Suite à l'officielle cessation d'activité de la formation après son 7ème album, The Last Judgment, il n'est que temps de revenir sur un trio d'exception et son excellente discographie : Moonchild. Dont acte.
PReMieRS CRiS
John Zorn/Moonchild "Moonchild" (2006)
ou "Le pécher originel"
Une relecture du rock dur filtré au classique contemporain et au rock progressif ? Un objet musical non identifié d'un compositeur à la largissime palette ? Un nouveau power trio mais pas un power trio de plus ? C'est tout ça Moonchild, création de John Zorn pour voix, basse et batterie.
Fondamentalement, il n'est pas surprenant de voir Zorn s'embarquer dans telle aventure, que ce soit avec Naked City, Painkiller, son apparition dans Praxis, et jusque Masada et son exemplaire mouture électrique, on sait que le turbulent new-yorkais a, aussi, un certain goût pour le bruit blanc qu'il soit punk, hardcore ou metal. Et puis les trois intervenants choisis, du fidèle batteur Joey Baron au régulier de la quatre corde électrique Trevor Dunn à un Mike Patton vocaliste aussi à son aise dans le bruitisme que dans l'harmonie que Zorn a déjà régulièrement croisé, ce ne sont que des têtes familières qui occupent l'affiche, et avec une telle qualité "à portée de main" il aurait tort de se priver, ce bon John. La musique du trio, d'ailleurs, est à l'avenant, habituelle et surprenante à la fois. En effet, qu'on y retrouvent compilés une esthétique contemporaine, un abattage empruntant autant au metal le plus prospectif qu'au punk le plus implacable, des fantômes directement issus du free jazz, celui de Carl Stalling, et du Rock in Opposition (la forme la plus extrême du rock progressif représentée, par exemple, par les mabouls d'Henry Cow), aussi, est tout sauf une surprise considérant que tous ces éléments (et de nombreux autres présentement inexploités) font partie intégrante de sa "grammaire" musicale. Des surprises sur la forme, peut-être ? Même pas en vérité, le format chanson déstructurée ayant été choisi ce qui est tout sauf une nouveauté. Et là, il y en a qui commence à flairer le négativisme à tous crins alors que, crénonvindiou, Moonchild, avec les feulements, grognements, cris et mélodies de Patton, un Dunn qui, sa basse livrée à elle seule comme instrument mélodique, a tout loisir de se déchainer et ne s'en prive pas, et un Joey Baron étalant, sans arrogance, sans recourir à une performance démonstrative à l'excès, la très large palette percussive qu'on lui connaît. Et c'est donc dans le fond, dans les compositions possédées d'un Zorn mode "prêt à en découdre" et dans la performance de chacun des trois mabouls adoubés que Moonchild fait la différence, et quelle différence ! Parce qu'outre sa furie évidente, son chaos organisé, le machin est aussi un épatante création sonore qu'on se plait à disséquer bien des écoutes après la baffe originelle prise à la première rencontre.
Moonchild ? C'est de la musique avant tout mais c'est aussi, et c'est lard qu'on perd les estomacs fragiles, un grand 8 et un train fantôme musical. Et un opus inaugural d'une formation qu'on ne saurait trop recommander.
Moonchild ? C'est de la musique avant tout mais c'est aussi, et c'est lard qu'on perd les estomacs fragiles, un grand 8 et un train fantôme musical. Et un opus inaugural d'une formation qu'on ne saurait trop recommander.
1. Hellfire 4:07
2. Ghosts of Thelema 4:32
3. Abraxas 3:13
4. Possession 5:21
5. Caligula 1:47
6. 616 5:20
7. Equinox 4:07
8. Moonchild 6:51
9. Part Maudit 2:49
10. Summoning 2:30
11. Sorceress 4:37
Joey Baron - drums
Trevor Dunn - bass
Mike Patton - voice
John Zorn - composition, production, arrangements, direction
Mike Patton, chante, parle, hurle... et on aime ça ! |
VoLuMe II
John Zorn/Moonchild "Astronome" (2006)
ou "Décollage immédiat"
On prend les mêmes et on recommence ? Oui et non parce que, sur la lancée d'un premier opus plus que convaincant, Zorn élargit encore le spectre, et son ambition.
