vendredi 10 juillet 2015

Salade de Fruits (5/5)

Et voilà ! C'est fini. 5ème collection d'albums à l'artwork fruitier avec, comme dans chaque précédent volume, son lot de pépites et de petites déception mais aucun album tout à fait indigne, c'est à signaler, pour conclure en beauté. Enjoie !

PoP aRT
The Velvet Underground "The Velvet Underground & Nico" (1967)
ou "Banane Flamboyante"

Ho l'énorme classique que voici, la définition même de l'œuvre qu'on se doit de ne pas manquer sous peine d'avoir un sacré manque dans sa culture musicale.
Déjà il y a la pochette, signée Warhol comme vous le savez tous, qui est aussi manager du groupe au moment de l'enregistrement, comme vous n'êtes pas sans l'ignorer, mais qui se fera virer pour n'avoir pas su dénicher le contrat permettant de révéler l'album au monde, parce que Lou Reed en avait marre, et que du coup Nico aussi prendra la porte pour ne garder que le quatuor dont aucun nom ne doit vous être étranger.
Parce que, donc, il fallut une petite éternité pour que The Velvet Underground & Nico trouve son label, il faut dire que l'œuvre est schizophrène. D'un côté vous avez les chansons douces où folk, pop, psychédélisme et accessibilité vont de pair, d'un autre les expérimentations garage ne démontrant pas la moindre volonté de compromission. Schizophrène donc, et pourtant, ou peut-être parce que, largement l'œuvre d'un homme, Lou Reed, qui ne laisse que miettes de l'écriture à ses partenaires (Sunday Morning et The Black Angel's Death Song avec Cale, collectivement sur European Song) qui participent cependant largement à la "mise en chair" de la chose, Cale en particulier, arrangeur et multi-instrumentiste précieux qu'il est. L'influence de Warhol, mentor, manager, mécène, est plus délicate à définir, on sait qu'il fut présent lors de quasiment toutes les étapes, des répétitions à l'enregistrement sans oublier le mixage, ce qu'il y fit, lui qui est certainement un authentique artiste mais aucunement un musicien, sans doute mettre son grain de sel, glisser quelques judicieux conseils, spéculations...
Toujours est-il que le résultat est là, d'un tout tranquillou Sunday Morning, un beau rayon de soleil pop pour commencer, d'un proto-punk garage en mode junkie tragique (I'm Waiting for My Man), d'une excursion en terre indienne revue et corrigée et la sauce new-yorkaise via deux improbables ragas (Venus in Furs, Heroin), à du blues lo-fi psyché-noisy (Run Run Run et The Black Angels Death Song à vous faire passer le Eight Miles High des Byrds pour un chant grégorien), en passant par une espèce de Beatles garage (There She Goes Again) à une bonne grosse jam finale qui fait un boucan de tous les diables (et préfigure White Light/White Heat qui sortira quelques mois plus tard), sans, évidemment !, oublier les trois participations de la chanteuse (sic !) Nico (deux jolies chansons pop, Femme Fatale et I'll Be Your Mirror, à son raga à elle, All Tomorrow's Parties), la collection a du corps, de l'esprit si pas franchement de cohérence stylistique ou de mise en son. Mais il est là, aussi, le charme de ce premier opus, dans ce mélange d'un savoir-faire déjà bien affirmé et d'innocence juvénile, d'une volonté de couper le cordon avec la pop music d'un côté mais de continuer à en faire de l'autre. Schizo, quoi !
Et ça fait un essentiel, déjà parce qu'elle contient les premiers ébats ô combien intéressants de deux monstres sacrés, Reed et Cale, ensuite parce qu'on y a vraiment l'impression de plonger dans le New York avant-gardiste de cette seconde moitié des années 60. Un album beau, bizarre, épatant, étonnant... essentiel !

