jeudi 31 juillet 2014

Recyclage "Cocorico dans ta Face !"

John Zorn ne s'y était pas trompé en les enrôlant sur son label pour une des plus belles réussites de jazz barré de 2012. Un petit recyclage d'ici-même s'imposait pour Devant à qui je l'avais évoqué et tous ceux qui auraient raté ce diable d'album.

Guillaume Perret & the Electric Epic "Guillaume Perret & the Electric Epic" (2012)
ou "Furie fine"


Il y a des albums qui donnent des envies de « cocorico », l'opus inaugural de la jazzy et libre formation Guillaume Perret & the Electric Epic est de ceux-ci, indéniablement. On y retrouve un jeune trentenaire saxophoniste savoyard, le leader, accompagné d'une belle bande de pointures en devenir produire un jazz qu'on pourra aisément qualifier de moderne (il prospecte régulièrement en terres inconnues) et de fusion de part la large palette d'influences dans lequel il puise ses inspirations et son tempérament de feu.
 
Dès le premier morceau, l'explosif Kakoum, on comprend que ces oiseaux-ci ne plaisantent pas. Sur une rythmique tantôt groovy, tantôt plombée, un duo de solistes (Perret, évidemment avec son sax lyrique trafiqué à coup de pédales d'effets, et Médéric Collignon, invité de marque sur cinq des sept titres, à la voix hululante et au cornet « milesien ») habitent à merveille une composition devant autant à John Coltrane qu'à Weather Report ou Meshuggah, une hybridation jazzo-fusionno-metallante qu'on s'enfile avec joie, fait absolument mouche et augure d'un festin de tous les instants.
Et la suite ne déçoit pas ! Tout le contraire, en fait. Y apparaissent de nouveaux univers (un peu de world, un peu d'electro, un peu de prog, etc.) qui s'imbriquent idéalement dans cette musique audacieuse et accomplie, toujours trippante, où la mélodie n'est pas qu'un accessoire mais bien le centre d'un passionnant débat.
 
Bien balancé (car jamais bêtement avant-gardiste), impeccablement produit et mixé, forcément pourvu d'une interprétation exempte du moindre reproche, l'éponyme de Guillaume Perret & the Electric Epic est une merveilleuse surprise. De celles qu'on a absolument envie de partager avec le monde parce que, c'est sûr, on tient là un (déjà et futur) grand, tout simplement.


1. Kakoum 8:24
2. Légo 7:58
3. Ethiopic Vertigo 4:46
4. Circé 8:46
5. Chamo 5:42
6. Thème Pour Le Rivage Des Morts 12:34
7. Massacra 8:43


Guillaume Perret - saxophones, effets
Philippe Bussonnet - basse, effets
Jim Grandcamp - guitare, effets
Yoann Serra - batterie, samples
&
Médéric Collignon
- voix, cornet, effets (1, 3-6)
Sir Alice - voix (5)

mercredi 30 juillet 2014

Le diable par la queue (The Genesis Studio Series 9/15)

Peter parti, on ne donne pas cher de la peau de ce dinosaure progressif d'autant qu'ils remplacent leur chanteur emblématique par leur batteur barbu... Quelle erreur !

Genesis "A Trick of the Tail" (1976)
ou "Second souffle"


Qui aurait pensé que Genesis survivrait au départ de Peter Gabriel et, même !, gagnerait régulièrement en popularité son référentiel frontman parti ? Pas grand monde en vérité.

 
Artistiquement, A Trick of the Tail fut accueilli avec un énorme ouf de soulagement. Parce qu'on y retrouvait un Genesis à peine marqué par l'expérience toute en noirceur de The Lamb Lies Down on Broadway. Parce qu'on y découvrait un chanteur capable de reprendre le poste de celui qu'on pensait irremplaçable, un chanteur étonnamment familier puisqu'on l'avait déjà entendu en support de son prédécesseur mais aussi parce qu'il y sonnait souvent comme celui-ci (sans en avoir tout à fait la fêlure soul ou l'énergie rock, c'est entendu). Parce que la musique qui y était proposé restait familière tout en se démarquant juste ce qu'il fallait pour qu'on sente encore le groupe progresser. De fait, s'il y a suffisamment de matériel qu'on aurait facilement imaginé sur Foxtrot ou Selling England by the Pound, il y a aussi la vision d'un nouveau Genesis. Pour le premier, on citera Dance on the Volcano, Squonk et Robbery Assault & Battery, toutes des chansons développant des thèmes proches de ce à quoi le quintet référentiel nous avait habitué, et du bon, de l'excellent même, avec moult prouesses toujours, évidemment !, au service de la mélodie, de la chanson. Pour le second, un Genesis plus délicat, plus conventionnellement mélodique on mentionnera les glorieuses têtes de gondole que sont Entangled, Mad Man Moon et Ripples où de délicats arpèges viennent rappeler la recette et les souvenirs datant de Trespass augmentés d'une maîtrise compositionnelle et instrumentale acquise au long d'un riche parcours. Et puis il y a les deux "oddities" de l'album, le morceau titre d'abord avec son esthétisme et ses chœurs à la Beach Boys et sa mélodie imparable, et le résumé final, Los Endos, clôturant en beauté un programme richement doté de ses feux d'artifice fusionnants tant instrumentaux que mélodiques reprenant, assemblant en un tout cohérent tout ce qui a précédé. Pas un morceau faible, donc, pas la moindre déception en vue dans ce qui constitue alors la collection la plus cohérente et la plus finement ciselée du néo-quatuor, rien que ça ! Tu parles d'un challenge relevé, c'est carrément au-delà, et la production du groupe et de David Hentschel, encore magnifiée par la précision pointilleuse du remaster définitif de 2007, ne vient qu'enfoncer le clou de cette ô combien spectaculaire réussite.
Il y a aussi, malheureusement, les prémices d'un nouveau divorce avec un Tony Banks tout puissant, compositeur, arrangeur et instrumentiste vedette de la galette, celui-là même qui aurait bien vu "son" groupe continuer sans vocaliste !, ne laissant que miettes à ses compagnons dont un, le pourtant extrêmement précieux Steve Hackett, finira par se lasser de son rôle de second couteau d'autant qu'il sort alors des sessions de son excellent premier opus solitaire, Voyage of the Acolyte, où il a démontré sa capacité à produire, seul ou presque, un matériau d'une qualité quasi-équivalente dans un style tout à fait compatible à l'esthétisme de sa maison mère.

On a trop souvent tendance à penser que Genesis sans Peter Gabriel n'est plus tout à fait Genesis. A l'écoute d'A Trick of the Tail et de son tout aussi recommandé successeur, Wind & Wuthering, le sentiment se voit battu en brèche de la plus impeccable manière. Recommandé ? Obligatoire, oui !


1. Dance on a Volcano 5:53
2. Entangled 6:28
3. Squonk 6:27
4. Mad Man Moon 7:35
5. Robbery, Assault & Battery 6:15
6. Ripples 8:03
7. A Trick of the Tail 4:34
8. Los Endos 5:46
Bonus
9. It's Yourself 5:46


Tony Banks – acoustic & electric pianos, Hammond T-102 organ, synthesizers, mellotron, 12-string guitar, backing vocals
Phil Collins – lead and backing vocals, drums, percussion
Steve Hackett – electric guitar, 12-string guitars
Mike Rutherford – bass guitar, 12-string guitar, bass pedals

mardi 29 juillet 2014

Vent divin (The Genesis Studio Series 8/15)

Où on attaque la période classique, référentielle de Genesis qui se découpera en 3 parties : Genesis en quatuor d'abord, le line-up classique ensuite, l'enfance de Genesis enfin. Et ça commence par la seconde livraison (!) de 1976, un must !


Genesis "Wind & Wuthering" (1976)
ou "La fin d'une époque"


Ultime opus du Genesis (presque) classique, album immense comme la plupart de ceux qui le précèdent, Wind & Wuthering est essentiel.

Un des albums les plus musicalement aboutis de ce Genesis progressif, aussi, grâce à la maniaquerie de l'arrangeur en chef, Tony Banks, et le soutien de ses collègues qui, c'est acquis, ne sont pas des demi-sels quand il s'agit de s'exprimer, chacun, sur leur instrument respectif. En résulte des compositions précieuses, millimétrées même et, du coup, un peu moins de folie que ce que nous avait habitué le groupe dans sa mouture la plus référentielle.
Concrètement, sur 8 des 9 compositions, on retrouve le Genesis qu'on avait eu l'habitude d'entendre en, cependant, un peu plus lisse. L'absence de Gabriel est, il faut dire, un facteur contribuant de cet etat de fait. Déjà parce que Collins, nettement moins "clonesque" que sur A Trick of the Tail (pour lequel, il est vrai, il n'avait pas prévu de chanter), amène une sensibilité plus pop, plus romantique, ensuite parce que les textes ont perdu en symbolique et en allégorie parfois cryptique ce qu'ils ont gagné en clarté.
C'est le cas sur l'ensemble de l'album où l'on n'est pas obligé de trop se creuser les méninges pour savoir ce que ce diable de parolier a bien voulu dire, à l'exception cependant de One for the Vine qui est aussi, tiens tiens, le chef d'oeuvre de l'opus. On y apprécie la fantaisie toute britannique d'un All in A Mouse's Night, sorte de Tom & Jerry version prog, moins le côté trop normal, commun dirait-on, d'une bête chanson d'amour telle que Your Own Special Way. Cette dernière, justement, fait un peu tâche sur un album qui, sinon, allie avec grandeur complexité et harmonie, sans doute cette dernière préfigure-t-elle la simplification de l'écriture du groupe (et de Rutherford en l'occurence) qui prendra effet dès l'album suivant, dès le départ de Steve Hackett, osera-t-on affirmer.
Sinon, c'est à un Genesis finalement assez proche de celui de Selling England by the Pound auquel nous avons affaire avec, notamment, des tentations "fusionnesques" sur l'instrumental Wot Gorilla? et, globalement, symphoniques sur l'ensemble de la galette. Et ça marche merveilleusement bien et donne une collection où, donc, à l'omission du précité faux-pas, le féru de rock progressif en prend plein les oreilles. D'autant que la production, signée de David Hentschel et du groupe, met parfaitement en valeur les nombreuses qualités d'une formation encore clairement à son sommet créatif.

