mercredi 12 novembre 2014

Retour sur investissement

Qu'ils aient tenté ou pas de s'éloigner de la maison mère (qu'ils ont quitté, qui a fermé boutique, dont c'est un side-project ou dont il se sont fait éjecter sans ménagement) ils en sont présentement très proches.... Voici 7 albums solo d'artistes s'approchant, revenant (penaudement parfois) vers le son qui a fait d'eux ce qu'ils étaient. Avec des bonheurs artistiques et commerciaux variés.

JeTé DeHoRS
Shane MacGowan & the Popes "The Snake" (1994)
ou "Pogue Alone"

Jeté des Pogues parce que sa conduite trop erratique finissait par handicaper les performances du groupe, il ne fallut pas très longtemps à Shane MacGowan pour rebondir... avec les Popes.
On peut le dire, la ressemblance phonétique entre les deux noms de groupe est tout sauf un hasard, le son des Popes étant largement reminiscent de celui de l'ancienne taverne de l'ivrogne anglo-irlandais. Il faut dire qu'on imagine mal la voix déglinguée de Shane dans autre chose que des chansons à boire celtiques et punkoïdes alternant rigolade et gros chagrin dans la chopine.
Concrètement, avec quelques invités prestigieux (l'ex-Thin Lizzy Brian Robertson, Sinéad O'Connor, le probable pote de beuverie Johnny Depp, deux anciens compagnons que sont Jem Finer et Spider Stacy), un groupe tout à fait capable d'approximer le son des légendaires anglo-irlandais et quelques très bonnes compositions, le toujours plus saoul Shane parvient à réaliser un album sans réel faux pas outre sa longueur un poil excessive (56 minutes auquel on aurait volontiers retranché 3/4 titres pour un ensemble plus cohérent et dynamique), un bon album des Pogues a qui il fait, du coup, la nique prouvant qu'il n'avait pas tant besoin d'eux que l'inverse. Impression validée par deux albums, Waiting for Herb et Pogue Mahone, au demeurant tout à fait correct, où manque cruellement la gouaille houblonnée du magnifique édenté, alors que The Snake...
Shane reviendra dans les Pogues qui se contenteront désormais d'être un groupe nostalgisant revisitant ses classiques lors de tournées triomphalement accueillies (voir le coffret Cd/Dvd fêtant les 30 ans d'existence du groupe enregistré en notre Olympia national), pas sans avoir sorti un deuxième opus de son offshoot, le bon si moins réussi The Crock of Gold. Et The Snake me direz-vous ? On le conseille, évidemment !

1. The Church Of The Holy Spook 3:00
2. Nancy Whiskey 2:58
3. The Song with No Name 4:06
4. Aisling 2:58
5. Roddy McCorley 2:20
6. Victoria 4:48 2
7. That Woman's Got Me Drinking 3:25
8. You're the one 3:58
9. A Mexican Funeral In Paris 4:49
10. The Rising of the Moon 2:28
11. The Snake with Eyes of Garnet 3:42
12. Haunted 4:11
13. I'll Be Your Handbag 3:02
14. Her Father Didn't Like Me Anyway 4:02
15. Bring Down the Lamp 3:11
16. Donegal Express 2:56

Shane MacGowan - vocals
Paul McGuinness - guitar, vocals
Bernie "The Undertaker" France - bass, vocals
Danny Pope - drums, percussion
Tom MacAnimal - tenor banjo
Kieran "Mo" O'Hagan - guitar, vocals
Colm O'Maonlai - whistles
&
Barney McKenna - tenor banjo
John Sheahan - fiddle, whistle
Brian Robertson - guitar
Siobhan Sheahan - Irish harp
Spider Stacy - whistle
Jem Finer - 5-string banjo
Tomas Lynch - uillean pipes
Rick Trevan - tenor saxophone
Dick Cuthell - trumpet
Sarah Jane Tuff - alto saxophone
Paul Taylor - trombone
Johnny Depp - "guitar weird noises" ("That Woman's Got Me Drinking")
Máire Brennan - vocals on "You're The One"
Sinéad O'Connor - vocals on "Haunted"
Ron Kavana - guitar on "Haunted"

SHANE MACGOWAN

La Queue eNTRe LeS JaMBeS (1)
Bruce Dickinson "Accident of Birth" (1997)
ou "Maiden's back?!"