Concrètement, Astronome est un opéra en trois actes, un opéra uniquement joué par le même trio qui a si bien réussi son coup de force originel six mois plus tôt, un opéra minimaliste donc, à la fois contemporain, jazz et rock qui parvient, trop fort, à transcender chaque genre auquel il s'intéresse. La base sonique, évidemment, les mêmes intervenants étant impliqués, est assez similaire à ce qu'on a déjà entendu, la forme par contre, et même le contenu, pousse encore un peu plus les limites de ce qu'on peut produire avec un line-up si réduit. Trois actes, trois titres donc, chacun de plus de 10 minutes, Zorn n'a décidément pas froid aux oreilles. Et c'est assez extraordinaire de maîtrise furieuse, de grâce occulte. Parce que, évidemment, et ce ne sera une surprise pour personne, la base textuelle de la chose tient du grand malin, de la magie noire et autres étrangetés qui collent si bien avec l'imagination musicale de Zorn. Or donc, on y retrouve la patte Moonchild, cette "free aggression" intelligente et nuancée si immédiatement identifiable, mais tout va plus loin, cette fois avec, notamment, une partition diablement plus ambitieuse que, pourtant, le trio démonique habite sans apparente difficulté. Ca crie, ça frappe, ça charcle mais ça sait aussi se ménager quelques plages plus mélodiques, éthérées mais toujours aussi malsaines, comme autant de répits avant de replonger dans la tempête. En vérité, on peine à justement décrire le fracas d'harmonie, d'ambiances et d'idées qui se disputent sur cet opus aussi indescriptible que jouissif, si vous avez l'estomac pour ce genre de chose qui n'est jamais très accessible, ceci se devait d'être précisé parce que Moonchild, ce n'est pas de la rigolade. Le mieux, c'est toujours le mieux d'ailleurs, est de vivre cette grande marée émotionnelle qui balaye tout sur son passage.
Et dire qu'ils ne sont que trois ! On voit mal comment John Zorn aurait pu plus pleinement exploiter les capacités et les obligatoires limites qu'avec ce Astronome dépassant, ce qui n'était pas gagné d'avance, son devancier en classe et en folie. Pas étonnant qu'à partir de là il ait toujours choisi, au moins sur une partie de l'album, d'adjoindre quelques compléments à son trio de base, à commencer par le légendaire, peut-être le sommet de la discographie de Moonchild, Six Litanies for Heliogabalus. Mais ça, c'est une autre histoire qui ne doit aucunement vous éloigner de ce second chapitre, cet Astronome si réussi et si recommandable alors, soyez curieux, laisser vous chahuter.
Et dire qu'ils ne sont que trois ! On voit mal comment John Zorn aurait pu plus pleinement exploiter les capacités et les obligatoires limites qu'avec ce Astronome dépassant, ce qui n'était pas gagné d'avance, son devancier en classe et en folie. Pas étonnant qu'à partir de là il ait toujours choisi, au moins sur une partie de l'album, d'adjoindre quelques compléments à son trio de base, à commencer par le légendaire, peut-être le sommet de la discographie de Moonchild, Six Litanies for Heliogabalus. Mais ça, c'est une autre histoire qui ne doit aucunement vous éloigner de ce second chapitre, cet Astronome si réussi et si recommandable alors, soyez curieux, laisser vous chahuter.