Il y a moult raisons de se réjouir du souffle de ce vent divin, et une de s'attrister car, enfin !, comment ne pas rager qu'une telle verve créatrice se voit petit à petit éteinte dans ce qui suivra ? Comment ne pas regretter cette formation d'exception dans sa mue pop-progressive d'abord puis carrément pop ? Pas que les successeurs ne déméritent vraiment, il restera du grain à moudre pour les amateurs de belles ambiances et de ciselées compositions, mais plus jamais autant qu'avec la période qui se clôt ici et laisse, mine de rien, six album quasi-parfaits en seulement cinq petites années. Très fort !

1. Eleventh Earl of Mar 7:43
2. One for the Vine 10:00
3. Your Own Special Way 6:17
4. Wot Gorilla? 3:20
5. All in a Mouse's Night 6:39
6. Blood on the Rooftops 5:27
7. Unquiet Slumbers for the Sleepers… 2:19
8. …In That Quiet Earth 4:54
9. Afterglow 4:14
Bonus
Spot the Pigeon (1977)
10. Match of the Day 3:24
11. Pigeons 3:12
12. Inside and Out 6:45


Tony Banks – acoustic & electric pianos, synthesizers (ARP 2600 & Pro-Soloist, Roland RS-202 String), mellotron, Hammond T-102 organ
Phil Collins – lead & backing vocals, drums, percussion
Steve Hackett – electric guitar, classical guitar, 12-string guitar, kalimba, autoharp
Mike Rutherford – bass guitars (4, 6 & 8 strings), bass pedals, 12-string guitar, electric guitar, backing vocals

lundi 28 juillet 2014

Kill with power

On remet ça avec Overkill et un album qui mérite que vous vous y penchiez parce que, franchement, c'est une bombe !

Overkill "Killbox 13" (2003)
ou "Boîte à baffes... et à malice"


Ce n'est pas le plus célébré des albums des thrashers de l'East Coast, c'est certainement, cependant, un des plus intéressants. Voici Killbox 13 !
 
Présentement, s'ils ont toujours un following fidèle, les gars d'Overkill n'ont encore atteint leur second souffle critique, ça viendra avec le quasi-miraculeux Ironbound et un retour à un thrash metal orthodoxe largement célébré. Du line-up qui avait tutoyé les étoiles et la gloire dans la deuxième moitié des 80s ne restent que l'impeccable Bobby Ellsworth (chant) et l'inoxydable D.D. Verni (basse), les autres se sont éparpillés au long d'un long parcours commencé en 1980. Ca ne veut pas dire que le groupe est pour autant méconnaissable, juste différent depuis son virage thrash'n'groove du début des années 90.
Concrètement, ils y sont encore même si l'on sent déjà la tentation d'un retour vers le passé qui viendra dès le glorieux successeur précité et se retrouve ici couplé à l'acquis de plus d'une décennie à tenter autre chose et à souvent y réussir, n'en déplaise aux intégristes du genre. On y entend donc un Overkill qui n'a pas peur de rajouter de la mélodie, de construire des ambiances parfois presque progressives, de faire groover son thrash, de le laisser ralentir (pour mieux repartir, évidemment), un luxe de riffs bien trouvés de mélodies (oui, mélodies !) de chant accrocheuses contrebalançant à la perfection d'autres plus radicales. Et un son !, une tuerie d'une clarté à peine croyable, d'une puissance implacable qui détruit tout sur son passage. C'est bien simple, Overkill n'avait pas fait mieux avant, n'a pas encore fait mieux après, c'est dire si ça sonne du tonnerre de Zeus !

Pas de chansons à vanter particulièrement, pas de remplissage non plus, c'est d'une sélection solide dont il s'agit marquant un retour de forme assez impressionnant. En bref, en cumulant le savoir-faire de toute sa carrière, Overkill a réussi l'un de ses plus beaux albums, ce n'est pas rien et l'opus est donc fortement recommandé aux amateurs du genre évidemment mais, aussi, à tous ceux qui aiment le metal de qualité supérieure, ils ne seront pas déçus.


1. Devil by the Tail 5:24
2. Damned 4:13
3. No Lights 5:52
4. The One 4:58
5. Crystal Clear 5:03
6. The Sound of Dying 4:56
7. Until I Die 5:20
8. Struck Down 4:42
9. Unholy 4:40
10. I Rise 5:08


D.D. Verni – Bass
Bobby "Blitz" Ellsworth – Vocals
Tim Mallare – Drums
Dave Linsk – Guitars
Derek Tailer – Guitars

dimanche 27 juillet 2014

Où le Zornophage fait amende honorable

Hé oui, une deuxième chronique pour le nouvel album de Judas Priest... Il fallait !

Judas Priest "Redeemer of Souls (Deluxe Edition)" (2014)
ou "Aux sources du Metal"


Tout émoustillé par le retour à un heavy metal bien burné, je m'étais laissé emporter par mon enthousiasme dans le billet initialement posté sur la foi de deux écoutes seulement, il n'est pas inutile de le préciser. Ceci dit, le recul critique et les écoutes répétées me permettent désormais de le dire : Redeemer of Souls, loin d'être un mauvais album, souffre de quelques handicaps privant l'auditeur du réel bonheur qu'il était en droit d'attendre de ces retrouvailles "testostéronées".

Le premier, et le seul auquel on ne peut réellement rien faire, vient de la production. Manquant de clarté et de puissance, particulièrement dans le traitement de guitares trop souvent noyées dans le mix, elle empêche de pleinement apprécier les globalement bonnes compositions habitant l'album. Venant d'un groupe aussi expérimenté que Judas Priest, on frise là la faute professionnelle.
Le second, par contre, sera facilement résolu. Il s'agit en l'occurrence de régler leur compte à quelques compositions qu'on qualifiera pudiquement de remplissage. Néanmoins, en excisant précautionneusement celles-ci, on se retrouve facilement avec un opus à classer au niveau d'un Angel of Retribution  ou d'un Ram It Down, tous deux des albums mineurs d'une formation légendaire, sympathiques néanmoins.
Parce que s'il est un bonheur qui reste entier, c'est d'entendre évacuées les prétentions conceptuelles et la mollesse d'un Nostradamus qui, lui, malgré quelques sursauts, était indigne du groupe et de son statut de légende vivante du heavy metal. Concrètement, ce premier opus sans l'élément blond de la paire guitaristique (K.K. Downing, démissionnaire inattendu présentement remplacé par son quasi-clone, Richie Faulkner) marche donc dans les pas des classiques passés de Judas Priest. Avec, donc, d'excellentes chansons où, c'est entendu, Rob Halford n'atteint plus ses prodiges d'antan sans pour autant démériter (à 62 ans, tout de même !), où la paire de six-cordistes revisite les riffs et soli/duels dont la précédente incarnation était coutumière, où la section rythmique assure comme il faut pour le genre de musique pratiqué.
Des exemples ? Dragonaut, mid-tempo d'ouverture tout à fait typique du style Judas Priest avec son gros riff bien senti, la mélodie de chant accrocheuse de Rob Halford et, évidemment, un duel de guitare qu'on jurerait que K.K. Downing n'a pas quitté le navire. Redeemer of Souls, morceau titre qu'on croirait sorti des sessions d'un Sin After Sin revu et corrigé à l'aulne du power metal qui, sans être exceptionnel, possède ce groove métallisé qui vous fera souffrir les cervicales et un refrain à vous casser les cordes vocales lors des prochaines prestations scéniques du quintet. Halls of Valhalla où le groupe met pour la première fois le turbo (modéré) et démontre quelques petites inflexions presque progressives pas désagréables et où Halford sort quelques vocalises aigües (si moins qu'avant, donc) de celles qui avaient fait sa réputation de Metal God. Sword of Damocles qui se permet même un petit décrochage tout en légèreté avant de relancer l'artillerie lourde et les soli en duo. Un peu plus loin, quelques cris de guerre certes un peu convenus, Hell & Back, Metalizer ou Crossfire, viennent relancer une machine en voie d'assoupissement créatif, c'est de Judas Priest sur-classique dont il s'agit ça n'apporte donc pas grande eau à leur moulin, mais ça fait son petit effet d'autant que les mélodies y sont accrocheuses, ce n'est déjà pas si mal. Last but not least, pour l'édition standard, vient  Battle Cry , un des tous meilleurs morceaux de l'album, qui a tout d'un hymne comme le Priest seul réussit à en produire.
Le reste est du pur remplissage, pas exactement mauvais (quoique Beginning of the End, ballade mollassonne et téléphonée...), juste un peu inutile et ennuyeux. Et c'est un peu le problème de l'album et de ses auteurs, outre la production crapoteuse, n'avoir pas su choisir le bon grain de l'ivraie et nous livrer, par conséquent, une œuvre longuette et inégale là où une sélection oldschool (une dizaine de titres et bonne quarantaine de minutes) aurait été largement suffisante. Impression encore renforcée pas un disque bonus où seul Tears of Blood, plus hard-rockant que réellement metal mais bien troussé, sort réellement du lot.