Après avoir goûté au sirop de l'aventure solitaire au gré d'un side-project hard-rockant de première bourre, Tattooed Millionaire, d'avoir du coup lâché sa vierge de fer historique pour se lancer dans une carrière forcément plus ambitieuse.
Après une première étape originale mais suffisamment familière pour accrocher une partie des fans de son ancienne maison, l'excellent et toujours très recommandé Balls to Picasso, une seconde péri-grungesque incomprise qui mérite d'être réévaluée, Skunkworks (un vrai groupe auquel une maison tint à ajouter le rassurant patronyme de l'idole du heavy), si incomprise d'ailleurs qu'elle vida les salles et ne se vendit que marginalement, un échec avant tout commercial donc, le circonspect Bruce Dickinson décidait de revenir vers ce que les gens attendaient visiblement de lui : du Iron Maiden !
Bon, c'est un tout petit peu exagéré même si le cousinage est d'autant plus évident qu'il bénéficie des qualités guitaristiques et compositionnelles d'un autre ex-Iron Maiden en la personne d'Adrian Smith et, évidemment, de la performance vocale immédiatement familière d'un Bruce Dickinson revenu aux sources d'un heavy metal classique. Le reste du groupe, essentiellement le Tribe of Gypsies du producteur/co-compositeur Roy Z., une équipe déjà utilisée par Bruce sur Balls to Picasso, suivant avec un grand professionnalisme l'emballage général de l'opus.
Un opus qui, bien que motivé par un objectif commercial évident, tourne comme la belle usine à riffs, refrains accrocheurs et soli endiablés d'un heavy mélodique et racé collant idéalement à l'organe vocal d'Air Raid Siren (le surnom de Dickinson à son entrée dans Iron Maiden du fait de ses capacités à vocaliser suraigu) à commencer par l'impeccable Freaks et ses guitares presque thrashy qui ouvre le bal en beauté. La suite alterne tempérance et excitation, morceaux épiques et rafales bouillonnantes avec classe et efficacité, approchant parfois de si près l'ancienne maison (Taking the Queen en nouveau Prodigal Son ?, Darkside of Aquarius en défouraillage heavy mélodique avec doubles guitares) que le retour, qui ne tardera plus, parait inévitable. Mais ce n'est donc pas de simple clonage dont il s'agit, la plupart des titres, alimenté des gros riffs groovy et la production moderne de Roy, se démarquent suffisamment du modèle pour valider l'intérêt d'un Dickinson version "retour aux racines".
Exceptionnel ? Sûrement pas. Réussi ? Absolument ! Un pas dans le retour en grâce d'une ex-idole qui passera, sans surprise, par la case du concept album ambitieux (The Chemical Wedding inspiré de William Blake) et l'obligatoire Brave New World de qui vous savez. Accident of Birth est un album recommandé, l'album accompli d'un rachat validé. 

1. Freak 4:15
2. Toltec 7 Arrival 0:37
3. Starchildren 4:17
4. Taking the Queen 4:49
5. Darkside of Aquarius 6:42
6. Road to Hell 3:57
7. Man of Sorrows 5:20
8. Accident of Birth 4:23
9. The Magician 3:54
10. Welcome to the Pit 4:43
11. Omega 6:23
12. Arc of Space 4:18

Bruce Dickinson  – vocals
Adrian Smith  – guitar
Roy Z  – guitar, mellotro, piano
Eddie Casillas  – bass
David Ingraham  – drums
&
Silvia Tsai – violin ("Taking the Queen", "Man of Sorrows", "Arc of Space")
Rebecca Yeh  – cello ("Taking the Queen", "Man of Sorrows", "Arc of Space")
Richard Baker  – piano ("Man of Sorrows")