1. Act 1 14:34
I. A Secluded Clearing in the Woods
II. A Single Bed in a Small Room
III. The Innermost Chapel of a Secret Temple
2. Act 2 17:02
I. A Mediaeval Laboratory
II. In the Magick Circle
3. Act 3 12:44
I. A Barren Plain at Midnight
II. An Unamed Location
Joey Baron - drums
Trevor Dunn - bass
Mike Patton - voice
John Zorn - composition, production, arrangements, direction
Joey Baron, bat comme si sa vie en dépendait |
LyRiQue, oPéRaTiQue
John Zorn/Moonchild "Six Litanies for Heliogabalus" (2007)
ou "Toute pompe dehors"
Ayant probablement un peu fait le tour du format précédent de la formation, désireux aussi de continuer à travailler avec le trio qu'il a créé, John Zorn relance son Moonchild en version opératique. Sur le papier, une bonne idée.
Et dans les faits, une excellente ! Et un radical changement parce que, avec en plus du trio indéboulonnable un Zorn qui repique à l'alto, une Ikue Mori qui vient faire chanter son laptop, un Jamie Saft à l'orgue ronflant et trois, oui, trois !, vocalistes venues "opératiser" tout ça encore un peu plus avant, on peut dire que le changement est radical. Et donc six litanies pour le dieu du soleil syro-romain ou pour l'empereur romain du même nom. La réponse est dans l'inspiration francophile dadaïste de Zorn et donc chez Antonin Artaud et son texte Héliogabale ou l'Anarchiste couronné mais comme ledit empereur fut prêtre du premier, la pomme ne tombe jamais loin de l'arbre, quoi. Ces considération conceptuelles, mais d'importance néanmoins puisqu'inspiratrices de la création, passées, qu'en est-il de l'aspect musical de ce saillie historico-mystique ? Salutairement, on reconnaît tout de même le trio des deux précédents opus mais là où il était nippé de guenilles qu'on ne le l'aurait même pas laissé entrer à un bal des pompiers du 14 juillet, le voici revêtu d'un seyante et très étudiée tenue de bal que même le plus sélect des clubs ne saurait refuser. Comparaisons costumières mise à part, c'est à une bluffante démonstration à laquelle nous sommes conviés où les apports additionnels, tout sauf envahissants, poussent le souffle lyrique permettant au trio de s'exprimer avec d'autant moins de retenue qu'ils ne sont plus seuls. Et donc, Litanie après Litanie, on apprécie l'art consommé du compositeur d'ainsi mêler, sans effort malgré le chaos, un chœur de trois voix et son indéniable porté opératique à un trio radical, les interventions de l'orgue de Saft et les courtes saillies saxophoniques de Zorn, et l'électronique texturante d'Ikue, mais aussi les pleins et les déliés, les hausses d'intensités et les moments de recueillement venant, comme autant de salutaires pauses, tempérer l'orage et le rendre, conséquemment, encore plus imposant quand il se produit (ce qui est souvent, parce que c'est bien de Moonchild dont il s'agit).
En élargissant la gamme, la palette sonore de son projet, Zorn accomplit, comme nous le savons désormais, un de ses hauts-faits et, ultimement, l'album le plus réussi de sept du présent projet. Un album tout sauf facile d'accès mais qui, pour ceux qui sauront s'accrocher, lui donner toute l'attention qu'il mérite, dévoilera moult merveilles. Six Litanies for Heliogabalus ? Une folie extrêmement rondement menée et définitivement recommandée.
En élargissant la gamme, la palette sonore de son projet, Zorn accomplit, comme nous le savons désormais, un de ses hauts-faits et, ultimement, l'album le plus réussi de sept du présent projet. Un album tout sauf facile d'accès mais qui, pour ceux qui sauront s'accrocher, lui donner toute l'attention qu'il mérite, dévoilera moult merveilles. Six Litanies for Heliogabalus ? Une folie extrêmement rondement menée et définitivement recommandée.