Clairement, Redeemer of Souls n'est pas une daube, ce n'est pas pour autant le grand retour que tous les amateurs du Priest étaient en droit d'espérer six ans après son prédécesseur. L'album fera sans nul doute plaisir à la majorité des fans qui n'auront pas tort de se réjouir, mais n'en gagnera pas de nouveau, ce qui n'était audiblement pas son but de toute manière, ça n'en reste pas moins une galette sympathique qu'on aurait tellement voulu mieux mise en son, tellement ! Quand à l'abondance de biens, à chacun de faire son tri.


Album
1. Dragonaut 4:26
2. Redeemer of Souls 3:58
3. Halls of Valhalla 6:04
4. Sword of Damocles 4:54
5. March of the Damned 3:55
6. Down in Flames 3:56
7. Hell & Back 4:46
8. Cold Blooded 5:25
9. Metalizer 4:37
10. Crossfire 3:51
11. Secrets of the Dead 5:41
12. Battle Cry 5:18
13. Beginning of the End 5:07
Bonus
1. Snakebite 3:14
2. Tears of Blood 4:19
3. Creatures 4:25
4. Bring It On 3:18
5. Never Forget 6:25
(les extraits choisis sont ma sélection perso)


Rob Halford – vocals
Glenn Tipton – guitar, synthesizer
Richie Faulkner – guitar
Ian Hill – bass guitar
Scott Travis – drums

samedi 26 juillet 2014

Vous aimez le thrash metal ?

Un peu de délicatesse dans un monde de brutes ! ;-)

Overkill "White Devil Armory" (2014)
ou "Le Retour, Chapitre III"


Après les claques successives d'Ironbound et de The Electric Age, on finissait par se dire qu'Overkill avait trouvé la formule magique en plus de le fontaine de jouvence... Presque, en fait.

Il faut dire que les deux précités avait mis la barre très très haut damant le pion du supposé Big Four dans l'art de bastonner sévèrement à coup de riffs tranchants, de rythmiques surpuissantes et rapides, de vocaux abrasifs et possédés. Aussi, quand arrive White Devil Armory on n'attend pas autre chose et on a... Presque la même qualité, mais presque seulement. Peut-être parce que les compositions y paraissent plus simples, que les riffs sont juste un tout petit peu moins bien trouvés, certainement parce que les soli sont légèrement moins convaincants dans ce qui reste une excellente collection de chansons avec même une belle reprise de Miss Misery de Nazareth (featuring Marc Tornillo actuel et excellent hurleur des germains d'Accept) rappelant que ces messieurs ne sont pas nés de la dernière pluie et assument fièrement leurs (p)références passées de mode. Côté chant, on retrouve avec un vrai plaisir le Brian Johnson (ou Udo Dirkschneider) du thrash metal, un gars qui sait beugler comme un taureau furieux sans jamais perdre de vue qu'il faut un peu de mélodie pour faire passer cette salutaire colère vocale, la rendre plus acceptable sans lui laisser perdre ne serait-ce qu'un iota de sa substance rageuse. Oui, Bobby Ellsworth est un vocaliste PARFAIT pour le genre, ce que ne démentit nullement White Devil Armory. Comme en plus l'album est idéalement mis en son (précision, puissance, etc., vous connaissez le refrain), il n'en faut pas plus pour secouer sauvagement nos chefs ravis malgré les légères réserves constatées.

Alors non, White Devil Armory n'amène pas tout à fait la même satisfaction que ses deux glorieux prédécesseurs mais, si vous aimez le thrash metal, le bon !, nul doute, vous aimerez White Devil Armory même s'il ne vous surprendra pas vraiment voire vous poussera à revenir vers Ironbound et The Electric Age en le délaissant un peu. Ca n'en demeure pas moins un efficace, rondement mené et diablement addictif album de thrash metal oldschool qu'on se passera en boucle le temps qu'il faut.


1. XDM 0:49
2. Armorist 3:53
3. Down to the Bone 4:04
4. PIG 5:21
5. Bitter Pill 5:48
6. Where There's Smoke 4:20
7. Freedom Rings 6:52
8. Another Day to Die 4:56
9. King of the Rat Bastards 4:09
10. It's All Yours 4:26
11. In the Name 6:03
Bonus
12. The Fight Song 5:13
13. Miss Misery (Nazareth cover) 4:31


Bobby Ellsworth – lead vocals
Dave Linsk – lead guitar, backing vocals
Derek "The Skull" Tailer – rhythm guitar, backing vocals
D. D. Verni – bass, backing vocals
Ron Lipnicki – drums
&
Mark Tornillo - vocals (13)

vendredi 25 juillet 2014

The Power of Three (The Genesis Studio Series 7/15)

Avec Calling All Stations, c'est le vilain petit canard de la discographie de Genesis. J'aime bien les vilains petits canards !

Genesis "...And Then There Were Three..." (1978)
"Un seul être vous manque..."


Un seul être vous manque et tout est dépeuplé ? C'est la thèse concernant And Then They Were Three qui suit le départ d'un guitariste exceptionnel, Steve Hackett, et amorce la seconde phase de la carrière de Genesis, plus pop, moin prog. Mais ce n'est pas si simple...
 
Présentement, Genesis se remet du départ d'un instrumentiste qui fut un élément important de son son en ne le changeant pas vraiment. Rutherford, qui c'est entendu, n'est pas du même niveau que celui qu'il est sensé remplacer, mise sur une approche supra-mélodique de l'instrument compensant ainsi son déficit technique, et c'est plutôt bien joué. D'autant qu'il y a, dans le groupe, une évidente volonté de simplification de l'écriture, une évolution vers des compositions à la structure plus pop sans pour autant abandonner l'emphase progressive qu'ils avaient l'habitude de leur donner. Le résultat, un compromis bien trouvé, ne produit pas que d'excellents résultats mais force est de constater qu'il fonctionne sur la majorité de titres plutôt très réussis et nullement indigne de la réputation du groupe.
Parce qu'il y a encore du grain à moudre pour les fans du Genesis d'avant : Down and Out, puissante et inspirée ouverture; Undertow, belle composition douce-amère à la mélodie entêtante et la progression réussie; Ballad of Big, morceau étonnamment rock fort bien troussé, Snowbound, délicate composition qui n'aurait pas déparé sur Wind & Wuthering; Burning Rope, une des plus belles réussites de l'opus, puissant, racé et mélodiquement superbe; Deep in the Motherlode, qui semble déjà annoncer le tournant pris par le groupe sur Duke; Scenes from a Night Dream, pendant égal de face B à Ballad of Big; Say It's Alrigh Joe, ballade mélancolique à l'emballage progressif final parfaitement réussi. Toutes de vraies belles réussites. Comme le reste, sauf peut-être un Follow You Follow Me trop facile pour être honnête, n'est pas mal non plus, on ne peut que fêter l'avènement d'un nouveau line-up suffisamment roué pour contourner ses handicaps naturels.
Evidemment, on ne peut qu'imaginer (rêver !) le résultat avec Hackett qu'il aurait été facile de retenir en lui offrant un rôle créatif plus étendu, et regretter que les saillies géniales du taciturne axeman ne viennent pas encore un peu plus embellir le probant résultat. Mais c'est comme ça, on fait avec.

Au final, passé la compréhensible si excessive déception d'époque, on se retrouve avec un Genesis classique et réussi, un album démontrant que, même à trois, ces messieurs possèdent un petit quelque chose de plus les plaçant loin au-dessus de la mêlée des laborieux. Excellent, quoi !


1. Down and Out 5:26
2. Undertow 4:46
3. Ballad of Big 4:50
4. Snowbound 4:31
5. Burning Rope 7:10
6. Deep in the Motherlode 5:15
7. Many Too Many 3:31
8. Scenes from a Night's Dream 3:30
9. Say It's Alright Joe 4:21
10. The Lady Lies 6:08
11. Follow You Follow Me 4:02
Bonus
12. The Day the Light Went Out 3:14
13. Vancouver 3:03


Tony Banks – piano (Yamaha CP-70 electric), organ (Hammond T-102), Mellotron, synthesizers (ARP 2600, ARP Pro Soloist, Polymoog, Roland RS-202)
Phil Collins – lead and backing vocals, drums, percussion
Mike Rutherford – guitars, fretted & fretless bass guitars, bass pedals

jeudi 24 juillet 2014

La tournée du Grand Duc (The Genesis Studio Series 6/15)

On continue de remonter l'histoire de Genesis, cette fois avec un album pour lequel j'ai des sentiments mitigés.

Genesis "Duke" (1980)
ou "Concept or not concept?"


Chapitre 2 du Genesis réduit à l'état de trio, Duke est un album ambivalent. D'un côté, il y a l'écriture de plus en plus pop, d'un autre, une ambition musicale non-démentie.
 
