitivement attirant. De fait, il n'y aurait que ce Giant Steps historique suivi d'un "récital" de Kenny G (le André Rieu du sax soprano) qu'on ne se sentirait qu'à peine floué, mais il y a plus, bien plus, dans le 5ème opus de John Coltrane, le premier dont il soit l'unique compositeur.
Parce qu'en plus d'être le furieux instrumentiste que l'on sait, le sax ténor est aussi un vrai bon compositeur sachant ménager quelques salvatrices respirations au sein de sa galette, des titres qui ne reposent plus sur sa vitesse d'exécution mais bien sur son talent de mélodiste. Naima, devenu un standard du jazz depuis, sensible ballade en hommage à son épouse d'alors, en est l'admirable démonstration mais pas le seul exemple talonné qu'il est par un Syeeda's Song Flute certes plus emporté mais pas moins inspiré et mélodique. Vous l'aurez compris, le reste de l'album, pas abscond pour autant, Trane hard-boppe encore, le free viendra plus tard, dédié à de swinguantes constructions où son saxophone supersonique est l'attraction principale comme, exemple extrême et unique de l'opus sur un bref et intense Countdown qu'on finit essoufflé alors que c'est John qui enchaine les notes en un galop frénétique.
Bref, pierre fondatrice d'une seconde partie de carrière, post héroïnomanie, hélas raccourcie par la maladie, Giant Steps est non seulement une aeuvre indispensable, c'est aussi, de l'avis de votre humble serviteur, la plus apte introduction à cette authentique légende de la musique du XXème siècle qu'est John Coltrane.

1. Giant Steps 4:43
2. Cousin Mary 5:45
3. Countdown 2:21
4. Spiral 5:56
5. Syeeda's Song Flute 7:00
6. Naima 4:21
7. Mr. P.C. 6:57
Bonus
8. Giant Steps (alternate version 1) 3:41
9. Naima (alternate version 1) 4:27
10. Cousin Mary (alternate take) 5:54
11. Countdown (alternate take) 4:33
12. Syeeda's Song Flute (alternate take) 7:02
13. Giant Steps (alternate version 2) 3:32
14. Naima (alternate version 2) 3:37
15. Giant Steps (alternate take) 5:00

John Coltrane -- tenor saxophone
Tommy Flanagan -- piano
Paul Chambers -- bass
Art Taylor -- drums
&
Wynton Kelly -- piano on "Naima"
Jimmy Cobb -- drums on "Naima"
Cedar Walton -- piano on "Giant Steps" and " Naima" alternate versions
Lex Humphries -- drums on "Giant Steps"' and "Naima" alternate versions


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CORNU "Cornu" (1998)
Un étrange animal

Y en a qui on le dont de ne pas faire comme les autres, qui ne réunissent pas les instruments habituels, les textes convenus, les mélodies attendues et même les pochettes qui vont bien. C'est le cas de Cornu mené par l'ex-Forguette Mi Note Julie Bonnie (groupe qui révéla aussi l'extraordinaire Claire Diterzi)... Et tout ça en power trio, en plus !
Ayant dit ça, il faut décrire l'objet, pas simple. On pourrait dire que le violon y prend la place habituellement allouée à la guitare et il y a de ça mais pas seulement. On pourrait citer les textes souvent très intimes de Miss Bonnie (depuis devenue infirmière en puériculture et romancière à petit succès), c'est une composante essentielle de l'ensemble. On pourrait aussi évoquer une section rythmique (Alex, le frère de Julie, à la basse, un certain Ben Bernardi à la batterie) qui, un peu comme celle de l'Experience de Jimi Hendrix, a le rôle de suivre les délires de l'évidente tête de proue de la formation, on apprécie leur performance. Et la voix de Julie évidemment, un organe de "fausse chanteuse" allant du mutin au viscéral sans qui rien n'aurait vraiment été pareil. En chansons, puisque si la forme est libre le format choisi est celui habituel de la pop ou de la variété, ça donne une sélection allant du fun et groovy (J'ai besoin de tes mains, J'aime ma vie) à des explorations plus expérimentales mais non moins satisfaisantes (Pour vous retrouver un de ces jours, Je suis fière (mes fesses), Piercing) assimilables à ce grand fourre-tout qu'on appelle indie rock mais, ultimement, unique en son genre.
Pour comprendre exactement de quoi il s'agit, parce que la comparaison avec Louise Attaque est d'une rare fainéantise intellectuelle, le mieux sera de se frotter à cet animal unique, à cette formation qui ne fera hélas pas florès (trop bizarre, trop alien... trop différent !) et se séparera après un second album d'une qualité comparable mais moins surprenant (parce qu'on a alors déjà entendu Cornu). Que ceux qui plongeront soit assuré d'une chose, il n'ont jamais entendu ça avant !

