Faster Pussycat Kill Kill!
Des filles qui en ont...
Une apothéose en guise de final à cette magistrale 7ème édition du Grand Jeu sans frontière des Mangeurs de Disques : 3 albums, 3 univers. Il fallait bien ça pour rendre hommage à une gent féminine souvent maltraitée dans le milieu musical. Et puisque le thème est "des filles qui en ont", allons-y gaiment avec d'admirables ladies particulièrement, si pas biologiquement, burnées. (désolé à ceux que j'aurais doublonné)
Nina Simone "Nuff Said!" (1968)
ou "Colère, tristesse, ferveur... le combat continue !"
Une fille qui en a ? Nina !
Nous sommes dans la période RCA de Nina Simone (1967-1974) qui tombe pilepoil sur l'époque ou Eunice Kathleen Waymon (son vrai nom) s'implique le plus politiquement dans le son combat pour les droits civils, contre la guerre du Vietnam. Rappelons aux plus jeunes et aux oublieux que c'est une époque où c'est synonyme de risquer sa peau, vraiment, physiquement.
Enregistré tois jours après l'assassinat de Martin Luther King (l'album lui est dédié), `Nuff Said est un live passionné où Nina Simone déverse son âme avec toute la pudeur et la classe qu'on lui connait. Visiblement blessée (et révoltée) par l'ignominie du meurtre haineux d'un homme dont le message visait à servir la paix et la fraternité, elle habite ces enregistrements de sa puissante indignation, de son évidente tristesse. Ce faisant, elle nous fait revivre une période noire où l'activisme conduisait trop souvent à des atrocités aujourd'hui difficilement compréhensibles (quoique...).
La performance est digne (s'apparentant parfois à un exutoire joyeux), et l'album ô combien recommandé bien qu'on soit loin de la qualité sonore de captations modernes. En complément, on conseillera un autre live survolté, celui-ci à inclinaison gospel, Emergency Ward, autre preuve que l'encombrant My Baby Just Cares for Me n'est que l'arbre qui cache la forêt et Nina Simone une immense dame au répertoire richement doté.
1. In the Morning 2:27
2. Sunday in Savannah 6:13
3. Backlash Blues 2:48
4. Please Read Me 2:52
5. Gin House Blues 3:08
6. Why? (The King of Love Is Dead) 12:51
7. Peace of Mind 2:46
8. Ain't Got No / I Got Life 2:07
9. I Loves You Porgy 3:28
10. Take My Hand Precious Lord 1:56
11. Do What You Gotta Do 3:04
Nina Simone - vocals, piano
(autres musiciens inconnus)
SUPPLEMENT (prime)
Patti Smith "Horses" (1975)
ou "This Woman's Art"
Madame Patti Smith fut punk avant les punks, poétesse de tous temps, presque chanteuse des hard rockers de Blue Öyster Cult, féministe toujours mais femme avant tout, sensible et dure à la fois, résolue... Une artiste de paradoxes, une créature complexe et sans concession... Et un premier album, crévindiou, venons-y :
Déjà il y a la pochette avec une Patti n'essayant aucunement de capitaliser sur sa féminité ou de sourire au chaland, pas de ça ici, on fait de la musique sérieuse, pas de la pop saccharosée pour flatter l'oreille radiophonique. Pour réussir l'exercice d'un rock à la fois brut et arty, la Dame s'est, il faut dire, entouré d'un sacré groupe de furieux zigomars à commencer par le gallois ex-Velvet Underground John Cale, producteur ô combien compétant de la galette, avec qui Mlle Smith a plus d'un point commun et qui apparait, donc, comme une évidence. Aussi, deux fameuses guests ont été convoqués en la personne de Tom Verlaine (Television) et d'Allen Lanier (Blue Oyster Cult, alors intime avec Patti) parfaits compléments de ce qui deviendra le "Group" dès le suivant, Radio Ethiopia. Présentement, c'est une Patti Smith survoltée, qui se dévoile sur son inaugural long-jeu, une Patti Smith en marraine de la scène punk new yorkaise alors en développement, une Patti Smith qu'on n'a aucun mal à imaginer en avant-gardiste de toutes les consœurs (de Chrissie Hynde à Debbie Harry, de Courtney Love à Beth Ditto) qui afficheront le droit, que dis-je la légitimité de rocker avec les c***les en-dedans sans craindre la comparaison avec la mâle majorité. Parce qu'encore plus que les chansons (qui, ceci dit, se défendent très bien, de Gloria adapté/remanié de Van Morrison à l'épique final Land convoquant le fantôme psychédélisé d'un autre Morrison, Jim), c'est par son intensité particulière, sa capacité à faire de l'art ET de la sueur ET du sang que la Dame se démarque, s'impose.