La première tendance, pop donc, s'affiche via une série de chansons abordables visant, audiblement, à répéter voire à amplifier le succès grand public naissant du tube de leur précédent album, Follow You Follow Me. Le groupe y réussit avec Turn It On Again qui deviendra une étape quasi-obligatoire de chacune de leur apparences scéniques et reste une chanson efficace et accrocheuse (à défaut de mieux...), et Misunderstanding, leur tout premier top 20 américain qui, composition de Phil Collins datant des sessions de son premier album solo, possède une (jolie) mélodie ratissant suffisamment large pour atteindre son but vulgarisateur.
La seconde tendance, prog !, s'exprime via ce qui aurait pu (aurait dû ?) être la suite ambitieuse de l'album mais se retrouve finalement éparpillée sur l'entièreté de la galette. Concrètement, le plan était un enchainement  Behind The Lines / Duchess / Guide Vocal / Turn It On Again / Duke's Travels / Duke's End qu'il est toujours possible de réaliser à la maison mais fut finalement annulé, les trois voulant éviter toute comparaison avec une autre suite, l'intouchable Supper's Ready sur l'impeccable Foxtrot. Dommage parce que la suite fonctionne plutôt bien et a le mérite de l'ambition, ce que les heureux détenteurs de billets pour la tournée Duke purent vérifier in vivo.
Au niveau du son, de l'orchestration et des arrangements, on constate un net effacement de la guitare au profit des claviers omniprésents de Tony Banks, pas forcément une mauvaise nouvelle si on considère les limitations d'un Rutherford à la six-cordes mais un peu dommage quand même si on se souvient de quelques éléments fort inspirés détectables sur And Then They Were Three. On remarque aussi une très nette modernisation du son, modernisation qui se concrétisera avec Abacab et ses successeurs, pour des fortunes variées, hélas. Pour le moment, encore en prise avec son récent passé, Genesis continue de progresser dans des eaux finalement assez familières, peut-être un peu trop d'ailleurs, signe d'une frilosité pas encore tout à fait évacuée. Mais l'album sonne bien (particulièrement dans son édition remasterisée de 2007), les compositions sont globalement de belle qualité même si Man of Our Times et Please Don't Ask, respectivement signées de Rutherford et Collins, font un peu baisser le niveau, et que la version solo, cuivrée et dynamisée, by Collins, de Behind the Lines est finalement plus convaincante que celle du trio.

Album transitoire, un peu le séant entre progressisme moderne et pop/rock grand public, Duke est un pas de plus dans la trajectoire sans cesse évolutive de la formation. Une réussite mineure aussi à laquelle je préfère ce qui suit et précède directement, opinion minoritaire mais assumée.


1. Behind the Lines 5:31
2. Duchess 6:26
3. Guide Vocal 1:35
4. Man of Our Times 5:34
5. Misunderstanding 3:13
6. Heathaze 5:01
7. Turn It On Again 3:50
8. Alone Tonight 3:56
9. Cul-de-sac 5:05
10. Please Don't Ask 4:01
11. Duke's Travels 8:40
12. Duke's End 2:08
Bonus
13. Open Door 3:56
14. Evidence of Autumn 4:58


Tony Banks – keyboards, 12 string guitar, background vocals
Phil Collins – drums, percussion, lead & backing vocals, drum machine
Mike Rutherford – guitars, bass guitar, bass pedals, background vocals
&
David Hentschel
– background vocals

mercredi 23 juillet 2014

l'Abc de la nouveauté (The Genesis Studio Series 5/15)

Genesis "Abacab" (1981)
ou "Time for change"


Le dernier chef d'œuvre de Genesis ? L'ultime album d'une triplette de transition du groupe de rock progressif des années 70 vers le groupe pop des années 80/90, indéniablement.

En fait, tout vient du départ de Steve Hackett et de l'obligatoire simplification instrumentale qui en suivit, du fait  que les trois membres restants aient décidés de ne pas, encore une fois, amener une nouvelle tête dans leur petit confort. Il y a un paradoxe là-dedans, d'un côté une volonté de rester entre eux, dans un petit cocon, d'un autre une vraie prise de risque tant la guitare était, jusqu'alors, un élément déterminant de l'assemblage sonique de la formation.
Sur les deux albums précédents, Genesis n'a pas encore tout à fait assumé ce resserrement trouvant des alternatives compositionnelles et sonores à ce manque, pour des résultats tout sauf indignes mais sans doute un peu frileux. Abacab change tout ça, prépare la suite aussi avec un parti-pris nettement plus moderniste sans pour autant perdre le progressisme qui a fait la réputation et la gloire du groupe jusque-là. Evidemment, c'est le jeu de l'évolution, ce nouveau cap n'ira pas sans heurts avec leur auditoire de référence.
Pourtant, quel album ! Bon, on avouera que le petit gag de studio Who Dunnit? perd de son sel la première écoute passée, n'est pas Devo qui veut. Pour le reste, de l'énorme groove-progressif du morceau éponyme, du très Collinsien mais diablement efficace No Reply at All (avec les cuivres d'Earth Wind & Fire !), de la new wave progressive douce-amère de Me and Sarah Jane, du robotique et efficace single Keep It Dark, de l'énoooorme Dodo/Lurker (au groove, à la progression et à la mélodie si irrésistible... un must !), de la jolie ballade pas racoleuse pour deux sous Man on the Corner (composition de Collins, ça s'entend), du stadium rock malin et diablement bien troussé Like It Or Not, au rock déconstruit sur batterie tribale d'Another Record, c'est un sans faute et un album indéniablement osé pour des musiciens en recherche constante.
Tout juste regrettera-t-on que que la très jolie face B Submarine ou n'importe laquelle des trois compositions du EP 3X3 enregistré lors des mêmes productives et inspirées sessions de l'album n'ait été substitué à la novelty song précitée. Et puis il y a la production, puissante, claire, pas si marquée par les 80s que ça, encore bonifiée dans le definitive remaster de 2007, on en reste pantois.

Abacab, à condition de ne pas commettre l'erreur de le comparer avec la première phase du groupe et son progressisme symphonique millimétré confinant à la perfection (surtout de 72 à 76), est l'apothéose du Genesis moderne, groupe qui n'a toujours pas froid aux oreilles mais ne tente pas, comme ce sera trop souvent le cas par la suite, d'attirer les foules par quelques bassesses commerciales embarrassantes. Une bombe, vous dis-je !


1. Abacab 7:02
2. No Reply at All 4:33
3. Me and Sarah Jane 6:00
4. Keep It Dark 4:32
5. Dodo/Lurker 7:30
6. Who Dunnit? 3:23
7. Man on the Corner 4:27
8. Like It or Not 4:57
9. Another Record 4:39
Bonus
b'sides

10. Naminanu 3:54
11. Submarine 4:38
EP 3X3
12. Paperlate 3:23
13. You Might Recall 5:31
14. Me And Virgil 6:18


Tony Banks – keyboards
Phil Collins – drums, percussion, vocals, drum machines
Mike Rutherford – bass guitar, bass pedals, guitars
&
EWF Horns
– horns

lundi 21 juillet 2014

22, v'là les Anges !

L'appel du Zorn est, comment dire, irrésistible ! Et quand il s'agit d'un volume du Book of Angels, c'est pire. Aussi n'ai-je pas résisté.

John Zorn/Zion 80 "Adramelech, Book of Angels Volume 22" (2014)
ou "Un collectif aux petits oignons"


Quelques mois seulement après un exceptionnel volume 21 de son Livre des Anges, John Zorn confie à une bande de têtes connues le numéro 22, et c'est une excellente nouvelle !
 
Pour ceux qui ont l'occasion d'écouter l'opus inaugural de Zion 80, paru chez Tzadik en décembre 2012, Andramelech ne sera pas une surprise. On y retrouve en effet la fusion d'Afrobeat et de klezmer qui avait si bien fonctionnée la fois précédente. Forcément, les compositions de John Zorn en sont toutes chamboulées, c'est une bonne chose et le sel d'une série où chaque interprète/arrangeur amène sa sauce, sa vision à ce qui commence sérieusement à ressembler à un impressionnant édifice. On y retrouve forcément la patte compositionnelle du maître mais aussi l'influence ô combien bienvenue d'un autre immense artiste : Fela Anikulapo Kuti. A la différence près et fort compréhensible que, le chef de bande, qui n'est pas le neveu du bandit de la finance du même patronyme,  étant un guitariste (qui plus est secondé par un autre six-cordiste radically jewish, Yoshie Fruchter), on y retrouve aussi moult rifferies et soli lui permettant de s'exprimer, ce qu'il fait excellemment bien. Rajoutez à ça un groove qui n'en finit pas de nous faire nous trémousser, des cuivres qui pulsent une énergie à peine croyable et vous obtiendrez, bien sûr !, un brillant opus plutôt très abordable si vous appréciez les tendances et styles précités.

Andramelech, Book of Angels Volume 22... Et toujours la même envie d'entendre la suite, qui arrive bientôt (septembre !) et s'annonce passionnante (Roberto Rodriguez promettant de cubo-latiniser furieusement le joujou Zornien) tout en goutant au tour de force présentement proposé. Tout simplement.


1. Araziel 7:14
2. Sheviel 5:48
3. Metatron 9:05
4. Shamdan 7:16
5. Kenunit 10:37
6. Caila 4:21
7. Ielahiah 6:00
8. Nehinah 5:55
(trop bon pour ne pas l'écouter en entier !)