BRUCE DICKINSON

La Queue eNTRe LeS JaMBeS (2)
Halford "Crucible (remixed and remastered)" (2002/10)
ou "un Judas dans la manche"

Après son départ de Judas Priest, son groupe de gros heavy moderne et groovy généralement acclamé, Fight, au gré d'une rencontre avec un ex-sideman de l'affreux Marylin Manson, John 5, et le claviériste et producteur Bob Marlette (Laura Branigan, Tracy ChapmanNeal Schon), Rob Halford se lança dans l'excellent indus metal light de 2wo pour un résultat massivement rejeté par son public refroidi et pourtant pas sans mérite, l'album Voyeurs mérite d'ailleurs d'être réévalué.
Echaudé et sans doute soucieux de maintenir son train de vie, le fameux chauve cuir-et-clouté, revint bien vite à ce qu'on peut considérer comme du Judas Priest bis. Resurrection, premier essai de la formule, menée de main de fer par un Roy Z. également utilisé par Bruce Dickinson pour un similaire retour aux sources, avait convaincu à défaut de faire tourner les têtes, c'est dire si on attendait le second album d'Halford, le groupe, le couteau entre les dents...
Et c'est un bon "pan sur le bec" que se prit l'opus à sa sortie. Certes, on loua la pérennisation du retour à un heavy metal référencé du divin chauve mais on conspua une production boueuse et brouillonne indigne du statut de légende vivante d'Halford. Tant et si bien que, c'est assez rare pour être signalé, 8 ans plus tard, l'album bénéficia d'une nouvelle sortie remixée, remasterisée et bonussée pour qu'enfin, il livre tout son potentiel. Passé ce premier handicap, l'album en rencontre un second, trop de chansons dont certaines franchement accessoires font qu'on finit, après quelques écoutes, à réduire la tracklist quasiment de moitié (9 sur les 16, 40 minutes de l'heure)... Tiens, un double handicap justement partagé par la dernière livraison du Priest, Redeemer of Souls qu'on verrait bien subir le même traitement de décrassage sonique.
Tout ça nous donne un album inégal, plus modern groove et thrashy que son prédécesseur aussi, où l'excellent (l'implaccable et terrassant Betrayal d'ouverture et ses 2/3 équivalents croisés au court de l'album, du très Judas Priest avec One Will ou Crucible, les deux belles ballades bien larmoyantes que sont In the Morning et She, quelques mid-tempo bien sentis comme Golgotha ou Crystal, l'emballage final énergique de Trail of Tears) côtoie l'accessoire (les dispensables Fugitive, Wrath of God, Heretic ou Weaving Sorrow) voire l'embarrassant (l'assez ridicule, et pas que par son titre, Rock the World Forever, sorte Rockin' All Over the World, Turbo, en plus moderne et magistralement raté).
Dernier album solo avant son retour à la maison, dernière énorme performance vocale du Metal God avant le déclin de l'âge aussi, Crucible reste un animal blessé dont les éclairs ne transpercent qu'épisodiquement la grisaille générale. Un album qu'on recommandera avant tout aux fans d'Halford, donc mais aussi à ceux curieux d'entendre leur Judas épicé de flaveurs "à la Pantera".

1. Betrayal 3:04
2. One Will 3:32
3. Hearts of Darkness 3:51
4. Golgotha 4:23
5. Handing Out Bullets 3:15
6. Crystal 4:47
7. Fugitive 4:01
8. Wrath of God 3:12
9. In the Morning 2:21
10. Rock the World Forever 3:11
11. Crucible 4:38
12. Heretic 3:53
13. She 4:04
14. Weaving Sorrow 3:27
15. Sun 3:48
16. Trail of Tears 4:27

Rob Halford – vocals
Metal Mike Chlasciak – guitar
Patrick Lachman – guitar
Ray Riendeau – bass
Bobby Jarzombek – drums
&
Roy Z
– guitar, production