Horses est un grand album. Horses est un album important, influent, aussi. Un indispensable d'une artiste qui ne l'est pas moins.
1. Gloria 5:57
Part I: "In Excelsis Deo"
Part II: "Gloria"
2. Redondo Beach 3:26
3. Birdland 9:15
4. Free Money 3:52
5. Kimberly 4:27
6. Break It Up 4:04
7. Land 9:25
Part I: "Horses"
Part II: "Land of a Thousand Dances"
Part III: "La Mer(de)"
8. Elegie 2:57
Bonus
9. My Generation (Live) 3:16
Patti Smith – vocals, guitar
Jay Dee Daugherty – drums, consultant
Lenny Kaye – guitar, bass guitar, vocals
Ivan Kral – bass guitar, guitar, vocals
Richard Sohl – keyboards
&
Allen Lanier – production, guitar, keyboards
Tom Verlaine – guitar
SUPPLEMENT (bis)
The Runaways "The Runaways" (1976)
ou "Girls go crazy!"
Avant les Riot Grrrls il y avait les Runaways. Bon, il y en a eu d'autres mais les Runaways, par leur mélange de séxualité faussement innocente et d'agression rock'n'rollesque, se posaient un peu là.
Et donc, voici 5 post-adolescentes rageuses et leur producteur, Kim Fowley, qui tire les ficelles, bien sûr, mais a aussi le cran de miser sur un diamant brut alors encore mal dégrossi jusqu'à la finalité : l'album ! Dans l'imagination du monsieur, en tête de gondole, il y a une Cherrie Currie, d'ailleurs seule présente sur la pochette de l'album, petite bombe de sexualité décomplexée affichant souvent des tenues scéniques outrageuses quoique minimalistes, la parfaite frontwoman pour pareil exercice glamo-punko-rockant qui n'a, cependant, pas grand chose à voir avec les agitations frénétiques secouant alors la Grosse Pomme (ne vous laissez pas berner par la reprise du Rock & Roll du Velvet Underground) et la Perfide Albion, parce que c'est de fun dont il s'agit surtout ici, ce qui n'est pas vraiment étonnant considérant que nous avons affaire à une formation poussée sous le soleil de Californie. Ce qui n'empêche pas d'envoyer du bois ou d'être positivement, si épisodiquement, en colère mais, bon, voilà quoi. De bout en bout l'album convainc. Parce qu'il y a les irrésistibles coups de boutoir introductifs que sont Cherry Bomb et You Drive Me Wild, archétypique de l'énergie musicale et sexuelle développée par le quintet, et parce que le reste accompagne bien cette doublette et que le groupe est largement aussi compétent (et plus sensuel !) que ce qu'on attendrait d'une pareille aventure sur le versant testostéroné.
Les Runaways n'ont rien inventé ? Vrai... et faux. Elles ont inventé le girl group électrique, la possibilité pour une bande de nanas d'en remontrer à un music business trop souvent machiste, ouvrant ainsi la voie... à hélas toujours trop peu de groupes aujourd'hui (les habitudes ont la vie dure !). Parce qu'une fille peut être autre chose qu'une groupie, choriste, vocaliste voire bassiste comme le prouvent, mais ne le prouveront plus jamais aussi explosivement ou résolument, les Runaways sur un premier album toujours aussi recommandé.
1. Cherry Bomb 2:18
2. You Drive Me Wild 3:22
3. Is It Day or Night? 2:45
4. Thunder 2:31
5. Rock & Roll 3:17
6. Lovers 2:09
7. American Nights 3:15
8. Blackmail 2:41
9. Secrets 2:43
10. Dead End Justice 7:01
Cherie Currie - lead vocals, keyboard on "American Nights"
Joan Jett - rhythm guitar, vocals
Lita Ford - lead guitar, backing vocals
Jackie Fox - bass, backing vocals
Sandy West - drums, backing vocals