jeudi 3 avril 2014

Nine Inch Neil

Neil Young "Trans" (1982)
ou "Transgenre"


     Pour bien parler de Trans et, conséquemment, bien le défendre, il n'est pas inutile, en guise de préambule, de le contextualiser dans la carrière du Loner comme dans sa vie privée, le sens, la profondeur qu'il y gagne en fait une toute autre oeuvre, plus grande.

     Nous sommes donc au début des années 80, période particulièrement délicate pour les géants des années 60 et 70 comme vous le savez sans doute tous déjà. Pour Neil, tout devrait bien aller, il vient de signer un juteux contrat avec un label qui monte (Geffen) et effectue un retour discographique fébrilement attendu par une cohorte de fans d'avance enthousiastes qui voit dans cette nouvelle ère un possible renouveau après deux derniers albums pas forcément très inspirés (Hawks and Doves, Re-ac-tor) qui en seront pour leur frais quand tombera l'opus nouveau, Trans. Parce que, si professionnellement Neil a tout pour être heureux, ce bonheur est irrémédiablement entaché par le lourd handicap mental de son dernier né, Ben, et son incapacité de communiquer avec lui par des méthodes traditionnelles.
     Forcément, musicien qu'il est, c'est par le truchement de son art qu'il s'essaye à l'impossible. Ce détail, non explicité à l'époque de la sortie, forcément influe largement sur l'orientation musicale de l'album, fait figure de mouton noire dans un catalogue jusque alors largement dédié au rock et à la folk. Ici, voix robotisées et synthétiseurs mènent la danse pour ce qu'il est convenu de considérer comme l'album électronique du canadien. On s'en doute, pas plus les fans que la critique ne marcha dans la combine et Trans de se retrouver voué aux gémonies tel l'affreux barbarisme que beaucoup entendaient. Pourtant la plupart des compositions se tient bien et le parti-pris expérimentaliste fonctionne plutôt mieux que ce qu'on aurait pu craindre à la description sonique du contenu. Ainsi, malgré leur vocaux vocodérisés, des chansons comme Transformer Man ou Sample and Hold valent leur pesant de chemises à carreaux et vestes en jeans... Et le reste est à l'avenant d'une création unique de (Nine Inch) Neil (avec, qui plus est, un beau casting au menu).

     Album bancal, imparfait mais étonnamment attachant, Trans n'est sans doute pas l'oeuvre Younguienne la plus essentielle de sa longue et excellente discographie, on l'admettra sans peine. Passer outre serait cependant une erreur, il a gagné, avec le temps, une patine, un charme qui le rend, de l'avis de votre serviteur, nettement plus aisément "ingérable" aujourd'hui qu'à l'époque de sa parution. Et puis, un album fait avec le coeur et d'aussi nobles motifs ne peut pas être totalement mauvais, n'est-ce pas ?


1. Little Thing Called Love 3:13
2. Computer Age 5:24
3. We R in Control 3:31
4. Transformer Man 3:23
5. Computer Cowboy 4:13
6. Hold On to Your Love 3:28
7. Sample and Hold 8:03
8. Mr. Soul 3:19
9. Like an Inca 9:46


Neil Young: guitar, bass, synclavier, vocoder, electric piano, vocal
Nils Lofgren: guitar, piano, organ, electric piano, synclavier, vocal
Ben Keith: pedal steel guitar, slide guitar, vocal
Bruce Palmer, Billy Talbot: bass
Ralph Molina: drums, vocal
Joe Lala: percussion, vocal
Frank Sampedro: guitar, stringman

.Recyclé de la Caverne d'Ali Baba.

20 commentaires:

  1. Autant j'adore Neil Young , autant cet album me fait peur.... je me souviens l'avoir vu à la télévision à cette époque et j'avais trouvé le concert pitoyable. Maintenant, il faudrait avec le recul, que j'écoute vraiment cet album que j'avais volontairement délaissé. Il n' y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis!

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    1. Tu me diras, quand tu l'auras VRAIMENT écouté, l'effet qu'il te fit. ;-)

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  2. Fatal et ravageur ce morceau de décennie qui a flingué.. j'ai lâché ici, pour revenir vers 86 avec "Freedom"..le grand retour. Ceci dit, faudrait p'ète que je réécoute ce truc qui m'a déglingué à l'époque. C'est vrai qu'il y avait des signe de faiblesse avec Reactor, et Hawk...

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    1. Oui, il faut.
      Je comprends le choc des fans quand l'album sortit, il est tellement alien dans la disco de Neil (un peu comme le rose rockab' ou le bleu marine rythm'n'blues).

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  3. Arfff, moi j'aime bien Re-actor. C'est d'ailleurs le seul que j'ai acheté à l'époque parce qu'il sonnait très rock, avec grosse guitare et ce son crade qui rappelait un peu les groupes punks. Ça me convenait bien. Je l'ai d'ailleurs réécouté il y a quelques temps, il a clairement quelques faiblesses mais passe encore bien. Je suis moins indulgent avec Hawks and Doves que je trouve plus faible.

    Quant à ce Trans - quelle pochette horrible ! - je n'en ai pas le moindre souvenir. J'entends bien le contexte dont tu parles mais je ne peux pas m'empêcher de penser que ces vocoder et synthés sont surtout là pour essayer d'être dans l'air du temps. Malheureusement ce n'est pas le meilleur air de l'époque qu'il a capté à mon avis.

    Ça ne m'empêchera pas d'y jeter une oreille curieuse.

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    1. Rhoo, c'est clair..pas une pochette du Neil ça:D

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    2. Je sais pas, je trouve que la pochette correspeond finalement assez bien à l'album.

      @ Till,
      J'aime bien Re-Ac-Tor aussi, mais on y trouve pas mal de remplissage...

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  4. Je ne connais pas ce disque, donc je vais écouter. La pochette fait très hard rock de ces années-là.

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  5. J'ai bien ce disque délicieusement SF, de plus son histoire est touchante. J'aime également sa pochette (contrairement à Till^^), mais il est vrai que la photo choisie ne lui absolument pas justice (trop de contraste et de compression), je trouve qu'elle synthétise bien la musique dont elle est l'écrin. De la vieille musique interprétée de manière futuriste (fatalement rétro-futuriste aujourd'hui)...

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    1. Je viens de demander à Google, effectivement les images qu'on trouve couramment sont moins saturées, ça passe un peu mieux. M'enfin, j'aime quand même pas tellement.

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    2. Perso, j'aime ce genre d'illustrations un peu cheap, mais comme je le disais plus haut, elle colle super bien avec le contenu de l'album.

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  6. A chaque fois que je lis un truc sur Neil Young je me remets On The Beach.
    A part quand on me parle de Harvest, là je me barre.
    En ce moment j'écoute On The Beach, tiens ...

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  7. Moi je suis d'accord avec toi...

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  8. Hey, surprise, je découvre, et j'aime beaucoup, alors que Neil Young, j'ai toujours un peu de mal. Bizarre, mais j'adore. Merci !

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    1. C'est peut-être parce que c'est un autre Neil Young que tu apprécies... Bonne nouvelle, en tout cas.

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  9. 82, Neil colle à l'actualité New Wave ambiante et flirte avec le Disco. Ce disque est plutôt bien fichu (malgré tout !!!), même s'il est extrêmement "typé". De cette époque, on se souvient de choses plus pitoyables !!!!!
    Je le garde dans ma collec… mais je recommande plutôt "Weld" !!!

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    1. Je recommande aussi Weld plus que Trans mais il est bon de mettre un petit coup d'éclairage sur un album souvent conspué et pourtant de belle qualité.

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