ROB HALFORD

RéTRoNoSTaLGiQue
Paul McCartney "Chaos & Creation in the Backyard" (2005)
ou "Nostalgia Lane"

Si Paul McCartney a souvent tourné autour du pot Beatles que ce soit lors de sa carrière avec les Wings ou sous son nom propre, il a rarement aussi bien saisi l'esprit et l'ambiance de à quoi on imagine qu'une composition de Macca avec les Fab Four ressemblerait plus de 30 ans après leur séparation que sur l'excellent Chaos & Creation in the Backyard de 2005.
A quoi tient la magie ? Bien malin celui qui saura répondre. A la production de Nigel Godrich traditionnaliste dans le résultat mais bénéficiant d'avancées technologiques inconnues dans l'ère des quatre garçons dans le vent ? Probablement. De l'implication de Macca à moult instruments mais tout de même supporté par un casting de grands professionnels ? Indubitablement aussi. A la verve mélodique nostalgisante présentement déployée par Sir Paul ? Evidemment ! A tout ça et à ce qui demeure indéfinissable et fait la différence entre une belle galette bien fignolée et un opus dont on sent qu'il appartient à la race de ceux qui dureront.
Près de 10 ans après sa sortie, déjà !, ayant découvert, remisé, repris, rangé, réécouté (etc.) l'objet à maintes reprises, on peut sans l'ombre d'un doute l'introniser dans la caste des seconds parce que s'il a la manière, et l'endurance appréciative donc, la pochette qui ne ment pas aussi, il a surtout l'inspiration et autant de merveilleuses petites pépites savamment distillées par un McCartney en forme olympique, en nombre supérieur d'un de la tracklist officielle de l'album (ben oui, y a une ghost track après Anyway !) où ballades acoustiques, miniatures pop baroques, emballages un poil plus rock aussi se succèdent avec un égal bonheur pour créer, vraiment, le meilleur "Beatles" depuis la cessation d'activité de XTC.
Ne "spolions" pas le contenu avec trop de précision, laissons à ceux qui, les veinards !, n'ont pas encore eu le bonheur et l'avantage de le déguster le loisir d'y découvrir les milles trucs et astuces d'un vieux roublard qui, s'il prouva par la suite avoir encore quelques atouts dans sa manche, ne nous a pas encore autant ébloui. Recommandé, c'est le mot.
 
1. Fine Line 3:05
2. How Kind of You 4:47
3. Jenny Wren 3:47
4. At the Mercy 2:38
5. Friends to Go 2:43
6. English Tea 2:12
7. Too Much Rain 3:24
8. A Certain Softness 2:42
9. Riding to Vanity Fair 5:07
10. Follow Me 2:31
11. Promise to You Girl 3:10
12. This Never Happened Before 3:24
13. Anyway 7:22
(contient "I've Only Got Two Hands")

Paul McCartney – Bösendorfer grand piano, Bladwin spinet, Höfner bass guitar, Epiphone Casino electric guitar, Martin D28 acoustic guitar, Ludwig drums, shakers, tambourine, vocals, flugelhorn, guerrero, piano and Epiphone acoustic guitar loops, Epiphone Texan acoustic guitar, Ludwig floor tom, Steinway grand piano, Fender Telecaster electric guitar, cello, mass vibrachimes, B3 organ, Ludwig drums, tambourine on snare, Höhner melodica, Ludwig bass drum, recorders, tubular bells, Fender Stratocaster electric guitar, Martin 12 string guitar, Schmidt autoharp, maracas, Petersen classical guitar, Crown upright piano, harmonium, Paiste gong, cymbal, triangle, Toy glockenspiel, Wurlitzer electric piano, percussion, block, Yamaha grand piano, Gibson L5 electric guitar, moog
Millennia Ensemble – strings, brass instrument
Joby Talbot – string arrangement, conducting, brass arrangement
Nigel Godrich – piano and Epiphone acoustic guitar loops
Pedro Eustache – duduk
Jason Falkner – electric guitar, classical guitar
James Gadson – drums
Joey Waronker – bass drum, bongos, shaker
The Los Angeles Music Players – strings
David Campbell – string arrangement
Rusty Anderson – acoustic guitar
Brian Ray – acoustic guitar
Abe Laboriel Jr. – percussion, block, tambourine