1. Litany I 7:53
2. Litany II 7:06
3. Litany III 10:36
4. Litany IV 8:13
5. Litany V 4:30
6. Litany VI 6:16
John Zorn: alto saxophone, composition, production, arrangements, direction
Joey Baron: drums
Trevor Dunn: bass
Mike Patton: voice
Ikue Mori: electronics
Jamie Saft: organ
Martha Cluver: vocals
Abby Fischer: vocals
Kirsten Soller: vocals
Trevor Dunn, 4 cordes bien martelées |
eXTRêMe MySTiCiSMe
John Zorn/Moonchild "The Crucible" (2008)
ou "Back to Basics and More"
Sur la lancée d'un Six Litanies for Heliogabalus instrumentalement richement doté, John Zorn recadre le projet Moonchild autour du trio originel sans oublier de s'inclure au mix pour un album, on peut le dire, sans le moindre compromis mais pas sans ses particularismes.
Mais, ne nous mentons pas, si l'album n'a clairement rien d'indigne, c'est une belle réussite de plus pour le trio présentement supplémenté de son compositeur au sax alto et de Marc Ribot sur un titre, on est un peu déçu. Une raison à ça ? Six Litanies for Heliogabalus, la précédente livraison de la formation qui, plus arrangée, plus variée, avait fait fort, très fort. Du coup, ce relatif retour à la normale, et à une inclinaison stylistique plus proche des deux premiers albums de Moonchild, laisse un peu l'auditeur sur sa faim. Ceci dit, la présence de l'alto de Zorn est une excellente nouvelle. Cette fois aucunement noyé dans la masse d'Heliogabalus, il apporte, entre stridences et harmonie, un vrai plus au son du trio, et encore plus sur un 9x9, indéniable sommet de l'album, quand il est soutenu par la grâce d'un Ribot en forme guerrière, ce qui donna sans doute des idées à Zorn quand à la suite à donner aux évènements. Présentement, passée le choc du "repli sur soi", on obtient la galette la plus accessible, jusque là, de la turbulente formation parce que, au-delà de l'obligatoire folie habitant les prestations d'un Patton possédé, d'un Dunn pilonnant ses quatre cordes en un parfait compromis de puissance et de finesse, et les nombreux patterns et intermèdes scientifiquement concoctés par un certain divin chauve (Joey Baron bien sûr !), ça envoie pas mal ! Mais, cette fois, quand Patton et Zorn s'harmonisent (sur un passage quasiment klezmer sur Almadel, par exemple), ou dans des morceaux à la construction toujours expérimentale, pas de refrain/couplet/refrain ici, mais plus préhensible, on tient le Moonchild le plus aisément recommandable au newbie qui ne sait pas ce qu'il l'attend, et aura tout de même un sacré choc, évidemment.
Or donc, The Crucible n'est pas le meilleur Moonchild, c'est un fait. Ce n'est cependant pas une raison de le démettre parce que, premièrement, c'est tout de même un excellent album et, deuxièmement, parce que relativement abordable, il constitue une idéale po porte d'entrée dans le monde occulte et chaotique de l'inspirée formation.
Or donc, The Crucible n'est pas le meilleur Moonchild, c'est un fait. Ce n'est cependant pas une raison de le démettre parce que, premièrement, c'est tout de même un excellent album et, deuxièmement, parce que relativement abordable, il constitue une idéale po porte d'entrée dans le monde occulte et chaotique de l'inspirée formation.
1. Almadel 7:10
2. Shapeshifting 3:19
3. Maleficia 8:13
4. 9x9 5:37
5. Hobgoblin 2:54
6. Incubi 7:44
7. Witchfinder 3:44
8. Initiate 5:41
Joey Baron - drums
Trevor Dunn - bass
Mike Patton - voice
Marc Ribot - guitar (4)
John Zorn - saxophone alto, composition, production, arrangements, direction
On se connaît, non ? |
éPiQue!
John Zorn/Moonchild "Ipsissimus" (2010)
ou "Mythe et Légende"
Un de plus, pas un de trop et certainement pas le moins conseillé de la majestueuse lignée, Ipsissimus (featuring guitar god Marc Ribot), est une nouvelle déclaration d'intention magistrale d'un compositeur et présentement saxophoniste (John Zorn) et de sa formation alors la plus radicale (Moonchild). Brave gens, soyez prévenu, ça ne plaisante pas !