1. Accompagné 3:21
2. Pour Vous Retrouver Un De Ces Jours 3:26
3. Lisa 2:27
4. J'Ai Besoin De Tes Mains 3:00
5. Le Bar 5:08
6. Je Suis Fière (Mes Fesses) 4:00
7. La Magie 2:29
8. Je Lève La Tête 2:56
9. Youpi 2:25
10. J'Aime Ma Vie 3:03
11. Piercing 4:12
12. Les Lutins (Je N'Ai Pas Voulu) 5:12

Julie Bonnie - violon et chant
Alex Bonnie - basse
Ben Bernardi - batterie


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COTTON MATHER "Kontiki" (1997)
Revivalissimo

Avec le nom d'un pasteur et politicien puritain du XIXème siècle pour le groupe et celui d'une expédition scientifique nautique norvégienne pour l'album, on sait d'emblée que le Kontiki (ou Kon-Tiki) de Cotton Mather ne sera pas un album tout à fait comme les autres.
Pas de doute, pour ceux que le revivalisme 60s intelligent intéresse, cette galette sera (s'ils ne la connaissent pas encore) une trouvaille inespérée. Passé l'étonnant mimétisme vocal entre Robert Harrison et John Lennon demeure une écriture qui n'est pas sans rappeler celle des Fab Four circa Revolver. On aurait pu craindre qu'une ressemblance aussi flagrante s'avère gênante mais l'écriture de ce quatuor d'Austin (Texas) permet d'éviter cet écueil.
Pas qu'elle diffère tant que ça de celle des Beatles, notez bien. En bons ouvriers de la pop, Cotton Mather n'appliquent que des recettes connues et reconnues afin d'arriver à leurs fins. Cependant, il faut que tous les éléments soient réunis afin d'accomplir la périlleuse mission. Pour ce faire, la mise en son est essentielle et comme elle est ici délicieusement vintage - pas en mono (faut pas pousser quand même !) mais avec juste ce qu'il faut de garage pour conserver un grain authentique - une première étape est brillamment accomplie. Notons simplement qu'en bon groupe indie, la tâche de production est assumée collectivement par trois des membres du line-up.
Evidemment, sans les chansons, tout ceci ne serait que de l'enrobage, clinquant, bien foutu mais vide de sens... Or, les compositions d'Harrison étant du tonneau de celles d'un Elliott Smith ou d'un Andy Partridge et voguant, pleines de malice, entre un rock psychédélique estampillé 60's et pop/folk enluminée de chaeurs appropriés comme savait si bien la faire les Beach Boys, CSNY... Et les Beatles, évidemment.
Avec tant d'atouts artistiques dans ses manches (imaginez un album avec des manches, pour voir... ), il est surprenant que Kontiki n'ai pas eu un plus grand retentissement. En France, de vénérables magazines tel que Magic RPM ou les Inrockuptibles (qui sont peut-être pédants mais n'ont pas mauvais goût), ont loué les qualités de ce groupe et de cet album, à raison. Hélas, à défaut d'un clip passant en boucle pour les chaines visant à lobotomiser les futures générations, d'une promotion suffisante (petit label indé oblige), c'est à une excellent réputation underground que se voit confiné ce putain de bon disque. C'est dommage, d'autant plus que le groupe semble avoir plié les gaules (plus de trace discographique depuis 2001). Reste la musique et quand elle est de cette qualité, on ne peut que se réjouir de la découverte et s'attrister que si peu de gens en aient entendu parler.
Alors, que vous soyez nostalgiques des années soixante ou amateur de musique revivaliste ou, tout simplement, amateurs de bonnes chansons, vous trouverez en Cotton Mather et leur Kontiki, une petite perle comme on n'en rencontre pas si souvent... Il serait regrettable de s'en priver.

1. Camp Hill Rail Operator
2. Homefront Cameo
3. Spin My Wheels
4. My Before and After
5. Private Ruth
6. Vegetable Row
7. Aurora Bori Alice
8. Church of Wilson
9. Lily Dreams On
10. Password
11. Animal Show Drinking Song
12. Prophecy for the Golden Age
13. She's Only Cool
14. Autumn's Birds


3 commentaires:

  1. C comme...

    JOHN CALE "The Island Years" (1996)
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    CAMEL "Mirage" (1974)
    - http://www32.zippyshare.com/v/VDhvoGXx/file.html

    CANNED HEAT AND JOHN LEE HOOKER "Hooker 'n' Heat" (1971)
    - http://www32.zippyshare.com/v/PME6FKvq/file.html

    CERAMIC DOG "Your Turn" (2013)
    - http://www32.zippyshare.com/v/NJCXpwOJ/file.html

    JOHN COLTRANE "Giant Steps" (1959)
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    CORNU "Cornu" (1998)
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    COTTON MATHER "Kontiki" (1997)
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  2. Merci !
    je les avais écoutés lors de leur première parution sur ton blog, je n'ai pas décroché depuis du Camel et du Cornu.

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  3. Hello Zorno!
    Maintenant que tu as du temps de libre, je serai heureux de te faire visiter mon nouveau chez moi (que tu peux glisser dans ta "blogroll" si le cœur t'en dit!) :

    https://absocool.blogspot.fr/

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