1. Sunday Morning 2:54
2. I'm Waiting for the Man 4:39
3. Femme Fatale 2:38
4. Venus in Furs 5:12
5. Run Run Run 4:22
6. All Tomorrow's Parties 6:00
7. Heroin 7:12
8. There She Goes Again 2:41
9. I'll Be Your Mirror 2:14
10. The Black Angel's Death Song 3:11
11. European Son 7:46

Lou Reed – lead vocals (1, 2, 4, 5, 7, 8, 10, 11), backing vocals (3), lead guitar (1-5, 7-11), ostrich guitar (4, 6)
Sterling Morrison – rhythm guitar (2, 5, 7, 8, 9), lead guitar (3, 10, 11) bass guitar (1, 4, 6), backing vocals (3, 5, 8)
John Cale – electric viola (1, 4, 6, 7, 10) piano (1, 2, 3, 6), bass guitar (2, 3, 5, 8, 9, 10, 11) backing vocals (8), celesta (1), hissing (10), sound effects (11)
Maureen Tucker – percussion (1, 3, 4, 7-11), drums (2, 5), tambourine (2, 6, 9), bass drum (6)
Nico – chanteuse (3, 6, 9), backing vocals (1)

THE VELVET UNDERGROUND (& NICO)

SWeeT PoPPer
Ween "White Pepper" (2000)
ou "Epicé Pop"

Que se passe-t-il quand l'un des plus beaux fleurons bizarro-pop se met dans l'esprit d'accoucher d'un album normal ? Il se passe White Pepper, 7ème album des faux-frères Dean & Gene Ween, et le pire c'est que ça marche du tonnerre de Zeus !
Indéniablement, il y a du Beatles (mais pas seulement...) dans ce Ween-là, et pas que dans un titre jouant avec ceux de deux des plus fameuses créations de quatre de Liverpool (Sgt. Pepper, White Album), dans la manière d'accommoder la pop, de l'épicer de moult flaveurs pour un résultat aussi flatteur à l'oreille qu'imaginatif. Evidemment, les Beatles étant passés bien avant et ayant tout inventé (ou presque), c'est à un exercice revivaliste auquel s'adonnent les natifs de New Hope (ça ne s'invente pas !), Pennsylvanie, mais un exercice revivaliste tellement rondement menée qu'on aurait mauvaise grâce à ne pas le célébrer comme il le mérite.
Parce que, mes amis, quelle belle collection de chansons voici ! Parce qu'en couvrant tout le panorama de la pop, d'un psychédélisme à peine modernisé sur la morceau d'ouverture, Exactly Where I'm At, à de douces flaveurs orientales sur Flutes of Chi, à une pop à la Revolver sur Even If You Don't, à un doux décrochage caribéen façon Elvis sous les cocotiers (Bananas and Blow), à une pop folk mélodieusement réussie (Back to Basom, quelque chose de Donovan et du Bowie débutant, She's Your Baby, que Macca ne renierait pas), à une petite jazzerie convoquant le fantôme de Phil Lynott (ce chant !) avec Pandy Fackler, jusqu'à un petit coup de country bienvenu (Stay Forever), c'est avec rouerie et un talent compositionnel qui laisse béat d'admiration que le duo et leurs compères réussissent magistralement leur petit hold-up multi-genres. On a même droit, parce qu'il faut quand même un peu de bruit blanc sur un album de Ween, à une sorte de Motörhead revisité (leur Helter Skelter ? pas loin à entendre l'agressif et addictif Stroker Ace) et à une sorte de sludgerie héritière indirecte de Black Sabbath (The Grobe). Bref, tous azimuts sans jamais le moindre faux-pas, sans la plus petite trace de faute de goût que ce soit... Grand !
Les amateurs de ce genre de chose, de la musique maline toujours un peu dans le second degré mais pas dans le pastiche, en auront pour leurs sesterces, nul doute ! Les autres, les curieux surtout, peuvent plonger dans ce qui demeure l'œuvre la plus attachante et abordable d'un magnifique duo. Youpi !

1. Exactly Where I'm At 4:31
2. Flutes of Chi 3:30
3. Even If You Don't 3:25
4. Bananas and Blow 3:34
5. Stroker Ace 2:08
6. Ice Castles 2:05
7. Back to Basom 3:46
8. The Grobe 3:32
9. Pandy Fackler 3:57
10. Stay Forever 3:32
11. Falling Out 2:28
12. She's Your Baby 3:00

Claude Coleman - Drums 
Dave Dreiwitz - Bass 
Glen McClelland - Keyboards 
Dean Ween - Guitar, Vocals 
Gene Ween - Guitar, Vocals 
(& other musicians)

WEEN

eDeN RoCK
Whitesnake "Come an' Get It" (1981)
ou "Le ver dans le fruit"