Dans les faits, Ipsissimus est la suite tout à fait logique de The Crucible et, plus précisément, d'une de ses pistes, 9x9, où déjà le présent quintet était à l'œuvre, preuve que Zorn a bien entendu le bénéfice d'avoir un si précieux et furieux guitariste de la trempe d'un Marc Ribot additionné au trio dans lequel il s'est maintenant incrusté depuis trois albums (à partir de Six Litanies for Heliogabalus et pour la dernière fois de la discographie de la formation, d'ailleurs). Evidemment, on reconnaît la patte désormais bien établie de Moonchild, cette mixture de musique contemporaine d'avant-garde, d'agression punk/metal et de free jazz, le tout chapeauté par un occultisme décidément chevillé à l'inspiration du compositeur new-yorkais. Evidemment, les performances désormais familières d'un Patton dans tous ses états (cris, murmures, chant), d'un Dunn toujours aussi solide et inspiré et d'un Baron batteur inventif s'il en fut, sont toujours au rendez-vous de la galette mais, cette fois, du fait de la double contribution de l'alto de Zorn et de la guitare très électrique de Ribot, c'est à une authentique, jouissive, énorme fête à laquelle nous sommes conviés. Parce qu'en plus les compositions sont bonnes, et savent alterner douceur et violence en un magnifiquement précaire équilibre qu'il fait plaisir d'entendre. En vérité, avec un groupe se connaissant parfaitement pour avoir, parfois presque tous ensembles, participé à de nombreux projets fomentés par John Zorn, nous nous retrouvons en territoire presque familier avec des échos de Naked City, du Masada électrique, d'Hemophiliac... Un territoire seulement presque familier parce que la fusion ici proposée a sa propre identité, sa propre alchimie qui, présentement, fonctionne tellement bien qu'on n'a pas à beaucoup exagérer pour crier au génie.
Et donc, avec Heliogabalus qu'on n'oublie pas, Ipsissimus constitue le sommet de la discographie de Moonchild. Mais là où l'autre mastodonte reposait sur l'ambition et la richesse du son, sur un côté opératique aussi assumé que satisfaisant, le présent ne doit ses mérites qu'à la partition et la complicité d'instrumentistes exceptionnels. En plus, il n'est pas, tout en restant fermement chaotique et sans compromis, aussi difficile d'accès que ça... En bref, si vous ne devez écouter qu'un seul Moonchild, Ipsissimus est celui-là !
Et donc, avec Heliogabalus qu'on n'oublie pas, Ipsissimus constitue le sommet de la discographie de Moonchild. Mais là où l'autre mastodonte reposait sur l'ambition et la richesse du son, sur un côté opératique aussi assumé que satisfaisant, le présent ne doit ses mérites qu'à la partition et la complicité d'instrumentistes exceptionnels. En plus, il n'est pas, tout en restant fermement chaotique et sans compromis, aussi difficile d'accès que ça... En bref, si vous ne devez écouter qu'un seul Moonchild, Ipsissimus est celui-là !
1. Seven Sigils 6:39
2. The Book of Los 8:21
3. Apparitions I 3:45
4. Supplicant 5:33
5. Tabula Smaragdina 6:12
6. Apparitions II 4:10
7. The Changeling 6:32
8. Warlock 4:57
9. Apparitions III 3:10
John Zorn: alto saxophone, piano, composition, arrangements, direction
Joey Baron: drums
Trevor Dunn: bass
Mike Patton: voice
Marc Ribot: guitar
Marc Ribot, punk à lunettes ! |
ô TeMPLieRS!
John Zorn/Moonchild "Templars: In Sacred Blood" (2012)
ou "Moonchild for dummies"
Si aucun des albums de Moonchild ne se ressemble, tous possèdent un similaire esprit fondeur, une rare liberté de ton qui peut déconcerter. Il n'y avait, à priori, aucune raison que Templars-In Sacred Blood, 6ème levée d'une formation à géométrie variable, enfreigne cette règle.