John Zorn - composition, executive producer
Jon Madof - guitar, producer
Matt Darriau - alto sax, kaval, clarinet
Greg Wall - tenor sax
Frank London - trumpet
Jessica Lurie - baritone sax, flute
Zach Mayer - baritone sax
Yoshie Fruchter - guitar
Shanir Ezra Blumenkranz - bass
Brian Marsella - keyboard
Marlon Sobol - percussion
Yuval Lion - drums
&
Mauro Refosco -  percussion (7)

dimanche 20 juillet 2014

Mama by the Sea, that's all (The Genesis Studio Series 4/15)

Toujours dans la série des albums studio de Genesis, et dans celle du "qui aime bien châtie bien", voici, en remontant encore un peu le temps, le cru 1983 soit l'explosion commerciale du groupe auprès d'un grand public déjà fan de son chanteur/batteur.

Genesis "Genesis" (1983)
ou "Insuffisant avec quelques rebonds"


L'album éponyme de Genesis de 1983 fut un énorme succès qui lança définitivement le virage grand public du plus grand groupe progressif de tous les temps. Rien que pour ça, on peut le détester, surtout si on aime le Genesis le plus ambitieux, celui qui de 1970 à 1977 produit une musique à la fois complexe et mélodique, presque parfaite pour ainsi dire.
 
Forcément, on ne peut évoquer l'album sans parler de son mammouth d'ouverture, Mama, tube planétaire, pas une chanson facile pour autant : de part son thème, l'amour d'un jeune homme pour une prostituée, sa construction, un lent crescendo nettement moins accrocheur que celui de Collins 2 ans plus tôt sur son premier album solo (In the Air Tonight, évidemment), une sacrée bonne chanson cependant. On ne peut pas non plus évoquer l'album sans mentionner la doublette Home by the Sea/Second Home by the Sea, exemplaire réussite de progressisme moderne et abordable. Et puis ? C'est hélas tout. Ha si, That's All, petite Beatlesrie, Collins y joue à la Ringo Starr, sympathique à défaut de mieux, fait son petit effet, son petit effet seulement. Et puis ? Cette fois c'est vraiment tout ! Sauf, bien sûr, si vous êtes amateur de chansons rigolardes qu'il ne faut surtout pas prendre au sérieux au risque de considérer les trois larrons comme de vils racistes patentés (Illegal Alien) ou que, fan de Collins, vous cherchiez une petite dose supplémentaire de sa pop mainstream (Taking It All Too Hard) ou de ses tentatives rock plutôt téléphonées (Just a Job to Do). On ne mentionnera même pas les deux dernières chansons faisant figure, au mieux, de remplissage, preuve que le groupe n'était pas dans sa phase d'inspiration la plus féconde, une impression confirmée par une totale absence d'inédits sur les faces B des quelques singles.
 
Et donc, finalement, après de longues années à produire une musique ambitieuse, c'est avec leur album le moins brillant à ce point de leur carrière que Genesis triomphera. Une réelle injustice qui, avec le succès sans cesse grandissant de leur batteur/chanteur en solitaire, influencera indéniablement ce qui suivra, de sinistre mémoire. Pas de quoi pavoiser.


1. Mama 6:46
2. That's All 4:22
3. Home by the Sea 4:46
4. Second Home by the Sea 6:22
5. Illegal Alien 5:12
6. Taking It All Too Hard 3:54
7. Just a Job to Do 4:44
8. Silver Rainbow 4:27
9. It's Gonna Get Better 5:00


Tony Banks – keyboards, backing vocals
Phil Collins – lead & backing vocals, drums, percussion, trumpet on "Illegal Alien", drum machines
Mike Rutherford – guitars, bass guitar, backing vocals, drum machine on "Mama"

samedi 19 juillet 2014

Le succès ne fait pas tout (The Genesis Studio Series 3/15)

Genesis "Invisible Touch" (1986)
ou "MTV m'a tuer"


Le succès ne fait pas tout. En ce qui concerne Invisible Touch, album le plus vendu de Genesis, (avec We Can't Dance qui le méritait, lui) c'est une évidence.
 
Invisible Touch n'est pourtant pas l'album le plus décrié du groupe, cet "honneur" revenant à And Then They Were Three et Calling All Stations pourtant nettement plus artistiquement intéressants.
En un mot comme en mille, on peut blâmer ce naufrage à une raison : ces maudites années 80, et aux tics de production qui vont avec et ne furent jamais aussi criants que sur l'album qui nous intéresse. Parce que, des synthétiseurs kitsch à un son de batterie imitant les pires boîtes-à-rythmes, ce n'est vraiment pas la panacée. Restent quelques bons moments, notamment dans Tonight Tonight Tonight, Domino ou The Brazilian, seules compositions à montrer encore quelques inflexions progressives bienvenues mais nettement trop délayées dans un opportunisme commercial encombrant.  Il y a même, si on cherche vraiment, un single rigolo aux paroles sarcastiques (Land of Confusion), jamais aussi bon qu'accompagné de son clip Spitting Image. Ca ne fait pas lourd.

Pour être tout à fait honnête, on précisera que la remasterisation de 2007 rattrape un petit peu le coup mais pas assez pour sauver la galette la plus indigne de la carrière d'un immense groupe. Au suivant, donc, sans regret mais avec quelque amertume devant un tel gâchis. MTV m'a tuer, comme dirait l'autre.

Petits veinards que vous êtes, je vous ai rajouté trois faces B dont l'excellent instrumental Do The Neurotic. qui, c'est un comble !, est probablement la composition la plus attrayante des sessions d'Invisible Touch. Et il s'agit bien du remaster 2007, la moins pire version de l'album, donc (je ne vous garantis cependant pas la provenance des extraits).
 

1. Invisible Touch 3:29
2. Tonight, Tonight, Tonight 8:53
3. Land of Confusion 4:45
4. In Too Deep 5:02
5. Anything She Does 4:09
6. Domino 10:44
7. Throwing It All Away 3.51
8. The Brazilian 4:50
Bonus
9. I'd Rather Be You 4:04
10. Do the Neurotic 7:08
11. Feeding the Fire 5:54


Tony Banks – keyboards, synth bass
Phil Collins – drums, percussion, vocals, drum machines
Mike Rutherford – guitars, bass guitar

vendredi 18 juillet 2014

Three at Last (The Genesis Studio Series 2/15)

J'ai finalement décidé de m'attaquer à Genesis. j'en remercie Devant du Gai-Tapis qui m'a mis le pied à l'étrier en requérant Calling All Stations, ultime album en date du groupe. Et donc, à la faveur d'un été pauvre en nouvelles sorties, je vais passer en revue chaque album d'un groupe qui me tient particulièrement à cœur avec, cette fois, We Can't Dance. Enjoie !

Genesis "We Can't Dance" (1991)
ou "Malgré quelques lourdeurs"


Je me souviens, alors que j'avais juré qu'on ne m'y reprendrait plus après le fiasco artistique d'Invisible Touch, avoir entendu le premier single de cet album, No Son of Mine, et m'être dit, tant côté son que côté composition, que Genesis avait enfin décidé de se remettre sérieusement au travail et de revoir ses ambitions musicales à la hausse. Evidemment, tout n'est pas si simple que ça mais, de fait, We Can't Dance peut-être aisément perçu comme une renaissance progressive, ce n'était pas gagné d'avance.
 
Bon, les fans de la première période (1970-1977) ne trouvèrent pas ici de quoi contenter leur appétit de progressisme symphonique, la faute à l'évolution du groupe vers d'autres territoires, d'autres envies aussi. Des envies bien légitimes parce que refaire encore et toujours un Selling England by the Pound, un Foxtrot ou un The Lamb Lies Down on Broadway, toutes des galettes légendaires à raison, aurait été, on se doute, une torture qui n'aurait probablement pas été, qui plus est, couronnée de succès. Toujours est-il qu'il y a dans We Can't Dance, outre d'excellents singles cette fois non handicapés par une production lourdement 80s, un vrai souffle créatif, une vraie ambition musicale démontrée par les deux longues compositions de l'album : Driving the Last Spike et Fading Lights, deux belles réussites réussissant à allier le modernisme assumé de la formation ainsi que son lien avec un passé qu'on pensait révolu. A tel point que, une fois l'ivraie dûment éliminée (les quelques ballades mollassonnes sans intérêt et autres morceaux nettement moins inspirés ou trop Collinsiens pour être honnêtes) on se retrouve avec le plus bel opus de Genesis depuis Duke. Je vous engage d'ailleurs à faire vous même le test en soustrayant Never A Time, Tell Me Why, Hold on My Heart et Since I Lost You voire Living Forever (le moins pourri du lot) du tout et en y, éventuellement, ajoutant la sympathique B'Side qu'est On the Shoreline. Concrètement, ça nous laisse 8 ou 9 chansons et 50 à 60 minutes, pas si mal pour un trio dont on pensait l'inspiration définitivement perdue dans les limbes.

Du coup, on peut le dire : We Can't Dance est une jolie réussite. Certainement pas un opus révolutionnaire ou possédant le souffle lyrique des meilleurs de ses aînés mais une œuvre inspirée par trois quinquagénaires sachant encore, à condition qu'ils s'en donnent la peine, produire une musique pleine de sève et d'esprit.