Un album de plus pour Whitesnake, leur quatrième, pas le plus spectaculaire, pas le plus réussi, juste un album de plus par de vrais professionnels marchant, quand même, un peu au radar du fait de tournées trop longues et de soirées trop arrosées. C'est bien connu, rien de tel qu'un rocker mort de faim pour vous pondre un album poudrière, alors comment en vouloir à Coverdale & Cie qui sont, en ces débuts des années 80, des stars confirmées et, donc, trop bien nourries, quoi...
Attention, Come an' Get It n'est pas un mauvais album pour autant mais, à l'image du morceau titre qui ouvre l'album, un album particulièrement routinier où on attend, sur chaque chanson, qu'il se passe vraiment quelque chose ce qui n'arrive, hélas, que trop peu souvent. Un bon riff et une bonne énergie sur Hot Stuff, un refrain bien accrocheur sur Don't Break My Heart Again, de belles performances guitaristiques et un Coverdale très en soul sur Lonely Days Lonely Nights, un sympathique boogie rock ouvert pas une bonne intro de piano bastringue sur l'entrainant Wine Women an' Song,  un groove bien trouvé sur Girl et Hit an' Run et un pastiche plutôt réussi de Led Zeppelin sur Till the Day I Die, et c'est tout. Et c'est peu, surtout si l'on considère que trois membres de l'alors défunt Deep Purple sont présents (Paice et Lord en plus de Coverdale), que les autres intervenants (la paire de guitaristes Moody & Mardsen et le bassiste Neil Murray) sont tout sauf des branquignols, et que Martin Birch (Fleetwood Mac, Deep Purple, Wishbone Ash, Iron Maiden, etc.) est aux manettes. A croire qu'à l'image de la pochette le ver est dans le fruit et le fruit, du coup, clinquant vu de l'extérieur, s'avère (presque) immangeable quand on croque dedans.
Mais presque seulement parce que, si indéniablement Come an' Get It est un sacré coup de mou créatif dans la carrière du Serpent Blanc, entre un très correct Ready an' Willin' et un réussi Saints & Sinners, c'est également un opus qui s'écoute sans déplaisir mais aussi, malheureusement, sans laisser d'impérissables souvenirs. Un coup d'épée dans l'eau, en somme, dans la carrière d'une formation qui trouvera sa plénitude (commerciale et artistique) dans l'américanisation de son son (Slide It In, 1987). Mais nous n'en sommes pas encore là et, par conséquent, Ready an' Willin' est surtout recommandé aux fans du groupe qui y trouveront tout de même quelques raisons de se satisfaire.

1. Come an' Get It 3:59
2. Hot Stuff 3:22
3. Don't Break My Heart Again 4:03
4. Lonely Days, Lonely Nights 4:16
5. Wine, Women an' Song 3:45
6. Child of Babylon 4:48
7. Would I Lie to You 4:29
8. Girl 3:55
9. Hit an' Run 3:23
10. Till the Day I Die 4:23
Bonus
11. Child of Babylon (Alternate Rough Mix) 4:28
12. Girl (Alternate Version/Rough Mix) 4:07
13. Come an' Get It (Rough Mix) 3:59
14. Lonely Days, Lonely Nights (Alternate Version/Rough Mix) 4:13
15. Till the Day I Die (Rough Mix) 4:44
16. Hit an' Run (Backing Track) 3:18

David Coverdale – vocals
Micky Moody – guitar, backing vocals
Bernie Marsden – guitar, backing vocals
Jon Lord – keyboards
Neil Murray – bass guitar
Ian Paice – drums

WHITESNAKE

oRaNGe GaRDeN
Brian Wilson "That Lucky Old Sun" (2008)
ou "Au soleil de Californie"