PAUL MCCARTNEY

TouJouRS eN CeNTRaLe
Karl Bartos "Off the Record" (2013)
ou "A man's kraft"

Bien que n'en étant pas un membre fondateur (il n'arriva dans la formation qu'en 75, pour leur déjà 5ème album), Karl Bartos est inséparable de sa partition au krauteux-electroniques de Kraftwerk. Pas étonnant, donc, que son deuxième album en solitaire (presqu'une décade après l'inaugural Communication de 2004) rappelle si fortement la fratrie robotique de Düsseldorf...
Encore moins quand on sait que la base des enregistrements d'Off the Record provient d'archives que le sieur Bartos accumula entre 1975 et 1993 et qu'il a, pour la circonstance, retravaillés de fond en comble. Rien que de très logique pour un musicien n'ayant jamais souhaité capitaliser sur la notoriété de son ancienne "maison" mais en étant, fondamentalement, indivisible.
Ici, Bartos fait tout, une habitude prise sur son précédent opus solitaire, une nécessité créatrice aussi, sûrement, pour un architecte sonore sachant exactement où il souhaite en venir et ne désirant pas, pour ce faire, s'encombrer de collaborateurs aux vues forcément, ne serait-ce que marginalement, différentes. De fait, peu importe que cette destination apparaisse si évidemment dérivative des travaux de ses anciens partenaires avec, en l'occurrence, l'emphase audiblement mise sur l'efficacité mélodique évidente dès un Atomium d'ouverture cousin du fameux Radio-Activity de qui vous savez.
La question, à partir de là, n'est pas de savoir si Off the Record fait avancer le schmilblick mais s'il fonctionne comme on est en droit de l'attendre. La réponse, présentement, est clairement positive et cette électro-pop aux nombreux hooks synthétiques, pas franchement prospective mais diablement efficace néanmoins, atteint son dérivatif but. Et ce n'est pas une pochette extrêmement référencée qui viendra nier cet état de fait.
Reste à savoir si, en 2014, cette musique trouvera son public ailleurs que chez quelques nostalgiques patentés. On peut légitimement en douter sans que ça n'enlève quoique ce soit à la réussite avérée du projet.

1. Atomium 3:16
2. Nachtfahrt 3:30
3. International Velvet 4:38
4. Without a Trace of Emotion 3:28
5. The Binary Code 1:42
6. Musica Ex Machina 5:16
7. The Tuning of the World 3:33
8. Instant Bayeruth 3:36
9. Vox Humana 2:56
10. Rhythmus 4:17
11. Silence 0:06
12. Hausmusik 3:30

KARL BARTOS

"SiDe"-PRoJeCT
Mike Rutherford "Smallcreep's Day" (1980)
ou "Genebis"