1. No Son of Mine 6:39
2. Jesus He Knows Me 4:16
3. Driving the Last Spike 10:08
4. I Can't Dance 4:01
5. Never a Time 3:50
6. Dreaming While You Sleep 7:16
7. Tell Me Why 4:58
8. Living Forever 5:41
9. Hold on My Heart 4:37
10. Way of the World 5:38
11. Since I Lost You 4:09
12. Fading Lights 10:16
Bonus
13. On the Shoreline 4:45
14. Hearts on Fire 5:15


Tony Banks – keyboards
Phil Collins – drums, percussion, vocals, drum & percussion programming
Mike Rutherford – guitars, bass guitar

jeudi 17 juillet 2014

Retour d'affection

Judas Priest "Redeemer of Souls (Deluxe Edition)" (2014)
ou "Aux sources du Metal"


Troisième album depuis le retour au bercail du divin chauve, premier sans l'élément blond de la doublette guitaristique, suiveur d'un Nostradamus trop pompeux et mollasson pour être satisfaisant malgré quelques beaux moments, on peut dire que Redeemer of Souls et ses auteurs étaient attendus au tournant... Mais, malins comme les vieux sages roués qu'ils sont, les membres de Judas Priest ont joué la sécurité en nous concoctant une galette brossant leur auditoire de choix dans le sens de la crinière soit un opus d'un immense classicisme.

Concrètement, il y a tout ici pour contenter le fan de Heavy Metal et de Judas Priest. A commencer par la pochette de Mark Wilkinson (Marillion, Fish, mais aussi quelques albums du groupe qui nous intéresse présentement) qui fera beaucoup rire les détracteurs habituels du genre et de son iconographie mais colle parfaitement au sujet, et au titre. Ensuite il y a la mise en son de Glenn Tipton et Mike Exeter, précise, claire, puissante, un peu trop "loud" (c'est hélas un signe des temps) mais idéale pour pareil exercice. Et puis, surtout !, il y a les chansons, 13 sur l'album "normal" bonussées de 5 dans la version Deluxe.
Donc il y a déjà la quantité, mais la qualité ? Hé bien elle est présente aussi ! Evidemment tout n'y est pas d'une égale réussite mais rien n'y approche l'indignité. Des exemples ? Dragonaut, mid-tempo d'ouverture tout à fait typique du style Judas Priest avec son gros riff bien senti, la mélodie de chant accrocheuse de Rob Halford et, évidemment, un duel de guitare qu'on jurerait que K.K. Downing n'a pas quitté le navire. Redeemer of Souls, morceau titre qu'on croirait sorti des sessions d'un Sin After Sin ou d'un British Steel qui, sans être exceptionnel, possède ce groove métallisé qui vous fera souffrir les cervicales et un refrain à vous casser les cordes vocales lors des prochaines prestations scéniques du quintet, efficace, donc. Halls of Valhalla où le groupe met pour la première fois le turbo (modéré) et démontre quelques petites inflexions presque progressives pas désagréables, où Halford sort quelques vocalises aigües (si moins qu'avant) ayant fait sa réputation de Metal God. Sword of Damocles qui se permet même un petit décrochage tout en légèreté avant de relancer l'artillerie lourde et les soli en duo. Etc., ce ne sont que les cinq premières chansons !, parce que, en vérité, toute la tracklist éblouissant par son retour de sève et aux sources, on a encore un peu de mal à trier le bon grain (qu'on soupçonne largement majoritaire) de l'ivraie (qu'on ne trouve jamais vraiment), ça viendra probablement avec l'obligatoire recul critique que le temps ne manquera pas d'amener. Allez, on concèdera d'ors et déjà un petit sentiment de monotonie avec une majorité de morceaux mid-tempo et un schéma individuel souvent répété, peut-être qu'abondance de biens nuit aussi un peu avec l'impression précitée.
En bref ? Du classique, du solide, de l'efficace à défaut de vraiment génial ou surprenant. Bien entendu, les morceaux bonus de l'édition Deluxe sont un tout petit peu moins mordants et convaincants mais s'écoutent avec le vrai plaisir d'avoir retrouvé un groupe ne cherchant plus à faire autre chose que ce qu'il accomplit avec le plus de talent : du bon gros Heavy Metal à l'ancienne.

Alors, certes non, on n'accrochera pas ce Redeemer of Souls au palmarès des grands classiques de la formation, ces temps là, ceux de British Steel, Sad Wings of Destiny ou Screaming for Vengeance, sont définitivement révolus mais, hallelujah !, les vieux en ont encore sous la semelle cloutée et ont su remettre du super dans le réservoir de leur rutilant bolide, qu'ils en soient dûment félicités et remerciés. Et, donc, Judas Priest est toujours vivant et revenu à ses fondamentaux, rien que ça est une excellente nouvelle qui se doit d'être fêtée comme il se doit.


Album
1. Dragonaut 4:26
2. Redeemer of Souls 3:58
3. Halls of Valhalla 6:04
4. Sword of Damocles 4:54
5. March of the Damned 3:55
6. Down in Flames 3:56
7. Hell & Back 4:46
8. Cold Blooded 5:25
9. Metalizer 4:37
10. Crossfire 3:51
11. Secrets of the Dead 5:41
12. Battle Cry 5:18
13. Beginning of the End 5:07
Bonus
1. Snakebite 3:14
2. Tears of Blood 4:19
3. Creatures 4:25
4. Bring It On 3:18
5. Never Forget 6:25


Rob Halford – vocals
Glenn Tipton – guitar, synthesizer
Richie Faulkner – guitar
Ian Hill – bass guitar
Scott Travis – drums

mardi 15 juillet 2014

Le dernier appel de la Genèse (The Genesis Studio Series 1/15)

C'est le Devant du Gai-Tapis qui me l'a demandé, je ne pouvais pas lui refuser ça... Aussi, aussitôt dit, aussitôt fait, voici l'album "alien" de Genesis, un album qui mérite plus que sa réputation.

Genesis "Calling All Stations" (1997)
ou "Le vilain petit canard"


1996, "And then they were two". Mais c'était intenable d'autant que ni Rutherford, ni Banks ne sont des vocalistes suffisants pour occuper le poste et qu'il faut bien un batteur... Alors on recrute, l'écossais ex et futur Stiltskin Ray Wilson, pas un choix évident d'autant que ça se bousculait au portillon, pensez !, une place dans une des plus célèbres formations du rock progressif des années 70, ou ce qu'il en restait...
 
S'il y a bien une évidence qui saute à la gueule à l'écoute de Calling All Stations, c'est que l'orientation FMinée du groupe n'était pas, comme beaucoup le pensaient, la seule "faute" de leur semi-chauve batteur et vocaliste, le rigolard et parfois agaçant Phil Collins. Parce que si, finalement, il y a une vraie surprise dans l'album c'est qu'il n'y en a pas vraiment, outre le changement vocal assez radical, c'est entendu.
Côté composition, s'il n'y a pas la bonne surprise d'une retour à un progressisme seventisant, il n'y a pas non plus de particulière déconvenue. Au contraire, si l'ensemble de l'album est indéniablement routinier, on ne se refait pas à l'âge des deux leaders (par défaut ?), il réserve quelques très jolies surprises desquelles on extraira les plus éblouissantes : le trippant Alien Afternoon, le puissant The Dividing Line, l'"Afterglowien" Uncertain Weather, le morceau qui aurait dû être un tube qu'est Small Talk (tellement mieux que Not About Us choisi pour l'exercice), ou la belle doublette de prog moderne de clôture, There Must Be Some Other Way et One Man's Fool. L'air de rien, ça fait plus de la moitié de la tracklist, pas si mal pour un album généralement décrié et qualifié de "combat de trop" par moult plumes critiques. D'autant que le reste, sans être aussi enthousiasmant, n'est aucunement indigne. Reste une production et des arrangements émasculant trop souvent le potentiel de bonnes chansons voire l'opportunité manquée de recruter quelques jeunes et fines lames (un guitariste soliste, un vrai !) histoire de dynamiser le long fleuve tranquille de quelques rapides salvateurs. C'est d'autant plus rageant qu'il ne manque pas grand chose ! Déjà parce que le chant de Ray Wilson, un Gabriel sans la fantaisie mais qui fait ce qu'il peut avec ce qu'on lui propose et possède un vrai sens de la mélodie, amène un réel supplément d'âme, ensuite parce que la paire de batteurs/percussionnistes convoquée pour l'occasion (Nick D'Virgilio de Spock's Beard, entre autres, et Nir Zidkyahu, qui participera à la tournée qui suivra) ré-épice le côté progressif du groupe là où Phil C. avait fini par simplifier son jeu à l'extrême en plus d'être souvent supplanté par d'affreuses boîte-à-rythmes, enfin parce que que (re !) il y a un paquet de bonnes chansons qui, on le sent !, ne demandaient qu'à s'épanouir mais resteront malheureusement trop contraintes par leurs arrangements calibrés et leur production clinique (si d'une qualité audiophile incontestable). 
 
Ces petits défauts mis à part, ce qu'il n'est pas compliqué de faire, tenez-le vous pour dit, Calling All Stations était une bonne surprise en 1997 et reste une œuvre plus qu'honnête 17 ans plus tard. Plus qu'honnête et nettement plus écoutable sur la durée que certains albums multi-platinés de la formation tels que l'éponyme de 1983 ou le putassier Invisible Touch sorti trois ans plus tard. Recommandé donc, et pas seulement aux fans de Genesis mais à tous ceux qui goûtent au rock progressif mélodique moderne, ils sont nombreux.
 
Et en plus, bien servis que vous êtes,  j'ai rajouté les trois b'sides enregistrées lors des mêmes sessions. Elles ne sont certes pas affolantes mais plutôt agréables ce qui n'est déjà pas si mal !

