lundi 17 février 2014

Devoir de Mémoire (7)

Louis Sclavis "Napoli's Walls" (2003)
ou "Murs, mûrs"


     Du jazz de France (enfin presque, Hasse Poulsen est danois) chez ECM ! Produit par le patron, Manfred Eicher ! Oui, m'sieurs dames, ils l'ont fait, et bien fait !

     Surtout bien, très bien fait, d'ailleurs. Parce que Louis Sclavis, clarinettiste par habitude, étendu aux saxophones soprano et baryton ici, est excellemment secondé. Par le bassiste et ici violoncelliste et "électronicien" de circonstance Vincent Courtois, par le furibard bugliste et vocaliste et percussionniste et coriste (joueur de cor, quoi !), etc. le garçon a de la ressource, Médéric Collignon. Sans oublier le viking précité, bien sûr, six-cordiste expert se fondant admirablement dans le collectif gaulois. Et bien secondé par la production slick & chaude de Master Eicher, grand manitou de la mise en son jazz moderne sophistiquée, parfois un peu clinique mais pas présentement. C'est donc une équipe gagnante, production et line-up, et ? Et les compositions !
     Parce que sans les compositions, sans le matériau brut suintant de pépites mélodiques et d'ambiances en devenir, Napoli's Walls ne serait qu'un vain exercice de style de jazz texturé sans support, beau sur la forme, "substantifiquement" vide. Il n'en est rien. Parce que les partitions distillées ici, entre jazz Milesien et contemporanéité de bon aloi, entre urbano-funko-jazzisme et accents folkloriques bienvenus, valent aussi, surtout !, par ses mélodies... Et ce qu'un excellent quatuor en fait, repoussant les lignes, les formes et les à-priori pour développer un vrai jazz moderne, écriture et interprétation ne tient pas du miracle mais de l'inspiration des auteurs, 9/10èmes pour Sclavis, un titre pour Courtois
     Moderne dans son approche "sans frontière" du genre, accueillant avec un égal bonheur les élans traditionnels que les ouvertures, nombreuses, se présentant, ce jazz est un animal libre. Formellement, il faut avouer qu'on est particulièrement bluffé par les apports (notamment vocaux) d'un Médéric Collignon, inventif et malin, agitateur patenté du jazz de chez nous alors à l'aube de sa carrière, mais ce n'est finalement qu'un point de détail d'un ensemble cohérent et varié.

     Napoli's Walls ? C'est avant tout un trip, un trip qu'il fortement recommandé d'entreprendre. Parce que la beauté mariée à l'intelligence et le talent, ça n'arrive pas si souvent.


1. Colleur de nuit 10:36
2. Napoli's Walls 7:21
3. Mercè 3:07
4. Kennedy in Napoli 6:25
5. Divinazione moderna I 3:38
6. Divinazione moderna II 3:30
7. Guetteur d'inaperçu 8:23
8. Les apparences 4:44
9. Porta segreta 5:03
10. II disegno smangiato d'un uomo 7:16


Louis Sclavis : clarinette, clarinette basse, saxophone soprano, saxophone baryton
Vincent Courtois : violoncelle, électronique
Médéric Collignon : trompette de poche, voix, cor, percussions, électronique
Hasse Poulsen : guitare



2 commentaires:

  1. Grand amateur de jazz "aventureux" (Miles, H.Hancock, Archie Shepp, Coltrane et tant d'autres), j'adore cette oeuvre, "Napoli's Walls".
    Louis Sclavis est originaire d'un tout petit village vers chez moi, pas loin de Bourg en Bresse à 60 km au nord-est de Lyon. Il organisait dans son village natale un p'tit festoche jazz d'un soir où j'ai eu l’occasion de voir (et vivre) live en entier ce disque....et avec toute la bande : Vincent Courtois, Médéric Collignon et Hasse Poulsen.
    ENORMISSIME !!! Un souvenir puissant gravé dans ma mémoire.
    A +

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    1. Merci pour l'anecdote et pour avoir défloré la partie commentaire de cet excellent album qui mérite un peu plus d'attention qu'il n'en eut.

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