Templi Secretum, premier titre, sorte de heavy prog'n'core possédé montre une étonnante facette, plus orientée vers le format chanson, qui est définitivement une nouveauté bientôt confirmée par le rampant et flippant Evocation of Baphomet où Mike Patton (voix murmurée, glaciale) excelle. Et ça continue comme sur tout l'album ! Certes, l'académisme n'est pas exactement ce qu'ont à l'esprit Zorn (auteur, compositeur et arrangeur), son trio (Baron, Patton et Dunn) et l'invité de la galette, l'organiste John Medeski, et si l'écriture, cette fois, peut paraître plus conventionnelle, plus cadrée, c'est peut-être simplement parce que Moonchild a produit son album le plus mélodique ce qui ne va pas sans conséquence. En effet, souvent, par le passé, le rôle de Patton se limitait à des exercices de gorge plus destinés à vriller les tympans qu'à modeler un récit, véhiculer une émotion, et ça avait son effet (parce que Patton sait faire ce genre de chose) et collait parfaitement à l'univers de chacun des albums. Là, avec un nouveau panorama, Patton retrouve la pleine amplitude de son registre, quelque chose qu'on avait plus entendu depuis l'Anonymous de Tomahawk voire depuis que Mr. Bungle et Faith No More avaient plié les gaules, c'est dire si c'est une bonne nouvelle et si sa contribution permet d'enrichir notablement l'étendue émotionnelle de la galette. La seconde « star » de l'album est indéniablement Medeski et son orgue qui créent des climats, des ambiances habillant à la perfection chacune des montées de sève, chacune des accalmies... Il fait peut-être même ici sa plus notable performance en collaboration avec John Zorn. Et il ne faut, bien entendu, pas oublier la formidablement adaptable section rythmique composée du vieux compagnon de route qu'est Joey Baron (batterie) et du bassiste Trevor Dunn qui, du fait de l'absence de guitariste, assume ponctuellement le rôle, avec brio, comme il se doit.
Pour expliquer à quel point ce Templars est étrange, si on devait le décrire avec quelques autres références musicales on citerait, pêle-mêle, Soft Machine, Procol Harum, Ruins, Black Flag, King Crimson, SunO))) ou Black Sabbath... Rien que ça ! Le miracle, en l'occurrence, est la cohérence de ce concept album (sur les Templiers), oeuvre vénéneuse, attirante et si étonnamment peu difficile qu'on la conseillera volontiers à tous ceux qui veulent entendre Zorn versant rock et ne savent par où commencer avec l'assurance de récolter quelques remerciements.
Comme quoi, quand l'ambition rencontre le talent (le génie ?), tout devient tout de suite plus simple... Même si Templars ne l'est pas pour autant.
Templi Secretum, premier titre, sorte de heavy prog'n'core possédé montre une étonnante facette, plus orientée vers le format chanson, qui est définitivement une nouveauté bientôt confirmée par le rampant et flippant Evocation of Baphomet où Mike Patton (voix murmurée, glaciale) excelle. Et ça continue comme sur tout l'album ! Certes, l'académisme n'est pas exactement ce qu'ont à l'esprit Zorn (auteur, compositeur et arrangeur), son trio (Baron, Patton et Dunn) et l'invité de la galette, l'organiste John Medeski, et si l'écriture, cette fois, peut paraître plus conventionnelle, plus cadrée, c'est peut-être simplement parce que Moonchild a produit son album le plus mélodique ce qui ne va pas sans conséquence. En effet, souvent, par le passé, le rôle de Patton se limitait à des exercices de gorge plus destinés à vriller les tympans qu'à modeler un récit, véhiculer une émotion, et ça avait son effet (parce que Patton sait faire ce genre de chose) et collait parfaitement à l'univers de chacun des albums. Là, avec un nouveau panorama, Patton retrouve la pleine amplitude de son registre, quelque chose qu'on avait plus entendu depuis l'Anonymous de Tomahawk voire depuis que Mr. Bungle et Faith No More avaient plié les gaules, c'est dire si c'est une bonne nouvelle et si sa contribution permet d'enrichir notablement l'étendue émotionnelle de la galette. La seconde « star » de l'album est indéniablement Medeski et son orgue qui créent des climats, des ambiances habillant à la perfection chacune des montées de sève, chacune des accalmies... Il fait peut-être même ici sa plus notable performance en collaboration avec John Zorn. Et il ne faut, bien entendu, pas oublier la formidablement adaptable section rythmique composée du vieux compagnon de route qu'est Joey Baron (batterie) et du bassiste Trevor Dunn qui, du fait de l'absence de guitariste, assume ponctuellement le rôle, avec brio, comme il se doit.