Le consensus général, concernant la carrière hors de Genesis de Mike Rutherford, est que rien de tout ceci n'est bien fameux. Cependant, le fait Mike and the Mechanics fasse trop souvent dans la mainstream pop la plus gluante ne doit pas nous éloigner du fait qu'un album signé Rutherford est on ne peut plus digne d'intérêt et, comme à fait exprès, c'est d'un (quasi) concept album dont il s'agit : Smallcreep's Day.
De fait, pour sa toute première aventure solitaire, Mr. Rutherford ne s'éloigne que prudemment du son qui a fait la renommée de son projet principal. C'est bien de rock progressif dont on cause ici et, si on glisse parfois dans le rock fm (ce que Genesis fait aussi à la même période), l'ensemble ne souffre pas de ces quelques petites compromissions. La nouveauté tient donc plus dans le line-up accompagnant le flegmatique barbu que dans la musique présentement proposée.
Outre les Phillips (Antony, ex-Genesis parti après Trespass et Simon, batteur bourlingueur s'il en fut) et Morris Pert (percussions), c'est Noel McCalla - un complet inconnu qu'on retrouvera plus tard dans une énième mouture du Earth Band de Manfred Mann - qui complète la formation en tant que vocaliste. On se doute que Rutherford a dû auditionner quelques dizaines de candidats avant de dénicher son oiseau rare et si il faut un temps d'adaptation pour intégrer cette voix pleine de soul à ce rock progressif supra-mélodique, le fait est qu'elle apporte un réel plus à ce qui n'aurait été - avec un clone de Collins ou de Gabriel - qu'un Genesis bis. Evidemment, Mike prend en charge les guitares et les basses ce qu'on peut regretter car, si il est un fameux bassiste, Rutherford n'est pas le guitariste d'exception qui conviendrait à cette musique même si il s'y défend plutôt pas mal du tout. On est d'ailleurs surpris que le guitariste Anthony Phillips (ce qu'il était dans Genesis) soit confiné exclusivement aux claviers qui, il est vrai, se taillent ici la part du lion.
Quand aux chansons, si aucune ne parait de prime abord exceptionnelle, les écoutes répétées démontrent que le fort potentiel mélodique entrevu se concrétise et se renforce avec le temps. Alors, évidemment, le fantôme de Genesis est bel et bien présent tout du long de ces 51 minutes ce qui est bien naturel l'unique compositeur représentant un tiers de ce qu'il reste alors du groupe. Et si d'autres influences (Alan Parsons Project ou Camel) pointent le bout de leur nez et enrichissent le son, l'ensemble demeure profondément Genesien. La Suite Smallcreep's Day (une face du vinyl d'époque) en est le parfait exemple et rappelle souvent Duke d'autant que la production de David Hentschel - également responsable de Duke et de nombreux autres albums de Genesis - y est relativement comparable... et totalement adéquate bien qu'on eût aimé un son de batterie plus organique.
En résumé, Smallcreep's Day est un album de rock progressif tout à fait de son époque et qui, cependant, s'ingère sans la moindre difficulté aujourd'hui... A condition d'aimer le genre qu'il représente, évidemment. C'est aussi, pour les fans de Genesis qui l'auraient raté, une excellente opportunité de se replonger dans une époque bénie mais hélas révolue.

Smallcreep's Day
  1. Between the Tick & the Tock 3:59
  2. Working in Line 3:07
  3. After Hours 1:45
  4. Cats and Rats (In This Neighbourhood) 4:50
  5. Smallcreep Alone 1:33
  6. Out into the Daylight 3:49
  7. At the End of the Day 5:35
8. Moonshine 6:23
9. Time and Time Again 4:52
10. Romani 5:25
11. Every Road 4:13
12. Overnight Job 5:43

Ant Phillips – keyboards
Noel McCalla – vocals
Simon Phillips – drums
Morris Pert – percussion
Mike Rutherford – guitars, basses

MIKE RUTHERFORD

SuiTe LoGiQue
Mark Hollis "Mark Hollis" (1998)
ou "Discreet Talk"

Ceux qui pensaient que Laughing Stock, l'ultime offrande des géniaux Talk Talk, n'aurait pas la suite qui les faisait tant saliver connaissent forcément l'unique album solo de Mark Hollis, leader artistique et spirituel de ces inspirateurs du post rock.
Parler d'épure quand on évoque l'album éponyme de Mark Hollis relève certainement du plus britannique understatement et, comme on le dit de Mozart, le silence - avant, après mais aussi pendant - sa musique est toujours du Mark Hollis.
De fait, l'influence de John Cage, Stravinsky et quelques autres sommités de la musique classique du XXème siècle est forcément présente ce qui n'enlève rien à la personnalité de la musique de Hollis qui a su parfaitement digérer tout ceci. D'autres, comme Rachel's, Labradford suivront d'ailleurs la formule amoureusement élaborée ici par l'ex-Talk Talk.
Mais les chansons, car c'est bien de chansons dont il s'agit Hollis posant sa voix émouvante d'incertitude sur ces quelques plages, ici contenues ont un charme si unique que nul suiveur ou zélote ne saurait les égaler en grâce... L'instrumentation, parfois un poil surannée, épouse parfaitement les courbes timides de cette musique impressionniste qui se déguste à lentes gorgées pour mieux en apprécier le gout délicat.
Hélas, trois fois hélas, il semble bien que cette merveille sera l'ultime présent au monde d'Hollis depuis retiré des bidons et fermement ancré dans l'assourdissant silence que son absence engendre.
Reste cet album parfait et les deux derniers albums de Talk Talk comme preuve absolue qu'un artiste d'exception a disparu et nous manque... cruellement.