Un concept album sur la douceur de vivre californienne ? En voilà une idée qu'elle est bonne, encore plus quand elle est fomentée par un ex-garçon de plage à la créativité mélodique aussi précieuse que Brian Wilson. Oui, mais...
Oui mais il ne faut s'attendre ni à Pet Sounds, ni à Smile, ni à aucun des quelques haut-faits ayant émaillé la carrière d'un Brian Wilson parfois un peu à la ramasse (maladie mentale et tout ça...). Ca ne veut pas dire qu'il l'est ici puisque, bien entouré par le fidèle Van Dyke Parks et un Scott Bennett promu d'accompagnateur à assistant à la création, Wilson est suffisamment bien "cadré" pour ne pas retomber dans ses errements passés. Et donc, un concept, basé sur la chanson du même nom de Frankie Laine (une idole de jeunesse de Brian ? possible) qui s'écoule entre courtes vignette mélodiques et narration contextualisant, articulant l'ensemble. Mélodiquement, on retrouve évidemment la patte de Wilson, une pop solaire, légère faite de mélodies éclatantes et de chœurs harmoniques pour un résultat éminemment nostalgisant qui va particulièrement bien au teint du vieux popster, pas une surprise mais une satisfaction. Parfois, on regrettera la brièveté de chansons qui ne demandaient qu'à être plus développées mais, dans l'ensemble, c'est une affaire qui roule joliment et satisfera tous les amateurs du créateur et de son ancienne formation, en particulier ceux qui goûtent à son aspect quasi-orchestral largement représenté ici.
Et donc, à défaut d'obtenir un grand album de Brian Wilson, qui a, ceci dit, fait bien pire, sera-t-on satisfait de retrouvailles pop, ensoleillées quoique douces-amères par une des plus belles figures de la pop music de ce dernier demi-siècle, ce n'est déjà pas rien et fait de Lucky Old Sun une addition recommandée à la collection de tous les amateurs du genre.

1. That Lucky Old Sun 0:57
2. Morning Beat 2:55
3. A Room With a View (narrative) 0:45
4. Good Kind of Love 3:20
5. Forever She'll Be My Surfer Girl 2:52
6. Venice Beach (narrative) 0:45
7. Live Let Live / That Lucky Old Sun (reprise)   2:35
8. Mexican Girl 2:42
9. Cinco de Mayo (narrative)  0:46
10. California Role / That Lucky Old Sun (reprise)  2:41
11. Between Pictures (narrative)  0:48
12. Oxygen to the Brain 3:28
13. Can't Wait Too Long 0:54
14. Midnight’s Another Day 3:57
15. That Lucky Old Sun (Reprise) 0:43
16. Going Home 3:03
17. Southern California 4:58

Brian Wilson - Keyboards, Piano, Lead Vocals
&
Peggy Baldwin - Cello
Scott Bennett - Bass, Keyboards, Spanish Guitar, Vibraphone and Background Vocals
Nelson Bragg - Percussion and Background Vocals
Phil Feather - Woodwinds
Jeffrey Foskett - Guitar, Ukulele and Background Vocals
Probyn Gregory - French Horn, Guitar, Trumpet and Background Vocals
Peter Kent - Violin
Bob Lizik - Bass
Taylor Mills - Background Vocals
Tommy Morgan - Harmonica
Bruce Otto - Trombone
Darian Sahanaja - Bells, Keyboards and Background Vocals
Brett Simmons - Bass
Cameron Stone - Cello
Todd Sucherman - Drums
Jessica van Velzen - Viola
Nick Walusko - Guitar and Background Vocals

BRIAN WILSON

LiVe DaTTeS
Wishbone Ash "Live Dates" (1973)
ou "Juteux double"

Live Dates est de ces albums live classiques des 70s que les amateurs de rock se doivent d'avoir dans leur collection parce que, si Wishbone Ash est déjà un très bon groupe en studio, c'est sur scène qu'une la formation mâtinant hard rock mélodieux et progressisme discret, prend tout son sens.
C'est vrai pour la quasi-intégralité de la production "in vivo" des britanniques, encore un peu plus pour cette unique offrande sur scène d'un line-up qui ne survivra pas à la tournée avec le départ d'une des deux gâchettes six-cordées, Ted Turner. Dans les faits, enregistrés sur quatre dates anglaises de juin 1973, la setlist de Live Dates couvre harmonieusement les meilleurs moments des quatre albums jusque-là sortis par le quatuor. Mais, évidemment, Live Dates vaut surtout par les performances de ses instrumentistes et, en particulier d'une paire de guitaristes (le déjà cité Ted Turner et celui qui demeure l'indéboulonnable leader d'une formation toujours en activité, Andy Powell) aussi complémentaires qu'épatants pour ce qui demeure (avec Murray et Smith pour Iron Maiden ou Robertson et Gorham de Thin Lizzy, deux groupes dont les performances de double-guitare doivent beaucoup à Wishbone Ash) une des plus belles doublettes du genre. C'est aussi l'occasion d'entendre la bande durcir notablement le ton par rapport aux versions studio ce qui, en plus des longues phases plus ou moins improvisées émaillant le double (cf. les deux version de Phoenix à plus de 17 minutes chacune ou un Pilgrim poussé dans ses retranchements à plus de 9), est une excellente nouvelle.
Avec Live & Dangerous, Made in Japan ou Tokyo Tapes, tous trois de véritables standard d'un format alors à la mode, Live Dates est tout bêtement un des tous meilleurs live de hard rock des années 70, et l'ultime classique d'un line-up finissant... Un immanquable, donc.