Pour expliquer à quel point ce Templars est étrange, si on devait le décrire avec quelques autres références musicales on citerait, pêle-mêle, Soft Machine, Procol Harum, Ruins, Black Flag, King Crimson, SunO))) ou Black Sabbath... Rien que ça ! Le miracle, en l'occurrence, est la cohérence de ce concept album (sur les Templiers), oeuvre vénéneuse, attirante et si étonnamment peu difficile qu'on la conseillera volontiers à tous ceux qui veulent entendre Zorn versant rock et ne savent par où commencer avec l'assurance de récolter quelques remerciements.
Comme quoi, quand l'ambition rencontre le talent (le génie ?), tout devient tout de suite plus simple... Même si Templars ne l'est pas pour autant.
1. Templi Secretum 5:34
2. Evocation of Baphomet 5:27
3. Murder of the Magicians 4:14
4. Prophetic Souls 6:21
5. Libera Me 3:21
6. A Second Sanctuary 6:07
7. Recordatio 3:54
8. Secret Ceremony 9:16
Joey Baron - drums
Trevor Dunn - bass
John Medeski - organ
Mike Patton - voice
John Zorn - composition, production, arrangements, direction
John Medeski, doigts agiles |
DeRNieR CHaPiTRe
John Zorn/Moonchild "The Last Judgment" (2014)
ou "Coucher de Lune"
Moonchild c'est fini !, voilà, c'est dit, les amateurs d'Art-Jazz-Core mystique et déjanté devront dorénavant chercher ailleurs leurs frissons musicaux. Mais quel parcours, 7 albums, comprenant le présent The Last Judgment, suite instrumentale et thématique de son prédécesseur, Templars: In Sacred Blood puisque cette fois encore dédié à la légende des Templiers.
On y retrouve donc, en toute logique, exactement la formation de 2012 soit le trio de base de la formation; Patton à la voix, Baron à la batterie et Dunn à la basse, augmenté de l'excellent John Medeski à l'orgue; pour un résultat forcément musicalement cousin, frère même avec sa construction en montagnes russes alternant calme théâtralité et psychotiques déluges électroacoustiques en neuf chapitres s'enchainant en une unique pièce conceptuelle, tel un opéra post-apocalyptique. Surpenant ? Sans doute pas mais un satisfaisant opus quoiqu'il en soit parce que des mélodies, nombreuses et inspirées, aux ambiances, réussies et prenantes, c'est tout le charme radical d'une formation d'exception qu'on retrouve, une dernière fois.
Si Ipsissimus restera à jamais la création la plus aboutie de John Zorn pour Moonchild, retournez-y vous ne serez pas déçus, ce Dernier Jugement ne dépare pas dans l'impeccable collection et constitue, ultimement, une fin en presque apothéose d'un projet que, nul doute, on regrettera.