1. The Colour of Spring 3:52
2. Watershed 5:45
3. Inside Looking Out 6:21
4. The Gift 4:22
5. A Life (1895 - 1915) 8:10
6. Westward Bound 4:18
7. The Daily Planet 7:19
8. A New Jerusalem 6:49

Mark Hollis – vocals, guitar
Martin Ditcham – drums, percussion
Chris Laurence – double bass
Lawrence Pendrous – piano, harmonium
Iain Dixon – clarinet
Tim Holmes – clarinet
Mark Feltham – harmonica
Henry Lowther – trumpet
Andy Panayi – flute
Melinda Maxwell – cor anglais
Dominic Miller – guitar
Robbie McIntosh – guitar
Maggie Pollock – bassoon
Julie Andrews – bassoon

MARK HOLLIS

12 commentaires:

  1. Retour sur investissement

    Shane MacGowan & the Popes "The Snake" (1994)
    - http://www28.zippyshare.com/v/21286766/file.html

    Bruce Dickinson "Accident of Birth" (1997)
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    Rob Halford "Crucible (remixed & remastered)" (2002/10)
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    Paul McCartney "Chaos & Creation in the Backyard" (2005)
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    Karl Bartos "Off the Record" (2013)
    - http://www28.zippyshare.com/v/32160335/file.html

    Mike Rutherford "Smallcreep's Day" (1980)
    - http://www28.zippyshare.com/v/58097936/file.html

    Mark Hollis "Mark Hollis" (1998)
    - http://www28.zippyshare.com/v/79461937/file.html

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  2. Pas pu résister à prendre le Karl B. La pochette me fait penser à DEVO et la musique à qui tu penses en un brin plus poppy. Ce n'est pas mal du tout, mais j'aime bien la période ou il arrive chez Kraftwerk. 1 ou 2 titres en deça des autres toutefois : comme Vox Humana & Silence bien entendu. Et Rythmus qui fait bien son age...Merci de l'échange. Le reste pour une autre nuit, je vais me coucher en fredonnant Authobanh...Ph

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    1. Marrant de superposer la pochette et la tête de Karl. Ha, la licence artistique !!!

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  3. Je me jette sur le McGowan à côté duquel je suis toujours passé. Merci.

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  4. Super idée… dans laquelle tu aurais pu aussi inclure mister Plant !

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    1. Non. Quel album d'ailleurs ? Mais non, sur le principe.

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    2. Si j'ai bien compris, ce sont des artistes qui ont connus une première carrière au sein d'un groupe avant de se lancer dans un projet en solo.
      Alors pourquoi pas Robert Plant ?
      C'était juste une référence à la série que tu lui avais consacrée !

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    3. Non, ce sont des artistes qui ont poursuivi le son de leur groupe soit parce qu'il s'en était virer, soit parce qu'il ne savent pas faire autre chose, soit parce que leur tentative de mutation n'a pas fonctionné. Donc pas Robert Plant qui n'a jamais plagié son ex-groupe. ;-)

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  5. Très belle chronique sur Mark Hollis et les deux derniers Talk Talk, chefs-d'oeuvres absolus !

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    1. L'intouchable et particulier M. Hollis. Il manque en effet !

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