CD 1
1. The King Will Come 7:44
2. Warrior 5:57
3. Throw Down the Sword 6:08
4. Rock 'n Roll Widow 6:08
5. Ballad of the Beacon 5:22
6. Baby What You Want Me to Do 7:48
7. Phoenix* 17:10

CD 2
1. The Pilgrim 9:14
2. Blowin' Free 5:31
3. Jail Bait 4:37
4. Lady Whiskey 5:57
5. Phoenix 17:23
* bonus

Martin Turner – bass, vocals
Andy Powell – guitar, vocals
Ted Turner – guitar, vocals
Steve Upton – drums

WISHBONE ASH

iNDie oRaNGe
Shannon Wright "Dyed in the Wool" (2001)
ou "Acides émotions"

Déniché chez Jimmy et, donc, à tout seigneur tout honneur, le billet d'origine :
"Après la dissolution de Crowsdell, Shannon Wright avait éteint l'électricité qu'elle ralluma pour ce magnifique album. Point de fioritures pour autant : une rythmique simple, une guitare ou un piano et sa voix écorchée pour une nouvelle mise à nue. Notre jeune amie calme parfois le jeu, mais c'est uniquement pour nous pousser de nouveau vers une falaise où il fait grand vent ! En ce sens, la photographie ci-dessous me semble plus révélatrice que la jolie pochette. Mais que cette fille est troublante quand elle se met en colère !"
Et Alors, il est d'accord le Zornophage ?
Je ne connais pas l'ex-groupe de Shannon Wright, Crowsdell, je ne connais aucun autre album de la dame mais celui-ci me donne de vraie envies d'exploration.
Qu'y entend-on ? De l'indie rock féminisé de compétition, pas d'effets de manche superflu cependant, concentrée sur la qualité de ses chansons, Shannon Wright n'a pas l'air du genre à se perdre dans d'ampoulés arrangements. Tant mieux. Evidemment, on ne peut pas ne pas penser à P.J. Harvey à l'écoute des moments les plus ouvertement rock ce Dyed in the Wool, tout comme on ne peut pas ne pas penser à Tori Amos quand elle s'installe au piano, pas que Shannon en soit une copie, juste que les trois dames partagent un même territoire fait de sensibilité et de féminisme mais aucunement de sensiblerie. Ceci dit, Miss Wright est nettement plus du côté arty lo-fi des choses que ses "cousines". Multi-instrumentiste et bien entourée (une première pour celle qui faisait tout toute seule sur ses précédents albums). Présentement, navigant entre rock théâtral minimaliste (Hinterland qui ne prend pas plus de deux minutes pour dévoiler toute sa puissance, et The Sable, 1 minute et demi et puis s'en va), rock costaud mais aussi finaud (Less Than a Moment,  Dyed in the Wool, The Path of Least Persistence (Figure II)), folk désossée (Surly Demise), comptine lunaire (Vessel for a Minor Malady, Bells), etc. Etc. parce que la dame sait toucher à tout sans jamais se tromper sur un album aussi diversifié que cohérent, sans doute parce que globalement habité par une voix écorchée vive et vibrante.
Il me reste, maintenant, à voir ce dont le reste du catalogue de cette artiste est fait. Sur la foi de l'excellent Dyed in the Wool et de quelques chroniques lues de-ci de-là, ça promet, parce que, quel album mes aïeux !

1. Less Than a Moment 3:00
2. The Hem Around Us 3:18
3. Hinterland 2:05
4. Vessel for a Minor Malady 1:56
5. You Hurry Wonder 2:54
6. Dyed in the Wool 5:14
7. Method of Sleeping 3:22
8. Surly Demise 3:11
9. Colossal Hours 2:44
10. The Path of Least Persistence (Figure II) 2:54
11. The Sable 1:27
12. Bells 1:51

Shannon Wright - bass, drums, guitar, harmonium, keyboards, noise, organ, piano, vocals
&
Brian Teasley
- Drums, Noise, Percussion
Kyle Crabtree - drums
Andy Baker, Jason Noble - bass
Ryan Hembrey - double bass
Christian Fredrickson - viola 
Heather McIntosh - cello  
Chris Lopez, Jeff Mueller - vocals

