ou "Gloom on You"
Il est de ces artistes dont quelques maniaques obsessionnels vantent ardemment les multiples mérites, de ces losers magnifiques qu'on croyait irrémédiablement broyés entre les mâchoires impitoyables d'une industrie qui détruit ce qu'elle ne comprend pas, ne sais pas vendre.
Bill Fay, historiquement, ce sont deux albums (l'éponyme et Time of the Last Persecution, son chef d'œuvre) sortis en catimini aux finissantes 60s et naissantes 70s et déroulant une folk sombre et habitée qui ne fit dont pas florès malgré ses indéniables et louables qualités. Puis une disparition, 40 années (!) de disparition aussi incompréhensibles que malvenues. Pas un cas unique en l'espèce, juste un beau gâchis supplémentaire... Et puis non, le revoilà le Bill pour vieilli, blanchi et dégarni qu'on le retrouve, il est bien là. Est-ce le souffle de la rumeur "webbique" qui aura ravivé l'intérêt ou juste un coup d'anges malicieux ? Allez savoir... Toujours est-il qu'en 2012, Mister Fay sort son 3ème album... Enfin !
Autant le dire, Bill n'est pas un rigolo et ceux qui cherchent de la légèreté seront bien inspirés de prendre la porte, de la fermer à double tour et de se visser presto l'ipode sur les feuilles pour déguster un petit Mika et évacuer prestement le souvenir de la sinistre rencontre qu'ils ont failli faire. Les autres découvriront (ou redécouvriront) une belle âme fêlée, un souffreteux magnifique déroulant les déchirants pathos d'une vie pas souvent rose. Certainement pas un comeback (Bill le refuse disant qu'il faudrait d'abord être arrivé quelque part pour revenir et l'album n'est de toute façon pas de la tonalité "pimpino-triomphante" qui sied à ce genre d'évènement), une continuation, la reprise d'un ouvrage trop longtemps abandonné comme on le croirait exprimé par la pochette au recueillement concentré, Life Is People ne fait pas dans le racolage opportuniste et ne propose, en définitive, que l'honnête travail d'un artisan appliqué qui a bien pris son temps (c'est le moins que l'on puisse dire !). Et comme tout travail d'artisan appliqué, et inspiré en l'occurrence, il vaut surtout par ses chansons, une collection largement downtempo qui frise la perfection magnifiée, qu'elle est d'arrangements dont l'intemporalité le dispute à la délicatesse (et prouve, conséquemment, la compétence, la richesse et la justesse du line-up présentement réuni). Et si on ressortira volontiers quelques highlights, quelques moments où la grâce atteint son paroxysme, avec, par exemple, en cerise diamant sur le gâteau d'or, le bouleversant Cosmic Concerto, épique et intime à la fois, une des plus belles chansons de l'an, rien que ça, chaque titre atteint son but, son rôle...
Avec des mots simples et justes, reflets de la longue expérience de leur vieux et sage galérien d'auteur, une intimité, tant vocale que musicale, tellement compatible avec son inclinaison rêveuse (...jamais loin d'être cafardeuse), une mise en son, aussi, permettant à l'auditeur de s'y croire, Life Is People est un trésor dont on sait immédiatement qu'on reviendra souvent se délecter à sa mélancolique source... Une pleine et entière réussite, tout simplement, qui nous fait espérer que, cette fois, Bill Fay ne nous abandonnera pas au milieu de la route et qu'enfin il rencontrera une reconnaissance originellement méritée. Vu le concert de louange qui a accueilli l'album, c'est plutôt bien parti.
1. There Is A Valley 4:15
2. Big Painter 3:59
3. Never Ending Happening 3:43
4. This World 3:43
5. The Healing Day 5:14
6. City of Dreams 6:10
7. Be At Peace With Yourself 5:00
8. Jesus, Etc. 4:17
9. Empires 3:23
10. Thank You Lord 3:14
11. Cosmic Concerto (Life Is People) 7:56
12. The Coast No Man Can Tell 3:06
Bill Fay: piano, chant
Ray Russell: guitare
Tim Weller, Alan Rushtown: batterie, percussions
Matt Deighton: guitare, chœurs
Mikey Rowe: piano, orgue, synthétiseurs
Matt Armstrong: basse
Ian Burdge: violoncelle
Jeff Tweedy: chant sur "This World"
The London Community Gospel Choir, Travis Cole, Wendi Rose, Waleed Isaacs: choeurs
Vulcan String Quartet
Andrew Walters, Joanna Walters: violon
Dr. Bernard Kane: viola
Nathan Stone: violoncelle
.Recyclé de la Caverne d'Ali Baba.
Encore une belle histoire du web ? Je vais écouter ça.
RépondreSupprimerSinon, y'a un Jeff Tweedy dans les crédits, c'est pas le leader de Wilco lui ?
J'ai checké sur Wiki aussi, et ça doit être lui. C'est coool.
SupprimerJe confirme, c'est bien lui.
SupprimerCa fait plaisir à lire.
RépondreSupprimerTout à fait !
RépondreSupprimerCa fait longtemps que j'étais pas venu dans le coin et ma foi c'est un excellent choix et avec plaisir que je trouve ce post sur Bill Fay. Cet album est absolument fabuleux et faisait partie de mon top 3 de mes albums préférés l'an dernier, enfin en 2012.
RépondreSupprimerConcernant Jeff Tweedy, c'est bien lui sur "This World" et "Jesus, Etc." est une reprise de Wilco (Yankee Hotel Foxtrot). Bill Fay la faisait déjà en concert avant de la reprendre sur cet album. Joli retour puisque Wilco reprenait déjà des chansons de Bill Fay sur scène. Ils ont aussi joué ensemble à quelques reprises.
Bill Fay a beaucoup de fans célèbres et notamment Nick Cave qui lui voue un culte. D'ailleurs, lorsque j'avais acheté l'album à sa sortie l'an dernier, y'avait un sticker avec quelques annotations dont une de Nick Cave sur l'album. Marc Almond et Jim O'Rourke sont aussi de grands fans. Comme quoi les chiens ne font pas des chats ! De grands artistes avec chacun leur originalité. Enfin, tout ça pour dire que Bill Fay est un grand et que cet album est à écouter en urgence pour ceux qui ne le connaissent pas encore ! Un véritable chef d'oeuvre.
Poptones.
Merci de ce long et riche commentaire, Poptones. Pas grand chose à rajouter sauf à confirmer l'urgence de l'écoute, en effet.
SupprimerEt bonne année aussi ! ^_^