On y retrouve donc, en toute logique, exactement la formation de 2012 soit le trio de base de la formation; Patton à la voix, Baron à la batterie et Dunn à la basse, augmenté de l'excellent John Medeski à l'orgue; pour un résultat forcément musicalement cousin, frère même avec sa construction en montagnes russes alternant calme théâtralité et psychotiques déluges électroacoustiques en neuf chapitres s'enchainant en une unique pièce conceptuelle, tel un opéra post-apocalyptique. Surpenant ? Sans doute pas mais un satisfaisant opus quoiqu'il en soit parce que des mélodies, nombreuses et inspirées, aux ambiances, réussies et prenantes, c'est tout le charme radical d'une formation d'exception qu'on retrouve, une dernière fois.
Si Ipsissimus restera à jamais la création la plus aboutie de John Zorn pour Moonchild, retournez-y vous ne serez pas déçus, ce Dernier Jugement ne dépare pas dans l'impeccable collection et constitue, ultimement, une fin en presque apothéose d'un projet que, nul doute, on regrettera.
1. Tria Prima 3:28
2. Trinity 5:22
3. Resurrection 4:20
4. Le Tombeau de Jacques de Molay 4:24
5. Sleepy Hollow 2:41
6. Friday the 13th 3:44
7. Misericordia 5:50
8. Incant 4:28
9. Slipway 6:19
Joey Baron - drums
Trevor Dunn - bass
John Medeski - organ
Mike Patton - voice
John Zorn - composition, production, arrangements, direction
Patton, Medeski, Zorn, Dunn, Baron...LIVE! (de gauche à droite) |
Zornons à la lune !
RépondreSupprimer"Moonchild" (2006)
- http://www33.zippyshare.com/v/5bsFiWzB/file.html
"Astronome" (2006)
- http://www33.zippyshare.com/v/sQ0pOpiO/file.html
"Six Litanies for Heliogabalus" (2007)
- http://www33.zippyshare.com/v/y5dVDYm9/file.html
"The Crucible" (2008)
- http://www33.zippyshare.com/v/uZuAhWMf/file.html
"Ipsissimus" (2010)
- http://www33.zippyshare.com/v/ztuSVEPX/file.html
"Templars: In Sacred Blood" (2012)
- http://www33.zippyshare.com/v/H0UJkaqf/file.html
"The Last Judgment" (2014)
- http://www33.zippyshare.com/v/uExizV3h/file.html
Merci
RépondreSupprimerMais je ne suis pas encore prêt ;)
Mes oreilles fonctionnent encore J' essayerai p't'etre plus tard quand j' aurai perdu L'ouïe ;)
Fil
Holà Fil..peut être peux-tu retourner l'analyse et faire l'hypothèse que tes esgourdes ne "fonctionnent pas encore"! :-)
SupprimerMathieu.
Tout pareil que Mathieu, un bon curetage des feuilles à l'électricité savante te ferait le plus grand bien, Phil... ^_^
SupprimerJ' préfère attendre quand même
SupprimerJe possède déjà le Six Litanies et ça me suffit ;)
Merci
Mais tu n'arrêtes donc jamais ?!? 8-°
RépondreSupprimerSi j'arrête, je meurs. Tu ne voudrais pas ça, vilain ?
SupprimerMERCI !!!! Il me manquait Issipsissiimiisiismus, qui a l'air si chouette !
RépondreSupprimerEt qui l'est ! Enjoie cher Jaunes au joli pseudo vermot. ^_^
SupprimerHi there Zornophage! First of all, thanks for the hard work, your blog rocks! It seems that these links are down, would it be possible for you to re-up "Moonchild" (2006), "Astronome" (2006) "Six Litanies for Heliogabalus" (2007), "The Crucible" (2008) and "Ipsissimus" (2010)? Many thanks in advance!
RépondreSupprimerRe-ups are quite a waste, hardly anyone notices it. I'd rather make a new post with the whole Moonchild discography. So that's what I'll do, early december hopefully.
SupprimerStay tuned!
That is such a good idea! Perfectly fine for me, thanks for answering. I'll stay tuned, merci beaucoup!
SupprimerNico