SHANNON WRIGHT

DoRé SuR TRaNCHe
XTC "Wasp Star (Apple Venus Volume 2)" (2000)
ou "dernière salve sans pépin"

C'est le yang électrique et dynamique de l'intimiste et orchestral yin que fut Apple Venus Volume 1. Un an après, réduit à un duo suite au départ d'un Dave Gregory peut-être lassé de ne jouer que les compléments de ses deux compositeurs de comparses, Wasp Star venait enfoncer le clou d'une doublette d'excellence. C'est aussi, pour le moment, croisons les doigts, l'ultime salve d'une des plus belles formations que la perfide Albion offrit au monde en matière de musique pop parce que XTC, ce n'est pas rien quand même.
Ceci dit, il ne faut pas s'attendre à retrouver la divine alliance de mélodies pop et d'arrangements orchestraux qui avait fait la force du Volume 1 mais aussi de quelques unes des plus belles plages de Nonsuch, là n'est clairement pas le propos. On y entend, en l'occurrence, un XTC pop et rock jouant plus avec l'électricité qu'ils le firent depuis près de 20 ans et, comme de bien entendu, une collection de chansons moins introspectives, plus directes. Ce n'est pas à dire que l'album est raté, il n'en est rien, simplement qu'y chercher la profondeur qui a marqué leur art depuis Skylarking est une vaine quête. On n'y retrouve pas moins de bien belles chansons, 11 signées Partridge, 3 pour Moulding, qui feraient le bonheur de toute formation du genre : Playground en excellente introduction avec, en prime, la fille d'Andy aux chœurs, Stupidly Happy qui porte admirablement son titre, l'étonnamment riffu My Brown Guitar, I'm the Man Who Murdered Love et son refrain accrocheur, We're All Right à l'optimisme béat bienvenu, ou un You and the Clouds Will Still Be Beautiful rappelant, rythmiquement, une autre excellente formation aujourd'hui disparue, les Talking Heads. Comme, en plus, les autres, certes un peu moins marquantes, sont loin de l'indignité et donneront à l'auditeur attentif de nombreuses heures de ravissement concernant l'intelligence compositionnelle et la délicatesse d'arrangements millimétrés et malins, démettre l'opus serait une erreur, un crime contre la bonne musique même.
Dans l'absolu, dans le canon de l'œuvre de ces talentueux messieurs, Wasp Star n'est qu'un album moyen de XTC mais, comme tous ceux qui ont creusé le catalogue du groupe le savent, un album moyen de XTC constituerait une excellente galette pour l'extrême majorité de leurs collègues. A partir de là, il est impossible de ne pas recommander cette ultime salve d'une valeur sûre qui manque beaucoup aujourd'hui.

1. Playground 4:17
2. Stupidly Happy 4:13
3. In Another Life 3:35
4. My Brown Guitar 3:51
5. Boarded Up 3:23
6. I'm the Man Who Murdered Love 3:44
7. We're All Light 4:39
8. Standing in for Joe 3:42
9. Wounded Horse 4:11
10. You and the Clouds Will Still be Beautiful 4:18
11. Church of Women 5:06
12. The Wheel and the Maypole 5:55

Colin Moulding – vocals, bass guitar, harmonica on "In Another Life", guitar on "Boarded Up"
Andy Partridge – vocals, guitar
&
Caroline Dale – cello
Nick Davis – keyboards
Simon Gardner – flugelhorn
Patrick Kiernan – violin
Peter Lale – viola
Holly Partridge – backing vocals on "Playground"
Prairie Prince – drums (2, 3, 4, 12)
Chuck Sabo – drums (1, 6, 7, 8, 9, 10, 11)
Kate St. John – oboe
Matt Vaughn – programming
Gavin Wright – violin

XTC

MauVaiSe PuLPe
Yes "Tormato" (1978)
ou "L'écrasé de Yes"

