samedi 2 août 2014

Le concept de référence (The Genesis Studio Series 10/15)

Gabriel dernière... Et ici première puisqu'on remonte l'histoire. C'est donc du Genesis de référence, celui qui n'a jamais déçu parce qu'il n'en a pas eu le temps.

Genesis "The Lamb Lies Down on Broadway" (1974)
ou "Double Noir"


Aussi névrosé que The Wall, aussi ambitieux que Tales from Topographic Oceans ou Thick As a Brick, The Lamb Lies Down on Broadway est une œuvre essentielle. Et atypique en bien des points pour Genesis, et pas seulement parce qu'elle sera l'ultime contribution à plein temps d'un certain Peter Gabriel.
 
Et donc, c'est d'un concept album dont il s'agit, l'histoire schizophrène de Rael qui cherche John, qui pourrait bien être lui-même, dans les bas-fonds d'un New York imaginaire plus proche des délires "nus-festinés" d'un Burroughs que des cartes postales de Woody. Mais en vérité, à moins que vous ne soyez de ceux qui analysent ad nauseam l'Œuvre, le concept n'a que peu d'importance outre qu'il influence la tonalité de ce qui restera l'opus le plus sombre du géant progressif, leur Double Noir.
Le plus noir ? C'est particulièrement évident sur certaines des plus belles pièces de ce tour de force. Sur le morceau titre d'ouverture et son pendant du second disque (The Light Dies Down on Broadway) où Gabriel délivre des performances écorchées vives qui magnifient des compositions par ailleurs fort inspirées. Sur In the Cage, évidemment, pièce épique également marquée par la performance à fleur de peau d'un chanteur poussant ses cordes vocales à la limite de la rupture. Sur un Back in NYC où on entend un Genesis oubliant l'art du compromis harmonique, nous rentrant frontalement dedans. Sur Carpet Crawlers, Anyway ou The Lamia où les douces mélodies ne sont qu'illusions, guet-apens cafardeux en plus de confirmer l'art consommé de Genesis à millimétrer ses savantes constructions sympho-progressives. Toutes d'excellentes compositions, ça va sans dire, où s'exprime avec classe un groupe de musiciens supérieurement doués.
Bien sûr, il y a quelques respirations, quelques salutaires bouffées d'oxygène dans l'étouffant tout. Un tout doux Cuckoo Cocoon où arpèges délicats et flûte gracile viennent nous caresser les tympans. Un presque pop Counting Out Time aux chœurs quasi-Bealtesiens et au solo de synthétiseur à la sonorité rigolote. Un The Chamber of 32 Doors, un des sommets de l'album ceci dit en passant, où Gabriel se fait presque soul sur une partition à la mélodie touchée par les dieux. Un Lilywhite Lilith où les chœurs angéliques de Collins viennent merveilleusement contrebalancer la rudesse de Gabriel. Que des sommets, une fois encore, ça commence à faire une somme !
Le reste ne dépare pas vraiment, parce qu'il n'y a pas un moment de baisse d'inspiration sur tout l'album, même sur les quatre intermèdes instrumentaux : le mélodieux Hairless Heart, le possédé The Waiting RoomSteve Hackett, artisan principal de la chose, sort des sonorités d'un autre monde de son instrument, et les respectivement mystique et ambient Silent Sorrow in Empty Boats et Ravine servant la progression du concept, et la servant bien.
Oui, vraiment, The Lamb Lies Down on Broadway est une fête, celle d'un rock progressif qui sait tenir ses formats sans partir dans de longuettes épopées sans queues ni têtes. Preuve en sont quelques unes des plus courtes compositions (l'enchainement Fly on the Windshield, Broadway Melody of 74, par exemple, splendide exemple). Parce que si Genesis sait faire Supper's Ready, The Cinema Show, il sait aussi se faire concis sans ne rien perdre de sa faconde mélodique. Ce qui tient quasiment du miracle quand on sait les conditions chaotiques de la création de l'œuvre (wikipédiez voir pour plus de détails).
Allez, pour minorer un peu cet idyllique tableau, on concèdera que l'album ne finit pas exactement sur ses meilleurs titres et que, sans être mauvaise pour autant, la doublette In the Rapids et it, ne clôt pas la performance sur le feu d'artifice final qu'on aurait pu attendre, mais le fait bien tout de même, parce que ces gens-là sont indéniablement très talentueux même quand ils sont un chouia moins inspirés.

Magnifiquement mis en son par le désormais coutumier John Burns, déjà auteur du mix du Genesis Live et producteur de l'immense Selling England by the Pound, The Lamb Lies Down on Broadway reste, 40 ans après sa conception, joyeux anniversaire !, une pièce de référence, un grandissime double album concept justement porté au nues, titulaire "panthéonique" de son style, évidemment !, mais aussi de la musique rock en général et de la musique tout court. Indispensable, c'est le mot.