1. Calling All Stations 5:45
2. Congo 4:52
3. Shipwrecked 4:24
4. Alien Afternoon 7:54
5. Not About Us 4:40
6. If That's What You Need 5:13
7. The Dividing Line 7:45
8. Uncertain Weather 5:30
9. Small Talk 5:02
10. There Must Be Some Other Way 7:55
11. One Man's Fool 8:54
Bonus
(b'sides du single Not About Us)
12. Anything Now 7:03
13. Sign Your Life Away 4:45
14. Run Out of Time 6:31


Tony Banks – keyboards, backing vocals
Mike Rutherford – guitar, bass, backing vocals
Ray Wilson – vocals
&
Nir Zidkyahu
– drums on tracks 1–3, 4 (second half), 5, 7, 10–11; percussion on 2
Nick D'Virgilio – drums on tracks 4 (first half), 6, 8–9

lundi 14 juillet 2014

On commémore !

Plutôt qu'un élan de fierté nationale (en plus y a pas franchement de quoi...), le Zornophage vous propose de commémorer la fête nationale en musique avec un opéra rock de 1973. Mais comme ça ne suffit pas, vous trouverez aussi le plus fameux (à raison !) album de rigolos doués qui périront bientôt dans la variétoche la plus abjecte (j'exagère, mais juste un peu) et furent justement partie prenante de l'opéra rock dont il est ici principalement question. Enjoie !

V/A "La Révolution Française - Opéra Rock" (1973/2012)
ou "14 Juillet"


Un projet d'une colossale ambition, le premier opéra rock made in France aussi, La Révolution Française n'est pas une œuvre parfaite mais une pièce musicale de qualité, ce n'est pas si mal. Le mérite en revient à Jean-Max Rivière  et Alain Boublil (paroles) et Claude-Michel Schönberg et Raymond Jeannot (musiques) ainsi qu'aux ineffables Martin Circus, auteurs des arrangements. Bon, on ne va pas se mentir, on n'est ni au niveau de Tommy ou de Jesus Christ Superstar (les deux mètres étalons du genre à l'époque) mais heureusement pas non plus dans l'approximation de ses équivalents anglo-saxons dont les artistes de notre pays ont trop souvent fait montre (les yé-yés de sinistre mémoire).

A propos de l'œuvre : Le bel ensemble de voix avec, ne riez pas !, les Charlots, Martin Circus, ou même un jeune Bashung pas encore tout à fait éclos est indéniablement un des atouts de la partition. L'autre tient à la qualité des chansons et des arrangements bien de leur époque. Bien sûr, on aurait aimé que tout ceci soit plus radicalement rock mais les petits décrochages en douceur sont d'agréables respirations avant de repartir à l'assaut. Il est aussi agréable, pour l'unité de l'ensemble, de retrouver régulièrement les même vignettes mélodiques, d'autant qu'elles sont plutôt très accrocheuses, ces vignettes.
Le livret n'est pas idiot non plus s'il est, forcément, une simplification de l'Histoire avec un grand H. A défaut d'explorer en profondeur le thème, il se concentre sur quelques grands épisodes donnant au tout un petit côté zapping qui est son plus grand défaut, mais pas un énorme défaut non plus.
A propos de la réédition : C'est là que le bas blesse, dans l'édition de 2012 en tout cas, où les chansons, sensées s'enchaîner les unes aux autres, sans temps mort, se voient handicapées de blancs disgracieux et, à vrai dire, agaçants. Personnellement, afin d'en optimiser l'efficacité, j'ai créé mon propre montage en les supprimant. On ne devrait pas avoir à procéder à ce genre de manipulations symptomatiques d'un manque du manque de soin de l'éditeur. C'est d'autant plus dommage que l'œuvre mérite mieux.

Conclusion, bien troussé à défaut d'être parfaite, la Révolution Française fut une belle première pierre à l'édifice des opéras rock cocorico. Un peu daté dans son son et ses arrangements aujourd'hui, elle reste une œuvre attachante avec suffisamment de jolis moments pour qu'on en conseille l'écoute.

PS : Pour que votre plaisir ne soit pas handicapé par les défauts précités de la réédition, j'ai procédé, via Audacity, à une excision de tous les blancs disgracieux qui ruinaient la continuité. J'espère que vous apprécierez.


1. Ouverture 3:20
2. Les Etats Généraux 4:50
3. Charles Gauthier 2:04
4. A Versailles 1:41
5. Retour De La Bastille 1:29
6. Il s’appelle Charles Gauthier 1:22
7. A bas tous les privilèges 2:24
8. Déclaration des droits de l’Homme 2:26
9. Ça ira Ça ira 2:16
10. Quatre saisons pour un amour 3:21
11. Serment de Talleyrand 1:58
12. Fête de la Fédération 2:17
13. Crieurs De Journaux 0:38
14. La Patrie Est En Danger 2:00
15. L’Exil 3:20
16. Valmy 2:34
17. C’est du beau linge mon Général 1:24
18. Le procès de Louis XVI 5:50
19. Chouans en avant 2:06
20. La Terreur est en nous 2:32
21. L’horrible assassinat du citoyen Marat par la perfide Charlotte Corday 1:22
22. Fouquier-Tinville 0:48
23. Au petit matin 2:31
24. Robespierre 2:19
25. La Fête de l’être suprême 2:08
26. Gardien de prison à la Conciergerie 0:51
27. Révolution 3:08


Livret et paroles : Alain Boublil et Jean-Max Rivière
Musique : Claude-Michel Schönberg et Raymond Jeannot
Arrangements : Jean-Claude Petit et Martin Circus

Antoine : Général Bonaparte
Cyril Azzam : Général Kellermann
Alain Bashung : Robespierre
Jean Bentho : M. de La Fayette, conseiller du roi
Les Enfants de Bondy : Les enfants du roi (Louis et Marie-Thérèse)
Françoise Boublil : Charlotte Corday
Gérard Rinaldi: Talleyrand
Les Charlots : Les prêtres
Noëlle Cordier : Isabelle de Montmorency
Mario d'Alba : Un conseiller du roi / Un crieur de journaux / Un gardien de prison
Franca di Rienzo : Marie-Antoinette
Raymond Jeannot : Un crieur de journaux
Gérard Layani : La Terreur (soliste)
Gérard Blanc : Danton
Martin Circus (Gérard Blanc, Alain Pewzner, René Guérin, Sylvain Pauchard) : Les députés du Tiers-État
Jean-François Michael : Les Chouans (soliste)
Jean-Max Rivière : Marat
Jean-Pierre Savelli : Charles Gauthier
Claude-Michel Schönberg : Louis XVI
Jean Schultheis : Antoine Fouquier-Tinville
Élisabeth Vigna : Madame Sans-Gêne
Daniel Balavoine et Guy Balavoine : choristes pour le clergé
Système Crapoutchick (Gérard Kawczynski, Christian Padovan, André Sitbon, Jean-Pierre Alarcen, Jean-Pierre Sabard) : La Noblesse, la Terreur

BONUS !

Martin Circus "Acte II" (1971/2009)
ou "Pas que des rigolos"


S'ils finiront par se perdre dans la facilité d'une variété à peine rock et franchement peu recommandable, les Martin Circus n'en sont pas encore là avec Acte II, album référence d'un progressisme volontiers rigolard qui a le mérite de ne pas tenter de copier ses voisins teutons et anglais. Gaulois, quoi !
Présentement, je vous propose la chronique de Hellman, sur l'excellent webzine Guts of Darkness, datant de janvier 2009 qui en parle fort bien :
 
"Il arrive que l'actualité nous rattrape. En cette dernière semaine de janvier, nous apprenions le décès de Gérard Blanc. Si le personnage est resté gravé dans la mémoire du plus grand nombre comme un chanteur pour midinettes de plus à avoir sévi dans les années quatre-vingt, non sans un certain succès, c'est oublier que l'homme eut un passé, et que celui-ci fût intimement lié au devenir des Martin Circus. Tout comme Michel Fugain et son Big Bazar, Jean-Jacques Goldman au sein de Taï-Phong ou, plus obscur et impensable encore, Pierre Bachelet avec Résonance, lorsque Gérard Blanc rejoignit les Martin Circus pour leur second album en 1971, celui-ci affichait une prétention artistique qui allait bien au-delà d'un simple désir de reconnaissance populaire. Animé d'une véritable démarche artistique qui leur valu très rapidement l'appui des jeunes médias en quête de nouvelles idoles susceptibles de provoquer l'émergence d'une véritable scène pop hexagonale, les Martin Circus accomplirent ensemble avec "Acte II" quelque chose dont ils peuvent effectivement se montrer fier. L'impulsion première, c'est à eux que nous le devons. C'était là l'occasion de le rappeler. Et même s'ils élèvent le débat en opposition aux nombreux artistes yé yé qui squattent encore les juke-box, en guise de récompense pour tant d'efforts, ils rencontreront tout de même le succès avec leur délirant 45tours "Je m'éclate au Sénégal" (avec-une-copine-de-cheval-je-suis-à-poil). Mais "Acte II" recèle en son sein les germes de tant de déclinaisons progressives qu'il devient difficile d'en occulter l'importance. Comment ne pas écouter "Poème" sans songer que Ange n'a pas encore enregistré la moindre note ? Et le plaisir sournois avec lequel les Martin Circus s'amusent à emprunter des chemins tortueux nous fait prendre conscience aussi que Eton Fou Leloublan n'a pas encore vu le jour... Bien ancré dans son époque, "Acte II" combine les arrangements précieux de "Sgt.Pepper's Lonely Hearts Club Band" et "Hot Rats" réunis sous forme ... d'un double album !!! Un quitte ou double qui s'avère payant pour une entreprise qui avait tout du suicide commercial annoncé. Mais les Martin Circus assurent comme des bêtes pendant près d'une heure vingt, un vrai bonheur, les deux disques croulant littéralement sous les références, qu'elles soient musicales ou en français dans le texte. Impossible de passer à côté de ce disque si vous n'êtes pas insensibles aux vibrations et à la fougueuse inventivité de cette époque bénie."