S'il y a un album, bon, on citera Big Generator qui n'est cependant plus de la période "classique" du groupe, qui fait figure de vilain petit canard dans la discographie de Yes, c'est bien Tormato, ultime œuvre du quintet de référence, album houleux dans sa réalisation et décevant dans son résultat.
Evidemment, Anderson, Wakeman, Howe, Squire et White déroulent tous les trucs qu'on leur connaît, évidemment, il y a de jolis petits moments qui ressortent de temps en temps, évidemment, les fans vous diront que l'album est meilleur que sa funeste réputation mais, vraiment, ce Tormato en pilote automatique ne mérite qu'on s'y arrête que pour trois petites chansons, c'est peu. Premièrement il y a l'accrocheur et joliment troussé Don't Kill the Whale, avec des paroles typiques des exactions hippies de ce bon vieux Jon mais surtout une belle performance instrumentale d'ensemble, sympathique. Deuxièmement, il y Onward ou 4 minutes de planeries où les arrangements de voix "à la Yes" font leur petit effet. Et enfin, troisièmement, il y a On the Silent Wings of Freedom qui, simplifiant la formule progressive du groupe, n'est pas loin de préfigurer le son plus pop qu'ils adopteront dans les années 80. C'est tout, et c'est peu (bis). Parce que le reste de l'album ne vaut pas tripette voire confine carrément au ridicule (le kitchissime Arriving UFO et ses synthés en toc, une constante de l'album, d'ailleurs, mais jamais aussi évidente qu'ici). Conclusion ? L'embellie de Going for the One, toujours aussi recommandé, lui, n'était qu'un feu de paille et le remplacement du soi-disant indispensable Anderson et de son comparse claviériste par les surprenants Buggles, finalement une excellente nouvelle (Ha ! Drama !).
Bref, si vous êtes fans ou ne pouvez vraiment pas vivre sans compléter votre collection des albums de Yes, il vous faut Tormato, ne serait-ce que pour une bonne rigolade de temps en temps. Sinon ? Fuyez, mais fuyez donc !

1. Future Times/Rejoice 6:46
2. Don't Kill the Whale 3:56
3. Madrigal 2:25
4. Release, Release 5:44
5. Arriving UFO 6:07
6. Circus of Heaven 4:31
7. Onward 4:05
8. On the Silent Wings of Freedom 7:47

Jon Anderson: vocals, percussion, Puerto Rican cuatro (mistakenly labeled as an Alvarez 10-string guitar) (tracks 1, 6 and 9)
Steve Howe: electric guitars (Gibson Les Paul Custom, Fender Broadcaster (track 5), Gibson ES-175 (track 9)), acoustic guitars (Gibson acoustic guitar, Martin 00045 (track 2)), Spanish guitar (track 4), mandolin (track 7), vocals
Chris Squire: bass guitar (Rickenbacker, Gibson Thunderbird bass guitar (track 5)), piano (track 3), bass pedals (tracks 1, 4 and 6), vocals
Rick Wakeman: piano (track 6), Hammond organ (tracks 1, 2 and 5), Polymoog synthesizer (tracks 1, 2, 3, 5, and 9), Birotron (tracks 1, 2, 3, 5, 6, 7 and 9), harpsichord (track 4), RMI Electra Piano (track 9)
Alan White: drums, glockenspiel, military snare drum (track 1), crotales (tracks 1, 4, 7 and 8), cymbals (track 4), bell tree (track 4), drum synthesizer (track 6), gongs (track 6), vibraphone (track 8), vocals

YES

BoNuS DéFRuiTé...
Bourvil "Bourvil" (1997)
ou "Joli Joli Joli"

Il en manque !, diront les mécontents. Et c'est vrai, à Byciclette, Salade de Fruits (un comble vu le final en beauté qu'est sensé être cette compilation à la série qui porte son nom), le Clair de Lune à Maubeuge, tous les grands succès n'y sont pas.
Mais, justement, il est aussi là l'intérêt de cette collection, d'offrir des chansons souvent oubliées d'un interprète talentueux. Et puis il y a La Tendresse, la chanson la plus optimistement poignante du répertoire d'André Raimbourg, plus conteur que comique troupier en l'occurrence. Et quelques "tubes" tout de même : les crayons, la tactique du gendarme, les rois fainéants, le bal perdu, la ballade irlandaise, Joinville le pont... entourés, donc, des moins connu mais également savoureux la mandoline, le pêcheur, mon bon vieux phono, nous vieillirons ensemble... Bref, quand même de quoi ne pas tout à fait perdre ses marques mais un joli lot de découvertes. Pour information, les enregistrements couvrent toute la carrière de Bourvil (de 1949 aux années soixante), il n'est donc pas question de droits mais bien de choix...
Qu'on peut contester parce que, c'est indéniable, il en manque. Mais comme il y en a aussi qu'on ne trouve pas ailleurs et qu'à creuser, on trouvera bien une compilation complémentaire, on ne se plaindra pas et, au contraire, conseillera cette belle double galette qui permet de redécouvrir un chanteur tendre et drôle, exactement ce qu'était Bourvil dans la vraie vie, tiens !