CD 1
1. The Lamb Lies Down on Broadway 4:55
2. Fly on a Windshield 2:47
3. Broadway Melody of 1974 2:11
4. Cuckoo Cocoon 2:14
5. In the Cage 8:15
6. The Grand Parade of Lifeless Packaging 2:45
7. Back in N.Y.C. 5:49
8. Hairless Heart 2:13
9. Counting Out Time 3:45
10. The Carpet Crawlers 5:16
11. The Chamber of 32 Doors 5:44

CD 2
1. Lilywhite Lilith 2:40
2. The Waiting Room 5:28
3. Anyway 3:18
4. Here Comes the Supernatural Anaesthetist 2:50
5. The Lamia 6:57
6. Silent Sorrow in Empty Boats 3:06
7. The Colony of Slippermen 8:14
a) The Arrival
b) A Visit to the Doktor
c) Raven
8. Ravine 2:05
9. The Light Dies Down on Broadway 3:32
10. Riding the Scree 3:56
11. In the Rapids 2:24
12. it 4:58


Tony Banks – Hammond T-102 organ, RMI 368x Electra piano, Mellotron M400, Elka Rhapsody synthesizer, ARP 2600 & Pro Soloist synthesizers, acoustic piano
Phil Collins – drums, percussion, vibraphone, backing vocals
Peter Gabriel – lead vocals, flute, oboe, tambourine, experiments with foreign sounds
Steve Hackett – electric guitar, classical acoustic guitar
Mike Rutherford – bass guitar, twelve-string guitar, bass pedals, fuzz bass
&
Brian Eno
– enossification (treatments)

10 commentaires:

  1. J'ai suivi depuis le début tes élans de billets sur genesis.
    Fallait oser et c'est vraiment bon de voir que ces albums restent encore à mettre en avant, en débat, en 2014...
    Le rock prog est un art en soit - un art en correspondance avec une forme de musique dite "savante" ou plus exactement en rapport avec une musique reposant sur des bases "écrites".
    Ici dans cet album c'est plutôt flagrant et il faut écouter les parties de Banks, les adéquations d'arpèges entre cordes, les choeurs, soignés... etc, etc..
    Un parfaite maîtrise donc d'un propos qui s'est bonifié au fil des ans.
    Mais comme tu fais en marcha arrière je ne vais pas te couper dans ton trajet.
    Il y avait les pro Genesis /GAb et les pros Genesis /Phil...
    Perso, je m'en fous, du moment qu'il y a ... la musique et avec eux, quelle que soit leur période - c'est tout de même avant tout elle qui est la règle du jeu...
    merci pour ces chroniques qui forcément en plus, pour un mec de ma génération, ne sont pas sans souvenirs...
    à +

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    1. Ca fait longtemps que j'ai envie de m'attaquer à Genesis qui reste un de mes groupes préférés. Mais je n'osais pas...
      Alors encore merci à Devant qui m'a lancé en demandant à écouter Calling All Stations.
      Et, oui, la musique de Genesis reste un machin dont on peut parler, débattre à l'infini parce que c'est de légende dont on parle.
      Sinon, comme toi, je me fous de savoir si c'était mieux avec Gabriel qu'avec Collins d'autant que, à mon avis, c'est surtout le départ d'Hackett qui a changé la donne.

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  2. C'est dommage, les liens sont morts... J'aurais bien testé même si j'ai quelques doutes sur la viabilité de l'entreprise parce que, The Lamb, c'est quand même un intouchable.

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  3. Tiens tiens, le tout est bien présenté, mais un seul désaccord: "in the rapid" est un titre qui me hante encore et encore. Trop court, mais parfait y compris dans le chant qui descend grave puis remonte pour exploser vocalement ... pour moi annonce les débuts solo de Gabriel... Ensuite, bon, ok l'enchaînement d'un titre qui me fait penser à AIRPORT des Motors, n'empêche que sur scène cela faisait explosif
    Bien entendu j'ai pris

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    1. J'arrête en général l'album sur The Light Dies Down on Broadway, ça fait une belle fin. :-)

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  4. Le Cd1 avec deposit fonctionne mais pas le 2 :(

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  5. Excuse moi cher anonyme, mais franchement, qu'un lien déposit marche ou pas, on en a rien à cirer...
    C'est ce qui me gonfle avec les commentaires bien souvent.
    Ça fait vraiment pas avancer le débat musical et sortir du mode sms ferait un peu de bien surtout en ces périodes de récession cuturelle - parler de musique comme tu l'as fait d'entrée au lieu de parler cuisine de lien, c'est un tantinet plus stimulant.
    Et puis, désolé, mais moi, l'anonymat...
    à bon entendeur.

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  6. Salut Pascal Georges
    Excuses moi de te gonfler avec mes com's que tu n' es pas obligé de lire
    Je voulais faire découvrir ce tribute de l' album posté par Zorn tout simplement
    A bon entendeur

    Fil

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  7. N'écouter que la moitié du tribute, franchement, ça ne me fait pas envie.
    Enfin, merci pour le relais.

    @ Pascal Georges,
    Stressé ? Fil (pas anonyme donc) ne fasait que répondre à ma réaction sur sa proposition de lien. Rien de bien grave, donc.
    Paix, amour, libertés et fleurs comme dirait l'autre... ^_^

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  8. Y a aucun soucis Zorn
    Mais méfies toi du mode SMS ça fait du mal a la culture ;)

    Fil

    ps: Si jamais t' as l' occasion d' écouter le tribute n' hésites pas et fonce

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