Alors, Acte II ? Recommandé, évidemment. Et encore un peu plus dans cette réédition "Vinyl Replica Deluxe" bien remasterisée et dûment bonussée.


Disque 1
1. Boudjateelack 2:56
2. Pourquoi tous ces cris 3:46
3. Chevauchée fantastique 5:10
4. Poème 8:02
5. Ti' Bill 2:09
6. Poussières 5:02
7. J'ai perdu 6:29
8. J'suis une groupie 3:28
9. Ouvrez vos mémoires 4:00

Disque 2
1. Je m'éclate au Sénégal 4:15
2. Le tromblon magique 4:47
3. Hyznogod 3:40
4. Images 2:49
5. A dada sur Paranoïa 4:51
6. Façon de parler 8:07
7. O' secours Bob 3:49
8. J'aimerais bien te faire flipper un p'tit peu 4:36
9. Ma guitare 3:26
Bonus
10. Moi j'aime bien prendre mon pied 3:13
11. Je m'éclate au Sénégal (version alternative) 2:54
12. Je danse comme un pingouin 4:09
13. Les indiens du petit matin (Pt.1)  5:00
14. Les indiens du petit matin (Pt.2)  4:26


Gérard Blanc - chant, guitare, percussions
Gerard Pisani - saxophones, clarinette, flûte, trombone, percussions
Sylvain Pauchard - orgue, piano, vibraphone, accordéon, choeurs
Alain Pewzner - guitare, orgue, percussions, choeurs
Bob Brault - basse, flûte, percussions, choeurs
René Guerin - batterie, violon, percussions, choeurs

vendredi 11 juillet 2014

Double dose de Zorn !

Tadah ! Voici la double dose de Zornienne de juin, parce que ça ne pouvait plus attendre plus longtemps, pas avec le Zornophage ! Et puis il y a le retour de l'encodage VBR (depuis le Hackett, suivez !) à la plus haute qualité existante qui vous permettra d'avoir des MP3 de haute définition sur des fichiers compressés moins lourds et donc plus rapides à télécharger. Elle est pas belle la vie ?!

John Zorn "Myth and Mythopoeia" (2014)
ou "Collection contemporaine"


Pas de long préambule, entrons directement dans le vif du sujet de la nouvelle collection contemporaine du compositeur New Yorkais qui, présentement, use de 5 (petites) formations pour autant de compositions :
 
- Pandora's Box: Où le Quatuor Arditti, excusez du peu !, et la vocaliste allemande Sarah Maria Sun interprètent la variation zornienne du mythe de la boîte de Pandore. Et c'est un sacré trip où se côtoient moments d'harmonie gracieuse et trépidations contemporaines tous azimuts. Les cordes y tissent le parfait background pour les vocalises en tous genres d'une soprano qui, elle, habite, entre l'éther et l'enfer, la partition tel une créature d'un autre monde. Epatant !
 
- Missa Sene Voces: Une messe pour la paix des âmes influencée par Anton Webern ? Parce que Zorn, en trublion indécrottable qu'il est et restera (souhaitons !), ne peut définitivement pas composer un requiem en faisant comme tout le monde. Mais l'abstraction ne fait pas tout ici et la partition vaut surtout pour sa qualité mélodique qui, certes, demandera une certaine acclimatation, mais finira par emporter le morceau. D'autant que la formation "construite" pour l'occasion - piano, vibraphone,  harpe, chimes et percussions - outre qu'elle cite à merveille quelque vignettes mélodiques typiquement zorniennes, propose un panorama rêveur où il est bon de se perdre. Excellent ! 

- Zeitgehöft: Composé dans le souvenir de la douleur d'une intervention chirurgicale dentaire sans anesthésie (!) et titré en hommage au poète Paul Celan, Zeitgehöft aurait presque des allures cartoonesques s'il n'exprimait une sorte de fraisage douloureux de notre cortex défendant. Outre Celan, Zorn cite volontiers le compositeur allemand Arnold Schoenberg comme influence, c'est dire si l'ambiance, présentement, prend le pas sur la mélodie sans qu'icelle ne soit tout à fait absente. Un "petit" duo de cordes (violon et violoncelle) tout en intensité dramatique, aussi beau et prenant que dérangeant. 
 
- Babel: Si, dans le livret, Zorn nous explique les limitations qu'il s'est auto-imposé pour composer, en une journée !, cette pièce pour violoncelle seul, c'est surtout de la performance, et quelle performance !, de Jeff Zeigler, qui a l'air de se dédoubler voire de se démultiplier, que la composition tire son mérite.  Parce qu'il fallait un instrumentiste d'un sacré calibre pour donner vie à ce qui reste une partition somme tout mineure.
 
- Hexentarot: Last but not least (comme on dit du côté de chez secoue-la-lance), Hexentarot reprend la formation de Zeitgehöft augmenté du pianiste Stephen Gosling. Composition classique du répertoire avant-gardo-contemporain de Master John, c'est un film sans image, une errance dans un paysage chaotique où la beauté n'est jamais vraiment loin mais jamais tout à fait présente non plus. Comme inspiration, Zorn y cite ses deux instrumentistes "archetés", Chris Otto et Jay Campbell, mais aussi quelques références de la musique du XXème siècle, et pas des moindres : Igor Stravinsky et Béla Bartók. Et on le croit sur parole, marche dans la combine et en redemanderait bien une tranche.

Bref... Diversité et qualité, une nouvelle réussite, pas forcément facile à appréhender mais définitivement passionnante, de Master Zorn dans un univers où son iconoclaste imagination fait merveille.


1. Pandora's Box 13:48
2. Missa Sene Voces 13:25
3. Zeitgehöft 9:15
4. Babel 4:55
5. Hexentarot 6:37
(écoutez tout ou rien !)


Pandora's Box
Sarah Maria Sun - voice
(Arditti Quartet)
Irvine Arditti - violin
Ashot Sarkissjan - violin
Ralf Ehlers - viola
Lucas Fels - cello

Missa Sine Voces
(Talea Ensemble)
Steven Beck - piano
Nuiko Wadden - harp
Matthew Ward - vibes
Matthew Gold - chimes
Alex Lipowski - bass drum, percussion
James Baker - conductor

Zeitgehöft
Chris Otto - violin
Jay Campbell - cello

Babel
Jeff Zeigler - cello

Hexentarot
Chris Otto - violin
Jay Campbell - cello
Stephen Gosling - piano


Wadada Leo Smith, George Lewis, John Zorn "Sonic Rivers" (2014)
ou "So Free!"


Sonnez tambours, résonnez trompettes (ou l'inverse, je ne sais jamais), John Zorn lance la nouvelle collection de son label (Tzadik) avec une rencontre au sommet où il s'implique en tant qu'instrumentiste (au sax alto, ce n'est plus si courant) et accueille deux sommités de l'avant-garde jazzée, le trompettiste Wadada Leo Smith et le tromboniste/électronicien George Lewis. Une belle affiche, indéniablement, mais la musique au fait ?, me direz-vous.
 
Avec un pareil trio d'explorateurs musicaux, on sait d'emblée qu'on aura affaire à un objet sonique sans le moindre compromis, sans la moindre facilité. Substantiellement, de bases compositionnelles développées lors d'improvisations, c'est de jazz dont il s'agit, de jazz libre (free) surtout où les considérations mélodiques, sans être tout à fait absentes, ne sont pas la seule préoccupation de trois larrons passionnés par la destruction de formats trop étroits. Bien sûr, il y a de réjouissants moments de grâce mais il y a aussi pas mal de grincements, de couinements, de dérapages contrôlés plus destinés à pousser l'enveloppe qu'à contenter l'hypothétique quête d'harmonie de l'auditeur (qui, s'il s'attendait à une mer d'huile s'est audiblement trompé d'adresse). Ceci dit, encore plus passionnant que la déconstruction formelle de la chose jazz, il y a l'interactivité de trois instrumentistes évidemment faits pour s'entendre, se compléter et donner vie à une œuvre aussi passionnante que passionnée où l'absence de structure rythmique lambda ne manque jamais.

Cette musique là, si elle n'est pas à mettre entre toutes les oreilles, saura réjouir les fanatiques de Zorn, bien sûr, des excellents Wadada Leo Smith et George Lewis, itou, mais surtout de grâce contemporaine jazzée foutraque. J'en suis et ai pris un infini plaisir à me faire violenter par les caresses et coups de griffes de trois aliens au talent (presque) incomparable.


1. Cecil Taylor 8:57
2. The Art of Counterpoint 3:50
3. North 7:14
4. South 5:44
5. East 4:05
6. West 3:55
7. Screaming Grass 5:49
8. The Culture of Gun Violence in the US 5:43
(rien n'est extrait, tout est bon !)


Wadada Leo Smith - trumpet
George Lewis - trombone, electronics
John Zorn - alto saxophone