CD 1
1. Adèle 3:06
2. C'est la Vie de Bohème 2:50
3. C'est une Gamine Charmante 2:25
4. En Revenant d'la Revue 3:01
5. Allumett' Polka 2:51
6. D'Où Viens-Tu ? 3:08
7. La Berceuse à Frédéric 3:06
8. Frédo le Porteur 3:16
9. Du Côté de l'Alsace 2:59
10. La Tendresse 3:08
11. Le Hoquet 3:14
12. Le Pêcheur 2:59
13. La Dondon Dodue 2:23
14. La Mandoline 3:24
15. Je Suis Content, Ca Marche 2:23
16. C'est pas le Pérou 3:12
17. Elle Faisait du Strip-Tease 3:51
18. Le Voleur de Pervenches 3:06

CD 2
1. Les Crayons 3:36
2. Les Papous 3:25
3. La Tactique du Gendarme 2:59
4. Les Rois Fainéants 3:07
5. C'Etait Bien (Le Petit Bal Perdu) 3:18
6. Mon Bon Vieux Phono 2:47
7. Mon Frère d'Angleterre 3:43
8. Ballade Irlandaise (Un Oranger) 2:56
9. Prends Mon Bouquet 3:18
10. A Joinville le Pont 2:42
11. Les Abeilles 3:23
12. Mon Village au Clair de Lune 3:08
13. Nous Vieillirons Ensemble 2:55
14. Nénesse d'Epinal 2:53
15. T'Epier 2:36
16. Tatane 3:09
17. Vive la Mariée 3:21
18. Les Haricots 3:04


11 commentaires:

  1. Salade de Fruits (5/5)

    The Velvet Underground "The Velvet Underground & Nico" (1967)
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    Ween "White Pepper" (2000)
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    Whitesnake "Come an' Get It" (1981)
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    Brian Wilson "That Lucky Old Sun" (2008)
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    Wishbone Ash "Live Dates" (1973)
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    Shannon Wright "Dyed in the Wool" (2001)
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    XTC "Wasp Star (Apple Venus Volume 2)" (2000)
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    Yes "Tormato" (1978)
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    Bourvil "Bourvil" (1997)
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  2. Très sympa ces chroniques sur un thème estival ! Pour une prochaine il y a Jamboree des Beat Happening. Je l'ai cherché et je ne l'ai pas trouvé.

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    1. On y pensera mais, pour l'instant, en 5 gros billets tout de même, j'ai fait le tour des albums "fruitiers" de ma collection.
      Merci de ton passage et de ton commentaire, aussi. :-)

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  3. Enfin, la plus célèbre pochette de toute l'histoire du rock !

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    1. Forcément, ordre alphabétique oblige, il a fallu attendre. Le pire, c'est que je suis sûr que tu ne l'aimes pas, cet album...

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  4. A finir par Bourvil, quelle joie. Le Bal perdu est pour moi l'une des plus jolies chansons française qui soit.
    J'ai jamais écouté Ween, je crois que c'est avec ce fruit (à l'aspect pourtant douteux) que je vais faire mes emplettes.

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    1. Je regrette juste que ma compil n'ait pas Salade de Fruits, ça aurait été parfait pour conclure...
      Bon écoute du Ween au Poivron Blanc (douteux, pas tant, y en a chez mon marchand !), tu m'en diras des nouvelles ! ^_^

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  5. En plein "été de l'amour", il fallait oser la musique du Velvet et les paroles du Lou...
    C'est pour moi le plus "bel" album de rock de tous les temps, j'ai expliqué maintes fois pourquoi et comment, je ne vais pas m'y recoller. Quand tu empruntes chez moi, ne te sens pas obligé de coller ma prose, je ne me vexerai pas.

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    1. Le plus bel album de rock de tous les temps, je ne sais pas, un des plus passionnants sans doute.
      Je te cite parce que c'était bien ce que tu avais écrit. ^_^
      A+

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  6. superbe en effet ce bal perdu

    https://www.youtube.com/watch?v=EJB2GtoP38Y
    C'était bien (au petit bal perdu) par Philippe Decouflé

    et cette salade de fruits archives Ina
    http://www.dailymotion.com/video/xgh98_bourvil-salade-de-fruits_music

    Antonio brasileiro



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